Jeudi 04 août J16
On se lève aux aurores, non sans passer et repasser bruyamment à côté des tentes des affreux-jojos, ce qui dérègle le ronflement du chauffeur qui a des ratés et au moment où nous démarrons vers the Famous rando super perdue et sauvage, un des adultes, nous ayant vu préparer nos sacs-à-dos, nous demande où nous allons faire du backpacking.
Quand je lui dis que nous allons à Coyote Gulch, il nous lance un enthousiaste « We too ! »
« Very nice ! » lancé-je avec mon sourire le plus faux. Merdum ! C'est bien ce que je craignais hier en voyant leurs sacs-à-dos.
Bon, on relativise en se disant que Coyote Gulch, c'est grand et qu'avec leur remorque ils ne prévoient sans doute pas de partir comme nous du Fortymile Ridge Trailhead.
http://www.wildbackpacker.com/backpacking-trails/coyote-gulch/
Arrivés près du watertank nous prenons en stop un jeune américain qui va récupérer sa voiture au Trailhead (ils ont remonté un bout de l'Escalante river puis Coyote Gulch et sont sortis à Jacob Hamblin Arch. Je ne comprends pas pourquoi il n'est pas ensuite retourné à sa voiture car ce n'est pas beaucoup plus loin que ce watertank. Après coup nous pensons qu'ils ont préféré suivre les cairns qui mènent de JHA au watertank alors qu'il n'y en a pas pour rejoindre le 40 mile ridge TH : GPS indispensable)
Il nous explique que le lit de Coyote Gulch est très agréable et que l'on peut y marcher pieds nus dans qq cm d'eau. Il nous dit aussi qu'il y a au moins 3 sources. Cool !
Il est déjà 10h quand nous démarrons la balade.
Ne vous fiez pas aux apparences ! Marion n'est pas une enfant martyre : elle transporte les matelas, volumineux mais légers !
Après une heure de descente dans le sable mou (féchô!) nous parvenons au bord de la falaise qui surplombe la confluence de Coyote Gulch et de l'Escalante River.
Les cairns nous mènent sans problème à l'unique passage qui permet d'en descendre :
Crack in the Wall, une étroite fissure d'une quarantaine de cm par laquelle on peut se faufiler et qui mène au sommet d'une très grande dune qui plonge vers les rivières.
Le décor est grandiose et dégage une impression très forte.
Nous utilisons une corde (10 ou 15 m sont suffisants) pour descendre les sacs qui sont trop gros pour la fissure.
En descendant cette grande dune de sable mou
on espère bien pouvoir sortir comme prévu à Jacob Hamblin Arch (sortie réputée un peu acrobatique) car remonter par là ne nous dit rien du tout (il y a toutefois moyen de passer vraiment au pied de la falaise par un sentier plus ferme et ombragé une partie de la journée. Reste encore la dune au-dessus de la falaise qui doit être aussi bien toxique en fin de rando!)
On aperçoit la très massive et aérienne à la fois Stevens Arch.
Il nous faut environ 1h pour passer la fissure et arriver au fond du canyon :
on aperçoit la verdure, puis le ruisseau.
On vide les chaussures pleines de sable et tout le monde (sauf moi, j'ai la peau sensible, hé oui!) continue pieds-nus dans l'eau limpide.
Pause pique-nique à l'ombre, bienvenue car il fait très chaud.
On n'en souffre pas car on peut se rafraîchir à loisir.
Pas le moindre taon ni moustique à l'horizon, cool !
Nous arrivons bientôt à la 1ère source, difficilement exploitable pour refaire le plein (on a notre filtre au cas où)
Vers midi (soit 2h après le départ, pause pic-nic comprise) nous atteignons la 1ère cascade,
puis la 2ème source 10 minutes plus tard (d'un bon débit celle-ci, on refait le plein en prenant une douche. Ça fait du bien!)
La 2ème cascade nécessite qq acrobaties mais est négociée toujours pieds-nus.
Le paysage est varié, alternant alcôves et petite arche.
Tout le monde doit se rechausser brièvement pour la 3ème cascade (2h45 du départ dont pique-nique), à la sortie d'un chaos où se mêlent roches et branches, rien de compliqué toutefois.
Enfin (4h15 dont pique-nique et innombrables arrêts photos/vidéos) nous arrivons à Coyote Bridge.
Petit coup de pompe (bah oui on n'a pas l'habitude des sacs),
grosse sieste à l'ombre dans le sable,
et ça repart !
Il doit rester une petite heure de marche jusqu'à Jacob Hamblin Arch où nous prévoyons de camper.
Ruissellement, cette année est particulièrement humide...
Les méandres se succèdent,
4ème cascade,
alors qu'on approche du but, on commence à entendre des cris « débiles »
Je pense aussitôt à nos pieds nickelés mais non il s'agit d'une autre bande d'ados... Au moins aussi bruyante !
Pfff, le canyon résonne de cris de singes, ça glousse, ça caquette, ça siffle, ça roucoule, ça couine. On croise encore 3 personnes, « normales ». Puis encore 4 autres. La foule !
Et on aperçoit les toilettes : on est arrivé ! Il est 16h (6h de marche - pieds nus pour Fred et les enfants, pas banal, pauses comprises)
Grosse déception : j'espérais pour notre première rando en backpacking pouvoir profiter d'une atmosphère magique, perdus seuls loin de tout au fond d'un canyon du Grand Staircase National Monument et nous voilà réduits à camper près de toilettes (nécessaires évidemment vu la fréquentation mais qui cassent un peu le mythe) en supportant une bande d'ados débiles.
Le moral remonte en flèche quand le silence revient : ils sont partis, ouf ! Bon débarras !
On repère l'endroit par où l'on peut sortir du canyon (à 20 m à droite des toilettes qd on les regarde depuis le ruisseau), ça a l'air d'aller, on est confiant.
On se trouve un endroit douillet à bonne distance des toilettes pour installer les tentes (on a le choix, on est tout seul) qui - c'est pratique- se trouve juste en face de la 3ème source (d'un débit tout-à-fait correct, nous n'aurons donc pas à utiliser notre filtre. De l'Aquatabs suffira) et avec la vue sur Jacob Hamblin Arch.
On se repose un peu et je pars avec Fred un peu en amont de l'arche :
il y a une voûte gigantesque qui permet de bivouaquer à l'abri de la pluie, mais un peu loin de la source.
Pas de risque de pluie pour cette nuit : le temps est au beau fixe.
On aurait donc pu ne pas prendre les double-toits et les vestes de pluie (mais ça on ne le sait qu'après coup)
Nous avions aussi pris les bâtons de marche, absolument inutiles eux.
Ne parlons pas des pots de Nutella et de confiture (en verre!) que Fred a pris « pour le moral des troupes » (bah, c'est lui qui a porté la bouffe et les tentes : une douzaine de kg à mon avis tandis que les autres sacs ne devaient pas dépasser les 6-8 kg, eau comprise)
On avait nos sacs de couchage « habituels » beaucoup trop chauds pour la circonstance, d'autant plus que nous étions au pied d'une falaise noire qui a réfracté toute la nuit la chaleur accumulée dans la journée. On a eu trop chaud cette nuit-là (la seule du voyage en fait)
Nous poursuivons encore un peu en amont et soudain inquiète, je tends l'oreille ! Non, ce n'est pas possible ! Si! C'est eux !
Ils apparaissent au détour d'un méandre : si l'un ou l'autre des enfants a encore l'énergie de grimper partout en criant, derrière c'est la Berezina ! Chacun des adultes porte 2 sacs, ils en ont visiblement plein les pattes.
Fred va au devant d'eux : ils n'ont plus d'eau et ne soupçonnaient pas qu'ils étaient presque arrivés à Jacob Hamblin Arch. Il leur indique que la source est au prochain méandre, leur demande où ils vont bivouaquer et leur recommande d'être plus discrets que la nuit dernière.
Nous regagnons les tentes, enchantés (!) pour aller annoncer la nouvelle aux enfants. Pfff !
Finalement on n'entend plus rien : ils ont installé leur camp sous la voûte et les adultes ont sans doute un peu plus d'autorité sur des ados crevés.
Un peu plus tard, on voit arriver les adultes accompagnés d'un enfant, chargés de gourdes : ils passent devant la source sans la voir (j'te jure!).
Je vais les voir et la leur indique. Ils ont marché 7h depuis Hurricane Wash Trailhead et pensent glandouiller dans le coin 2 nuits avant de remonter par le même chemin. Les adultes ne se sont pas absentés depuis 5 min que les cris recommencent : j'en remets une couche !
Alors que la nuit tombe, on voit encore passer un groupe de 6 personnes (de jeunes adultes « normaux »)
Nuit trop chaude mais tranquille finalement (bon ils sont tout de même à plusieurs centaines de mètres)
Vendredi 05 août J17
On attaque la montée vers 6h30 : si on a le pied sûr, quelques notions basiques d'escalade, des sacs de taille raisonnable et une corde d'une dizaine de mètres, c'est tout-à-fait faisable (toutes ces conditions doivent être réunies hein!)
Il y a un pas un peu délicat pour lequel Fred a assuré l'adhérence de nos chaussures en les tenant de la main, puis nous lui avons lancé une corde (que l'on peut fixer au rocher, il en est même usé) pour l'assurer à notre tour. Sans corde ce passage est risqué.
En une demi-heure à peine nous sommes sortis du canyon.
Je trouve l'arche plus belle du dessus finalement.
Il nous faut en tout 2h pour retrouver la voiture : la rando est donc faisable en un jour puisqu'il y a en tout 8h de marche mais la fin est assez fastidieuse, on aurait eu du mal.
Impression mitigée pour cette rando finalement, principalement à cause du monde que nous y avons croisé (on ne s'y attendait vraiment pas)
Rapport effort (poids des sacs)/intérêt/ambiance pas terrible en fait. Sur les 8h de marche, seulement 4 dans le Gulch (mais la descente de Crack in the Wall vers le ruisseau est superbe!), 1ère et 2 dernières heures pas passionnantes. Attention : vu le débit somme toute modeste des sources, il n'est pas sûr qu'on les trouve lors d'un été très sec. Mieux vaut avoir un filtre.