Suite SIDA 2 - lettres et Doc interne ACS période 89/96

Lettres et télégrammes concernant ACT UP Paris entre Philippe Labbey, Cleews Vellay, Pascal, Isabelle et autres

Si l'on compare le contenu de ces lettres avec les orientations et l'action de Cleews Vellay à la présidence d'ACT UP en 1992/1994, on comprend l'influence exercé par ses membres. Cleews choisira délibérément une Ligne Dure (prôné par Scalpel) qui permettra les résultats tangibles obtenus en terme de santé publique. L'affaire du Sang Contaminé ayant propulsé deux des nôtres à la présidence et au poste d'Administrateur (pour Philippe), il fallait profiter du rapport de force pour avancer nos pions et radicaliser la lutte. Depuis cette période du début des années 90 la régression sociale est à la mesure des salaires et subventions copieuses de nos successeurs qui ne sont que des opportunistes et des agents du système comme nous l'avions prévu. Il faut cependant ajouter que certaines commissions comme "Action Traitement" qui c'est perpétuée sous une autre forme aujourd'hui est une réussite réelle. Ceux qui ont rejoint la "Recherche médicale" (autour du prix Nobel Fitoussi) ont apporté des avancées majeurs en terme d'implication des "Patients" dans les processus d'élaboration et de décision médicales dont tous les malades sont redevables. Mais seulement à partir de l’impulsion que nous avions provoqué...

La première période de 1989 à 1991 fut plus difficile et les lettres ci-dessous montrent les violentes querelles entre les membres de l'ACS au sujet d'ACT UP Paris. Le premier président est Didier Lestrade (ancien journaliste du Gay-pied) entouré de ses amis proches du pouvoir Mittérandien. Alors que Philippe, Régine, Isabelle et Cleews ont adhéré en 1989, scalpel hésite mais passe volontairement par la case Briefing pour newbies d'ACT-UP en 1990 sans découvrir son identité véritable pour mieux connaître le fonctionnement et la prise en charge des nouveaux venus. L'exercice est écourté par Philippe Labbey "C'est bon il connaît déjà".

C'est cette période mole qui est critiquée et fait l'objet d'un échange de lettres ci-après. Une violente polémique va aboutir à la démission "Formelle" de Philippe et d'Isabelle de l'ACS mais surtout à la radicalisation d'ACT-UP Paris.

A partir de 1992 les satellites du PS infiltraient Act Up attendant leur heure pour récupérer l'organisation à leur profit comme Emmanuelle Cosse qui dans l'ombre travaillait pour son avenir de bureaucrate au service de la Raison d’État. Cleews en démasqua un nombre significatif, rémunérés en douce par le PS et qui furent éjecter comme aussi cette bande de provocateurs qui proposaient à Philippe Labbey rien de moins que "La Lutte Armée" dans Act Up et dégagèrent très vite après leur échec mais sans jamais faire parler d'eux...

En pièce jointe Le livre de Michel Bounan est porté à la connaissance de scalpel par Philippe, dans sa réponse qui prétend ne pas en être une...

En fait le coup a porté et la polémique s'installe au cœur d'ACT UP.Lire "Demandez le programme" tract de Philippe Labbey qui circule dans l'organisation et remet en question la direction de Didier Lestrade.

Nouvelle lettre de scalpel mais cette fois adressée à Philippe Labbey seul et pour une fois signé de son nom.

C'est la Fin de la Tranquillité pour Didier Lestrade et sa clique. Les attaques seront de plus en plus précises et soutenues surtout dans les RH (AG réunion du mardi)

Cleews et Philippe deviennent les Ténors d'ACT UP et préparent la successions de Lestrade: Cleews Vellay sera élu président et une nouvelle ligne politique plus hard sera mise en place avec le succès que l'on sait. Depuis la mort de Cleews et le départ immédiat des activistes de l'ACS, Lestrade a bien dû étaler ses mensonges sur deux douzaines de livres mais qu'importe, la vérité est devant vos yeux.

Le 25 avril 1991, après un long et tenace travail d’investigation, la journaliste Anne-Marie Casteret publie dans l’hebdomadaire L’Evénement du Jeudi, un scoop dont elle est loin d’imaginer l’impact que celui-ci va imprimer durablement dans la société française. La révélation consiste en une note du Centre National de Transfusion Sanguine (CNTS) en date du 29 mai 1985. Sa lecture révèle clairement que le directeur général du CNTS, le docteur Michel Garetta, a laissé en toute connaissance de cause, se poursuivre la distribution de lots sanguins contaminés par le virus du SIDA auprès d’hémophiles sous traitement.

L’ensemble des médias français s’empare aussitôt du dossier. Les éléments accablants s’accumulent à vitesse éclair. Sous la pression, le Dr Garetta démissionne en juin 1991 tandis qu’une enquête administrative est diligentée suite aux faits dénoncés. Les conclusions mettent en lumière les négligences mortelles commises par plusieurs hauts responsables administratifs et politiques du système français de santé entre 1982 et 1985. Négligences qui conduiront à la contamination d’environ 8000 transfusés (dont une majorité d’hémophiles) par le virus du SIDA.

Le scandale du sang contaminé peut véritablement être considéré comme le modèle fondateur de la systémique de crise en France. L’équation délétère qui l’anime est celle que l’on va inexorablement retrouver à l’origine des crises sanitaires et industrielles ultérieures qui émaillent la société française jusqu’à nos jours. Une équation délétère qui fonctionne sur la combinaison de 5 facteurs.

L’histoire du sang contaminée survient à un moment où le virus du SIDA a été identifié quelques années plus tôt. Si les voies de transmission sont très vite cernées (le sang et le sperme en l’occurrence), ce nouveau rétrovirus pathogène demeure en revanche une énigme scientifique. Les médecins assistent impuissants à la mort de leurs patients tandis que la nouvelle maladie virale sème la confusion dans leurs certitudes médicales en se montrant rebelle aux thérapeutiques les plus éprouvées.

En parallèle, il s’établit subrepticement une vision simplificatrice avec laquelle la pathologie est rapidement qualifiée de « cancer gay » dans les médias, une partie du corps médical et les conversations quotidiennes. L’association systématique entre SIDA et homosexualité est d’autant plus renforcée que la communauté gay paie en effet un lourd tribut à la maladie. De plus, les homosexuels eux-mêmes vont très vite se structurer en associations de patients pour alerter et faire pression sur le corps médical, les responsables politiques, les médias, les autorités sanitaires et les laboratoires pharmaceutiques afin d’accélérer la recherche thérapeutique et améliorer la prise en charge des malades.

C’est notamment l’avènement de la plus médiatique et virulente d’entre elles : Act Up. Créée en 1987 à New York et 1989 à Paris, l’association ne recule devant rien pour faire entendre la cause des malades. Extrêmement revendicative et fortement connotée homosexuelle (même si elle défend aussi les toxicomanes, les sans-papiers ou les prostituées), ses combats font du bruit. Ses militants mènent des actions éclair spectaculaires qu’ils dénomment « zaps » comme recouvrir l’obélisque de la place de la Concorde d’un préservatif géant en décembre 1993 ou asperger de peinture rouge sang la façade du siège francilien d’une entreprise pharmaceutique suisse.

Les actions choc sont largement relayées par les télévisions mais parallèlement elles ancrent un peu plus les préjugés autour du SIDA dans l’opinion publique. Autant dire que l’affaire du sang contaminée va constituer une secousse tellurique majeure en frappant des personnes autres que les gays, les drogués et les noirs !

Dans ce contexte médiatico-médical mouvant autour du SIDA où le sang se trouve être l’un des vecteurs de contamination, le système de transfusion sanguine se retrouve de fait en première ligne. Le moins qu’on puisse dire est que cette agitation tombe plutôt mal. Le Centre National de Transfusion Sanguine est confronté à des pénuries récurrentes de sang à cause du faible nombre de donneurs mais également parce qu’il s’appuie sur un mode opératoire de collecte rigoureux pour ne pas recourir à des importations de concentrés sanguins issus d’autres pays.

Ainsi pour chaque groupe sanguin identifié, les dons de sang recueillis chez les volontaires sont poolés (les sangs prélevés chez plusieurs donneurs d’un même rhésus sanguin sont mélangés ensemble) de manière à obtenir des quantités suffisantes de poches sanguines. Cela permet de faire face en temps normal aux situations médicales requérant des transfusions en n’importe quel point du territoire français.

L’heure est donc cruciale pour le CNTS. Depuis 1983, l’Organisation Mondiale de la Santé a déclaré le SIDA comme « problème de santé publique internationale ». Informé de la situation qui est en train de virer à l’épidémie massive aux États-Unis, Jacques Roux, directeur général de la Santé, diffuse alors le 20 juin 1983 une circulaire à tous les médecins transfuseurs: « Bien que la transfusion sanguine ne constitue actuellement qu’un risque minime de transmission du sida, le caractère grave de cette affection et l’absence de test approprié pour la détection des éventuels porteurs de son agent pathogène conduisent le secrétariat d’Etat chargé de la Santé à recommander les mesures suivantes aux médecins des établissements de transfusion sanguine ». Ces mesures invitent par conséquent à sélectionner plus drastiquement les donneurs en leur faisant remplir un questionnaire de santé détaillé et d’exclure des personnes potentiellement à risque et c'est toujours le cas pour les homosexuels.

Film Remake de la Société du Spectacle de Guy Debord