TOMMASO FRANCHI: Qui êtes-vous?
ROBERTA VALLA: Je m'appelle Roberta Valla. J'habite à Travo. Je suis adjointe au maire de Travo, déléguée au tourisme et à la culture. Je m'occupe aussi du bilan parce que dans les petites communes comme la nôtre, il n'y a pas beaucoup d'adjoints et donc, à part les dossiers gérés par le maire directement, les autres sont distribués parmi les autres adjoints. A Travo, nous sommes deux. Je m'occupe de ce dont je t'ai parlé et l'autre adjoint s'occupe des travaux publics, des rapports avec les autres petits villages environnants (‘frazioni’) et de l'environnement. Toi aussi, tu vas toujours à Travo le mercredi. Qu'est-ce que tu vas y faire?
TOMMASO FRANCHI: Je vais à la bibliothèque, pour le projet ‘Bookbox’.
ROBERTA VALLA: C'est pour ça que je t'avais déjà vu. Tu aimes aller à la bibliothèque, au Bookbox?
TOMMASO FRANCHI: Oui!
MARIO BERTUZZI: Bonjour Roberta Valla. Bienvenue à l'Istituto Tecnico Commerciale San Colombano de Bobbio. Je suis Mario Bertuzzi et voici mes camarades Jessica Nobili et Matteo Vardelli. Nous aimerions vous poser quelques questions en tant que représentants de la classe 4^ AFM de l’ITC San Colombano, avec laquelle nous sommes impliqués dans un projet sur le thème du marketing territorial, qui s'intitule «Un plongeon dans la Trebbia. La promotion touristique du territoire de Bobbio et de la haute vallée de la Trebbia à destination des touristes francophones».
MATTEO VARDELLI: Tout d'abord, qui est le touriste-type qui arrive à Travo?
ROBERTA VALLA: A Travo, à part les touristes, que nous considérons touristes mais qui sont ceux qui occupent les maisons secondaires et qui font doubler ou tripler les habitants du village pendant les vacances d'été, il y a tous les types possibles de touristes, ceux qui viennent faire des excursions, des randonnées, du vélo, et ceux qui sont intéressés par les aspects culturels.
Avec le GAL, nous avons créé une table ronde du tourisme dans notre territoire. Chaque vallée avait un thème, le nôtre concernait la culture. En premier lieu parce que la ville de Bobbio, sur le plan culturel, est la reine de la Vallée de la Trebbia, mais aussi parce que culturellement, à Travo, nous avons beaucoup de choses à proposer. Je ne sais pas si vous avez entendu parler du Parc archéologique néolithique, qui est un des plus importants sites de ce genre de l'Italie du nord. Et donc je pense que le tourisme, même le tourisme de niche, comme celui qui suit l'archéologie, est pour nous une valeur ajoutée.
De plus, nous avons toutes les églises, parce que notre territoire, toute la vallée, appartient au diocèse de Piacenza et Bobbio, et, par le passé, au Moyen-âge, il y avait évidemment des châteaux, des familles nobles, comme celles des Malaspina et des Anguissola, mais le pilier le plus important, c'était l'église. Et en effet nous avons beaucoup de petits villages avec de très belles petites églises, à redécouvrir.
JESSICA NOBILI: Est-ce que c'est un tourisme saisonnier? Il y a une grande différence entre été et hiver dans les flux qui arrivent vers Travo? Comment faire pour rendre les flux plus homogènes durant l'année?
ROBERTA VALLA: Notre tourisme est surtout estival. Ces dernières années, nous avons vécu grâce au tourisme généré par la rivière Trebbia. Mais nous devons nous poser la question, notamment ceux qui administrent et veulent promouvoir le tourisme, de savoir jusqu'à quand le Trebbia sera une ressource pour nous. Parce que, comme vous pouvez le voir, les changements climatiques réduisent énormément la portée de l'eau du fleuve. Et donc nous avons l'obligation de chercher et de trouver une stratégie différente, une stratégie qui puisse apporter une autre forme de tourisme. Et donc nous devons investir sur les services, principalement pour les jeunes, mais aussi sur les services en récupérant, en améliorant les infrastructures, parce que ce sont les routes qui permettent au touriste de venir dans nos vallées plus facilement, en récupérant tous les sentiers. Après le Covid nous avons vu ce grand afflux de touristes qui voulaient rester en plein air. Je me rappelle que, après le Covid, quand nous avons pu sortir, je suis allée sur la Pietra Parcellara et j'ai eu l'impression d'être à Rimini! Il y avait plein de monde. Un peu grâce à la forte promotion de ce qu'on cherche à faire maintenant: faire connaître nos zones en dehors de nos frontières provinciales et régionales, mais aussi parce que je pense que depuis le Covid, nous voulons nous approprier ces espaces extérieurs.
Et donc investir sur les infrastructures, sur les services, parce que nous avons des beautés naturelles, pour faire venir les gens sur notre territoire, pas seulement en été, parce que les excursions en vélo, tu peux les faire en hiver aussi, et donc chercher à attirer les personnes, les faire venir nous visiter même hors saison.
Parce que le tourisme, comme me le disait un adjoint régional, n'est pas tourisme s'il ne génère pas de l'économie. Nous ne voulons pas un tourisme de masse qui vient ici pour détruire, nous voulons un tourisme de qualité, qui apporte de la richesse, parce que si tu viens, tu vas dans un bar, au restaurant, et tu permets de créer une économie dans notre village. Et c'est pour ça que vous, qui êtes des étudiants, je pense que c'est très important pour vous d'évaluer la possibilité de travailler dans le tourisme dans le futur, parce que notre territoire n'offre pas beaucoup d'opportunités de travail. Vous le savez très bien, ici à Bobbio, vous avez l’entreprise Gamma, mais nous n'avons pas d'autres entreprises fortes qui peuvent embaucher beaucoup de monde.
Faire venir les gens sur le territoire pour créer de la richesse, mais aussi investir sur le territoire avec le travail. Et le fait d'arriver à faire du marketing, de la promotion, c'est un travail. C'est un travail qui vous permettrait de rester vivre ici.
Evidemment, les administrations locales doivent améliorer les infrastructures. Maintenant on est en train de mettre la fibre optique pour permettre à tous de travailler plus vite depuis chez soi. Il y a l'opportunité d' investir dans le territoire et nous devons y croire.
Les jeunes qui gèrent chez nous le parc archéologique font partie d'une start-up de Parme. Ce sont des jeunes qui avaient commencé à travailler dans la culture, comme association. En voyant leurs résultats, ils ont compris que ça pouvait devenir un travail. Et ils ont beaucoup progressé parce qu'ils s'occupent des musées de la gastronomie de Parme, du parc archéologique néolithique de Travo et aussi d’un parc qu'il y a dans la zone de Reggio Emilia.
Et donc l'opportunité de travail, ce n'est pas seulement derrière un bureau. Nous devons réinventer le futur justement pour le travail, parce que si vous réussissez à rester ici, la vallée ne se dépeuple pas et c'est mieux pour tout le monde, pas seulement pour nous qui y vivons.
MARIO BERTUZZI: Pour essayer de se faire une idée du chiffre, vous avez des données à disposition sur combien de touristes sont venus à Travo en 2022? Observe-t-on une augmentation après la période du Covid?
ROBERTA VALLA: Je n'ai pas de données sûres. Ce qui est certain, c'est qu'après le Covi, ça a beaucoup augmenté. Je pense qu'au-delà du Covid, nous essayons ici à Travo, avec beaucoup d'efforts, d'investir également sur les évènements, et surtout sur la récupération des sentiers de randonnée. C'est un projet que nous mettrons dans le plan d'urbanisme général (PUG). La réunion est prévue pour la semaine prochaine. Parce que, comme je le disais, nous n'en avons pas beaucoup, de données statistiques. Nous savons qu'en été la population triple, voir quadruple, mais ce que nous savons, c'est que nous avons une grande visibilité de l'extérieur. Je ne sais pas si l'un d'entre vous a déjà utilisé Google Trend pour voir combien de personnes visitent tel ou tel site. On choisit Travo, ou Bobbio, par exemple, et on peut voir sur un graphique combien de fois notre site est visité. Le Val Trebbia est vu de toute l'Italie et bien au-delà.
MATTEO VARDELLI: En parlant avec un interlocuteur du GAL del Ducato, nous avons appris qu'un des grands problèmes du tourisme de la Vallée de la Trebbia, à part les infrastructures, est l'absence de structures d'hébergement. A Travo quelle est la situation à cet égard?
ROBERTA VALLA: Comme dans toute la vallée, nous n'avons pas beaucoup de structures d'hébergement. A part Bobbio, qui est un peu plus active, la vallée se base sur quelques gîtes ruraux, bed and breakfast ou chambres d'hôtes. Mais les choses sont en train de bouger grâce à la promo-commercialisation faite aussi par les autres organismes, il y a de l'intérêt envers nos territoires. Je sais qu'au printemps, deux nouvelles chambres d'hôtes seront disponibles aussi à Travo. C'est ‘un chien qui se mord la queue’ parce que si quelqu'un vient investir sur notre territoire et sait que les chiffres sont positifs, alors il investit sans problèmes. Si les chiffres sont bas, c'est difficile car c'est un risque pour l'entreprise.
JESSICA NOBILI: Si on pense à l'attractivité touristique de Travo, comment est-ce que vous pourriez la décrire en 5 mots?
ROBERTA VALLA: Culture, évènements, oenogastronomie, archéologie.
Dans l'oenologie, bien que toute la vallée offre plus ou moins les mêmes produits, on voit à Travo de plus en plus d'attention envers les vins biologiques et naturels. Nous avons des producteurs de vins biologiques qui vendent souvent au Japon, parce que là-bas ces vins sont très recherchés. Nous avons à Travo un japonais qui est venu planter des vignes pour les cultiver de façon naturelle, comme nous le faisons ici.
Et nous avons aussi un important entrepreneur originaire du département lombard de Lodi, Polenghi, de San Rocco al Porto (LO), qui a implanté une citronneraie expérimentale, en collaboration avec l'université, et qui produit un citron local du Val Trebbia. Ce serait bien pour les écoles de visiter cette citronneraie. On peut y voir également toutes les plantes de citron du monde entier. Ils essaient de créer ce qui pourrait être la culture du futur sur notre territoire. Vous pouvez voir qu'il y a beaucoup d'investissements sur les olives, mais aussi sur le citron.
Cet entrepreneur a fait une très belle chose: pendant la pandémie, comme nous étions tous obligés de rester à la maison, il a essayé avec son beau-frère, de créer un cocktail avec le citron de Fiorano. Et comme il croit beaucoup en notre territoire, il a décidé de vendre ce cocktail, qui s'appelle Fiorano, uniquement dans les bars de Travo. Il aurait pu le commercialiser dans le monde entier, comme pour le reste de ses articles, mais il a choisi de faire ce produit juste pour valoriser Travo. Polenghi a démontré une forte attention pour le territoire. Travo doit apprendre à l'exploiter pour pouvoir ensuite l'exporter même dans les zones voisines. Mais c'est un choix que j'ai apprécié énormément.
MARIO BERTUZZI: Comment est-ce que vous voyez le tourisme à Travo dans 5 ans? Quelles stratégies pensez-vous développer, dans un court – moyen terme? A travers quelles ressources, ou avec quelles synergies et collaborations?
ROBERTA VALLA: C'est une question un peu difficile. Depuis des années nous investissons sur les évènements culturels. Ce qui nous a permis de nous faire connaître également en dehors de Travo. Nous continuerons donc sur cette ligne parce que nous y croyons.
Ça n'a pas été facile parce que les petites communes ont peu de ressources. Nous ne pouvons pas faire appel à d'autres sociétés pour promouvoir et organiser ces évènements, nous devons le faire par nous mêmes.
Nous arrivons à organiser - avec difficulté - environ une cinquantaine d'évènements pendant l'été. De début juillet jusqu’à fin août, pratiquement tous les jours, nous sommes sur la place du village avec mon collaborateur de la Mairie.
Toujours pour faire connaître notre territoire, une autre chose que nous avons essayé de faire, c'est d'organiser des petits évènements dans les villages, sur les parvis des églises un peu éloignées.
On devrait voir les résultats de nos efforts d'ici 5 ans, même si je pense que 5 ans c'est un peu court. Ce type d'efforts donne des résultats sur le long terme.
Je pense aussi que Destinazione Turistica Emilia fait un bon travail au niveau de la promo-commercialisation du territoire. Je pense que la vallée de la Trebbia, qui a longtemps agi sournoisement sur la promotion touristique, en profitera sûrement.
Destinazione Turistica Emilia est un organisme qui est né en 2017. C'est un organisme qui couvre un vaste territoire.
Avant le redimensionnement des départements, la culture et le tourisme étaient gérés au niveau provincial. Tous les petits villages, comme le nôtre, étaient suivis par des fonctionnaires et des adjoints départementaux, qui faisaient une programmation dans le temps.
Avec la fermeture des provinces, il y a eu un vide normatif jusqu'au moment où la région a institué cet organisme. Chaque commune a dû se débrouiller toute sele, et toutes n'en avaient pas les moyens.
Bobbio a progressé parce qu'elle a eu la chance d'avoir une personnalité comme Bellocchio. Et parce que cette commune a toujours investi beaucoup sur le tourisme et sur la culture.
Travo le fait maintenant, mais les autres petits villages comme Zerba, Cerignale, Corte Brugnatella, Coli, ont plus de mal à investir sur ces sujets.
Cet organisme est très important, même si au début ce n'était pas évident. Maintenant nous voyons des résultats, parce qu'il est présent à toutes les expositions internationales avec le brand de Destinazione Turistica Emilia, qui inclut Reggio Emilia, Parme et Plaisance. Pour faire comprendre que nous avons autant, sinon plus, à offrir que la rivière adriatique en Romagne.
MATTEO VARDELLI: Est-ce qu'il y a une collaboration, une synergie, entre les organismes locaux et/ou les différents niveaux administratifs, pour augmenter la capacité d'attraction de l'accueil touristique dans la haute Vallée de la Trebbia?
ROBERTA VALLA: J'ai en partie répondu lors de la question précédente.
Maintenant nous avons Destinazione Turistica Emilia, mais aussi l'apport du GAL del Ducato.
Le GAL signifie Groupe d'Action Locale. Ce sont des regroupements nés pour augmenter le développement des zones rurales.
Ils ont compris que pour augmenter ce développement il faut s'occuper aussi du tourisme, parce que ici l'agriculture s'appauvrit terriblement.
Et donc faire venir des gens pour investir même dans l’accueil touristique sous forme de gîtes ruraux. Des gens qui viennent investir pour faire revivre de l'agriculture, ça peut aider le tourisme aussi.
Et puis, je ne sais pas si vous connaissez, il y a des portails sur la Toile, comme Val Trebbia Experience, Travo Le Pietre, qui sont des portails très vus à l'étranger, ce qui nous aide beaucoup.
J'ouvre une parenthèse, Val Trebbia Experience, que je ne cherche pas à promouvoir parce que je n'y ai pas d'intérêts, a travaillé gratuitement pour le territoire, sans jamais rien demander à l'administration publique. Probablement parce que celui qui gère le portail a à cœur de promouvoir la vallée.
Et puis, toujours pour promouvoir tout ce que nous faisons, nous avons la page facebook, la page instagram.
MARIO BERTUZZI: Est-ce que la rivière Trebbia, et plus généralement les éléments naturels et paysagistes autour de celle-ci, représentent une ressource pour le tourisme à Travo et dans la vallée? Si oui, dans quelle mesure?
ROBERTA VALLA: Certainement, comme je l'ai dit. L'aspect culturel est le plus connu. Bobbio, ayant remporté le prix «borgo dei borghi», a désormais eu une résonance dans le monde entier et a sûrement servi de moteur pour la vallée entière. Mais tout le monde nous envie nos paysages. Je ne veux pas me répéter mais, si Hemingway a dit avoir traversé une des plus belles vallées au monde, ça doit vouloir dire quelque chose.
Mais comme je l'ai déjà dit, je ne sais pas pour combien de temps encore le fleuve Trebbia pourra être une ressource dans le futur. Et puis, nous avons d'autres merveilles naturelles. La Pietra Parcellara et la Pietra Perduca, oar exemple, sont les sites les plus vus sur internet.
JESSICA NOBILI: Au niveau oenogastronomique, est-ce qu'il y a des produits qui pourraient servir de multiplicateurs pour l'attractivité touristique de Travo?
ROBERTA VALLA: Comme je l'ai dit, le vin. C'est vrai que nous avons besoin d'une plus grande synergie. Il faut créer un réseau pour promouvoir le tourisme. C'est un défaut de notre vallée que de se recentrer sur soi-même. Un touriste peut visiter Bobbio en une journée. Par contre, si nous lui proposons Bobbio, Travo, le parc archéologique, un parcours d'excursion ou de randonnée, la visite des caves avec dégustation de vin - dans la partie plus haute, comme Zerba - le Giro del Postino, le Val Boreca... alors ce touriste peut rester même une semaine. Un tourisme plus sédentaire pourrait encourager les personnes à investir sur les structures d'accueil, les petits hôtels, les pensions, les Bed & breakfast etc.
MATTEO VARDELLI: Quels instruments de communication et de marketing utilisez-vous pour la promotion touristique de Travo?
ROBERTA VALLA: Pour le marketing, nous avons adhéré, comme tous les villages des Apennins, à Natural Valley, qui a repris à fonctionner depuis un an. Nous verrons les résultats plus tard, mais cette marque cherche à promouvoir les produits du territoire. Avec facebook, et les autres portails qui aident beaucoup. Mais surtout avec les organismes supérieurs qui ont compris qu'il faut promouvoir notre territoire.
MARIO BERTUZZI: Notre projet veut explorer les exigences de ceux qui s'occupent du tourisme dans la haute Vallée de la Trebbia, en se focalisant tout spécialement sur les visiteurs francophones. Que pouvez-vous nous dire à ce propos? Avez-vous des statistiques, ou plus simplement des anecdotes, pour nous permettre d'avoir une idée sur la population touristique internationale qui vient dans notre vallée?
ROBERTA VALLA: A ce jour, malheureusement, il n'y en a pas beaucoup. Mais Destinazione Turistica Emilia joue ce rôle, pour porter notre territoire sur les expositions et les salons à l'étranger. Des touristes francophones, c'est-à-dire des touristes français, dans notre zone, il y en a probablement un peu moins que dans le Val Nure. Ce sont des touristes qui reviennent pour les vacances, parce qu'il s'agit de l'émigration du vingtième siècle, ceux qui sont partis en France.
Hier soir, puisque je savais que j’allais vous rencontrer, j'ai parlé à un opérateur touristique qui m'a dit que dans notre zone, à Travo et dans le Val Trebbia, le touriste français représente environ 2% de l'afflux des touristes qui viennent normalement. Ce n'est pas beaucoup, mais petit à petit...
JESSICA NOBILI: En tant que commune de Travo, vous avez des demandes spécifiques de produits promotionnels et publicitaires qui pourraient contribuer à promouvoir les richesses de notre territoire, en particulier auprès d'un public de langue française?
ROBERTA VALLA: Toutes les associations de catégorie le disent, ce serait de faire une formation sur la langue. Dans notre village, quand tu vas dans un hôtel, il est très difficile de trouver quelqu'un qui parle anglais, et encore moins le français. A moins d'avoir de la famille qui vit en France et d'y être habitué. Sinon le niveau est scolaire.
Probablement les employés de l’office du tourisme (IAT) connaissent quelques langues étrangères.
A Bobbio nous avons mis des bornes qui permettent avec un programme multilingue de donner des informations dans toutes les langues.
Mais je pense qu'il est important d'investir sur la formation des opérateurs commerciaux, sur l'utilisation de la langue. Parce que si nous voulons accueillir des touristes étrangers, il faut apprendre à utiliser les langues étrangères. A l'étranger les gens savent parler l'italien, même si c'est une langue de niche. Nous, nous n'en sommes pas capables.
ANDREA ALESSANDRINI: Vous avez parlé d'investissement sur la culture. Quels sont les événements ou les manifestations les plus attractifs?
ROBERTA VALLA: Nous avons institué, depuis 2010, un concours littéraire dédié à Gianna Anguissola. Votre génération ne la connait peut-être pas, mais c'étaient les livres que toutes les petites filles de ma génération lisaient. Priscilla, Violetta... C'était vraiment une des écrivaines les plus connues des années 1900. Gianna Anguissola venait de Piacenza, non de Travo, mais elle a beaucoup aimé Travo. Elle y a passé beaucoup d'étés. Son fils avait des problèmes de santé, elle a donc passé de longues périodes à Travo, et ici elle a composé beaucoup de ses œuvres.
C'est pour cela que nous avons pensé de lui intituler le concours littéraire. Un peu pour promouvoir la culture et la lecture, car il est très important de lire. Lire te permet de mieux dialoguer, d'avoir une meilleure dialectique quand tu t'adresses aux autres personnes.
Le fait d’intituler le concours à Gianna, c'est pour nous du marketing, parce qu' en investissant sur le personnage, nous cherchons à faire reconnaître Travo. Et ça me donne une grande satisfaction, parce que, depuis que nous investissons sur Gianna Anguissola, nous avons rencontré des personnes qui, à Rome, s'occupent de ses œuvres. Nous avons invité des auteurs, dans nos soirées littéraires (nous invitons des auteurs, des commentateurs, des journalistes italiens) , qui sont venus à Travo justement parce qu'ils aiment ses livres.
Donc, promouvoir la culture, c’est faire en même temps du marketing.
Pour les plus jeunes, nous avons le festival Travo Balafolk, qui a lieu à l'intérieur du parc archéologique, avec la coopérative Fedro, qui fait venir des artistes d'une certaine carrure internationale. Par exemple, l'année dernière nous avons eu Max Gazzè, il y a 2 ans, Arisa. Nous avons eu Davide Van De Sfroos.
Et donc nous investissons sur ces événements pour essayer de faire connaître Travo et son parc, en utilisant aussi l'instrument qui est la musique.
Et il y a aussi un autre festival. C'est un festival qui me tient beaucoup à cœur parce que, quand on me l'a proposé, j'ai cherché à impliquer toutes les communes, et toutes les communes de la vallée y ont participé. Ça s'appelle «Note in valle, sapori sonori del Trebbia». Nous en sommes à la quatrième édition et c'est une manifestation qui grandit. Le directeur artistique est Serafino Tedesi qui a joué avec les Spandau Ballet. Vous ne les connaissez probablement pas, mais c'est un groupe qui était très connu dans les années 90. A chaque fois que leur chanteur, Peter Hadley, vient en Italie, il insiste pour le rencontrer. Serafino est donc un personnage d'un certain niveau musical, et en tant que directeur artistique de ce festival, il essaie d'inviter de très bons artistes, pas forcément très connus, mais qui savent promouvoir la musique contaminée, comme il le dit lui-même. Il invite également des artistes de musique classique.
Ce qui est bien, c'est que nous l'avons fait en réseau, avec toutes les communes.
A Zerba aussi, il y a un spectacle. A Cerignale aussi. Depuis Cerignale jusqu'à la partie la plus haute de la vallée.
L'idée était d'apporter la culture, en l'utilisant comme un instrument touristique. Nous pouvons promouvoir la vallée si nous travaillons tous ensemble. Ce sera votre devoir dans le futur. J'espère que l'un d'entre vous dans le futur aura l'ambition d'essayer d'administrer son village.
Travo, Bobbio, rien à voir avec Milan, mais pour aider sa communauté, l'administrateur public doit se mettre au service des gens. Et s' il y croit et le fait avec passion, il aura quelques résultats.
C'est une très belle expérience, avec pas mal de difficultés et peu de compréhension de ce qui est en face de vous.
Si jamais l'un d'entre-vous en avait envie, je vous invite à essayer. Quel âge avez-vous? 17/18 , à 18 ans vous pouvez déjà donner votre disponibilité pour commencer tout doucement comme conseiller municipal. J'ai commencé plus tard, après mes 30 ans et ça m'attriste de ne pas l'avoir fait plus tôt, quand on est jeune on a plus d'idées, on regarde plus vers le futur.