Les tendinopathies sont fréquentes chez les coureurs. Elles sont le plus souvent liées à une mauvaise quantification du stress mécanique – autrement dit, une augmentation trop rapide du volume, de l’intensité ou du dénivelé. Le traitement passe donc avant tout par un programme d’exercices et une remise en contrainte progressive du tendon (.
Or l’environnement nutritionnel conditionne la capacité des coureurs à tolérer le stress mécanique et à s’y adapter progressivement. En revanche, si cet environnement n’est pas optimal, il peut au contraire amplifier négativement les conséquences de ce stress mécanique, et rendre les tendons plus vulnérables aux pathologies .
Il nous est donc souvent demandé si un contexte particulier, notamment nutritionnel, pouvait favoriser l’apparition de cette pathologie, mais également si le fait d’agir sur l’environnement alimentaire pouvait favoriser une meilleure guérison. Que nous dit la littérature scientifique sur le lien entre l’alimentation et les tendinopathies?
La vitamine C est un des éléments de défense contre le stress oxydatif. Elle joue aussi un rôle important dans la production du collagène, la composante principale du tendon.
La réparation optimale du tendon peut donc être compromise, si la vitamine C est présente en quantité insuffisante dans l’alimentation, ou si elle est rendue moins disponible parce qu’elle est utilisée pour d’autres fonctions de l’organisme.
Dès lors, plusieurs études invitent à recourir à une supplémentation à haute dose en vitamine C ( 1 000 mg/jour) pour optimiser le processus cicatriciel des tendons (8–11). En revanche, le niveau de preuve est faible. On ne peut donc pas en tirer une ligne directrice claire pour la pratique.
Oméga-3
Anti-inflammatoires à éviter
Pour les tendinopathies comme pour les blessures aiguës ou traumatiques, les anti-inflammatoires sont à éviter, car ils peuvent entraver l’assimilation de certaines vitamines et de certains nutriments, en plus d’altérer la diversité du microbiote.
Comme beaucoup d’études en nutrition, celles qui concernent la supplémentation évaluent l’effet isolé d’une substance sur une situation, sans prendre en considération le contexte et le terrain individuel dans lequel cette supplémentation est effectuée. Or il existe une grande diversité de diètes, chacune associée à des statuts en macronutriments et en micronutriments qui varient beaucoup d’une personne à une autre.
De plus, même entre deux personnes aux habitudes alimentaires similaires, ces statuts peuvent varier du fait de différents facteurs (p. ex., activité physique, histoire individuelle, héritage familial, génétique, stress, inflammation, microbiote, santé de la muqueuse intestinale).
Étudier les effets de l’alimentation sur les tendinopathies à travers le prisme de la supplémentation est à la fois réducteur et trompeur:
Réducteur, car cette approche sous-estime l’importance des autres facteurs qui structurent et influencent le terrain alimentaire individuel et l’alimentation quotidienne.
Trompeur, car elle laisse croire que la supplémentation peut être une pilule miracle et risque d’occulter une réflexion nécessaire sur les facteurs qui rendaient les tendons vulnérables aux pathologies. Pire, cette approche laisse aussi croire que ces compléments ne peuvent être obtenus que par supplémentation, alors qu’ils devraient avant tout être obtenus par la consommation d’aliments complets.
En somme, les suppléments alimentaires, souvent onéreux, ne devraient être qu’en soutien d’une alimentation déjà optimisée.
Plusieurs études montrent un lien entre un terrain individuel éloigné de l’état d’équilibre (p. ex., un statut en oméga-3 insatisfaisant) et la survenue d’une pathologie tendineuse.
De même, il existe un lien entre un contexte hyperglycémique et la capacité du tendon à revenir à son état d’équilibre 17–19). Autrement dit, la régulation de la glycémie (la concentration de glucose en circulation dans le sang) affecte la capacité du tissu tendineux à tolérer le stress mécanique et à s’y adapter.
La présence d’un taux élevé de masse grasse augmente également le risque de développer une tendinopathie (20). On ignore toutefois si c’est ce taux de masse grasse, ou encore l’hygiène de vie et l’alimentation qui y est associée, ou encore une combinaison de tous ces facteurs, qui accroît le risque de tendinopathie. On sait en revanche que le tissu adipeux a une activité endocrine qui entretient la présence d’un contexte inflammatoire. En ce sens, réduire l’excès de masse grasse et l’inflammation de bas grade en améliorant la qualité de son alimentation est doublement bénéfique pour la santé du tissu tendineux.
Messages-clés à retenir
La quantification du stress mécanique et la remise en contrainte des tendons restent le traitement de choix pour les tendinopathies.
La littérature scientifique évalue l’intérêt de la nutrition sur les tendinopathies avant tout par la supplémentation, mais cette approche est réductrice et trompeuse.
En matière de supplémentation, l’apport en vitamine C paraît le plus pertinent.
Afin de favoriser la guérison d’une tendinopathie, le terrain et le contexte alimentaire peuvent être optimisés par la régulation de la glycémie et du statut en oméga-3, ainsi que par une réduction de la masse grasse et de l’inflammation de bas grade.