« Décision médicale pour un autre », Jean-Pierre Graftieaux, Karine Bréhaux, Revue Ethique et Santé, Paris : Elsevier Masson, septembre 2014
« Décision médicale pour un autre », Jean-Pierre Graftieaux, Karine Bréhaux, Revue Ethique et Santé, Paris : Elsevier Masson, septembre 2014 [...]
La décision suppose la liberté : je décide parce que je suis libre. Un acte libre est un acte qui n’a besoin que de moi-même pour exister. Liberté et autonomie sont donc au cœur du débat. La décision comme acte de décider, de couper (decidare = couper) renvoie à une rupture dont je suis l’auteur, dont j’ai l’autorité et qui engage à ce titre ma responsabilité. La décision est au cœur de la pratique médicale.
La décision de soin, toujours singulière, n’est pas un acte anonyme. Ivan Illich dénonçait en son temps cette attitude impersonnelle propre qu’il définissait comme une gestion rationalisatrice de la santé. Mais qui a (aurait) le droit de décider pour un autre ? S’agit-il seulement d’un problème de droit ? Il en va au-delà des règles de déontologie d’une éthique de la responsabilité. Qui est cet autre ? Si ma conscience le constitue comme un alter in ego ce n’est pas un autre mais mon même. On reste enfermé dans un référentiel identitaire égocentré « Autrui en tant qu’Autrui n’est pas seulement un alter ego ; il est ce que je ne suis pas ». Pour Lévinas, Autrui ne se donne pas dans l’expression de son visage, il reste absolument autre, déborde (contre Husserl) la conscience qui le vise, est inassimilable. La catégorie de l’autre comme autre en soi renvoie à celle de sujet. L’autre renvoie directement au sujet humain. Une expérience modulée par les champs contextuels et existentiels où elle s’inscrit.