L'éveil aux mathématiques au préscolaire
L'éveil aux mathématiques au préscolaire
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Depuis toujours, les mathématiques suscitent émerveillement et curiosité. Présentes partout autour de nous, elles s’invitent dans la vie des enfants dès leur plus jeune âge. Comment donner à cette science une place dans le quotidien des tout-petits au préscolaire ? Et surtout, par où commencer pour leur en faire goûter le plaisir? Une simple question bien placée : « Que se passe-t-il si l'on empile ces blocs ? » ou « Comment ces formes peuvent-elles aller ensemble ? » peut déclencher une réflexion mathématique inattendue. L’éveil aux mathématiques, c’est ouvrir doucement la porte vers le monde des nombres, des formes, des grandeurs, des relations et de la résolution de problèmes.
Selon l'approche développementale, les mathématiques sont mobilisées à travers tous les domaines de développement. Bien qu'il n'y ait pas d'attentes en mathématiques à la fin du préscolaire et qu'il soit important de respecter le rythme de chacun, votre rôle en tant qu'enseignante est essentiel. L’enfant reste toutefois l'acteur principal de ses apprentissages et il importe de tenir compte de ses intérêts.
Au préscolaire, il est recommandé d'exposer les enfants à plusieurs savoirs et habiletés afin qu'ils expérimentent différents concepts mathématiques. Voici quelques exemples tirés du programme (p.50) :
Faire des prédictions (ex. : « c’est possible », « c’est impossible ») ;
Reconnaître différentes quantités et grandeurs (ex. : beaucoup, peu, autant, plus que, moins que) ;
Compter ou dénombrer des objets, mais pas nécessairement dans le bon ordre (ex. : « un, deux, quatre, dix ») ;
Réciter la comptine des nombres (« un, deux, trois, quatre… ») sans nécessairement faire le lien avec les nombres réels ;
Expérimenter des jeux de dénombrement, d’association, de classement et de logique ;
Etc.
Ces concepts ont été placés par des chercheurs dans un tableau qui présente les différentes habiletés liées aux savoirs mathématiques (St-Jean et al., 2023).
Voici un dossier avec quelques articles tirés de la revue « Vive le préscolaire » sur l'organisation des coins thématiques, ainsi que des exemples d'activités reliées à ces savoirs/habiletés, de même que des propositions d'outils d'observation pour noter la progression de vos élèves.
Le questionnement est au cœur du développement de la pensée mathématique des tout-petits. Il stimule également la réflexion et la pensée critique.
Voici quelques exemples de questions à poser à vos élèves en tout temps dans votre quotidien :
Si je change l’ordre de ces blocs, est-ce que la tour sera pareille ou différente? Pourquoi?
Que se passerait-il si l'on ajoutait un autre cube ici? Comment le sais-tu?
Comment saurais-tu lequel de ces deux contenants peut contenir le plus d’eau?
Si l'on enlève une pièce (ou un objet), qu’est-ce qui va changer?
Comment pourrais-tu tracer un chemin pour aller d’ici à là-bas ? Est-ce qu’il y a plus d’une façon pour s'y rendre?
Qu’est-ce qui est pareil et qu’est-ce qui est différent entre ces deux figures?
Montre-moi ton âge en utilisant tes mains. Peux-tu me le montrer d'une autre façon?
Montre-moi que 9 est plus grand que 5. Peux-tu me le prouver de différentes façons?
Nomme les différences et les ressemblances entre les nombres 15 et 18.
Je pense à un nombre qui est proche de 15. Quel pourrait être ce nombre?
Peux-tu trouver une autre solution ou une autre idée pour résoudre ce problème?
Utiliser des questions ouvertes en mathématiques permet aux élèves d’explorer différentes stratégies, de justifier leur démarche et de développer leur raisonnement en donnant plusieurs réponses possibles plutôt qu’une seule solution attendue. Les élèves peuvent apprendre en répondant aux questions ouvertes et l'enseignante en apprend sur ses élèves grâce à leurs réponses. Cependant, les bonnes questions ne remplacent pas l’écoute active. Cette dernière est généralement plus utile pour découvrir comment les élèves raisonnent et pour observer comment ils interagissent.
Les apprentissages en mathématique se construisent à travers des explorations concrètes et ludiques. En effet, le jeu occupe une place centrale dans le quotidien des enfants au préscolaire ; deux périodes de 45 à 60 minutes doivent y être consacrées.
Voici un tableau représentant un continuum des différents types de jeux. Il est possible de partir d'un jeu libre et de planifier un apprentissage d'un concept mathématique pour retravailler ou approfondir celui-ci avec les enfants. L'inverse est aussi vrai; le jeu dirigé peut être un beau pont vers une réutilisation d'un concept mathématique dans un jeu libre. Par exemple, la réalisation d'une soupe en dénombrant les légumes à y intégrer dans un contexte de jeu dirigé pourrait les amener à réutiliser cette notion dans un jeu libre où ils jouent au cuisinier. Le rôle de l'enseignante dans le jeu est de soutenir et encourager les enfants, ce qui aura un impact sur leurs apprentissages. Voici quelques rôles facilitateurs pour soutenir le développement des enfants.
Le jeu symbolique, aussi appelé le jeu de « faire semblant », contribue au développement de la pensée mathématique. Les apprentissages réalisés en contexte de jeu symbolique contribuent au développement d’une pensée mathématique qui permet à l’enfant de découvrir le monde qui l’entoure, en plus de résoudre une diversité de problèmes au quotidien. Par exemple, lorsque l’enfant cuisinier voit « 3 pizzas » sur la commande du serveur, il est en mesure de préparer la quantité de pizzas nécessaire. Il n’a pas besoin de voir les trois pizzas devant lui. puisqu’il reconnait que le symbole « 3 » représente une quantité. Le jeu de faire semblant devient ainsi un outil pédagogique puissant pour stimuler la pensée mathématique tout en respectant le rythme de l’enfant.
Pour aménager différents coins de jeux symboliques, rien de mieux que de s’inspirer des intérêts des enfants, puisque ce sont les premiers à profiter de ces espaces, deux fois par jour, lors des périodes de jeux libres. Ils pourraient par exemple être enrichis de matériel de manipulation sensoriel et concret (une balance, des pompons, un pot, des petites figurines, des figures géométriques, dés, dominos, etc.), permettant aux enfants d'expérimenter et de manipuler physiquement des objets pour mieux comprendre des concepts abstraits. Pourquoi ne pas faire participer les enfants à la création de celui-ci ? Il serait même intéressant d'exploiter un coin sur le thème... des mathématiques !
La causerie mathématique, planifiée ou spontanée, peut s’instaurer dès le préscolaire pour développer le raisonnement, valoriser le droit à l’erreur et enrichir la pensée des élèves. Les déclencheurs sont infinis! Son fonctionnement est le suivant :
D’abord, l’enseignant présente un déclencheur sous la forme d'un ou plusieurs objets, d’une image ou d’une photo. Au préscolaire, nous privilégions les objets concrets, davantage réels et facilement manipulables par les élèves. Par exemple, faire lever quatre élèves, de grandeurs différentes, en demandant aux autres élèves ce qu'ils observent par rapport à leur grandeur respective (ex. le plus petit, le plus grand).
L’enseignant laisse environ une trentaine de secondes aux élèves pour réfléchir, sans toutefois nommer les stratégies utilisées pour trouver la réponse à voix haute.
Ensuite, l’enseignant laisse environ deux minutes aux élèves pour qu’ils partagent, en dyade, leurs différentes solutions et stratégies utilisées. On peut convenir d'un petit signe discret avec les doigts afin que les élèves nous montrent combien d'idées ou de stratégies ils ont trouvées à la suite de la présentation du déclencheur.
Finalement, l’enseignant anime une discussion de groupe dans laquelle il demande aux élèves de partager leurs stratégies en insistant sur le processus et non seulement sur le résultat obtenu. Un élève pourrait par exemple dire au reste du groupe qu'une stratégie pour trouver l'élève le plus petit serait de les placer en ordre de grandeur, du plus petit au plus grand. Un autre élève pourrait suggérer que les élèves se couchent par terre pour les mesurer avec une unité de mesure non conventionnelle.
Voici des idées de questions que vous pourriez poser aux élèves pour faire ressortir les stratégies utilisées :
À quoi cela te fait-il penser?
Que vois-tu?
Que veux-tu dire par... ?
Comment le sais-tu?
Est-ce que quelqu’un a utilisé une stratégie semblable? Différente?
Les réseaux sociaux regorgent d'idées de causeries mathématiques au préscolaire. Un livre intitulé Les causeries mathématiques, paru en 2023, propose quelques déclencheurs pour le préscolaire. L'article paru dans l'édition été 2023 de la revue « Vive le préscolaire » aborde également la causerie, notamment celle en mathématique.
La littérature jeunesse est un outil précieux pour introduire les savoirs mathématiques au préscolaire. Grâce à des histoires, les tout-petits peuvent être immergés dans un univers mathématique riche. L’utilisation des albums jeunesse permet de travailler plusieurs habiletés, comme le comptage, la reconnaissance des formes, la comparaison des grandeurs, ou encore l’exploration des séquences et des relations logiques. Nul besoin de chercher un livre spécifique sur un savoir mathématique précis, un livre sans contexte mathématique peut contenir une multitude d'idées à exploiter avec les élèves !
Voici des exemples concrets :
Les nombres
Compter les personnages ou les objets dans une illustration : « Combien de souris se cachent dans la maison? ».
Comparer des quantités : « Qui a le plus de pommes, le renard ou le lapin? ».
Ajouter/retirer à partir de l’histoire : « Si l’oiseau donne 2 graines à son ami, combien en reste-t-il? ».
Les formes géométriques
Repérer les formes dans les illustrations : « Combien de triangles vois-tu dans cette image? ».
Associer forme et objet : « Quelle forme ressemble au ballon de l’histoire? ».
Construire avec des formes après la lecture : reproduire une maison, un bateau ou un personnage avec des blocs géométriques.
Le voyage / les déplacements
Tracer un trajet : « Par où le personnage doit-il passer pour arriver chez sa grand-mère? ».
Se repérer dans l’espace : « Est-ce que la tortue est devant ou derrière le camion? ».
Mesurer une distance avec des pas ou des cubes : « Quelle route est la plus longue? ».
Les grandeurs et mesures
Comparer des tailles : « Qui est le plus grand : le géant ou l’ours? ».
Ordonner des objets (petit, moyen, grand) à partir d’illustrations.
Estimer puis vérifier : « Penses-tu que le panier peut contenir toutes les pommes? ».
Les régularités
Observer les motifs dans les images : « Quelle couleur vient après dans la suite de fleurs? ».
Créer une suite avec des éléments de l’histoire (ex. : rouge, bleu, rouge, bleu…).
Les problèmes à résoudre (adaptés)
Situations issues de l’histoire : « Le lapin a 3 carottes et il veut en partager avec ses 2 amis. Comment peut-il faire? ».
Deux articles tirés de la revue « Vive le préscolaire » proposent des albums jeunesse et des activités qui y sont reliées pour faire émerger les savoirs mathématiques.
Explorer les mathématiques par la résolution de problèmes est une approche motivante pour initier les enfants du préscolaire à la pensée mathématique et l'appropriation de savoirs. Comme nous rencontrons des problèmes chaque jour, pourquoi ne pas utiliser des situations réelles pour les amener à réfléchir ? Van de Walle et Lovin (2007) soulignent que les problèmes stimulent l’attention, l’intérêt et la confiance des enfants en leurs capacités mathématiques.
Un coin de jeu symbolique peut devenir un contexte riche. Par exemple, transformer l’espace vert de la cour en jardin communautaire où les enfants doivent déterminer le nombre de semences nécessaires pour remplir des pots amène les enfants à se questionner. L'enseignante propose de compter, organiser, dessiner ou photographier cet espace pour les aider à trouver une solution.
Les conflits sont aussi des occasions d’apprendre . Par exemple, deux enfants veulent jouer à la clinique vétérinaire ? L’enseignante propose un tirage à pile ou face, ce qui amène à discuter de probabilité, à faire des prédictions, à tester et à organiser les observations.
Enfin, toute situation peut devenir un problème à résoudre . Par exemple, un jeu placé trop haut empêche deux élèves de l'utiliser. En utilisant le questionnement, l'enseignante propose de planifier des actions pour l’atteindre. La démarche de la résolution de problèmes en mathématique est très semblable à celle de la résolution de problèmes de la vie quotidienne alors... place à l'imagination pour créer des situations où l'enfant devra spontanément trouver des solutions!
Source : Les mathématiques au préscolaire et au primaire, un défi à taille humaine!,
Voici un ouvrage abordant quelques fondements didactiques sur l'enseignement, l'apprentissage et les progressions développementales spécifiques aux savoirs mathématiques. Il propose des activités pour le préscolaire et le 1er cycle du primaire. On y aborde notamment les contextes de jeu, l’évaluation et l’inclusion.
Les causeries mathématiques représentent une ressource inestimable pour dynamiser l'enseignement des mathématiques, un incontournable au préscolaire. Elles favorisent l’intérêt et l’engagement des élèves, en plus de susciter de belles réflexions (que vous n'auriez peut-être pas anticipées). Dans cet ouvrage, une quinzaine de causeries sont proposées pour le préscolaire.