(Portrait de sa Majesté Srinagarindra (thaï : ศรีนครินทร์) sur 4 plateaux pour 30 oeufs
Art brut, peinture phosphorescente)
Portraits de sa Majesté Srinagarindra
Ayant de très solides bagages en sciences dont les mathématiques, la physique et la chimie, ce sont des matières à penser qui me passionnent et animent ma réflexion quotidienne, malgré de multiples formations de haut niveau dans les matières littéraires et un esprit plus enclin à la littérature qu’à la science. Particulièrement, je me passionne pour les recherches en physique relativiste et surtout quantique, je suis l’actualité, préférant regarder et écouter des documentaires ou des conférences plutôt que de lire des livres. En vieillissant, la lecture me fatigue et me demande trop d’efforts... Par ailleurs, l’art m’a demandé tellement d’autres efforts visuels, peindre des milliers de portraits sur des milliers de plateaux à œufs, j’ai souvent l’impression de travailler dans un univers quantique, dans l’infiniment petit et cela a esquinté ma vue.
La physique quantique me semble la meilleure approche pour comprendre la vie, la mort pour laquelle nous avons d’ordinaire tant de pudeur. L’univers est un organisme vivant comme nous, composé d’une multitude d’espèces d’organismes vivants que sont par exemple les galaxies, les étoiles et les planètes, etc. Tout comme la terre qui renferme elle aussi une infinité d’autres espèces d’organismes vivants. Nous devrions vivre sinon en symbiose, du moins en meilleure intelligence avec la terre qui est aussi une des espèces d’organisme vivant et de plus notre mère porteuse et nourricière et avec les autres espèces qui la peuplent. Nos composants sont de la même nature, nous avons les mêmes contraintes d’un même ensemble législatif (constantes universelles), nous partageons le même destin, il nous a été imposé une existence à chacun dans une espèce d’organisme vivant différent, mais dont la finalité commune est la désagrégation par dégénérescence à plus ou moins long terme. Après cette désagrégation par dégénérescence, il y aura une nouvelle infinité de possibilités d’agrégation de nos composants dans une infinité d’espèces d’organismes vivants que nous ne choisirons plus ou pas encore. Heureusement que l’univers nous épargne d’une renaissance. La mort comme une génération parmi les nombreux modes de reproduction qui existent dans l’univers, des reproductions souvent par accouplement et sélection naturelle. Ainsi, notre soleil s’est constitué une cour de planètes dont la terre et il a engendré avec elle un enfant que nous appelons la lune. Parfois, l’idée surgit à mon esprit de demander aux gens que j’aime de consommer un morceau de mon cadavre pour entrer dans leur composition et ainsi continuer de vivre avec eux quelques temps encore en des atomes crochus. Mais aujourd’hui, on pourrait les condamner pour anthropophagie. Nos anciens, surtout les pères des églises prêchaient la vie éternelle, privilège des individus de cette espèce d’organisme vivant que nous sommes et nous la faisaient miroiter comme récompense. Cela me fait sourire. Je crois à la vie éternelle du fait de ses composants qui sont éternels, mais ce ne sera jamais plus moi comme individu de cette espèce d’organisme vivant que nous appelons les êtres humains. Revenons à ma dernière œuvre, elle est une illustration d’un phénomène quantique. Aujourd’hui, nous ne comprenons pas vraiment la physique quantique, et il y a encore beaucoup de travail pour y arriver. Mais cela ne nous a pas empêché d’élaborer une théorie quantique, en permanence mise à l’épreuve par l’expérience et on n’a jamais encore pu mettre en défaut les prédictions de cette théorie. La théorie quantique a de nombreuses applications dans les objets de la vie courante, laser, transistor, microprocesseur ou énergie nucléaire. Le premier tableau luminescent recensé date d’environ 3000 ans chez un empereur de Chine représentait un buffalo. La phosphorescence (illuminer comme le phosphore) est le phénomène observé lorsqu'une matière continue à émettre de la lumière après avoir été éclairée, c’est une forme de luminescence. La peinture phosphorescente fonctionne tout simplement : elle accumule la lumière naturelle ou artificielle lors des périodes d'exposition et la restitue lorsqu'elle se retrouve dans l’obscurité. La phosphorescence est un phénomène de relâchement lumineux continu et dégressif de l’énergie accumulée par certains matériaux pendant l’excitation durant un certain temps par des sources lumineuses naturelles ou artificielles (post luminance ou temps de restitution) et un certain niveau d’intensité (luminance). Il existe des matériaux phosphorescents organiques ou inorganiques. Le phénomène de phosphorescence est dû aux pertes d'énergie d’électrons qui ont été excités et qui retournent à des niveaux d'énergie plus bas, en passant par un état intermédiaire dit triplet qui dure un certain temps. Dans le modèle quantique la transition de l’état d’excitation à l’état de repos n'est pas possible, mais est rendue faisable par le couplage spin-orbite. L'électron, une fois dans l'état intermédiaire peut alors revenir dans l'état de repos et émettre un rayonnement phosphorescent avec émission de photons pour retourner à l'état fondamental. La chaleur amplifie le phénomène de phosphorescence tandis que le froid l'inhibe. J’ai pu constater des phénomènes étranges lorsque je tourne la tête, aux alentours de l’œuvre, comme des apparitions subliminales parfaitement nettes mais instantanées du portrait phosphorescent, mais je ne sais si elles proviennent de l’œuvre ou de mon cerveau. Il y a actuellement beaucoup de recherches sur ce sujet complexe des apparitions d’images. En général, les pigments phosphorescents sont des aluminates de terres rares. Appellation erronée car les terres rares sont plus abondantes que l’or ou l’argent. La peinture phosphorescente que j’utilise est une peinture à base de pigments constitués d'aluminate de strontium SrAl2O4 produisant un effet de photoluminescence maximal. Pour accroitre la luminescence, il est préférable de peindre sur un fond blanc, de passer plusieurs couches de peinture phosphorescente. De plus, j’ai exécuté cette peinture sur quatre plateaux à œufs pour 30 œufs. Cette peinture est légèrement colorée, d’une pâleur verdâtre, un peu pâteuse et ainsi, on peut apercevoir de jour, très atténué, le motif peint. Plus l’épaisseur de la couche de peinture est importante, plus elle peut emmagasiner de la lumière et plus la phosphorescence sera longue et intense. Pour la couleur, j’ai choisi un bleu-turquoise, une substance phosphorescente inorganique à longue rémanence qui émet une fluorescence d'une belle couleur. C’est une couleur phosphorescente forte, mais pas aussi forte que la verte. Une couleur forte est une couleur qui se charge très rapidement, et peut briller avec douceur dans l’obscurité jusqu'à 12-15 heures sans interruption après avoir absorbé la lumière visible pendant 10 à 20 minutes. Sa luminosité et sa durée lumineuses sont au moins 30 fois supérieures à celles des matériaux luminescents traditionnels. Pour les applications en tant que luminophore, SrAl2O4 peut être dopé avec des éléments des lanthanides comme l’europium et le dyprosium. Le liant est composé à partir de résines acryliques, sans danger pour la santé et pour l’environnement. Je précise que depuis deux ans, toutes mes nouvelles œuvres sont composées avec des peintures vinyliques. Les peintures industrielles vinyliques sont aujourd’hui d’une très grande qualité et leur coût est beaucoup plus abordable qu’une peinture beaux-arts qui n’est par ailleurs pas toujours respectueuse de l’artiste et de l’environnement. L'usure dans le temps est presque inexistante, car la vie des produits phosphorescents s'étend au-delà de 15 ans pour la plupart d'entre eux. Alors, j’ai fabriqué deux rideaux noirs coulissants pour limiter la mise en service de l’œuvre, ils protègent les matériaux de leur exposition aux sources de lumière ambiante et donc leur excitation, espérant ainsi augmenter la durée de vie de mon œuvre. Il faut noter que les peintures phosphorescentes n’apprécient pas du tout la pollution lumineuse et l’œuvre devra être appréciée dans une totale obscurité. Aussi, j’avais trouvé dans la terre de mon jardin de vielles planches de teck qui m’ont servi à faire un encadrement original. Parfois, des images très anciennes qui ont survécus et illuminent mon esprit, pas très nettes, elles ont du subir l’érosion de la dégénérescence comme ces morceaux de bois, images comme des phosphorescences de mon passé. Mais ci-dessus, ce n’est pas l’objet de mes recherches, c’est un apprentissage qui m’était indispensable pour essayer de conduire au mieux cette œuvre. En fait, j’ai fait cette œuvre pour essayer de comprendre un processus de la création, comment les artistes voient le monde, le mémorisent et le conçoivent afin de le restituer pour en faire une re-présentation personnelle, originale. Il y a ces analogies entre la phosphorescence et le cheminement de la pensée, de la perception à la restitution. D’ailleurs, on dit parfois que le cerveau phosphore. Le phosphore représente un tiers du poids du cerveau. Mais le phosphore n’est pas un matériau phosphorescent. Pourtant, si l’on veut un cerveau brillant, il est indispensable de consommer régulièrement des aliments contenant du phosphore. Avec cette œuvre, il a beaucoup d’électRicité dans l’R et surtout, n’oubliez pas que dans l’exil, il y a le Royaume.