Les Bretons du Havre

Les Bretons au Havre

Le Havre est dit-on la troisième ville Bretonne après Paris et New-York[1]. Nombre de Havrais ont dans leurs ancêtres un Breton. Néanmoins les Bretons qui ont séjourné au Havre n’y ont pas tous fait souche. Voici une petite rétrospective qui nous permettra de situer l’arrivée de ces personnes qui ont participées au développement et à la vie du Havre

16^ème siècle

1517 Création de la ville du Havre à l’initiative de François 1^er en partie sur les plaines de l’Eure et d’Ingouville et parmi les premiers ouvriers on trouve 8 Bretons. L’an suivant le nombre d’ouvriers est passé à 360 et les Bretons sont au nombre de 200. Il y avait des Bretons car les travaux du Havre étaient une corvée royale, donc non payée. Comme la peste sévissait également dans la région, les autorités ont décidé de faire appel à une main-d’œuvre qu’ils ont rétribuée, la Bretagne n’étant « vraiment » Française qu’en 1532, après publication de l’édit royal signé à Plessis Macé.

Deux ans plus tard il n’en reste que 75 qui repartiront quasiment tous en 1530 à la fin des travaux. La fièvre des marais et le travail dans la boue toute la journée avait décimé les effectifs. Quelques Bretons viendront s’installer au Havre par la suite mais ce n’est qu’au 19è siècle que les Bretons reviendront en force.

1520 Une nef, la Grande-Françoise, fut construite sous les ordres du capitaine Lespargne, gentilhomme Breton.[2] Elle ne sortit jamais du port à cause de son tirant d’eau.

1524 Une liste des premiers habitants du Havre qui avait une maison ou qui devaient bâtir ne comportait aucun nom Breton[3] mais c’était avant l’ordonnance de Villers-Cotteret (1539) qui imposait la tenue de registres qui fixèrent le nom des individus.

1541 L'architecte italien Jérôme Bellarmato construit le quartier Saint-François sur un plan orthogonal. C’est dans cette île reliée par de ponts que commencera l’histoire du Havre. L’église Saint-François voit sa construction démarrer mais celle-ci va s’éterniser à cause des guerres de religion. Près de 90 ans après elle est consacrée mais son chœur ne sera construit qu’en 1687

17^ème siècle

18^ème siècle

1790 Un comptage effectué dans les registres de Notre-Dame et Saint-François entre 1780 et 1790 révèle que sur les 3516 mariages contractés seuls 18 mariages ont des époux originaires de Bretagne.[4] Sur les 2500 personnes venant de l’extérieur entre 1700 et 1790 on n’en compte que 19 venant de Bretagne.[5]

19^ème siècle

1815 C’est à partir de cette année que quelques rares liaisons entre la Bretagne et le Havre amènent de Bretons au Havre.

1831 La commune de Leure (ou L’Eure, L’Heure, Lheure), est annexée par Graville. Cette dernière prend alors le nom de Graville-Leure.

1839 Début de l’arrivée en nombre des Bretons au Havre suite à la mise en service du bateau à vapeur « le Morlaisien » qui assure la liaison avec Morlaix en 20 heures. Il assurait un aller-retour par semaine et pouvait embarquer 150 passagers. Il était surnommé le bateau à musique[6] car il transportait souvent des porcs qui, avec le mal de mer, gémissaient de façon lugubre. Quatre ans plus tard c’est la liaison avec Saint-Malo et le streamer « Bretagne » et dix ans plus tard c’est au tour de Brest d’être relié. Beaucoup de Bretons arrivant au Havre seront manœuvres ou journaliers, pour participer aux grands travaux comme la construction de 7 bassins, mais certains deviendrons navigateurs et resteront au Havre après leur dernier débarquement.

1840 Le recensement de 1840 nous informe sur les lieux d’origine des habitants du Havre. 5700 viennent du 22, 2800 du 29, 1000 du 35, 560 du 56 et aucun du 35. Cette communauté Bretonne représente presque 9% de la population.

1842 Un second navire à vapeur assure la liaison Morlaix-Le Havre. Au total ce seront 5 navires, dont le « Finistère » qui assureront le trafic entre 1839 et 1915.

1843 La compagnie d’Ille-et-Vilaine, dirigée par Auguste Postel relie Le Havre et Saint-Malo.

1852 La partie basse de Graville-Leure (dont l’ancienne Leure) est annexée par Le Havre. La commune de Graville-Leure prend alors le nom de Graville-Sainte-Honorine. Sanvic est annexée en deux temps par Le Havre avec en premier le quartier Saint-Vincent. La commune d’Ingouville est annexée par Le Havre

1854 La compagnie Brestoise relie Le Havre et Brest.

1865 Le train est arrivé en Bretagne et annonce la fin de la liaison maritime qui relie les ports bretons à Paris via le Havre

1870 Arrivée d’un recteur à Saint-François. C’est le père Marie Hervé Madec, né en 1838 à Saint-Thégonnec. 15 ans plus tard c’est au tour de Saint-Nicolas d’avoir un aumônier Breton. Les prêches se font en Breton

1875 Création de l’aumônerie bretonne demandée dès 1862 par l’archevêché.[7] Peut-être 30 rue Dauphine ?

1891 Le recensement de la population permet d’établir que près de 10 000 Bretons (8,8% de la population) habitent le Havre et sont présents à Saint François et dans le quartier de l’Eure. 57% sont nés dans les Côtes-d’Armor, 28% dans le Finistère, 10% en Ille-et-Vilaine et 5% dans le Morbihan. Il n’y a pas de natif de Loire-Inférieure. L’implantation des Bretons se fait selon la répartition suivante : Quartier de l’Eure 19%, Saint-François 18%. Notre-Dame, Rond-Point et Hôtel de Ville 4 à 5% dans chacun des quartiers. Saint-Vincent dépasse à peine les 2%. En 1898 l’abbé Gallic dit qu’il ne peut savoir le nombre de Bretons Havrais car cela varie tous les jours tant les mouvements sont importants. Cette proportion de Bretons va perdurer et sera toujours actuelle au recensement de 1939.[8]

1898 L’abbé Gallic est aumônier à Saint-François

20^ème siècle

1909 Création de l’association : Les Bretons du Havre

1911 Une cavalcade mettant en scène une noce Bretonne traverse la ville pour aller se présenter à l’Hôtel de Ville. Si les Bretons n’étaient pas tellement intégré dans la vie Havraise, c’est certainement cette festivité qui lancera l’intégration.[9]

1912 L’Édouard-Corbières et le Finistère assurent la liaison Morlaix-Le Havre en 16 heures. Le prix varie de 10Francs sur le pont à 25 Francs pour la première. Les hommes sont seuls admis sur le pont.

1914 Les Bretons commencent à s’installer sur Sanvic et Bléville afin de trouver des logements pavillonnaires et plus salubres que dans la ville basse.

1915 La réquisition du bateau assurant la liaison avec Morlaix, l’Edouard-Corbière le 24 juillet, freine l’arrivée des Bretons au Havre mais on va continuer à y trouver des navigateurs et des fonctionnaires qui ne feront pas forcément souche et retourneront au pays.

1919 La commune de Graville-Sainte-Honorine (ancienne partie haute de Graville-Leure) est annexée par le Havre.

1923 Suite à la demande de la Société amicale des bretons du Havre, dans ce quartier Saint-François, où demeure un grand nombre de bretons la rue du Grand-Croissant devient la rue de Bretagne. Délibération dénomination n°191 du 14 février 1923

1933 Le quartier Saint-François cesse d’être une île avec la destruction du pont d’Angoulême.[10]

1936 Le nombre de Bretons au Havre est estimé entre 40 000 et 50 000

1944 Le déclin de Saint-François commence dès le début de la guerre et, avec le pilonnage de la ville par la RAF, la « petite Bretagne » est détruite. Les allemands font évacuer la ville, beaucoup de Bretons rentrent chez eux. Les pilotes partent avec leurs bateaux, les employés de la manufacture de tabacs partent à celle de Morlaix. De nombreux élèves de l’école de la marine marchande, dont des Bretons, partent rejoindre le général de Gaulle. Le quartier Saint-François est rasé et déblayé

1953 La commune de Bléville est annexée par Le Havre.

1955 Fin de l’annexion de Sanvic où l’on retrouve une forte animation Bretonne.

C'est le 18 janvier qu'a eu lieu le changement de dénomination du département de la Seine-Inférieure par un décret pris par Pierre Mendès-France. La Bretagne est amputée de la Loire-Inférieure.

1963 Annexion d’une partie du territoire de Rouelles

1971 Annexion d’une partie du territoire de la commune d’Harfleur pour bâtir la Z.U.P. de Caucriauville.

1973 Rouelles, n’est pas annexée par Le Havre mais passe sous le statut de commune associée.

1986 Fusion des « Bretons du Havre » avec « Bretagne accueil »

21^ème siècle

2017 Le Havre a fêté ses 500 ans. On estime la population havraise d’origine bretonne à 70 000.[11]

[1] http://www.normandie-actu.fr/

[2] http://www.culture.gouv.fr/

[3] Histoire de la ville du Havre et de son ancien gouvernement A.-E. Borély

[4] & [5] Migrants dans une ville portuaire : Le Havre (XVIe-XXIe siècle) par John Barzman et Éric Saunier

[6] Les Havrais et la mer par Philippe Manneville

[7] Clergé religion et société en Basse-Bretagne

[8] Migrants dans une ville portuaire : Le Havre (XVIe-XXIe siècle) par John Barzman et Éric Saunier

[10] Info Jojo Le Guern sur facebook

[11] https://fr.wikipedia.org/wiki/Bretons

[12] Annuaire de Brest et du Finistère 1851 gallica.bnf.fr