Transports & mobilités dans l’Égypte antique
Modèles et stratégies de circulation dans la vallée du Nil et au-delà entre le IVe millénaire av. J.-C. et le Ier siècle apr. J.-C.
Intervenants
Transports & mobilités dans l’Égypte antique
Modèles et stratégies de circulation dans la vallée du Nil et au-delà entre le IVe millénaire av. J.-C. et le Ier siècle apr. J.-C.
Intervenants
Cristina ALÙ
Università di Pisa
Dipartimento di Civiltà e Forme del Sapere.
Mots-clés :
Eastern Desert
South Sinaï
Mining Expedition
Guides
Mediators
Desert guides and mediators: the auxiliary personnel of mining expeditions in the Eastern Desert and South Sinai.
Since the Early Dynastic, ancient Egyptians were habitual visitors to the harsh and inhospitable desert territories. The dangers they had to face were diverse and frequent, mostly in reaching mining locations where they have to settle for a while to recover all the necessary resources. Difficulties were due not only to the nature of the landscape, the presence of wild animals, and the scarcity of water and food supply but also to the presence of semi-nomadic populations, local or neighbouring, with whom they competed for the exploitation of the mines. Egyptian expeditions must, therefore, have envisaged specific strategies, sometimes of negotiation, sometimes of defence in their logistical organisation and staff composition. In the vast majority of cases, Egyptian mining inscriptions attribute the success of their expeditions solely to the favour of the gods and the political skills of the king. It is, however, very likely that expeditions were largely facilitated by the guidance and intermediation of auxiliary figures, often local to the desert, experts in shortcuts and easier routes, as well as being in charge of protecting the circulation of people and materials.
The paper aims to investigate the logistical, diplomatic and defensive role of these figures within the Pharaonic mining expeditions especially during the Middle Kingdom, through the archaeological contextualisation of epigraphic and iconographic sources from different areas of the Eastern Desert and South Sinai.
Aix-Marseille Université
Centre Paul-Albert Février UMR 7297
Académie des Sciences et Lettres de Montpellier
Mots-clés :
Nomes de l’Oryx et du Lièvre
Taxes douanières
Nomarques
Khnoumhotep II
Désert Arabique et Libyque
Sillonner, exploiter les déserts ḫȝs.t ou smj.t au Moyen Empire (secteur des nomes du Lièvre et de l’Oryx en Haute-Égypte).
Cette communication tente de cerner le problème suivant : à qui, à la XIIe dynastie, revient la gestion des espaces désertiques, ce qui suppose le contrôle des déplacements, à l’est comme à l’ouest ? Les titres administratifs et des fonctions religieuses des nomarques de l’Oryx et du Lièvre témoignent que l’activité de ces derniers, relayée par des fonctionnaires spécifiques, consiste dans l’organisation rationnelle de l’exploitation du désert, une évolution qu’il faut tenter d’expliquer d’après le contexte politique. Il semble que les familles des xve et xvie nomes, aux liens familiaux étroits et en raison de contacts avec la Cour, apparaissaient comme détentrices de monopoles sur l’exploitation et la gestion des déserts de l’est et de l’ouest, du moins de la responsabilité de percevoir les taxes douanières dans leurs territoires respectifs, au profit de l’administration centrale. On peut postuler que ce système pouvait aller jusqu’au contrôle militaire des marges et à l’organisation d’expéditions comme dans le cas de Khnoumhotep II. Rien de ce qui concernait la surveillance des frontières, le transit des caravanes et l’exploitation des ressources, dans les déserts Arabique et Libyque, voire au-delà – le Pays du Dieu – n’échappait à leur contrôle.
Éléonore BESNARD
Université Paul Valéry
ASM UMR 5140
Mots-clés :
Typologie
Maquette de bateau
Architecture navale
Procession funéraire
Topographie
La typologie des maquettes de bateaux à l’Ancien Empire : Approche architecturale et sociétale.
Les maquettes de bateaux égyptiennes conservées au sein des musées permettent à la fois une étude étique et émique. Ainsi, deux approches peuvent être envisagées : l’analyse architecturale et sociétale.
D’un point de vue étique, ces maquettes de bateaux fournissent des données de première importance pour l’étude de la nautique égyptienne. Leur représentation en trois dimensions permet de rendre compte de la largeur de chaque embarcation, ce que les représentations bidimensionnelles égyptiennes ne permettent pas de constater en raison de leur style artistique codifié. Les maquettes égyptiennes présentent des types de navires bien distincts au fil des dynasties, pourtant, aucune typologie chronologique n’a été réalisée à ce jour. Une typologie de ces objets peut être proposée grâce à un corpus regroupant une trentaine de maquettes de bateaux datées de l’Ancien Empire. Celle-ci permet de rendre compte de l’évolution architecturale et stylistique des différents types de maquettes de bateaux au cours de cette période. Malheureusement, ces objets ne présentent pas toujours le gréement et l’armement de chaque navire ou le font d’une manière imprécise : il est rare de retrouver la voile, les vergues ainsi que les cordages. Ces éléments sont pourtant dépeints sur les représentations bidimensionnelles, ce qui signifie qu’ils existaient et étaient même essentiels à la navigation. Le croisement de ces deux types de sources est donc nécessaire afin d’organiser une classification environnementale permettant de différencier les bateaux maritimes et fluviaux. Concernant le point de vue émique, il peut être étudié grâce au contexte de découverte des objets. Lorsque celui-ci est précisément décrit, il permet de comprendre la signification des maquettes de bateaux pour les Anciens Égyptiens.
Ainsi, de la barque sacrée au bateau profane, il s’agira de déterminer les différents types de navires représentés sur les maquettes de l’Ancien Empire, puis d’analyser l’intérêt sociétal de leur représentation.
Quelques (remises en) questions sur l’origine des matières premières de Byblos.
« En Méditerranée Orientale, le cuivre vient de Chypre, l’ivoire et l’ébène d’Afrique. »
Et s’il en était autrement ? L’origine de certains matériaux semble tellement acquise qu’on ne les met que rarement en question. Pourtant des analyses sur des armes en bronze de Byblos du Bronze Moyen montre que le cuivre employé pour leur fabrication n’est pas chypriote. D’où provient-il s’il ne provient pas de cette île à deux jours de navigation de la cité portuaire levantine ? Pourquoi le chercher aussi loin que l’Iran, le nord de la Turquie ou encore Oman ? Est-ce une question de qualité du minerais ou Chypre ne commerçait-elle qu’avec certains partenaires ? Et si Byblos était davantage tournée vers l’est avec ses routes terrestres que vers l’ouest et l’espace maritime ? Cette question sur le cuivre se pose également pour d’autres matières telle que l’ivoire que l’on dit forcément provenir d’Afrique via l’Égypte. Pourtant des données, notamment archéologiques, montrent des sources d’approvisionnement autres, plus proche voire autochtone.
Et si nous avions jusqu’alors surestimé les relations, en particulier commerciales, entre l’Égypte et la cité de Byblos fondées sur quelques mythes et textes ?
Axelle BRÉMONT
Ifao / Membre associée Orient & Méditerranée UMR 8167
Maël CRÉPY
Ifao / Chercheur associé Archéorient UMR 5133.
Mots-clés :
Path-modelling
Gravures rupestres
Visibilité
Marquage du territoire
Désert Oriental
« Errer dans des déserts sans chemin » ? Balisage, repérage et choix des itinéraires dans le désert oriental à l’époque nagadienne.
le corpus de panneaux rupestres prédynastiques s’est considérablement étoffé depuis les premiers travaux des années 1940, les informations paysagères et la localisation précise des gravures dans leur contexte topographique et archéologique sont plus rarement documentées. Les modalités d’occupation, de marquage et d’exploitation de l’espace sont par ailleurs bien mieux connues pour la période gréco-romaine, et dans une moindre mesure dynastique.
À partir d’études de terrain directes menées sur des zones restreintes mais représentatives, et grâce aux données satellites et topographiques permettant une étude à distance, cette communication proposera les premiers résultats d’une enquête visant à restituer les itinéraires suivis par les expéditions prédynastiques dans le désert oriental, en se focalisant sur les stratégies de repérage et le rôle éventuel que peuvent jouer les gravures rupestres dans ce contexte. Nous nous attacherons à la zone comprise entre Coptos et Edfou, ayant fait l’objet des prospections les plus systématiques et donc à même de produire des propositions de reconstitution d’itinéraires moins biaisées par l’absence de quadrillage complet des ouadis secondaires.
Divers indices complémentaires sont sollicités. D’une part, l’étude stylistique et typologique des panneaux a révélé l’existence de gravures produites par une même main, ouvrant des perspectives sur les trajets effectués et l’éventuelle fréquence des expéditions. D’autre part, le recensement systématique de l’ensemble des gravures de date nagadienne et le croisement avec les données sur les structures archéologiques et les ressources (minières et hydriques) de la région permettent d’émettre des hypothèses sur la finalité de ces trajets et les itinéraires privilégiés à partir des habitats prédynastiques connus dans la Vallée. L'étude de la localisation des panneaux permet également de mettre en avant des comportements statistiquement plus fréquents dans le choix de l’emplacement des stations rupestres, et l’exploration de la troisième dimension à travers un Modèle Numérique de Terrain permet de modéliser la visibilité et l’intervisibilité des stations, contribuant ainsi à la question d’un éventuel rôle de balisage des itinéraires par les graffiti.
The transport of middle and late bronze age Levantine amphorae in Egypt: a long-term relationship’s benefit for the Mediterranean trade.
By the 3rd millennium BCE, Egypt and the Levant maintain close links. Although the first interactions between both areas go back beyond this period, it is actually during the Early Bronze Age that their relationship is substantially strengthened. The settlement of Byblos, particularly influenced by the Egyptian culture, embodies the strong link between these two neighbours. Among the exchanges that take place between the Levant and Egypt, various liquid commodities are frequently transported inside ceramic vessels. The first imports of such containers were most likely carried out overland. However, as sailing develops, a completely new type of ceramics originating from sites settled along the Levantine coast makes its appearance; the very first amphorae to be exchanged across the Mediterranean appear.
The close relationship between the two regions seems to have encouraged the development of this unique class of ceramics, which would see exceptional use over the next millennium. Similarly, the frequency of Levantine amphorae traded to Egypt during the Middle Bronze Age, and more specifically with the settlement of Tell el-Dabʿa, apparently led to morphological changes that improved their function. Thus, the shape would have become more and more suitable for the holds of maritime ships as well as for transport logistics in general, facilitating for instance the various gestures related to their handling. Finally, the privileged relationship between Egypt and the Levant seems to have also favoured the extension of trade networks. The experience gained from the various expeditions to Egypt encouraged the seafarers to venture further west on a more regular basis. From the Late Bronze Age onwards, the first exports of Levantine amphorae reached the coasts of Cyprus and Crete as well as mainland Greece, and the concept of this new class of ceramics spread throughout the Eastern Mediterranean.
Maël CRÉPY
Ifao / Chercheur associé Archéorient UMR 5133.
Mots-clés :
Routes
Photointerprétation
Géomatique
Diachronie
Points d’eau
Tracer la route ou brouiller les pistes ? Étudier les itinéraires anciens par l'imagerie satellitaire.
Dans l’étude des circulations, des mobilités et des réseaux anciens en contexte désertique, il est généralement plus aisé d’étudier les nœuds, correspondant aux sites archéologiques et au points d’eau, que les arcs, qui correspondent aux routes. Plusieurs écueils freinent les recherches les concernant spécifiquement. D’abord Les étendues à couvrir pour les suivre et les documenter sont immenses. Ensuite, leur dégradation par les activités postérieures ou par les processus naturels, en particulier par les crues, les rendent de plus en plus difficilement détectables au fil du temps, à l’exception de routes ou de tronçons plus intensément aménagés. Enfin, leurs utilisations successives brouillent – littéralement – les pistes. L’accélération récente de l’exploitation du désert Oriental d’Égypte par des engins lourds entraine ainsi une dégradation rapide des routes anciennes dont tous les vestiges disparaissent peu à peu.
Pour analyser les itinéraires, l’utilisation d’images satellitaires est devenue de plus en plus courante, soit par télédétection semi-automatisée, soit par photo-interprétation. Ces documents permettent de prospecter à distance sur de très grandes surfaces, de retrouver différents tronçons et de tracer la route lorsqu’elle est encore visible. Cette communication propose, à partir d’études de cas, une évaluation des apports et des limites de méthodes de télédétection et de photo-interprétation dans l’étude des itinéraires. Ce bilan développé à partir de ma propre expérience, principalement dans le cadre du projet ERC Desert Networks (dir. B. Redon) et d’une revue de la littérature scientifique débouchera sur une typologie des routes, des pistes des sentiers observés dans le désert Oriental d’Égypte et de leur place dans les réseaux.
La palanche. Un instrument de transport du quotidien.
La palanche était un outil de transport indispensable dans la vie quotidienne en Égypte antique. Elle était utilisée dans divers contextes, allant du transport de mobilier funéraire à l'approvisionnement en eau ou en matières premières. Ainsi, bien qu’il y ait une présence discrète, le porteur de palanche s'avère être fréquemment figuré dans les scènes des tombes et mastabas.
Au travers de ces représentations – datant majoritairement pour cet exposé de l’Ancien Empire à la Deuxième Période intermédiaire – il sera dans un premier temps question de savoir ce qui était transporté à l’aide de la palanche et comment les anciens Égyptiens procédaient. Nous nous intéresserons ensuite aux postures adoptées par les porteurs lors du transport et nous verrons si la nature du chargement pouvait influencer la manière dont la palanche était utilisée puis nous nous interrogerons sur les possibles innovations technologiques apportées à ce mode de transport.
Enfin, nous étudierons la palanche en tant qu'élément du trousseau funéraire en nous appuyant sur des exemplaires provenant de différents sites archéologiques. Puis, grâce à celles retrouvées dans deux tombes de Deir el‑Medina – aujourd'hui conservées au Musée du Louvre et au Musée Égyptien du Caire – nous tenterons de déterminer quel type de porteur étaient leurs propriétaires et d’élucider quel usage ils en faisaient au quotidien.
Opening, making, guiding, trampling... the ancient Egyptian roads: Words that include the N31 hieroglyph (𓈐) and their related expressions that refer to land routes and mobility during the Old Kingdom.
Egyptian Old Kingdom documents offer several words and expressions connected to travels and transport by land. Many of them contain the hieroglyph N31 (𓈐), either as logogram of the word wȝt, “way, path”, or as classifier for the categories [trail] [street] [passage], or for other ideas on mobility on land. This study presents both a semiotic study of this hieroglyph, that depicts a path or road, and a survey of the terms and expressions related to it in the written record of the period under study (for instance biographical inscriptions, official and private documents, Pyramid texts, etc.). The purpose is to approach some ancient Egyptian perceptions on overland routes and travels by means of the terminology related to this hieroglyphic sign.
Serena ESPOSITO
Sorbonne université
Membre associée Orient & Méditerranée UMR 8167
Mots-clés :
Navigation ancienne
Prosopographie
Administration de l’Égypte ancienne
Mines et carrières.
Navigateurs ou bâtisseurs ? Mobilité, fonctions et hiérarchie des bateliers-marins dans l’Égypte du 3e millénaire av. J.C.
La documentation égyptienne du 3e millénaire offre un très large panel de titres d’officiers navals recrutés par l’autorité royale afin d’accomplir des voyages de long et moyen cours. Il s’agissait d’un personnel recruté périodiquement pour divers types de missions : opérations militaires et commerciales, exploitation des ressources minières du Sinaï et du désert Oriental ainsi qu’activités expéditionnaires vers les oasis du désert Libyque.
La présence de titres administratifs dans des contextes aussi variés pose alors question. Pourquoi recruter des navigateurs pour extraire des ressources minières ou diriger l’administration des oasis ? Au travers d’une étude prosopographique, cette communication propose une remise en contexte du rôle de cette catégorie de fonctionnaires dont les compétences dépassaient largement l’action de naviguer.
Les rapports hiérarchiques montrent que certains bateliers-marins pouvaient encadrer d’entières opérations et exercer une autorité sur d’autres catégories d’officiers présents à bord des équipages. Inversement, les navigateurs étaient souvent soumis à l’autorité d’autres types de cadres lors de missions terrestres, fluviales et maritimes. Notre objectif est donc d’illustrer les relations horizontales entre les différents officiers de la marine et leurs liens verticaux avec les hautes institutions de l’État. Le bilan de cette analyse montre une correspondance parfaite entre l’organisation des navigateurs et le système hiérarchique adopté par les bâtisseurs des tombes royales et des hauts fonctionnaires. Le déplacement de marins et bateliers illustre alors la mise en place de stratégies efficaces, optimisées pour affronter des conditions de voyage nécessitant d’une logistique rigoureusement programmée.
Österreichisches Archäologisches Institut
Österreichische Akademie der Wissenschaften
Mots-clés :
Kom Ombo
Old Kingdom
First Intermediate Period
Town
Upper Egypt
Kom Ombo, a node in the river and land transport system in southern Upper Egypt.
The modern town of Kom Ombo lies approximately 45 km north of Aswan, on the eastern bank of the Nile. The archaeological site, some 3 km to the east, is well known for its Graeco-Roman temple complex.
Today it is dominated by a well-preserved temple of the Ptolemaic period (about 300 BC to 30 BC), but around three sides of the temple is a mound consisting of the remains of the ancient settlement, which was inhabited from at least 2600 BC to about the 10th century A.D., and again in the 19th century.
Kom Ombo was an important urban centre in southern Upper Egypt, not far from the border of Egypt at the 1st cataract. It was on occasion a nome capital in Pharaonic times, and later a metropolis in the Roman period (Forstner-Müller et al. 2019). It lay at the end of a network of desert routes leading to the Red Sea and Nubia, and was as well a node in the river transport system, thus making it point of interaction between varied cultures and communities.
Since 2017, the Egyptian-Austrian joint mission has undertaken survey and excavation on the mound as part of its research into ancient Egyptian cities and urbanism. The work has focused partly on an area where the Pharaonic town of Kom Ombo was to be expected. The remains of a settlement, an administrative compound and a cemetery spanning the Early Dynastic Period, the Old Kingdom and the First Intermediate Period have been discovered. Thus, the mission’s research has significantly contributed to the better understanding of the history of the town.
This paper will present the new results of the Egyptian - Austrian work and focus on the question of exchanging goods in a regional and supra-regional perspective.
CNRS / Université Paul Valéry
ASM UMR 5140
Mots-clés :
Grauwacke
Expédition
Pierre
Statues
Transport
Rapporter la grauwacke.
Quelques éclairages sur le transport des blocs de pierre du Ouadi Hammamat (des origines à la fin du Nouvel Empire).
La grauwacke est la « pierre de Bekhen », connue en ce terme par les textes égyptiens.
Cette pierre se trouve dans un gisement situé au milieu du désert Oriental, entre Coptos et Qosseir. De tous temps, les pharaons ont envoyé des expéditions pour rapporter des blocs de cette pierre exceptionnelle. Les plus grands chefs-d’œuvre, de la palette du roi Narmer au célèbre buste de Jules César, à Berlin, proviennent de ces carrières.
Nombre d’inscriptions gravées sur les parois du ouadi Hammamat abondent en renseignements sur l’organisation des expéditions envoyées par les pharaons dans cette vallée qui est aussi une carrière, les quelques kilomètres où affleure cette pierre.
Ces inscriptions, sur lesquelles se fonde mon étude, livrent à l’envi la composition des expéditions : elles recensent la présence des chefs des diverses sections de travail, et – bien souvent – , dans le détail, le nombre des hommes engagés, carriers, sculpteurs, prospecteurs, etc.
Mais, alors que les musées regorgent d’objets en grauwacke de toutes les époques, rares sont les inscriptions qui donnent quelques renseignements à propos des blocs de pierres pour lesquels les expéditions ont été envoyées sur place.
Essayer de mettre en relation ces trop rares indications – la mention des blocs choisis, le personnel mentionné dans les inscriptions et la production statuaire connue – est une enquête, si modeste qu’elle soit, qui devrait permettre d’offrir quelques éclairages sur l’organisation employée par les pharaons pour faire sculpter leur image dans la pierre qu’ils avaient choisie entre toutes.
The development of transport wagons, carts and chariots and the acceptance / non-acceptance of the innovation “wheel” from the earliest evidence to the Graeco-Roman Period.
Chariots were rapidly widespread in Egypt, and they are attested until the 1st century BC. Beyond their use in war, they were an essential means of locomotion for the elite. However, only a few Egyptian carts and about 40 wagons are known in Egypt up to Graeco-Roman times. In the lecture some of the will be analyzed concerning their construction, their context as well as their development. Moreover, their introduction to Egypt will be discussed.
In the Near East, Caucasus and in Europe, the oldest wheeled vehicles are already attested in the 4th millennium BC. in Egypt, however, the earliest wheel only appears in the 3rd millennium BC. Therefore, the reasons for this delay as well as for their low use in contrast to the chariot will be analyzed.
The first wheeled objects in ancient Egypt were no carts or wagons, but a scaling ladder and a siege tower; the earliest wheeled vehicles were wagons, followed by chariots, and then by carts.
Referring to the sociological facts, carts and wagons were only seldom used; instead, donkeys were favored for daily work, sledges for heavy transport. Therefore, the earliest evidence of wheels in Egypt is comparatively late, namely to the 3rd millennium BC. The late and restricted use of wheeled vehicles in ancient Egypt is not a rejection or deliberate non-acceptance of wagons or the innovation “wheel”, but owed to the climatic and geomorphological basic requirements of the country, together with the sociological aspects. Carts and wagons played a minor role in the Egyptian traffic system.
In contrary to both, the innovation chariot was accepted at once and rapidly widespread in Egypt, and they are attested until the 1st century BC. Beyond its use in war, it an essential means of locomotion for the elite. The fast introduction of the chariot is due to the high attractiveness within the elite and, moreover, the adoption of the chariot was a pressing need, being a military necessity.
Florence
MAURIC-BARBERIO
Institut Khéops
Université de Bâle (UBKVP)
Mots-clés :
Au-delà souterrain
Course solaire
Apophis
Ba
Transport et mobilité dans l’Au-delà souterrain : quelques réflexions sur la course solaire nocturne d’après le Livre de l’Amdouat et les compositions apparentées.
Qu'elle prenne la forme d’une navigation, d’un halage ou d’un cheminement à pied, la course solaire nocturne qui s’effectue dans l’Au-delà souterrain répond à un impératif de mobilité : Rê doit constamment avancer sous peine de ne pas réapparaître à l’aube, menace cosmique incarnée par le serpent Apophis. Au fil de son parcours, des êtres réanimés sur son passage se mettent en mouvement ; d’autres l’accompagnent jusqu’à l’extrémité de la Douat, certains le suivant même au ciel. Par-delà les spécificités des différentes compositions, la mobilité du dieu solaire résulte fondamentalement de sa qualité de ba, venu momentanément s’unir à son cadavre dans les profondeurs du monde souterrain.
Université catholique de Louvain,
Université de Namur
Les déplacements dans les récits : ce que les textes ne nous disent pas.
Nombreux sont les récits de trajets liés à des activités menées hors de la vallée du Nil. L'exposé s'emploiera à montrer que (1) celui qui participe à une mission se limite souvent à évoquer ce qu'il a lui-même accompli (cf. la biographie d'Ahmès fils d'Abana) ; (2) l'itinéraire n'est pas décrit de façon complète et détaillée, mais en sélectionnant les données les plus notables (cf. le trajet aller de Ramsès II vers Qadech).
Le propos sera approfondi grâce à l'examen de trois textes des VIe et XIIe dynasties : les voyages vers Iam de la biographie d'Herkhouf, les trajets évoqués dans le récit du Naufragé, enfin la mission du héraut Amény au Ouadi Gaouasis.
La piste des coquillages. Un itinéraire divin dans le désert Oriental égyptien.
La découverte d’inscriptions datant de toutes les époques sur les parois des montagnes du désert Oriental atteste les traversées multiples de ces étendues « inhospitalières » par les anciens Égyptiens. Véritable bibliothèque de pierre, le canyon du ouadi Hammamat présente des centaines d’inscriptions datant du Prédynastique à la fin de l’époque impériale romaine. Elles mentionnent ou figurent une divinité singulière : Min de Coptos. Dieu ithyphallique incarnant la force et la foudre, Min était vénéré dès les plus hautes époques dans deux sanctuaires de Moyenne Égypte : Akhmîm et surtout Coptos. Véritable point de départ pour les expéditions vers la mer Rouge depuis la boucle du Nil dans la Vallée, Qena, les fouilles de W. M. Fl. Petrie dans ce sanctuaire ont mis au jour plusieurs statues monolithes anthropomorphes de 4 à 5 mètres de haut et datés de 3300 avant J.-C. Sur les jambes de ces plus anciens colosses de l’humanité ont été gravés plusieurs pétroglyphes, permettant d’identifier la figure représentée, à savoir Min. Au-delà des signes théonymes apparaissent plusieurs représentations d’un type singulier de coquillage : le tridacne. Provenant des eaux de la mer Rouge et associé au dieu Min, il permet d’esquisser un trajet divin et humain précis, traversant Hammamat, sanctuaire naturel du dieu de la force et portail vers le monde des dieux, jusqu’à atteindre un site portuaire de la mer Rouge caractéristique, principal point de départ maritime vers Pount au Moyen Empire : Mersa Gaouasis.
Université Lumière Lyon 2
HiSoMA UMR 5189
Mots-clés :
Oasis de Dakhla
Balat
Ancien Empire
Première Période intermédiaire
Desert roads archaeology
La traversée du désert : pratiques de mobilité à Dakhla de l’Ancien au Moyen Empire.
Le développement des activités archéologiques dans les oasis a permis de mesurer la vaste amplitude des déplacements des habitants des oasis en général, et de Dakhla en particulier, dans les derniers siècles du 3e millénaire. Un certain nombre de personnes de différents statuts sociaux voyageaient sur les routes désertiques, dans des buts variés. Plusieurs catégories d'informations (lexicales, archéologiques) permettent au moins de détecter, à défaut d'évaluer précisément, ces mouvements d'individus ou de groupes de ou vers Balat, siège de l'administration pharaonique du désert occidental. En particulier, les modalités pratiques de certains de ces voyages ont pu être récemment étudiées en détail par différentes équipes internationales, principalement par le projet ACACIA de l'université de Cologne, le long de la route dite d'Abou Ballas. D'autres indices complémentaires sont fournis par les textes documentaires trouvés dans le palais des gouverneurs à Balat. Si les données dont nous disposons sur ce site proviennent en grande partie de sources officielles égyptiennes des 6e-9e dynasties, les itinéraires pratiqués à cette époque supposent des connaissances environnementales et astronomiques spécifiques mises en œuvre par des groupes humains itinérants bien avant les temps historiques. Les populations semi-nomades du désert occidental, qui ont coexisté un temps avec les Égyptiens venus de la vallée du Nil, ont dû jouer un rôle important dans la transmission de ces expériences. Par la combinaison de la logistique pharaonique avec ces savoirs traditionnels, les expéditions égyptiennes ont pu accéder à de nouveaux territoires.
Renaud PIETRI
Université de Liège
Mots-clés :
Char
Cheval
Amarna
Véhicule solaire
Rê
Le char, un « véhicule solaire » au Nouvel Empire ?
Introduit tardivement en Égypte dans le courant de la Deuxième Période intermédiaire, le char léger tiré par deux chevaux a rapidement été mis au service de l'idéologie royale et s'est imposé au Nouvel Empire comme le moyen de transport privilégié non seulement du roi mais aussi d'une élite bien souvent issue des rangs de l'armée. Le véhicule a peu à peu été intégré au système de pensée pharaonique, même si la place qu'il occupe dans la religion reste limitée : les divinités représentées « en char », par exemple, sont peu nombreuses.
Plusieurs chercheurs ont néanmoins mis en évidence une dimension « solaire » du char au Nouvel Empire (cf. notamment CHAPPAZ 1987 et CALVERT 2013), qui a même pu entrer en contradiction avec la tradition égyptienne de la barque comme véhicule du dieu Rê, largement éclipsé à l’époque amarnienne. L’iconographie royale, mais aussi les sources textuelles et archéologiques, sont autant d’indices de cette « solarisation » du véhicule, étroitement liée à la figure du roi et finalement incomplète. La présente communication propose de revenir sur ce phénomène de « solarisation » du char au Nouvel Empire en confrontant les sources à disposition, et d’en discuter les enjeux et les limites.
What equipment for the transportation by donkeys? Analysis of data from the Old Kingdom to the New Kingdom.
The donkey is one of main means of transportation of goods in Egypt during the Pharaonic times. It is used for carrying heavy loads both on short and long distances. The iconography and texts insist on the nature of the goods thus carried, but are less loquacious about the equipment that made the transportation possible. Indeed, the loads cannot just be dropped on the back on the animal: some material is necessary to fasten and stabilize them.
The speaker proposes to review the elements of this equipment, and their possible evolution from the Old Kingdom to the New Kingdom, through iconographical, textual and archaeological sources.
The iconography shows different kinds of containers carried by the donkeys, mainly bags and panniers. Their variety is such that it is difficult to identify them among the archaeological material. Goods can also be transported in other containers, such as jars or skins.
The complete harness fixing the load is composed of belly girths, a breast girth and a crupper. Its different parts are rarely all represented in iconography, though they are all necessary in order to be efficient. A blanket protects the back of the animal from the frictions perpetuated on the skin by the containers and the straps.
One can wonder if Egyptians would use furthermore a more solid and rigid gear for retaining the goods, like a packsaddle. The iconography is not clear on this point, but several words could refer to a kind of packsaddle, or possibly to a saddle – which raises the question of the existence and frequency of donkey riding in Ancient Egypt.
Stocker des céréales et fournir de l'eau. La logistique des expéditions de chasse à l'éléphant sur la route d'Edfou à Bérénice au IIIe s. av. J.-C.
Durant une cinquantaine d'années, du règne de Ptolémée II à l'éclatement de la Grande Révolte de Thébaïde (ca 270/269-ca 208/7 av. J.-C.), la route reliant le port de Bérénice à Edfou, dans la vallée du Nil, a connu une intense activité, liée quasiment uniquement à la tenue d'expéditions de chasse dans la Corne de l'Afrique, destinées à fournir l'armée lagide en éléphants de guerre.
Pour faciliter le franchissement des 360 km reliant les deux villes, une dizaine de stations a été érigée sur le parcours. Grâce à l'exploration de deux de ces stations par la MAFDO, et à l'étude du réseau formé par ces arrêts routiers dans le cadre du projet Desert Networks, il est désormais possible de décrire avec une grande précision la manière dont la route a été équipée pour faciliter les trajets des hommes et des animaux et de retracer la chronologie de ces travaux. On montrera également comment l'administration lagide s'est déployée dans le désert pour assurer le ravitaillement en blé et en céréales des centaines de personnes qui formaient les expéditions. On verra enfin comment les chameaux, véritables vaisseaux du désert, ont joué un rôle crucial dans le succès des expéditions.
Université Paul Valéry
ASM UMR 5140
Mots-clés :
Lexicographie
Manœuvres nautiques
Expéditions maritimes
Naviguer en Méditerranée avec Sennéféri (TT 99).
À propos d’une expédition à Byblos sous le règne de Thoutmosis III.
Si les inscriptions mentionnant des navigations nilotiques ou maritimes ne sont pas rares, celles qui fournissent quelques indications techniques sont, en revanche, bien moins nombreuses. Pourtant, en dépit de leur importance pour ce qui est de l’histoire de la batellerie et de la marine, elles restent peu – ou mal exploitées –, pour deux raisons principalement. La première est la méconnaissance par les chercheurs des techniques de la navigation dont une maîtrise, ne serait-ce que partielle, leur permettrait de « pénétrer » le monde complexe des manœuvres nautiques. La deuxième est la méconnaissance du lexique des bateliers et des marins. Les quelques mots de ce dernier ayant subsisté sont, pour la plupart, mal traduits ou le sont avec un niveau de généralité trop important (par ex. : « naviguer » pour « tenir un cap », « manœuvrer », « virer », etc.).
Une inscription de la tombe de Sennéféri à Cheikh Abd el-Gournah (TT 99), décrivant une expédition à Byblos sous le règne de Thoutmosis III, permet de montrer comment, en restituant la traduction exacte de certains mots de ce vocabulaire, il est possible de reconstituer les principales données nautiques dont il est question, la logique de la navigation, ainsi que la dimension calendérique de l’expédition.
Permanence et mutations dans la région de la Première Cataracte à la fin du Moyen Empire : l’apport des sources épigraphiques et de la prosopographie à l’étude de la porte méridionale de l’Égypte.
Frontière Sud traditionnelle de l’Égypte, carrefour de biens et de personnes, lieu d’exploitation de carrières, base de lancement de campagnes militaires et d’expéditions minières en Nubie, l’importance stratégique de la région de la Première Cataracte ne se dément pas au Moyen Empire. Elle atteint même son apogée à cette époque sous l’impulsion de la monarchie et de ses relais locaux, les gouverneurs d’Éléphantine. L’établissement de la nouvelle frontière méridionale de l’Égypte par Sésostris III dans la région de Héh, au sud de la Deuxième Cataracte, marque une nouvelle étape dans l’histoire de la Première Cataracte. À partir du corpus des inscriptions rupestres de la région d’Éléphantine et des exvotos du sanctuaire d’Héqaib, et en s’appuyant plus particulièrement sur l’analyse des titres qui y sont mentionnés, cette communication s’attachera à étudier l’évolution du rôle de cette région à la fin du Moyen Empire et les répercussions administratives, économiques, cultuelles et sociales de l’annexion de la Basse Nubie. Il s’agira d’abord de mettre en évidence la continuité et les ruptures dans l’administration et l’exploitation des ressources locales entre la fin de la XIIe dynastie et la fin de la XIIIe. Ces évolutions seront ensuite mises en regard avec les transformations cultuelles qui accompagnent les projets royaux mis en œuvre dans les sanctuaires locaux, autant de motifs qui peuvent expliquer la présence sur place de fonctionnaires et d’artisans issus des institutions et des ateliers de la Résidence, ainsi que celle de quelques membres du clergé de la région Memphis-Fayoum. On tentera aussi d’éclairer le rôle de certains hauts fonctionnaires de l’administration centrale dans la mise en valeur de la Basse Nubie, et notamment celui des directeurs des champs, particulièrement bien attestés à Éléphantine à la fin du Moyen Empire. Les conséquences de la perte de contrôle de la région au bénéficie du Royaume de Kouch, pendant une grande partie de la Deuxième Période intermédiaire, et les conditions de sa reconquête seront enfin analysées.
Claire SOMAGLINO
Sorbonne Université
Orient & Méditerranée UMR 8167
Mots-clés :
Ayn Soukhna
Mer Rouge
Expéditions minières
Ancien Empire
Moyen Empire
Les évolutions de la logistique expéditionnaire à Ayn Soukhna entre l’Ancien Empire et le Moyen Empire.
Les expéditions égyptiennes vers la zone minière du Sud-Sinaï, et parfois au-delà vers le pays de Pount, impliquent une planification soigneuse des déplacements, à la fois terrestres et maritimes, ainsi qu’une organisation sans faille de la chaîne logistique. Il était en effet nécessaire d’approvisionner plusieurs centaines à plusieurs milliers d’hommes, selon les expéditions, pendant plusieurs semaines, dans des zones arides.
La fouille du port et plateforme logistique d’Ayn Soukhna par une équipe franco-égyptienne depuis 2001, a fourni des données essentielles pour comprendre sur le temps long ce système expéditionnaire, notamment du point de vue logistique. La fouille des galeries de stockage, ainsi que du large campement de bord de mer, permet désormais, au terme de plus de 20 ans de missions, d’avoir des données précises sur la gestion des expéditions, en particulier le matériel et les vivres transportés depuis la vallée du Nil (quantité, nature, répartition entre équipes, stockage). Il a également été possible de caractériser les évolutions de cette logistique entre l’Ancien Empire et le Moyen Empire. Des changements notables sont dus au fait que durant une courte période entre la fin de la XIe dynastie et le début de la XIIe dynastie, Ayn Soukhna est le lieu de transformation d’une partie du minerai de cuivre provenant du Sinaï. Ce dernier point permet de réfléchir à la question des stratégies de transport des matières premières et de la localisation de leur transformation, entre lieu d’extraction et vallée du Nil.
Pierre TALLET
(en collaboration avec Damien LAISNEY)
Sorbonne Université
Orient & Méditerranée UMR 8167
Mots-clés :
Pistes
Désert Oriental
Mer Rouge
Moyenne-Égypte
Chéops
Les évolutions de la logistique expéditionnaire à Ayn Soukhna entre l’Ancien Empire et le Moyen Empire.
Le port du ouadi el-Jarf jouait au début de l'Ancien Empire le rôle d'une plateforme logistique aménagée sur la mer Rouge pour faciliter les expéditions envoyées au sud-ouest de la péninsule du Sinai à la recherche du cuivre et de la turquoise. Depuis ce point de la côte, des bateaux faisaient sans doute des rotations régulières pour soutenir le corps expéditionnaire qui opérait dans les mines de la Péninsule. Mais le port lui-même devait en permanence être approvisionné en vivres et en matériel depuis la vallée du Nil, et les pistes qui y menaient devaient être également fréquentées de façon régulière par les équipes d'ouvriers qui y étaient envoyées. Le corridor naturel du ouadi Araba – qui relie le ouadi el-Jarf à la région de Meydoum et à Atfih – a certainement constitué un accès majeur au site. Une prospection qui y a été menée il y a quelques années par Yann Tristant et Grégory Marouard a mis en évidence la présence régulière de cairns qui ont pu baliser les itinéraires empruntés par les Égyptiens, et l'abondante documentation épigraphique découverte sur le site lui-même (papyrus, textes biographiques, scellés) confirme l'usage régulier de cette voie. La découverte récente de plusieurs sites du désert oriental présentant une importante série d'inscriptions rupestres, à l'ouest de l'actuel monastère de Saint Paul, permet maintenant de démontrer l'existence d'une autre piste majeure, qui relie cette fois-ci le port à la région de El-Bersheh, Cheikh Saïd, Hatnoub et Miniah, une région qui est bien connue pour l'intérêt que lui ont porté les rois du début de la IVe dynastie.
F.R.S.-FNRS / Université libre de Bruxelles
Mots-clés :
Art rupestre
Déserts
Communication
Interculturalité
Formation de l’État
Si les pierres pouvaient parler : réseaux de circulation et « zones de contact » en Égypte pré- et protodynastique.
Au cours des dernières décennies, plusieurs programmes de recherche conduits en Haute-Égypte et dans les déserts la jouxtant ont mis en évidence le rôle joué par ces derniers en tant que voies de circulations et espaces d’interactions majeurs durant la Préhistoire. Les données exploitables sont limitées, toutefois, et il est souvent bien difficile d’identifier l’ensemble des communautés impliquées dans ces contacts et échanges. Il est en effet aujourd’hui démontré que les cultures matérielles dominantes implantées dans la vallée à l’époque, à savoir les Nagadiens et les membres du Groupe A nubien, s’intégraient dans une réalité socio-culturelle plus complexe et diversifiée que ce que l’archéologie a longtemps laissé suggérer.
L’actuel développement des études rupestres en Égypte et au Soudan contribue à approfondir notre compréhension de l’occupation humaine de ces territoires à la fin de la Préhistoire : cette catégorie de sources n’est plus envisagée comme un seul réservoir d’images qu’il faudrait nécessairement attribuer aux Nagadiens ou aux membres du Groupe A, mais bien comme un ensemble hétérogène de témoignages illustrant la forte dimension interculturelle de la Basse Vallée du Nil à ces époques. En effet, l’analyse des divers corpus de gravures aujourd’hui disponibles met en lumière cette composante interculturelle et l’usage, tant par des autorités locales/régionales que par des communautés mobiles, de voies de communication stratégiques liant la vallée aux déserts. Loin d’être anecdotiques, le développement de ces contacts et échanges, et par extension de ces réseaux de communication, ont joué un rôle fondamental dans le processus de formation et de consolidation de l’État dès le Prédynastique final et le début du Protodynastique. Cette communication propose, au travers du matériel rupestre, de recontextualiser ces réseaux de circulation à l’aune de nos connaissances actuelles et d’apporter un regard neuf sur ces problématiques.