Cet été au village, ma pratique au cœur du programme enfants

Date de publication : Aug 30, 2014 9:29:14 PM

Durant quatre semaines, le village des pruniers a accueilli les familles. Enfants qui courent, qui rient, le village prend une autre couleur, moins silencieuse et plus vivante. La première fois que j'ai vu cela, j'ai immédiatement ressenti une profonde gratitude pour Thay et pour la sangha. Quelle joie d'offrir une telle chance aux enfants, quel bonheur de les voir baigner dans la pratique, de les voir apprendre à Etre dans un environnement si favorable. C'est cette gratitude qui a été le moteur de mon choix d'aller aider au programme des enfants cet été. J'avais aussi très envie de partager cette expérience avec les monastiques, d'aller pratiquer, jouer et travailler avec eux pour m'imprégner de leur présence et m'inspirer de leur façon d'être.

Qu'avons nous fait ? Des jeux, des balades, des chants, des partages, des gouters, des activités de création. En apparence une approche assez similaire avec ce que l'on pourrait trouver ailleurs. Mais la singularité se fait dans un autre domaine, dans la qualité d'attention et d'ouverture que chacun partage, dans le mélange de nos couleurs, dans la volonté commune de favoriser un être ensemble harmonieux. La pratique est avant tout amenée aux enfants par un savoir être des adultes et c'est le climat de bienveillance ainsi généré qui permet à l'enfant de s'épanouir. Nous avons aussi partagé des temps plus formels, la méditation des cailloux, les deux promesses, les contemplations avant le gouter. Les enfants étaient invités à pratiquer l'écoute profonde dans les échanges et des temps d'arrêt et de silence ponctuaient les journées. Pour ma part, ces arrêts au cœur du jeu étaient le carburant qui m'a permis de rester fraiche, respirer avec les enfants m'offrait avant tout un temps de ressourcement personnel.

Une des grande question qui m'habitait début juillet et à laquelle j'avais envie de réfléchir pendant cette retraite "travail" était : Comment réussir à animer un groupe en étant juste pour chacun : moi-même, les autres adultes, les enfants qui ont besoin de s'agiter, ceux qui n'osent pas s'exprimer, ceux qui comprennent vite ou lentement, ceux qui sont pris par une souffrance extérieure qui les empêchent d'être là... Une question fondamentale pour toute personne intéressée par l'éducation. Bien sur, je souhaitais dans le respect de la pratique ne pas user des schémas d'autorité traditionnels y compris les plus subtils, ne pas jouer sur l'aspect récompense extérieure et ne pas me servir de procédés rhétoriques qui incitent à un choix. Et bien, je n'ai pas réussi. J'ai vu remonter bien des schémas, j'ai vu défiler tant de conditionnements, j'ai observé mes réactions et j'ai accepté que cet idéal était une étoile polaire vers laquelle je pouvais tendre en faisant de mon mieux chaque jour mais que par bienveillance envers moi-même, envers les autres et par respect de la pratique il était préférable de ne pas émettre de jugements sur ce "mieux".

Au fil des semaines, en collaborant avec l'équipe du programme enfants, j'ai vu que notre pratique, notre stabilité, notre ancrage et notre capacité à agir sans réagir depuis un espace de paix et d'amour étaient des conditions essentielles. La pratique au sein d'un collectif permet de générer une écoute et une tolérance qui va rapidement permettre de créer un climat de soutien et une harmonie au sein du groupe encadrant. La sangha semble une belle voie vers cette étoile. Cependant créer cette harmonie au sein d'un collectif au village n'a pas été pour autant une évidence. Et cela se révèle bien entendu encore plus difficile dans un contexte d'établissement où chaque enseignant n'a pas spécialement envie de regarder les choses de cette façon et où l'emploi du temps et les classes sont surchargés. Du coup, pour cette rentrée, j'ai envie encore davantage de pratiquer pour moi, d'essayer de rayonner la bienveillance et de développer le non-jugement, en faisant de mon mieux à chaque instant et en faisant confiance à cette présence pour les petites graines qu'elle sème.