Comme nous l'avons mentionné en introduction, il est nécessaire de réfléchir qu'est-ce que j'attends de ce changement.
Même si plusieurs plus-values sont à attendre (et plusieurs difficultés inhérentes à ces changements), il est conseillé de se centrer sur un élément. Est-ce que j'attends de mes élèves qu'ils collaborent, qu'ils soient plus autonomes, qu'ils augmentent leur sentiment d'efficacité personnel…?
Ainsi, il sera plus facile de mettre en place les éléments par petites touches. Pour ma part, je commence souvent avec des défis sous forme papier avant d'utiliser le numérique, car c'est l'échange autour de ces défis qui est important. Je démarre donc des leçons de la manière qu'ils connaissent. Avec un cours dialogué, d'abord en frontal avec des explications, puis des exercices qu'ils réalisent seuls ou à deux.
Lorsque je vois qu'un élève est en avance et semble avoir compris, je lui donne la fiche de défi et notifie à la classe que cet élève est devenu expert, car il a réussi le défi. La classe peut s'appuyer sur lui en cas de questions. Il est le 2e prof.
Je compte alors sur l'effet boule de neige puisque d'autres vont déclarer qu'ils savent aussi et veulent essayer le défi. Je donne alors un ou deux défis qui vont m'être retournés. A ce moment, je déclare que c'est l'expert qui va les corriger. Je jette un oeil sur les échanges et interviens au besoin pour guider ce travail. On va ensuite déclarer les nouveaux experts ou je rassurerai le duo s'il y a des éléments à corriger.
Rapidement, la question arrive de savoir à quel moment l'expert peut valider. S'il y a une erreur, trois erreurs? Je renvoie donc à la réflexion "penses-tu qu'il a compris et maîtrise la compétence". Si le doute persiste, je propose que l'expert interroge sur une ou deux questions supplémentaires qu'il va ajouter au défi (ou par oral).
Une fois qu'il y a quelques experts et même quelques compétences, je prends une leçon pour inscrire tout le monde sur la communauté que j'ai préalablement créé sur Sqily. Je m'assure d'avoir assez de matériel pour tout le monde et d'avoir accès à un email. Je crée toujours une première compétence "S'orienter dans la communauté" qui contiendra les règles et chartes ainsi que quelques exercices pour modifier la photo de profil. Lors de cette séance, l'objectif est d'ajouter tous les élèves (parfois il va en manquer tout de même) et qu'ils aient validé cette 1re compétence (souvent en autovalidation, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de défi). Les plus avancés aident les autres et peuvent également mettre à jour les tâches et compétences qu'ils ont déjà réalisées.
Par la suite, je m'arrange pour avoir toujours quelques appareils (tablettes, ordinateurs, voire téléphones). Dans l'idéal, un pour trois élèves est suffisant pour gérer les tâches au fur et à mesure. Car, ils trouveront non seulement leurs compétences, mais aussi des documents d'aide et un plan sous forme de tâches (la liste des exercices proposés).
Cette projection est à long terme. J'envisage plusieurs semaines (voire plusieurs mois suivant l'âge) avant que les habitudes soient prises et que l'autonomie soit suffisante pour que les experts jouent leur rôle. Parfois, certains rentrent très vite et d'autres peinent. L'objectif est toujours au niveau de la classe. Et lorsque tout est en place, l'autonomie et la confiance permettent d'avoir des groupes qui s'auto-organisent parfois dans des lieux différents.
Un autre élément que j'aime bien lorsqu'il y a des élèves vraiment en avance est de leur demander de créer leur propre défi. Ça leur demande de retourner le concept pour poser les questions d'après les réponses attendues et la compétence travaillée.
Une année, j'ai même donné une communauté vide et demandé aux élèves de créer le contenu. Les attentes n'étaient donc pas les mêmes que pour une communauté plus structurée. Et la préparation non plus.
Actuellement, nous sommes en collaboration avec plusieurs collègues (vraiment bénéfique pour tous les aspects). Et nous avons décidé d'ouvrir certaines classes (décloisonnement) en utilisant des tableaux blancs en fond de classe pour que les élèves puissent se lever et avoir un espace de collaboration plus grand.
Ainsi, en fonction de la durée, du curriculum (et de la discipline), du matériel à disposition, de l'autonomie des élèves, des soutiens dans l'école, etc., votre projet peut varier dans son usage des artéfacts et de la configuration de classe. Ces éléments sont à planifier (en restant bien sûr évolutifs).
Nous verrons dans la planification, que le gros du travail de l'enseignant et de créer le contenu (et faire comprendre le changement aux élèves). Cette préparation et le démarrage sont capitaux pour votre réussite.
Être une équipe a plusieurs avantages. Celle de se soutenir dans la réflexion, répartir les tâches de créations et partager ensuite ses expériences. Il est donc conseillé de se lancer à plusieurs. Un duo d'enseignants ou un petit groupe qui a les mêmes intentions pédagogiques pour mieux faire face aux éventuelles difficultés rencontrées.
Si l'équipe travaille dans le même établissement, dans un cadre identique (même classe, même niveau, etc.), c'est autant un avantage. Mais bien sûr qu'il est possible de se lancer seul. Et peut-être pourrez-vous trouver sur Sqily des communautés qui partagent contenu et expérience.