Madame, Monsieur,
Que vous l’ayez acheté ou non, nous avons eu l’occasion d’échanger plus ou moins longuement à propos de mon livre L’Oued Rouge. Il m’a permis de rencontrer des anciens combattants ou de converser avec eux par téléphone ou par courrier. J’ai aussi pu parler avec des frères, des sœurs, des cousins ou des amis de soldats morts au combat. Les sujets de conversation les plus douloureux avaient trait aux disparus. Aux cours des accrochages, certains ont vu, de loin, des camarades qui levaient les bras pour se rendre. Ni eux ni leurs corps n’ont été retrouvés. Pour leurs proches, les questions sont toujours terribles : « Que lui est-il arrivé ? », « Il est certainement mort mais comment ? », « Où est son corps ? ». Le temps qui passe, les archives françaises qui s’entrouvrent lentement et celles de l’Algérie qui restent closes; les rumeurs et quelques témoignages difficiles à vérifier sur des transfusions sanguines subies jusqu’à la mort par des disparus durant les dernières années de la guerre; sur des bagnes, aussi, où auraient été prisonniers après 1962, des soldats français capturés durant le conflit, ajoutent à l’angoisse de découvrir une vérité pourtant nécessaire pour effacer les questions et atténuer un peu les afflictions, les angoisses et les désespoirs.
L’une des personnes concernées m’a écrit ceci : « C'est le cas parmi tant d'autres de mon cousin Louis, Théodore, Jean-Marie GUEGAN, né le 23 juin 1933, Tirailleurs au 7ème Régiment de Tirailleurs Marocains, SP 59 932, Peloton d'instruction des chauffeurs, enlevé et disparu le 18 février 1956 dans la région de Khenchela, département de Batna. Lorsque Louis est tombé dans cette embuscade il n'était pas seul. Pourquoi ne pas dire la vérité à sa famille même si ceci est cruel ? Il a deux sœurs de 86 et de 83 ans qui attendent toujours la vérité. Ses parents sont morts de chagrin. Il a été déclaré mort pour la France par le Tribunal de Grande Instance de Vannes le 24 juillet 1963 ». Ce cousin m’a demandé si je pourrais vous consulter pour savoir si l’un ou plusieurs d’entre vous ou de vos proches, des adhérents à des associations d’anciens d’Algérie ou des combattants d’Algérie plus particulièrement, auraient quelques informations, même infimes, qui pourraient orienter les recherches de la famille et de Soldis-Algérie , une association dont les buts sont :
Recenser les informations sur les disparus;
En dresser la liste qui, à ce jour, n’est pas établie;
Entreprendre, le moment venu, la recherche des corps, leur identification et leur inhumation;
Ultérieurement, élever un monument à la mémoire des militaires français portés disparus afin d’offrir à leurs familles et à leurs compagnons d’arme un lieu de recueillement.
J’espère que vous ne m’en voudrez pas de vous avoir sollicités. Aucun d’entre vous ne m’avait autorisé à le faire mais, en mon âme et conscience, je ne pouvais pas ignorer la demande de ce cousin de Louis GUEGAN. Je crois que vous me comprendrez.
J’espère, aussi, que l’une ou l’un d’entre vous aura, peut-être, une information susceptible d’apporter un peu d’éclaircissement sur cette disparition qui réconforterait sa famille.
Avec mes chaleureuses salutations.
Antoine Delaunay auteur du livre "L'Oued rouge" (voir rubrique des livres.)
L'Association des militaires disparus : Soldis-Algérie