Energie Vitale

La maladie en tant que perturbation de l’équilibre vital (ou équilibre biologique global)

Cet article a pour but de donner une définition de la maladie selon le point de vue homéopathique qui soit à la fois conforme à sa tradition et compréhensible et recevable par la biomédecine et les sciences biologiques en générales.

Pour ce faire, il nous faut nos démarquer de la définition qu’a donné Hahnemann. En effet, il n’est plus possible de reprendre la définition d’Hahnemann pour lequel la maladie est due à une perturbation de la « force vitale » ou de l’énergie vitale.

Une telle définition est caduque et doit être remplacée par la définition de la maladie en tant que perturbation et perte de l’équilibre vital.

1) La nécessité de replacer les choses dans leur contexte

Il n’est pas, bien entendu, question de jeter la pierre à Hahnemann qui, pour formuler sa découverte, a été bien obligé de se référer aux concepts de son époque et aux contraintes de sa langue.

Au XIX° siècle, la référence à la notion de force ou énergie vitale était chose courante en médecine, et même en chimie. Laennec et Bichat, le père de la physiologie, étaient tous deux vitalistes. Qu’Hahnemann s’y réfère témoigne donc avant tout de son inscription dans son époque.

Par ailleurs, les langues occidentales, et indo-européennes, poussent à substantiver les processus (à la différence du chinois par exemple) et, de ce fait, à les transformer en «choses», à en entités, non réelles.

Pour le chinois, on peut parler du fait de « vivre » avec toutes ses modalités sans passer par le terme de « vie ». En occident, on dit la vie et on transforme, ainsi, un processus, un phénomène, une dynamique, une expérience vécue, en une entité, une « chose », « la vie » qui, en réalité, n’existe pas.

Ce qu’a vraiment penser et découvert Hahnemann, c’est que la maladie est une perturbation du « vivre » du patient, du « sentir et de l’agir » pour reprendre ses termes, c'est à dire encore, une perturbation vitale.

Le problème est qu’au lieu de s’en tenir à cette formulation, peu usuelle dans les langues occidentales, il a suivi le penchant de celles-ci et référer ce déséquilibre du « vivre » à une « chose », une entité, l’énergie ou la force vitale.

2) La force vitale est l’expression de l’équilibre global de l’organisme, non sa cause.

La force vitale n’existe donc pas en tant qu’entité autonome. Une force est «une action exercée par un objet sur un autre». C’est la capacité d’un objet à effectuer quelque chose. La force musculaire n’existe pas «en soi» mais est l’expression d’une capacité des muscles. De même, la force gravitationnelle est une force exercée, l’une sur l’autre, par les masses de deux corps situés à une certaine distance l’un de l’autre. Cette force explique, ainsi, le positionnement, la situation d’équilibre finale obtenue. Mais cette force n’a pas d’existence autonome là non plus.

Qu’il y ait des forces agissantes dans le vivant est une évidence mais, là aussi, elles ne peuvent avoir la moindre existence autonome. Et l’on ne peut concevoir une «force vitale» qu’en tant que «résultante», que somme globale de tous les phénomènes vitaux à l’œuvre dans le vivant et nullement en tant que cause de ces phénomènes vitaux.

Autant dire que cette «force vitale» ne peut nullement assurer, contrairement à ce qu’a dit Hahnemann, la cohésion de l’organisme, qu’elle ne peut nullement le diriger et assurer son bon fonctionnement.

C’est bien du contraire qu’il s’agit. A savoir que la «force vitale» du sujet sera amoindrie, affaiblie, perturbée, si et seulement si l’équilibre global de l’organisme est, lui même, amoindri et perturbé.

Il est donc possible d’affirmer que

3) La cause de la grande majorité des maladies est un déséquilibre vital ou déséquilibre biologique global

La maladie n’est donc nullement due à la perturbation d’une énergie ou d’une force particulière, dite «vitale» qui commanderait l’organisme comme un cocher dirige un attelage de chevaux ou un capitaine son navire.

La maladie est, au contraire, et c’est la grande avancée qu’a apporté Hahnemann avec l'homéopathie, un déséquilibre vital, un déséquilibre dans la capacité à vivre du sujet, une perturbation de sa dynamique vitale (vaste mouvement du fonctionnement global de l’ensemble de l’organisme, psyché incluse), c’est à dire, encore, un déséquilibre biologique global.

Un tel changement de définition et de pensée est essentiel et riche de conséquences. Il rend, en effet, enfin possible l’échange et le dialogue avec la communauté médicale, biologique et scientifique puisque chacun sait, bien évidemment, que santé et maladie possèdent une dimension homéostatique. Chacun sait, aussi, ce qu’est un déséquilibre. Chacun comprend ce que veut dire global. Quand à l’adjectif vital, il ne renvoie à aucune force ou énergie particulière mais rappelle que, du point de vue homéopathique, la maladie est prise en compte dans sa dimension d’altération du «sentir et de l’agir», c'est à dire en tant qu’expérience vécue, dans ne dimension phénoménologique.

La maladie, de ce point de vue, est, aussi, notons-le, le passage à un nouvel équilibre vital, un nouveau fonctionnement global, viable mais moins optimal, moins «confortable», qui provoque et s’accompagne de plus ou moins nombreux, et plus ou moins graves, désagréments.


4) En résulte une articulation claire et précise entre biomédecine et homéopathie.

La biomédecine s’inscrit dans le champ de l’objectivation.

Elle cherche donc, fort logiquement, comme cause aux maladies, des objets (agents infectieux, paramètres biologiques (cholestérol, triglycérides, glycémie, etc.), lésions, images radiologiques, etc.) et les vise, comme cible d’action.

L'homéopathie s’inscrit dans le champ phénoménologique ou champ vital, c'est à dire de la vie telle qu’elle est, concrètement, vécue.

Elle prend en compte la façon dont le patient vit sa maladie, comment il l’éprouve et vise à rééquilibrer l’organisme global du patient ou, plus exactement à donner à celui-ci l’impulsion et/ou l’information nécessaire pour qu’il se rééquilibre de lui même.

Articulation et complémentarité des deux approches deviennent, ainsi, évidentes.

Il y a, du côté biomédical, les maladies des mécanismes biologiques, des causes locales, en un mot, de la machinerie du vivant.

Et il y a, du côté homéopathique, les maladies par déséquilibre vital ou biologique global. Les deux registres s’intriquant, d’ailleurs, plus souvent qu’on ne pense. Surtout, les deux registres se complétant harmonieusement, dès lors que l’on voit les choses avec clarté.


Octobre 2019