Kaija Saariaho, Nuits, Adieux
Cologne, Allemagne, 1991
Cologne, Allemagne, 1991
« Nuits, Adieux traite du chant, du souffle, du chuchotement, de la nuit et de l'adieu. La pièce est formée de dix sections : les cinq premières sont intitulées Nuits, les cinq autres Adieux.
Deux sources différentes ont été utilisées pour les textes, en relation avec les deux divisions de l'œuvre : des extraits du livre de Jacques Roubaud Échanges de la lumière (dans Nuits) et un fragment du roman de Balzac Séraphîta (dans Adieux).
Les voix sont amplifiées et transformées pendant l'exécution. Chaque chanteur utilise deux micros. L'un est utilisé pour une amplification générale : les sons captés sont envoyés vers différents programmes de traitement et modification du son. Les transformations les plus audibles sont cependant obtenues avec le matériau chanté dans le deuxième micro. J'utilise ici un système qui contrôle le temps de réverbération par les changements de dynamique des voix. En général, ce temps est conçu pour être relativement long : le résultat auditif est celui d'une texture changeant continuellement, et qui forme une toile de fond mouvante pour les événements chantés dans le premier micro.
La meilleure introduction à Nuits, Adieux est de lire les textes que j'ai sélectionnés pour la pièce. Nuits, Adieux est une commande de la WDR. Sa création a été donnée à Cologne le 11 mai 1991 par Electric Phoenix. La pièce est dédiée à la mémoire de ma grand-mère. »
Kaija Saariaho.
Dans l'air s'arrache de la terre au noir la lumière et la crache dans l'air la nuit rêche jusqu'aux bords des arbres dans la terre
Nuit tu es venue les lumières ont poussé sur les herbes, les pentes vidées de lumière, les lumières sont devenues sombres
dans l'herbe s'attachent de la terreau noir les grains les vagues de la lumière et les crachent dans l'herbe la nuit réelle jusqu'au bord des arbres sous la terre
Nuit, c'est cela chevelure de noir révérend la lumière n'est que pour le définir ainsi la nuit première précéda le jour
Jacques Roubaud, Échanges de la lumière
Adieu, granit, tu deviendras fleur, adieu, fleur, tu deviendras colombe ; adieu, Colombe, tu seras femme ; adieu, femme, tu seras souffrance ; adieu, homme, tu seras croyance ; adieu, vous qui serez tout amour et prière.
Honoré de Balzac : Séraphîta