no 21 à 40

 21.   Luisa se plie de bonne grâce aux souffrances et aux dénégations lui venant des prêtres. Durant l'épidémie de choléra, Jésus rend public son rôle de victime.    Audio

Oh! comme j'ai été méchante et comme je le suis encore, puisque je ressens encore vivement en moi les accusations que je ne suis qu'une âme capricieuse et désobéissante! Je pense en effet que la raison profonde de mes sentiments est que mes pensées et mon agir sont très différents de ceux de mon aimable Jésus. Toute sa Vie, il fut un signe de contradiction sur tous les plans. Cependant, il n'a jamais eu le moindre ressentiment. Il n'était jamais dérangé et, dans un grand calme, il supportait insulte après insulte et affront après affront.

Moi, j'ai honte de le dire, j'ai très souvent pleuré et  je me suis souvent plainte à mon très doux Jésus — au point même d'éprouver de la résistance envers lui —, pour qu'il ne me soumette pas à de si sévères souffrances ou qu'on ne m'accuse pas injustement d'être désobéissante et capricieuse. Oh! comme le Seigneur fut bon pour moi, méchante que je suis. Dans mes résistances, il feignait de se désintéresser de moi et ne disait rien. Il partait, mais seulement pour un temps très court. Il réapparaissait ensuite et me trouvait dans la désolation causée par son absence. Alors, avec ses séductions et ses caresses très douces, mon aimable Jésus me persuadait d'accomplir sa Sainte Volonté. Puis il me replongeait dans les souffrance mortelles qu'il me donnait lui-même directement.

Une fois, quand le confesseur vint pour me réanimer, il me dit durement: «Je ne veux pas que tu retombes dans cet état.» Momentanément, je retrouvai mes sens et lui dis: «Mon père, il n'est pas dans mon pouvoir de tomber ou de ne pas tomber dans cet état de léthargie. C'est vrai que je suis capricieuse, désobéissante et bonne à rien. Mais je dis la vérité quand je dis que la souffrance de ne pas pouvoir vous obéir, est très pénible pour moi. Je pense, mon père, que je subis cette souffrance parce que je suis dépourvue de la vertu d'obéissance, qui est une brillante pierre précieuse de mon Jésus et sans laquelle je ne serai jamais acceptée avec plaisir par lui. J'ai beaucoup de regrets et je me sens très inconfortable quand je me vois si différente de lui. Quel bien peut-il accomplir dans une âme désobéissante?»

Ces paroles d'humilité venaient du fond de mon coeur qui palpitait d'amour pour mon très cher Jésus. Le confesseur me laissa alors avec un mot d'encouragement et avec un peu plus de bonheur qu'à la visite précédente.

Malgré cet encouragement, je décidai à contrecoeur que si le Seigneur ne voulait pas m'assurer que je pourrais être libérée de l'état de pétrification sans l'intervention d'un prêtre, et s'il voulait que j'accepte des épreuves et des souffrances en réparation pour les nombreux péchés commis continuellement par la majorité des hommes, alors je lui résisterai et m'opposerai à lui pour avoir ce que je veux. Mais, même si une créature propose, Dieu, dans son impénétrable sagesse accomplit ce qu'il a préparé pour elle.


"L'acte le plus beau, le plus héroïque et le plus agréable pour moi et que vous
devez m'offrir, est celui de vous offrir pour ceux qui sont contre vous". 


À cette époque, Dieu fit augmenter l'épidémie de choléra de jour en jour au point que nos habitants étaient effrayés. Un jour, je suppliais le Seigneur plus que jamais pour qu'il fasse cesser ce fléau, fruit de sa juste et inexorable colère face aux innombrables affronts commis par les hommes méchants. Pendant que je priais, Jésus m'apparut et me dit: «Très bien, puisque tu t'offres volontairement comme victime de réparation pour souffrir dans ton corps et ton âme de graves et douloureuses souffrances, je t'accorderai ce que tu désires.»

Après cela je lui dis: «Seigneur, si les choses se passent entre toi et moi, je suis bien prête à accepter tout ce que tu m'imposeras. Autrement, je ne peux pas. Tu sais ce que les prêtres pensent et comment ils agissent avec moi.» Jésus, très doucement répondit: «Mon enfant, si j'avais médité sur ce que l'homme ferait de mon Humanité, je n'aurais jamais accompli la Rédemption du genre humain. Mon but était leur salut éternel. Un grand Amour me consumait et me fit tout sacrifier pour eux. Pour le salut éternel des créatures, j'offris à mon Père Éternel les épreuves et les souffrances produites injustement en moi par les pensées et les actions des hommes.

«As-tu oublié que je veux de toi une imitation de ma vie? Sache que, pour imiter ce que j'ai fait durant mes trente-trois ans de vie terrestre, tu dois te soumettre à mes labeurs, mes rejets, mes souffrances et ma mort. Et tu dois les vivre de la même manière qu'ils ont été ressentis par moi. C'est de cette manière que je te demande d'imiter ma Vie, si tu le veux. Autrement, m'imiter comme il te plaît n'est pas et ne sera jamais à mon goût. La plus belle action et la plus plaisante pour moi est l'action faite inconditionnellement par l'âme qui se soumet à moi sans sa volonté propre, mais uniquement dans la mienne.

«Ainsi, pour que je puisse trouver en toi l'accueil qui me soit le plus plaisant, fais l'acte héroïque de faire mourir totalement ta volonté et de laisser vivre uniquement la mienne en toi. Pour le moment, je veux que tu sois une victime d'amour, de réparation et d'expiation pour les personnes qui s'opposent à toi et qui continuent de te harceler. Souviens-toi que ces personnes sont mes enfants et qu'elles ont été rachetées par mon Sang.  Si tu vis vraiment dans l'Amour, tu te soumettras et tu donneras tout pour leur salut

Est-ce que je pouvais m'objecter à ces justes Paroles de Jésus? C'est pourquoi j'ai accepté l'état de victime qu'il voulait pour moi. Le soir même, je fus reprise par cet état de souffrance qu'il me communiqua et dans lequel je suis restée pendant trois jours, sans réanimation. Quand je revins à moi, personne ne parlait plus de choléra à l'exception de quelques personnes agissant follement et qui ont dû payer leur contribution à la mort. 

La majorité des habitants furent secoués par ce fléau de Dieu. Quand le confesseur vint pour me réanimer, il me dit à la blague: «Ces derniers jours nous avons eu un grand missionnaire avec nous, qui a fort bien prêché. Nous avons vu des gens à nos pieds, qui jusque-là résistaient à tout sentiment religieux et qui, durant leur vie entière n'avaient pas daigné passer devant une église. À l'appel de cet excellent prédicateur, ils se rendirent à la grâce et produisirent des fruits de vie éternelle.»

Je lui demandai où ce missionnaire avait prêché. Il répondit: «Pas seulement dans les églises, mais sur les places, dans les cercles, les boutiques et les maisons. Sa parole puissante atteignait tous les endroits avec une onction de grâce qui en amena beaucoup à la pénitence. Et veux-tu savoir son nom? Il a un bon nom. Il est appelé D. Coletto (allusion au choléra), le fléau de Dieu

22.   Changement de confesseur. Il exige que Luisa ne se soumette comme victime que sous son autorisation.   Audio

Je suis retourné chez le confesseur qui m'a avoué quand j'étais petit. 

Pendant ce temps, le Seigneur préparait une autre mortification pour moi; elle me frappa après que le fléau du choléra fut passé. La mortification consistait en des changements rapides de confesseurs. Celui que j'avais à ce moment-là était membre d'un ordre religieux et était appelé à une vie sobre par ses supérieurs. J'étais satisfaite de lui parce qu'il était le seul à ne pas me faire souffrir. Tout le tumulte que j'ai raconté plus haut m'était fait par d'autres prêtres pendant que ce confesseur était à la campagne. Ses visites étaient isolées à cause du choléra. Et je souffrais beaucoup de son absence, parce que plus volontiers que les autres, il consentait à me réanimer.

Très chagrinée, j'eus recours à Notre-Seigneur et lui montrai ma souffrance. Avec son habituelle tendresse, Jésus me dit: «Mon enfant, ne sois pas chagrinée pour cela. Je suis le Seigneur des coeurs et je peux les tourner ou les tordre comme il me plaît. Si ton confesseur t'a fait du bien, il n'était que mon ambassadeur, qui recevait tout de moi et te donnait comme je décidais. Je ferai de même avec d'autres confesseurs et je leur donnerai les grâces pour remplir leur fonction. Qu'as-tu alors à craindre?

«Mon enfant, combien de fois dois-je te répéter qu'aussi longtemps que tu persisteras à regarder à droite et à gauche, à poser tes yeux parfois sur ceci, parfois sur cela, tu ne pourras pas vraiment te maintenir sur le chemin du Ciel? Si tu ne rives pas tes yeux seulement sur moi, tu boiteras toujours;  l'influence de ma grâce ne pourra pas être complète en toi. C'est pourquoi je veux que tu restes dans la sainte indifférence par rapport aux choses qui t'entourent et que tu sois toujours disposée à accomplir tout ce que je veux de toi. Autrement tu ne pourras pas être préférée à d'autres pour le rôle de victime.»

Réfléchissant à ces Paroles qui m'étaient données directement par Jésus, mon coeur développa une telle force que je ne remarquais plus maintenant l'absence de mon confesseur, même s'il avait fait du bien à mon âme. Par la suite, Dieu m'inspira de me soumettre aux soins du prêtre qui me confessait quand j'étais jeune fille. Je n'ai jamais regretté ce choix. De fait, je me suis souvent exclamée à Dieu: «Puisses-tu toujours être béni ô Seigneur. Tu m'as confondue quand tu as tiré parti de ce qui me semblait dommageable à mon âme et pour ta plus grande Gloire, tu as transformé cette situation en bienfaits pour moi. Puisse-t-il en être toujours ainsi, ô mon Dieu!»

Alors que mon coeur avait toujours été fermé à mon autre confesseur, je l'ai ouvert à ce ministre de Dieu proposé par Jésus et accepté par moi. Malgré ses pressions et son insistance, mon coeur restait fermé à l'autre confesseur et, par conséquent, je ne pouvais pas me libérer intérieurement. Il essayait de toutes les manières de me faire parler, mais la simple pensée d'avoir à dire à un autre ce qui se passait entre Jésus et moi produisait en moi tant d'embarras et d'aversion que c'était comme si j'avais eu à confesser le plus affreux péché, lequel, merci à Dieu, je ne suis pas consciente d'avoir commis et pour lequel je n'ai d'ailleurs pas de penchant. À ce confesseur, cependant, et en de multiples occasions, j'ai fait connaître mon âme dans les menus détails, même si je le faisais sans aucun ordre.

Si on me demandait pourquoi je ne voulais pas de l'autre confesseur pour me réanimer, ma réponse serait que je me sentais incapable de lui expliquer ce qui m'arrivait. Ce n'était pas sa faute à lui, parce qu'il était bon et avisé et qu'il m'aurait écouté patiemment. Il aurait pris grand soin de mon âme si je lui avais dit ce qui se passait entre Jésus et moi. Il veillait néanmoins à ce que je demeure dans les chemins de la vertu. Quant à moi, je ressentais une très grande pesanteur en mon âme, de laquelle j'aurais bien voulu être soulagée en m'exprimant à quelqu'un d'autre, avec le désir de connaître son opinion.

Cependant, je le répète, il m'était impossible de le faire. Je crois que la raison pour laquelle mon premier confesseur ne pouvait pas me faire parler était le bon vouloir divin, tout simplement. Je dois ajouter que mon nouveau confesseur avait un talent spécial pour pénétrer dans mon intérieur. Avec lui, je prenais graduellement courage et je sentais en moi la volonté et la patience de m'exprimer. Petit à petit, je lui ouvris mon âme et je le laissai lire en moi comme dans un livre, page par page, même mot par mot, incluant les grâces spéciales que m'avait accordées le Seigneur. C'était comme si mon bon Jésus se donnait la peine de me rappeler tout ce qu'il m'avait déjà dit et tout ce qui m'était arrivé. Quelquefois, quand je ressentais de la répugnance à lui révéler quelque chose, il me réprimandait beaucoup et même menaçait de me quitter. La peur qu'il m'abandonne me faisait atrocement souffrir. Cependant, j'arrivais à surmonter les difficultés. J'étais très dure pour moi-même.

Je peux dire la même chose de l'autre confesseur, qui continuait à me demander une chose et ensuite une autre. Parfois il me demandait ce qui causait mes léthargies et quels en étaient les effets. Quelquefois, quand il voyait mon entêtement, il me commandait au nom de l'obéissance de lui répondre; et il plaçait devant moi la peur d'une grande illusion diabolique. Ensuite il ajoutait: «Quand l'âme est obéissante, nous sommes tous les deux plus sécurisés et tranquilles, parce que le Seigneur ne permettrait pas que son ministre, qui veut agir correctement dans la quête de la vérité, soit dans l'erreur.»

À ce sujet, il m'a souvent semblé que les deux, Jésus et le confesseur, savaient tout de la question, parce que, avant que Jésus me soumette à quelque souffrance, je remarquais que le confesseur connaissait la vérité. Je me disais en moi-même: «Il vaut mieux tout lui dire tout de suite que de garder le silence, puisque déjà il sait tout. Et si je garde le silence, qui sait s'il ne sera pas alors amené à changer sa façon de faire.»


« Si tu t'offre à souffrir, j'épargnerai les hommes ». 

Tout cela n'arrivait pas avec mes confesseurs des années précédentes, qui non seulement ne m'ont jamais questionnée ni n'ont essayé de chercher la vérité sur mes états de pétrification —  par exemple si ça provenait de Dieu ou des démons, ou si c'était causé par une maladie corporelle. Bref, ils ne demandaient rien et ne disaient rien. Toutefois, j'étais très désireuse de savoir si j'étais oui ou non ajustée à la Volonté de Dieu quand je portais la croix qu'il m'envoyait. Je souffrais beaucoup quand j'étais incapable de trouver la patience de la porter.

D'autre part, quand le second confesseur apprit que le Seigneur se montrait à moi et qu'il me demandait si je voulais remplir le rôle de victime, il me dit que je devrais dire à Jésus: «Seigneur, je ne peux pas et je ne devrais pas accepter la souffrance à laquelle tu veux me soumettre, jusqu'à ce que j'aie la permission de mon confesseur. Si tu désires que je sois victime, va en premier lieu à lui pour lui demander son consentement, afin qu'il n'ait pas de ressentiment envers moi.»

23.   Jésus demande à Luisa de s'offrir comme victime perpétuelle et lui ouvre la voie à de nouvelles grâces de sanctification.   Audio

Un matin, après la communion, mon aimable Jésus me dit: «Mon enfant, les iniquités des hommes sont telles et si nombreuses que l'équilibre entre mon Amour et ma Justice en est bouleversé. La prépondérance des forces du mal m'astreint à faire venir sur les hommes une violente guerre par laquelle j'infligerai une destruction sans précédent de chair humaine.»

Puis, tout en larmes, il ajouta: « Oh! oui! je leur ai donné des corps pour être des sanctuaires dans lesquels je comptais me réjouir. Plutôt, ils en ont fait de putrides fosses septiques. Leur puanteur est si grande que j'ai été forcé de m'éloigner d'eux. Ce sont là, mon enfant, les remerciements que je reçois pour tant d'Amour et tant de souffrances endurées pour eux. Qui d'autre que moi les a bénis aussi abondamment et a tant retardé leur juste châtiment? Personne n'a été comme moi! Et quelle est la cause de leur si grande perversion? Ce n'est rien d'autre, mon enfant, que les biens excessifs que je leur ai donnés. Maintenant je vais leur enseigner la manière de revenir à leur devoir par les plus dures punitions.»

À la suite de ces propos de Jésus, mon coeur était inondé d'amertume à la pensée qu'un Dieu si bon pouvait être aussi bafoué par l'ingratitude des hommes. Et qui pourrait aussi dire quelle était ma souffrance quand je pensais à ceux qui allaient être punis par le fléau de la guerre. Pour eux j'éprouvais un grand désir de souffrir plutôt que de les voir livrés à ces terribles châtiments.

J'essayais d'apaiser le Seigneur par toutes sortes de supplications. Et je lui dis: «Ô Saint Époux, épargne-leur ce fléau de ta Justice. Si leurs iniquités sont aussi grandes que tu dis, il y a encore l'immense mer de ton Sang dans laquelle tu peux les plonger. Ainsi, ils pourront en ressortir purifiés, et ta Justice sera satisfaite. Et je te le dis pour toujours, si tu ne trouves pas d'endroit que tu aimes, viens vers moi quand tu le désires. Je t'offre mon coeur afin qu'en lui tu puisses trouver le repos et la joie.

«Même si mon coeur est un cloaque de péchés et de défauts, avec l'aide de ta grâce si efficace, je suis disposée à le purifier et à le faire devenir comme tu le veux. Oh! mon Bien, sois apaisé! Et s'il est nécessaire et utile, je t'offre le sacrifice de ma vie. Je le ferai volontiers si je peux voir ton Image surgir de ce dur fléau.»

Me coupant la parole net, Jésus me dit: «Enfant bien-aimée, si tu veux volontairement t'offrir pour souffrir, pas sporadiquement comme par le passé, mais continuellement, j'épargnerai sûrement les hommes. Sais-tu comment je ferai? Je te placerai entre les deux, entre ma Justice et l'iniquité des hommes. Quand je voudrai appliquer ma Justice en envoyant sur eux des fléaux, te trouvant au milieu, tu seras frappée, mais eux seront épargnés. Si tu es prête à t'offrir ainsi, je suis prêt à épargner les hommes. Autrement, je ne peux plus être apaisé, ni ne peux m'abstenir plus longtemps.» 


"Allez chez le confesseur et demandez-lui l'obéissance". 

Après ces Paroles, je restai consternée et totalement confondue. Ma nature fut secouée, et je tremblais. Mais voyant que Jésus attendait un oui ou un non, je dis en me forçant pour parler: «Ô mon Divin Époux, je suis prête à faire tous les sacrifices que tu voudras, mais compte tenu de mon expérience passée, comment nous y prendre avec le confesseur qui, quand il vient de temps en temps, demande que je ne m'offre pas pour des souffrances sans avoir au préalable son consentement? Si, d'autre part, tu veux que je me soumette à ces souffrances sans son consentement, je suis prête, puisque ma réanimation ne dépendra pas de lui, mais de toi seulement, Dieu Très-Haut.»

Alors Jésus, mon Époux, qui a su tout sacrifier par obéissance, me dit: «Puisse-t-il ne jamais arriver que j'agisse contre mon épouse de Sang. Va à ton confesseur et demande son acquiescement. S'il veut t'écouter, dis-lui en détail ce que je t'ai dit; et dis-lui que tout ceci ne sera pas seulement pour le bien des créatures qui vivent dans le péché, mais pour le bien de ceux qui vont venir après. Il en va de ton plus grand bien que tu te soumettes à ces souffrances ininterrompues et presque mortelles. Car, dans l'état futur dans lequel tu es invitée à être —  à travers l'obéissance —,  je te purifierai de manière à ce que ton âme soit digne de ton mariage mystique avec moi

«Par la suite, j'aménagerai ta dernière transformation en moi afin que nous deux puissions devenir un. Comme deux cierges fondus par un même feu sont fusionnés et deviennent un seul corps. Ainsi unis, nous deviendrons de la même pensée, du même amour, et de la même oeuvre de réparation. Je te transformerai en moi et moi en toi pour que tu puisses être crucifiée en moi, avec moi et pour moi. Ne serais-tu pas heureuse de pouvoir dire: Jésus mon Époux est crucifié en moi. Et moi son épouse, je suis crucifiée en lui. Il en sera bien ainsi, parce qu'il n'y aura plus rien qui te fasse dissemblable de moi.

Quand le confesseur vint, je lui répétai tout ce que Jésus m'avait dit. Je lui ai même dit que je voulais souffrir sans limite de temps. Cependant, il me semblait, et j'en étais vraiment convaincue, que ces souffrances ne dureraient pas plus de quarante jours. Mais, au moment où j'écris ces lignes, ça fait douze ans que je vis dans un état de souffrances continues. Je ne sais combien de temps encore ça durera. Puisse Dieu être toujours béni et son insondable Jugement.

Il me reste à dire que si j'avais compris que j'aurais à passer mon temps continuellement au lit, peut-être que je ne me serais pas aisément soumise au rôle de victime perpétuelle. Ma nature aurait été alarmée. J'aurais difficilement pu rassembler assez de courage pour me prêter à un tel sacrifice. Je peux dire la même chose de mon confesseur: s'il avait connu le sacrifice qu'il aurait à faire chaque matin pour me réanimer, il n'aurait peut-être pas consenti à ce que je reste dans cet état pour aussi longtemps.

Je peux assurer que j'ai toujours été une amoureuse de cette douce souffrance. J'ai toujours été plus résignée quand j'étais dans une souffrance continuelle que quand j'en manquais. En fait, quand j'ai commencé à vivre dans cette situation de victime constante, je ne savais pas apprécier la valeur de la croix; mais le Seigneur m'a donné de la connaître durant les douze dernières années.

24.   Victime permanente, Luisa est continuellement alitée.   Audio

Mon confesseur, à qui j'avais fait connaître ce que mon très aimable Jésus voulait de moi, me dit: «Si tout ce que vous m'avez dit est vraiment la Volonté de Dieu, vous pouvez recevoir ma bénédiction. À vrai dire, je pourrai faire le sacrifice de vous réanimer chaque matin. Si j'en éprouve des ennuis dans ma nature, je les surmonterai par la grâce de Dieu.»

Quand je pensais aux créatures qui seraient épargnées du terrible fléau de la guerre, mon âme jubilait. Néanmoins, ma nature commençait à trembler. Et j'ai passé quelques jours dans une profonde tristesse. On me conduisit à l'église.  Après avoir reçu Jésus dans mon coeur, je lui dis:


« Offrez-vous en victime volontaire pour réparer mes offenses. »

«Très doux Jésus, vois la mer tourmentée dans laquelle mon âme est plongée. Plutôt que d'être dans une paix tranquille et de te remercier pour les lumières données à mon confesseur, lui qui m'a permis de faire dans l'obéissance ce que tu attends de moi, me voici soudainement troublée et confuse. Je le suis d'abord pour la condition de souffrance dans laquelle tu es sur le point de me plonger, et ensuite parce que j'aurai peut-être à rester dans cet état sans te recevoir, ce qui serait pour moi la plus grande souffrance. Qui pourrait survivre sans toi? Mon Bien, qui d'autre que toi pourra me donner la force de survivre, de me remettre de ma souffrance. Comment pourrai-je recevoir cette force, si on ne me permet pas de te recevoir dans ton Sacrement?»

Quand j'eus déchargé mon coeur de ses angoisses, j'ai beaucoup pleuré. Sympathisant avec moi, Jésus me dit poliment: «Mon enfant, n'aie pas peur. Je comprends ta faiblesse et j'ai préparé des grâces nouvelles et spéciales pour soutenir ta fragilité. Ne suis-je pas tout-puissant en tout? Ne suis-je pas capable de faire en sorte que tu me reçoives dans le Sacrement? Sois résignée, et comme une personne morte, place-toi dans mes bras paternels. Offre-toi comme victime en réparation pour les nombreuses offenses que je reçois continuellement des hommes. Alors tu pourras sauver ceux qui méritent la discipline.

«Si tu veux faire le sacrifice volontaire de toi-même en te donnant comme victime d'amour, d'expiation et de réparation, je promets de ne pas laisser passer un jour sans que tu aies une visite. Jusqu'à maintenant, tu venais à moi, mais je t'assure à présent que je viendrai te visiter sans manquer. Ces visites pourront être courtes, mais elles seront toujours un bénéfice et une grande consolation pour ton âme. Es-tu satisfaite? Et parce que je connais ton adhésion à ma Volonté, sache que dès à présent, tu es déjà une victime permanente, dans un état de souffrance perpétuelle, en accord avec ma Volonté. Je te demande cela pour la réparation des péchés que d'autres créatures ont commis.»

Comment décrire les grâces que le Seigneur commença alors à m'accorder? Il est impossible pour moi de relater tout ce que mon aimable Jésus a fait pour moi à partir de ce jour jusqu'à aujourd'hui, surtout s'il s'agit de décrire avec exactitude chacune de ces grâces. Afin de satisfaire la sainte obéissance — qu'on m'impose sans pitié —, je le ferai de mon mieux en m'efforçant de ne pas omettre les grâces les plus intimes, que je trouve si difficiles à révéler.

Concernant la promesse déjà mentionnée qui m'a été faite par Jésus, je dirai qu'il a toujours été irréprochable. Il a tenu sa promesse du commencement jusqu'à présent, et je crois qu'il la tiendra jusqu'à la fin. Je me souviens bien de ce qu'il m'a dit le premier jour où j'ai dû garder le lit: «Bien-aimée de mon Coeur, je t'ai placée dans cette condition pour pouvoir plus librement venir à toi et te parler. En effet, dès le commencement, je t'ai libérée du monde extérieur et des occasions d'avoir affaire aux créatures. Je t'ai ainsi purifiée intérieurement de manière à ce qu'aucune pensée ou affection de la terre ne reste en toi; et je les ai remplacées par des pensées célestes toutes remplies d'amour pour moi.

«Maintenant que toute autre chose t'est étrangère et que nous sommes devenus familiers, je veux t'identifier à moi-même, afin que ton corps aussi bien que ton âme puissent être à ma disposition pour être un perpétuel holocauste devant moi. Si je ne t'avais pas confinée à ce petit lit, tu n'aurais pas le bénéfice de mes fréquentes visites: tu aurais voulu d'abord remplir tes obligations familiales à coups de sacrifices, pour ensuite te retirer dans l'oratoire de ton coeur, en attendant une visite passagère de moi. Maintenant, tu ne peux pas faire cela. Nous sommes seuls. Il n'y a personne pour déranger notre conversation ou pour nous empêcher de nous communiquer nos joies et nos souffrances.

«En me ressemblant, tu peux participer à la joie et au bonheur que quelques bonnes personnes me donnent, de même qu'à l'amertume et à l'oppression qui me viennent de ceux qui sont méchants. À partir de maintenant, mes consolations seront les tiennes et tes consolations seront les miennes. Mes afflictions et tes afflictions seront en communication pour que «ta volonté» et «ma Volonté» disparaissent complètement, pour être appelées «notre Volonté». Bref, tu prendras intérêt à mes choses comme si elles étaient vraiment tiennes; et moi, de la même manière, je prendrai intérêt à tes choses — tes imperfections exceptées —, qui seront certainement miennes.

Sais-tu comment je me conduirai envers toi? Je serai comme un roi nouvellement marié à une noble reine, qui est provisoirement forcé d'être loin d'elle et qui, dans sa hâte d'être avec elle, garde son esprit et son coeur toujours tournés vers elle. Il s'active à finir son affaire pour pouvoir retourner vers elle le plus tôt possible. Une fois qu'il y est, ses yeux sont tournés vers elle pour voir si elle montre quelques signes de regret de son absence. Et s'il veut lui parler, il donne congé aux personnes qui l'entourent, il l'amène avec lui à ses appartements et ferme la porte. Il place une personne de confiance au dehors, comme garde, pour que personne ne puisse interrompre leurs conversations ou entendre leurs secrets. Seul à seul, ils se communiquent leurs pensées. Si quelqu'un voulait imprudemment les priver de leur isolement et les déranger, cette personne serait immédiatement arrêtée comme une perturbatrice de la paix du roi et serait sévèrement punie.

J'ai agi de manière semblable en te plaçant dans cet état; et malheur à celui qui s'aviserait de déranger ces dispositions. Ça n'aurait pas seulement pour effet de me déplaire, mais ça m'amènerait à le punir. Es-tu contente de cela?

PRÉCISION:

Le chapitre 41 du texte italien présente les différentes manières que Jésus emploie pour se manifester à Luisa. L'édition "Guy Harvey" a choisi de placer ce texte à la fin du volume (point no 54), juste avant la "Fin de la neuvaine de Noël". Pour lire ce texte "maintenant", comme  présenté dans les écrits de Luisa, suivre le lien.    

25.   Jésus appelle l'âme de Luisa à se perfectionner conformément à sa Volonté. Il veut qu'elle soit dans la plus complète pauvreté, absolument détachée de tout.     Audio

« Je veux de vous une parfaite conformité à ma Volonté. » 

Si, en retour des nombreuses grâces que mon Jésus bien-aimé m'a accordées, mon coeur ne débordait pas d'amour reconnaissant envers lui, je mériterais d'être qualifiée du plus détestable de tous les noms. Si je n'acquiesçais pas totalement aux désirs de sa Sainte Volonté, tout le Ciel et la terre devraient me pointer du doigt — y compris les générations futures — comme étant l'âme la plus ingrate et la plus méprisable qui ait jamais existé. Ce serait comme si un va-nu-pieds couvert de guenilles sales boudait un seigneur très fortuné qui l'inviterait à devenir copropriétaire de ses immenses possessions et de s'en occuper comme si elles étaient siennes. Ce pauvre indigent ne deviendrait-il pas la risée de tous?

Jésus a agi ainsi avec moi. En échange de mon néant, il m'a accordé de posséder en commun avec lui ses biens infinis, à la seule condition que j'en prenne soin. Je ne lui ai rien apporté, si ce n'est mon néant. Avez-vous déjà vu quelque chose de semblable? Je me sens toute gênée d'en parler. Et Jésus devint non seulement propriétaire de mon néant, mais aussi de mes imperfections, qu'il veut totalement purifier dans son infinie Perfection. Oh! comme je suis endettée envers lui! Lui qui jamais ne s'est lassé, ne se lasse, et ne se lassera de me répéter: «Je veux de toi une parfaite conformité à ma Volonté, de telle manière que tu deviennes complètement fondue dans ma Volonté.»

Quand il remarquait mon plus petit attachement à des choses sans importance, gentiment il me pressait de faire marche arrière en me disant: «Mon enfant, je désire de toi une séparation absolue de tout ce qui n'est pas de moi. Je veux que tu considères tout ce que tu sais être de la terre comme fumier, dégoûtant à regarder. Mon Coeur se gèle quand tu regardes avec plaisir les choses de la terre qui ne sont pas des nécessités. Elles ennuagent les choses célestes en toi et retardent le mariage mystique que j'ai promis de conclure avec toi. Sache que je n'accorde aucune valeur aux choses de la terre qui ne sont pas totalement nécessaires. Je veux que tu suives cette abjecte pauvreté à laquelle je me suis moi-même assujetti, méprisant tout ce qui n'était pas nécessaire.

«Dans ce petit lit où tu m'imites dans la pauvreté, tu dois te considérer comme une pauvre enfant abandonnée. Seulement alors pourras-tu dire que tu es vraiment pauvre. Parce que je veux une pauvreté vraie et pratiquée dans les actes. Ne désire jamais acquérir quelque chose, ne soupire jamais après quelque chose, et n'accepte jamais rien qui ne soit réellement nécessaire. Le cas échéant, remercie-moi en premier, ensuite tes donateurs. Je veux que désormais tu t'arranges avec ce qui t'est donné et tu ne demandes rien d'autre, parce que désirer quelque chose qui ne t'est pas donné, peut devenir encombrant dans ton esprit. Résigne-toi avec une sainte indifférence à la volonté des autres sans considérer si c'est bon ou mauvais.»

Au commencement, cela fut vraiment un très grand sacrifice pour moi. Mais, rapidement, j'ai vu à ne pas penser à ceci ou cela.  À l'exception de ce dont j'avais vraiment besoin, je ne demandais rien qui ne m'était pas offert.

26.   Une nouvelle croix pour Luisa: elle vomit toute nourriture et souffre de la faim. Son confesseur lui défend de poursuivre dans son état de victime.   Audio

La vraie résignation sait changer la nature
des choses et convertir l'amertume en douceur. 

Ayant surmonté la précédente difficulté, le Seigneur désirait me soumettre à une tâche plus ardue. Une des souffrances continues qui me vint directement de Jésus fut l'épisode des vomissements après avoir mangé. Quand ma famille me donnait quelque chose à manger, je le vomissais immédiatement et je devenais si faible que je ne pouvais plus parler. Mais je me souvenais de ce que Jésus m'avait dit: «fais ce qu'on te dit». Et je ne désirais rien d'autre. Je me sentais honteuse et comme si ma famille me grondait en me disant: «Pourquoi veux-tu encore manger alors que tu viens tout juste de vomir?» Aussi, je me disais en moi-même: «Je ne demanderai rien jusqu'à ce qu'ils m'apportent quelque chose; Dieu s'occupera des choses.» Et je poursuivais remplie de remerciements de pouvoir souffrir pour l'amour de Jésus et j'offrais tout en réparation pour les offenses commises par le péché de gourmandise.

Je ne sais pas pourquoi, mais mon confesseur, qui avait entendu dire que je vivais des épisodes de vomissements, m'ordonna de prendre de la quinine chaque jour. Ceci dérangeait mon appétit. Et comme je ne pouvais prendre de la nourriture tant qu'elle ne m'était pas donnée, j'entendais toujours gronder mon estomac. Dans cet état, je me sentais comme si j'étais dans les affres de la mort, mais sans mourir. Ceci dura environ quatre mois, après quoi mon bien-aimé Jésus me dit: «Dis à ton confesseur qu'on ne te donne ni nourriture ni quinine quand tu vomis. Illuminé par la Lumière divine, il t'accordera cela.»

Ainsi donc le confesseur m'accorda que je ne prenne ni nourriture ni quinine. Par la suite cependant, pour ne pas que je sois mise en évidence, il voulait que je prenne de la nourriture une fois par jour. Ainsi j'avais plus de paix. Ma faim disparut, mais pas les vomissements. En effet, à chaque fois que je prenais de la nourriture, je devais la rendre².

Mon bien-aimé Jésus me disait souvent: «Dis à ton confesseur de te donner la permission de ne plus manger du tout.» Mais, à chaque fois, il refusait en disant: «Accepte la nourriture qui t'est donnée comme un acte de mortification en réparation des nombreuses offenses faites au Seigneur par la gourmandise des hommes.» Chaque fois, au bout de quelques jours, Notre-Seigneur revenait à la charge et répétait: «Une fois encore, je veux que tu demandes à ton confesseur la permission de ne prendre aucune nourriture. Fais-le nonchalamment et sois disposée à accepter, dans l'obéissance, tout ce qu'il voudra que tu fasses.»

Une fois, alors que, comme le voulait Jésus, je refaisais la demande à mon confesseur, celui-ci, je ne sais pas pourquoi, non seulement refusa de me donner la permission sollicitée, mais il m'ordonna d'arrêter mes souffrances, comme si elles dépendaient de moi. La raison de sa réaction était peut-être la suivante: se souvenant que je lui avais dit que mes souffrances ne dureraient que quarante jours, alors qu'elles perduraient, il fut amené à croire que je ne lui disais pas la vérité concernant l'état de souffrance qui m'était demandé ou concernant le fait que je ne devais plus prendre de nourriture.

Pour des raisons qui me sont inconnues, il en vint à la conclusion que je ne devais plus rester dans cette situation de victime, et que si je retombais dans cet état de souffrance, il ne devrait plus venir me réanimer. Je dois dire ici que, par esprit d'obéissance, j'étais bien disposée à me soumettre à ses directives, d'autant plus que ma nature réclamait d'être déchargée du fardeau de tant de souffrances mortelles qui se reproduisaient fréquemment. Cependant, il m'apparaît clair que je n'aurais jamais pu porter de tels fardeaux sans une intervention divine spéciale.

Il y avait aussi la souffrance d'avoir à me soumettre en tout, même en ces choses qui me répugnaient tant (les nécessités naturelles): c'était vraiment un sacrifice que je faisais pour me conformer à la Volonté de Dieu. D'ailleurs, sans ce motif de la conformité à la Volonté Divine, même les plus grands saints auraient renoncé. À Jésus je dois mon habileté à lui retourner l'Amour immense qu'il m'a toujours manifesté.

C'est ainsi que j'éprouvais une certaine consolation vis-à-vis de mon passé et que j'étais disposée à tout faire dans la sainte obéissance. Puisque je faisais l'expérience de l'Amour et de la Bonté de Dieu envers moi, j'étais prête et consentante à rester confinée à mon petit lit aussi longtemps que le Seigneur le voudrait, dans l'état de victime. Sa Sainte Volonté qui sait si bien changer la nature des choses,  les transformer d'amères à douces, obtenait pour moi la résignation et la conformité à sa Volonté.

__________

² Au début, les vomissements venaient à tous les trois ou quatre jours. Par la suite, ce sera continuel: quelques minutes après avoir pris de la nourriture, Luisa vomissait tout. Ainsi, elle vivra dans un jeûne total jusqu'à sa mort, sauf pour une petite exception (cf. Tome 2, 29 septembre 1912).

27.   Parce qu'elle n'a pas le consentement de son confesseur, Luisa résiste à Jésus. Jésus fournit la preuve que tout vient de lui.    Audio

Je suis resté toute la nuit à me battre avec le Seigneur. 

Quoique j'eus accepté volontairement et dans l'obéissance d'être victime et de rester au lit, j'ai commencé à offrir de la résistance à mon toujours aimable Jésus. Une fois, quand il m'apparut pour me communiquer ses souffrances, je lui ai dit: «Mon bien-aimé Seigneur, ne prends pas mal mon refus de souffrir. Que veux-tu de moi? Puisque c'est l'obéissance qui m'en empêche, je ne peux plus me soumettre. Mais si tu veux que je fasse ta Volonté, donne la lumière à mon confesseur pour qu'il m'accorde ce que tu désires. Autrement, je suivrai ses désirs et m'opposerai obstinément à ta Volonté. Vraiment je croirai que tu n'es pas mon aimable Jésus!»

Notre-Seigneur voulait me soumettre à un test sévère en me faisant passer une nuit toute entière brouillée avec lui. Avec le risque d'être trouvée malavisée, j'ai maintenu ma position toute une nuit. Quand il viendrait, je lui dirais vivement: «Mon Amour, prends patience. J'ai besoin du consentement de mon confesseur pour que tu puisses me communiquer ta souffrance. Aussi, s'il te plaît, ne me force pas à opposer ma volonté à la Tienne. Sans le consentement de ma volonté qui ne pliera pas sans le consentement de mon confesseur, tu peux néanmoins me réduire à l'anéantissement et me communiquer toutes tes peines, tes chagrins et tes souffrances.³»

Dans cet état de souffrance où je me trouvais, je croyais que Notre-Seigneur avait donné la preuve qu'il avait gagné. Mais ce n'était pas ainsi. Car, en un instant, quand je fus libérée de toute souffrance, mon bien-aimé Jésus m'attira à lui d'une manière qui me fit hésiter; en conséquence je ne pus offrir aucune résistance. Je me suis trouvée liée à lui si fortement que peu importe comment j'essayais de m'opposer à lui, il était impossible pour moi de me dégager. Puisque je ne suis rien, il aurait été inutile pour moi de résister ou d'essayer de triompher dans une bataille avec lui, lui qui est omnipotent et qui est la Force des forts. Étant si près de Jésus,  j'étais embarrassée par mes nombreuses oppositions à lui,  et je me suis trouvée complètement anéantie. Aussi, dans la honte, je lui ai dit: «Pardonne-moi, Saint Époux, de t'avoir offert de la résistance. Ceci n'aurait pas été si l'obéissance ne m'avait pas forcée.» Et Jésus, très tendrement me dit:

«Enfant bien-aimée de mon Amour, n'aie pas peur que je sois offensé: je ne suis pas offensé par le geste de ton confesseur qui t'a donné cette directive. Il exerce son ministère avec délicatesse et conscience et il doit se servir de moyens et d'artifices pour s'acquitter de sa responsabilité morale face au mauvais et au bon. Retrouve ta paix et vis toujours abandonnée à moi. Viens à moi! Aujourd'hui, c'est le premier jour de l'année (c'était vraiment le jour de l'an). Viens, je veux te donner un cadeau.»

Il vint à moi, me serra sur lui et, pressant ses lèvres contre les miennes, il versa en moi un liquide, beaucoup plus doux que le lait et, m'embrassant encore et encore, affectueusement il prit un anneau de son Coeur en disant: «Admire et contemple bien cet anneau que j'ai préparé pour toi, pour notre mariage, puisque je te marierai dans la foi. Pour le présent, je t'ordonne de continuer de vivre dans cet état de victime et de dire à ton confesseur que c'est mon désir que tu continues de vivre dans cet état de souffrance. Et comme signe que c'est bien moi qui parle, sache que la guerre qui est à un arrêt entre l'Italie et l'Afrique continuera jusqu'au moment où il te donnera la permission de vivre dans l'état de victime. À ce moment, je ferai cesser la guerre, pour qu'ils aient la paix des deux côtés.»

Puis Jésus disparut. Je me suis alors sentie comme si j'étais habillée d'un habit de souffrance qui pénétrait jusqu'à la moelle de mes os, tellement je me sentais incapable de me réanimer moi-même de cet état mortel, sans l'intervention du confesseur. Dans ma douleur, je pensais à ce que j'allais lui dire quand il me trouverait dans cet état de souffrance majeur contre ses ordres. Que pouvais-je faire? Il n'était certainement pas en mon pouvoir de me réanimer moi-même.

Le liquide laiteux que Jésus m'avait versé produisait en moi tant d'amour pour lui que, malgré la douleur, je languissais d'amour. Cette douceur et cette satiété que je ressentais me forcèrent à prendre un peu de la nourriture offerte par ma famille après que le confesseur m'eut réanimée. Mais cette nourriture refusa absolument de descendre dans mon estomac. Il fut nécessaire que mon confesseur me l'impose au nom de l'obéissance pour que je l'avale. Cependant je fus immédiatement forcée de le rendre avec un peu du doux liquide versé en moi par Jésus. En le faisant, j'ai senti Jésus à l'intérieur de moi qui, avec humour, me dit: «Ce que j'avais versé en toi n'était pas assez? N'en étais-tu pas satisfaite?»

Très embarrassée et remplie de honte, je lui dis: «Que veux-tu de moi, ô Jésus? C'est l'obéissance qui m'a amenée à rendre aussi ce qui était tien — qui était pourtant si doux et si délicieux.» Sans autre question, regardant ce qui était arrivé, mon confesseur se retira en disant: «Je reviendrai quand j'aurai du temps libre.» Je ne fus pas seulement indifférente à cette interférence du confesseur en rapport avec ce qui se passait entre le Seigneur et moi, mais j'en fus très ennuyée. Rapidement, je remerciai mon toujours aimable Jésus, qui avait permis que mon confesseur ne me pose aucune question.

Je ne savais vraiment pas ce qui m'attendait pour le jour suivant. Mon confesseur revint avec un air renfrogné et, sans me questionner, me traita d'âme désobéissante. Et il ajouta: «Le fait que tu sois tombée dans une faiblesse mortelle m'amène à croire que ce qui t'arrive est une pure maladie et non pas le fruit d'une intervention surnaturelle. Si cela était de Dieu, il ne t'aurait certainement pas laissée me désobéir, parce qu'il veut de toi l'obéissance et ne veut rien qui ne soit fait sans cette belle vertu. Aussi, plutôt que d'appeler ton confesseur, désormais tu appelleras les médecins qui, par leur science, te libéreront de ta maladie nerveuse

Quand il eut fini de me rabrouer, je me suis obligée à lui dire ce qui était arrivé, et tout ce que le Seigneur m'avait demandé de lui dire. En m'entendant, il changea d'idée et m'assura qu'il ne doutait pas de ce que j'avais dit regardant Jésus, parce que les paroles à propos de la guerre entre l'Italie et l'Afrique étaient véridiques. Il ajouta à propos de la prétendue paix, si elle arrive sous peu, conséquemment au fait que tu seras redevenue victime, alors je ne pourrai plus douter. Si, d'un autre côté, c'était dû à d'autres causes... Nous allons attendre et nous verrons.» Ainsi il consentit à ce que je réponde au désir exprimé par mon bon Jésus. Et il me répéta: «Nous allons attendre et nous verrons si cette guerre n'augmente pas et si bientôt nous aurons la paix.»

Quatre mois plus tard, mon confesseur apprit du journal que la paix prophétisée par Jésus s'était réalisée. Quand il me vit, il dit: «Sans victime d'un côté comme de l'autre, la guerre qui sévissait entre l'Italie et l'Afrique s'est terminée; il y a maintenant la paix entre les deux.» Parce que ce fait avait été prophétisé et qu'il s'était réalisé, mon confesseur devint convaincu de l'action de la Divinité dans ce qui m'arrivait, et il me laissa seule et en paix — chose qu'on ne peut obtenir si on résiste à Dieu.

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³ Pensez à quoi peut ressembler le fait d'être alitée pendant soixante-quatre années, sans plaie de lit, sans aucune maladie de cause naturelle. Ceci était attaché à l'obéissance volontaire de Luisa, ce qu'elle appelait son état usuel.

28.   Jésus prépare Luisa pour le mariage mystique déjà promis.    Audio

Jésus m'apparaissait comme un amant qui ne peut être sans son épouse. 

À partir de ce jour, Jésus ne fit rien d'autre que de me préparer pour le mariage mystique qu'il m'avait promis⁴, me visitant plus souvent - jusqu'à trois ou quatre fois par jour quand ça lui plaisait. Souvent il allait et venait continuellement. Il se comportait comme un amoureux qui ne peut s'empêcher de penser très souvent à son épouse, ainsi que de l'aimer et la visiter. Il se révélait à moi en me disant des choses comme: «Je t'aime tant que je ne peux pas rester loin de toi. Je me sens comme non payé de retour quand je ne te vois pas ou que je ne te parle pas directement et de tout près. Je suis porté à penser que tu es seule et que tu languis d'amour pour moi. Et je viens voir si tu as besoin de quelque chose.»

Alors il relevait ma tête, arrangeait mon oreiller, mettait ses Bras autour de mon cou, m'embrassait et me couvrait de baisers encore et encore. Comme c'était l'été, il me soulageait de l'excès de chaleur en me rafraîchissant d'une légère brise qui émanait de sa douce Bouche. Quelquefois, il secouait quelque chose qu'il avait dans ses Mains ou tapait le drap qui me recouvrait pour que je sois rafraîchie, et il me demandait vivement: «Comment es-tu maintenant? Sûrement que tu te sens mieux, n'est-ce pas?» Et je lui répondais: «Tu sais, mon bien-aimé Jésus, quand tu es près de moi, je me sens mieux de toute manière.»

Après, quand il venait et qu'il me trouvait toute prostrée et faible à cause de mes souffrances continuelles, spécialement la nuit, après que mon confesseur soit venu, il m'approchait et, de sa Bouche, il versait un liquide laiteux dans la mienne. Il me laissait m'attacher à sa très sacrée Poitrine, de laquelle il me laissait tirer des torrents de douceur et de force qui me donnaient un avant-goût des délices du Paradis. Quand il me voyait dans l'état de parfaites délices, il me disait avec son ineffable bonté: «Je veux être vraiment ton Tout, me faisant la nourriture réconfortante non seulement de ton âme, mais aussi de ton corps.»⁵ 

Que dire de tout ce que j'expérimentai d'amour céleste à la suite de tant de grâces inhabituelles paradisiaques? Si je devais dire tout ce que mon très doux Jésus me communiquait, je risquerais de devenir ennuyeuse. À mon confesseur non plus je ne pouvais pas tout dire, parce que ça aurait pris beaucoup trop de temps. Je me limiterai ici à dire brièvement ce qu'il suffit de savoir pour comprendre un peu l'état d'une âme qui est en pleine possession de Jésus, le plus délicieux Époux de l'âme. Et, avec toute la véhémence de mon coeur, je veux m'exclamer en lui disant: «Ô Jésus, comme j'ai apprécié toutes tes douces et délicieuses communications!»

Elles sont à la fois amères, douces et intermittentes les souffrances qui me sont départies par mon Jésus, lui-même si rempli d'amertume. Mais si la douceur et l'amertume n'étaient pas données simultanément à l'âme qui est devenue une victime d'amour, d'expiation et de réparation, cette âme ne pourrait tenir bien longtemps sans mourir. Le corps se désintégrerait et l'âme irait rapidement rejoindre son Dieu. D'où mes gémissements et mes plaintes quand je pensais qu'il m'avait laissée. Quand il se cachait occasionnellement, je devenais très souffrante mentalement. Il me semblait que je ne l'avais pas vu depuis un siècle. C'est pourquoi je me plaignais alors en lui disant des choses comme: «Ô Saint Époux, comment peux-tu me faire attendre si longtemps après toi? Ne sais-tu pas que je ne puis survivre sans toi? Viens et ravive-moi par ta Présence qui est pour moi, lumière, force et tout.»

Un jour, me sentant rejetée à cause de son absence de seulement quelques heures, il me semblait qu'il ne m'était pas apparu depuis plusieurs années. Aussi, dans ma souffrance, je pleurais des larmes amères. Alors il m'apparut, me consola, et sécha mes larmes. Il m'embrassa et, pendant qu'il me baisait, il me dit: «Je ne veux pas que tu pleures. Tu vois, je suis avec toi maintenant. Que désires-tu?»

Je répondis: «Je languis simplement après toi. Je cesserai de pleurer quand tu me promettras que tu ne me laisseras plus t'attendre aussi longtemps. Mon bon Jésus, tu sais comment je souffre pendant que je t’attend, spécialement  quand je t'appelle et que tu n'arrives pas rapidement  pour me consoler, me fortifier et m'encourager par ta douce Présence.» Jésus reprit: «Oui, oui, je te plairai.» Et il disparut rapidement.

Un autre jour, je me plaignais encore et je le suppliais de ne pas me faire attendre si longtemps après lui. Quand il a vu que je n'arrêtais pas de pleurer, il me dit: «Maintenant, je veux vraiment te satisfaire en tout. Je suis tellement enthousiasmé par toi que je ne peux qu'accéder à tes désirs. Si, jusqu'à maintenant, je t'ai dégagée de ta vie extérieure et me suis manifesté à toi, maintenant je veux attirer ton âme à moi. Ainsi tu pourras me suivre de plus près, me réjouir, te presser plus intimement sur moi. Je peux te montrer tout ce qui n'a pas été fait avec toi dans le passé.»

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 Et Jésus tint Parole, comme l'attestera Luisa 15 ans plus tard (cf. Tome 4, 16 novembre 1902).

Ces lignes font penser à celle du Cantique des Cantiques de l'Ancien Testament. Le véhément et innocent amour de Luisa pour Jésus incite ce dernier à lui donner un avant-goût des chastes intimités qui seront vécues dans le Ciel.

29.   Jésus montre à Luisa la divine beauté de sa très sainte Humanité.   Audio

Un matin, mon doux Jésus vient avec une apparence
tout à fait aimable.


Trois mois passèrent pendant lesquels je demeurai victime permanente dans mon lit, où je recevais non seulement les peines et les souffrances que Jésus me communiquait, mais aussi sa Douceur. Un matin, Jésus vint à moi comme un aimable et très charmant jeune homme d'à peu près dix-huit ans. Ses Cheveux couleur or étaient bouclés et descendaient de chaque côté de son Front. Il semblait que ses Boucles tissaient les pensées de son Esprit jointes aux affections de son Coeur. Sur son Front, serein et large, on pouvait voir, comme à travers un cristal très clair, son Esprit, où sa Sagesse infinie régnait dans un ordre et une paix célestes.

Mon esprit devint clair et mon coeur tranquille à la vue de ce très charmant Jésus. L'effet fut tel et mes passions si réprimées que je ne ressentais pas le moindre trouble. Puisque mon âme expérimenta un si grand sentiment de paix à seulement le voir, qu'est-ce que j'expérimenterais si je pouvais posséder sa Divinité? Je crois que Jésus ne pourrait pas se manifester dans une si grande beauté à une âme qui ne jouirait pas d'un calme parfait et d'une profonde humilité. Il se retirerait au moindre trouble de l'âme. D'un autre côté, si une âme ressentait une paix et un calme tels qu'elle ne serait pas troublée par un désastre et une guerre féroce autour d'elle, alors non seulement Jésus se laisserait voir par elle, mais il goûterait un doux repos en elle, un repos que ne pourrait lui procurer une âme troublée.

Sous l'aspect où Jésus se montrait à moi, je ne cessais de le regarder et de l'admirer, et je me disais en moi-même: «Oh! comme ils sont beaux ses Yeux si purs, qui brillent d'une lumière plus claire que le soleil.» Contrairement à la lumière du soleil, cependant, la lumière des Yeux de Jésus ne blessait pas ma vue. Et je pouvais fixer mon regard sur cette splendeur sans aucune fatigue. Bien au contraire, mes yeux en recevaient plus de force. On ne peut quitter des yeux ce mystérieux miracle de beauté qu'est le bleu foncé des Pupilles de Jésus.

Un Regard venant de Jésus est suffisant pour être transporté hors de soi-même et faire parcourir les vallées, les plaines, les montagnes, les cieux ou les plus profonds abîmes de la terre pour le trouver. Un Regard de Jésus est suffisant pour transformer l'âme en lui, et faire ressentir je ne sais quoi de sa Divinité. Plusieurs fois, cela m'a fait m'exclamer: «Ô mon très beau Jésus, ô mon Tout, qu'est-ce que ce sera de jouir de ta vision béatifique sans le mélange de la souffrance, toi qui, dans les quelques minutes où tu m'es apparu, as donné tant de paix à mon âme; toi pour qui on peut endurer des torrents de souffrances, le martyre ou des épreuves humiliantes; toi qui es habité par un mélange de peine et de plaisir dans une parfaite tranquillité d'esprit!»

Qui pourrait dire toute la beauté que dégage son adorable Visage. Son aspect est comme de la neige teintée de la couleur de très belles roses. Il transpire une noblesse majestueuse et divine. Son apparence invite à la crainte et à la révérence, et aussi à la confiance. Son apparence est comme le blanc comparé au noir, comme la douceur comparée à l'amertume. La confiance que pourrait inspirer une créature est une ombre comparativement au brillant soleil qu'est la confiance inspirée par Jésus.

Oh! oui! la confiance que Jésus inspire à l'âme transparaît sur sa sainte Figure, si majestueuse, si aimable. Et l'Amour qu'il dégage attire l'âme d'une manière qui ne lui laisse aucun doute quant à l'accueil qu'il lui offre. Jésus ne méprise pas une créature qui, attirée par la brûlante flamme de son Amour, veut retourner dans ses Bras, peu importe sa laideur ou son état de péché.

Que dire maintenant des traits de sa figure? Son Nez très gracieux descend harmonieusement de ses blonds Sourcils. Sa Bouche, quoique petite, affiche un doux sourire. Ses Lèvres, de couleur écarlate, sont fines, douces et aimantes. Quand elles s'ouvrent pour parler, elles donnent l'impression que quelque chose de précieux, de céleste, va être prononcé. Sa Voix exprime la douceur et les harmoniques du Paradis, aptes à enchanter les coeurs les plus récalcitrants.

La Voix de mon Bien-Aimé pénètre avec tant de douceur qu'elle touche chaque fibre du coeur de quiconque l'entend, et en moins de temps qu'il ne faut pour le dire elle ravit l'âme par ses accents chauds et stimulants. Elle est si plaisante que tous les plaisirs du monde sont néant, comparés à un seul mot sortant de sa Bouche. Tous les plaisirs du monde ne sont que simulacres, comparés à sa douce Voix. Elle est efficace et produit de grandes merveilles. Quand Jésus parle, il produit l'effet qu'il veut dans l'âme.

Oh! oui! la Bouche de Jésus est radieuse. Elle est d'une beauté souveraine quand il parle. Alors peuvent être vues ses dents propres et bien proportionnées. Aux coeurs qui l'écoutent avec affection, Jésus envoie du Ciel un souffle d'Amour palpitant, qui darde, enflamme et consume. Plus belles encore sont ses Mains douces, blanches et délicates. Ses Doigts, clairs et transparents, bougent avec dextérité et sont un véritable enchantement à voir quand ils touchent quelque chose.

«Oh! comme tu es beau, totalement beau, mon doux et gracieux Jésus! Pardonne-moi de si pauvrement parler de ta beauté. Ce que j'ai dit n'est rien comparé à la réalité. D'une manière gaffeuse, j'ai essayé de décrire ta beauté, que même tes anges sont indignes et incapables de décrire adéquatement. C'est par la sainte obéissance que, de mon mieux, je l'ai fait. Si ma description n'a pas ton approbation, pardonne-moi. Blâme en premier lieu l'obéissance, parce que mes faibles essais ne font pas justice à ta beauté, j'en suis bien consciente.»

30.   L'âme de Luisa se détache de son corps une première fois. Souffrances que Jésus lui transmet dans cet état.  Audio

Si ce n'eut été d'un ordre explicite donné en vertu de l'obéissance, je n'aurais sûrement jamais consenti à mettre sur papier, dans l'humiliation, les étranges épisodes de ma vie qui, de jour en jour devenaient moins exceptionnels. Sans doute, pour quelques personnes, ils sembleront bizarres.

Fais-moi part de tes peines. 

Puisque je n'ai pas le choix, je dirai que mon bien-aimé Jésus, après s'être montré à moi de la manière que j'ai précédemment si gauchement décrite, souffla de sa bouche une fragrance céleste qui m'envahit dans mon corps et mon âme. À la suite de ce souffle, en moins de temps qu'il ne faut pour le dire, il me prit avec lui. Il fit sortir mon âme de toutes les parties de mon corps. Il me donna un corps d'une forme très simple, resplendissant de pure lumière. Je pris rapidement mon envol avec lui, et nous avons parcouru l'immensité des cieux.

Puisque c'était la première fois que j'expérimentais ce merveilleux phénomène, j'ai pensé: «Vraiment le Seigneur est venu pour me prendre et certainement je vais mourir.» Quand je me suis trouvée hors de mon corps, les sensations que mon âme ressentaient étaient les mêmes que je ressentais quand j'étais dans mon corps, avec la différence que, quand l'âme est unie au corps, elle perçoit chaque sensation à travers les sens et les transmet aux puissances du corps. Dans l'autre situation, l'âme reçoit toutes les sensations directement. Elle comprend instantanément tout ce qu'elle traverse, et elle pénètre même les choses les plus cachées et imperceptibles — de près ou de loin — mais uniquement dans la Volonté de Dieu.

La première chose que mon âme ressentit quand elle quitta mon corps, fut de trembler de peur en suivant l'envol de mon bien-aimé Jésus, qui me tirait continuellement derrière lui à l'aide d'une brise céleste. Il me disait: «Puisque tu as expérimenté de grandes souffrances quand tu étais privée de ma Présence visuelle pendant une heure ou à peu près, maintenant vole avec moi. Je veux te consoler et te griser de mon Amour.» Oh! comme il était bon pour mon âme d'être en suspension dans la voûte des cieux en compagnie de Jésus! Il me semblait que j'étais appuyée sur lui et qu'il me tenait pour que je ne sois pas trop loin derrière lui. Quoiqu'il me précédait, j'étais attachée à lui d'une manière ferme afin de pouvoir le suivre — lui penché vers moi et moi vers lui —, pendant qu'il me soutenait et me tirait par son doux souffle. En somme, j'ai intérieurement une bonne représentation de ce qui est arrivé, mais je n'ai pas les mots avec lesquels le décrire.

Après avoir fait ces rondes dans l'immensité des cieux, mon bien-aimé Jésus, qui trouve ses délices dans la compagnie des hommes, m'amena à un endroit où étaient concentrées les iniquités et les infamies des hommes. Oh! comme il était devenu changé, l'aspect de mon bien-aimé Jésus. Quelle amertume submergeait son Coeur sensible! Avec une clarté que je n'avais jamais expérimentée auparavant, je l'ai vu souffrir de terribles tortures. Son Coeur adorable m'apparut comme celui d'un homme mourant, expirant dans une terreur extrême.

Le voyant dans ce pénible état, je lui ai dit: «Mon adorable Jésus, comme tu as changé! Tu es comme un mourant. Appuie-toi sur moi et permets-moi de participer à ta souffrance. Mon coeur défaille de te voir tant souffrir.» Là-dessus, retrouvant un peu son souffle, Jésus me dit: «Oui, ma bien-aimée, libre à toi de m'aimer. Je ne peux pas tenir plus longtemps.» Me disant cela, il me pressa plus intimement sur lui, et plaçant ses Lèvres sur ma bouche, il versa en moi une amertume foudroyante: je me suis sentie comme transpercée par plusieurs couteaux, fers de lances, flèches, dards et dagues qui, une à une, pénétraient dans mon âme.

Pendant que j'étais plongée dans cette souffrance extrême, mon bien-aimé Jésus ramena mon âme dans mon corps et disparut. Qui pourrait décrire le terrible supplice qui s'empara alors de mon corps! Seul Jésus pourrait faire cette description, lui qui, chaque fois qu'il me communiquait des souffrances, les adoucissait par la suite. Les gens sur la terre, non seulement ne peuvent ressentir de telles souffrances, mais ne peuvent même pas imaginer leur profondeur.

En analysant l'histoire de mon âme — cette âme pauvre et misérable qui a bien des fois imité son bien-aimé Jésus — on pourrait croire que la mort se moquait de moi. Quoique je n'étais alors pas digne de mourir, je savais que la mort viendrait bientôt. Elle viendra en son temps, et elle ne se moquera plus de moi. Ce sera plutôt moi qui la ridiculiserai en lui disant: «J'ai badiné bien des fois avec toi; je t'ai effleurée au moins cent mille fois; j’ai plus qu'égalisé le compte avec toi!»

Je dis cela car, à bien des occasions, j'aurais quitté ce monde si ce n'eut été de Jésus, qui, après avoir communiqué directement d'atroces souffrances à mon âme, me réanimait en m'attirant près de son Coeur qui est vie pour moi, ou en me prenant dans ses Bras qui sont force pour moi, ou en versant de sa Bouche en moi un très doux élixir. Et puisque les souffrances communiquées directement à mon âme sont plus terribles que celles communiquées à mon corps, je serais sûrement morte bien des fois si ce n'eut été de ce merveilleux Jésus.

31.   Jésus communique à Luisa ses souffrances inouïes pour les péchés des hommes.   Audio

Quand Jésus voyait que j'arrivais à mes limites, c'est-à-dire que je ne pouvais plus porter «naturellement» mes souffrances, il m'aidait pour ne pas que je succombe. Parfois il le faisait directement, parfois il inspirait à mon confesseur de me réanimer plus rapidement. Dans ce cas, mes souffrances, vécues à travers l'obéissance, étaient quelque peu soulagées, mais pas autant que quand Jésus opérait directement.


Oh, comme le péché est mauvais ! Ah ! Seigneur, fais-le savoir à tous,
afin que chacun puisse fuir cet horrible monstre.
 


Jésus voulait me communiquer des souffrances extrêmes, il faisait sortir mon âme de mon corps, la prenait avec lui, et me laissait voir les nombreux péchés commis par les blasphèmes contre la Charité, ou autres péchés. À mon point de vue, d'après les effets ressentis en moi, je peux affirmer sans crainte de me tromper que le péché de malhonnêteté est celui qui offense le plus le Coeur de Jésus, qui le rend le plus amer.

Une fois, par exemple, alors que Jésus versait une petite part de son amertume en moi, j'ai ressenti que j'avalais quelque chose de nauséabond, de purulent et d'amer, qui pénétrait dans mon ventre et me donnait une haleine répugnante. J'aurais perdu connaissance si je n'avais pas rapidement pris quelque nourriture pour me faire vomir cette matière purulente.

On pourrait croire que cela m'arrivait seulement quand Jésus me faisait voir les méchancetés commises par ceux que l'on considère comme de grands pécheurs. Mais mon aimable Jésus m'attirait d'une manière particulière dans des églises où on l'offensait. On y blessait son Coeur par des choses saintes en soi, mais contrefaites: par exemple des prières vides faites par des personnes feignant la piété, ou encore la pratique de dévotions hypocrites. Les personnes concernées semblaient procurer à mon Jésus plus d'affronts que d'honneur.

Oui, ces actes mal accomplis donnaient des nausées à ce Coeur si saint, si pur et si droit. Plusieurs fois il m'exprima sa souffrance en me disant: «Mon enfant, vois les offenses et les insultes que me font, même dans des endroits saints, certaines personnes que l'on dit dévotes. Ces personnes sont stériles, même quand elles reçoivent les sacrements. Elles sortent de l'église ternies plutôt que purifiées; elles ne sont pas bénies par moi.»

Il me montrait aussi des personnes faisant des communions sacrilèges. Par exemple, un prêtre célébrant le Saint Sacrifice de la messe par habitude, dans un intérêt matériel et en état de péché mortel (je tremble en mentionnant cela). Parfois, Jésus me montrait des scènes si blessantes pour son Coeur qu'elles le faisaient presque tomber en agonie. Par exemple, quand ce prêtre consomma la Victime, Jésus fut forcé de quitter rapidement son coeur tout sali par les misères spirituelles.

Et au moment où, par les paroles puissantes de la consécration, Jésus allait être appelé à descendre du Ciel pour s'incarner dans l'hostie, il était dégoûté par l'hostie non encore consacrée, parce qu'elle était tenue par des mains impures et sacrilèges. Cependant, sans broncher, par l'autorité qui lui était donnée par Dieu, ce prêtre faisait descendre Jésus dans l'hostie. Pour ne pas manquer à sa promesse, Jésus s'incarnait dans cette hostie qui, au préalable, suintait la pourriture de l'impureté, et qui, par la suite, dégouttait du Sang provoqué par un déicide. Comme il faisait pitié l'état sacramentel dans lequel Jésus m'apparut alors. Il semblait vouloir fuir ces mains indignes; mais, de par sa promesse, il était forcé de rester jusqu'à ce que la forme du pain et du vin soit consommée par un estomac qui, dans le cas présent, était pour lui plus nauséabond encore que les mains indignes qui l'avaient touché plusieurs fois auparavant.

Quand la sainte hostie fut ainsi consommée, Jésus vint à moi en se lamentant: «Oh! mon enfant, laisse-moi verser une partie de mon amertume en toi. Je ne peux pas la retenir plus longtemps. Aie pitié de ma condition qui est devenue trop douloureuse! Prends patience, et souffrons un peu ensemble.» Je lui répondis: «Seigneur, je suis prête à souffrir avec toi. Oui, si la capacité m'était donnée de prendre toute ton amertume, je le ferais volontiers, de telle manière que je ne te vois pas souffrir.» Jésus alors versa de sa Bouche dans la mienne la part d'amertume que je pouvais porter, et me dit: «Mon enfant, ce que j'ai versé en toi n'est rien, mais c'est tout ce que tu peux recevoir. Comme je désirerais que beaucoup d'autres âmes soient disposées à faire le même sacrifice que toi par amour pour moi! Ce n'est pas que je ne peux verser en eux toute l'amertume que contient mon Cœur; c'est pour que je puisse goûter l'amour réciproque et bienveillant de mes enfants.»

Les mots ne peuvent pas exprimer l'amertume que Jésus versa en moi empoisonnée, nauséabonde et soulevant le coeur par sa putréfaction. Même si je faisais tout pour la garder, mon estomac refusait de l'accepter. Une forte impulsion la faisait remonter à ma gorge; mais à cause de mon amour pour Jésus, et avec le soutien de sa grâce, je ne l'ai pas rejetée.

Qui pourrait décrire les souffrances qu'entraînaient en moi ces épanchements avec Jésus! Ils furent si nombreux que si je n'avais pas été soutenue, fortifiée et revigorée par lui, j'aurais sûrement été victime de la mort bien des fois. Jésus versait en moi seulement une petite portion de l'amertume qu'il portait. Une créature ne peut normalement pas porter autant d'amertume ou de douceur comme mon très aimable Jésus en versait parfois en moi. Lui seul porte et tolère l'amertume causée par le péché. J'ai toujours eu cette opinion: le péché est laid et destructif! Si toutes les créatures ressentaient et reconnaissaient l'effet empoisonné et amer du péché, elles éviteraient le péché comme s'il était un monstre horrible émergeant de l'enfer!

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  Dans le Tome 9 (cf. 1 er octobre 1909), Luisa dit que, dans les années précédentes, Jésus avait voulu la «prendre» quatre ou cinq fois, mais que son confesseur avait intercédé pour qu'il laisse la victime sur la terre.

32.   Jésus permet à Luisa de participer à son ineffable douceur en lui montrant des scènes consolantes des saints mystères de la foi.   Audio

Comme c'était beau de voir le prêtre célébrer
la messe et Jésus transformé.
 

Si l'obéissance me fit décrire certaines scènes pénibles que mon toujours aimable Jésus me faisait vivre pour que je puisse participer à ses souffrances, je ne peux pas passer sous silence qu'il me fit aussi voir des scènes consolantes qui séduisaient mon coeur. De temps à autre, il me permettait de voir de bons et saints prêtres qui, avec ferveur et humilité, célébraient les mystères de la foi. Quand je voyais ces scènes, j'étais très souvent inspirée de dire à mon bien-aimé Jésus avec mon coeur tout rempli d'affection: «Comme il est élevé, grand, excellent et sublime le ministère du prêtre auquel est donnée cette noble dignité de non seulement s'affairer autour de toi, mais de t'immoler à ton Père Éternel comme Victime de Réconciliation, d'Amour et de Paix

J'étais consolée quand je regardais seule, ou aux côtés de Jésus, un saint prêtre célébrer la messe. Avec Jésus en lui, le célébrant me paraissait comme un homme transformé. Il m'apparaissait même comme si ce fut Jésus lui-même qui célébrait le Sacrifice divin à sa place. Il était extrêmement exaltant d'entendre Jésus réciter les prières de la messe avec autant d'onction, de le voir bouger et exécuter la sainte cérémonie avec autant de dignité. Ceci éveillait en moi une grande admiration pour un ministère aussi haut et aussi saint. Je ne sais pas combien de grâces j'ai reçues quand je voyais la messe célébrée avec autant d'attention et de dévotion.

Combien d'autres divines illuminations j'ai eues et que je préférerais passer sous silence. Mais puisque l'obéissance me le commande et que, lorsque j'écris, Jésus me réprimande souvent pour ma paresse ou parce que je veux omettre des choses, je vais m'exécuter. En mettant toute ma confiance en lui, je veux lui dire: «Quelle patience on doit avoir avec toi mon bon Jésus. Je vais te satisfaire, mon doux Amour. Mais parce que je me sens indigne et inhabile pour parler de mystères aussi profonds, sublimes et exaltants, je le ferai en comptant beaucoup sur l'aide de ta divine grâce.»

33.   De la Sainte Messe et de la Résurrection des Corps.   Audio

La chose la plus réconfortante pour un chrétien est : Jésus dans le sacrement
et la résurrection de nos corps pour la gloire.


Pendant que j'assistais attentivement au Sacrifice Divin, Jésus me fit comprendre que la messe recouvre tous les mystères de notre religion. Elle parle silencieusement au cœur, de l'Amour infini de Dieu. Elle nous parle aussi de notre Rédemption en nous faisant nous souvenir des souffrances que Jésus supporta pour nous. La messe nous fait comprendre que, non satisfait d'être mort une fois sur la Croix pour nous, Jésus veut, dans son immense Amour, se diffuser en nous et perpétuer son État de Victime à travers la Sainte Eucharistie.

Jésus me fit aussi comprendre que la Messe et la Sainte Eucharistie sont un rappel perpétuel de sa Mort et de sa Résurrection, qu'ils nous donnent le remède parfait pour notre vie mortelle et qu'ils nous disent que nos corps, qui seront désintégrés et réduits en cendre par la mort, ressusciteront pour la vie éternelle au dernier jour. Pour les bons, ce sera pour la gloire, et pour les méchants, ce seront les tourments. Ceux qui n'ont pas vécu avec le Christ ne ressusciteront pas en lui. Mais les bons qui ont été intimes avec lui pendant leur vie, auront une résurrection similaire à la sienne.

Il me fit bien comprendre que la chose la plus consolante du Saint Sacrifice de la messe est Jésus vu dans sa Résurrection. Cela est supérieur à n'importe quel autre mystère de notre sainte religion. Au même titre que sa Passion et sa Mort, sa Résurrection est renouvelée mystiquement sur nos autels quand la Messe est célébrée. Sous le voile du pain sacramentel, Jésus se donne lui-même aux communiants pour être leur compagnon au long du pèlerinage de leur vie mortelle. Par le moyen de la grâce provenant du Sein de la Sainte Trinité, il donne la vie qui dure toujours à ceux qui participent, corps et âme, au sacrement de l'Eucharistie.

Ces mystères sont si profonds que nous ne pourrons les comprendre entièrement que dans notre vie immortelle. Cependant, dès maintenant, dans le sacrement, Jésus nous donne de plusieurs manières — presque tangiblement — un avant-goût de ce qu'il nous donnera dans le Ciel.

La messe nous dispose à la méditation sur la Vie, la Passion, la Mort et la Résurrection de Jésus. L'Humanité du Christ, à travers les vicissitudes de sa Vie terrestre, s'est réalisée en trente-trois années, mais, dans la messe, mystiquement et dans une brève période de temps, elle est renouvelée dans l'état d'anéantissement des espèces sacramentelles. Ces espèces contiennent Jésus dans l'état de Victime de Paix et d'Amour propitiatoire, jusqu'au moment où elles sont consommées par un humain. Après cette consommation, la présence sacramentelle de Jésus n'existe plus dans le coeur: Jésus retourne dans le Sein de son Père, exactement comme il le fit quand il ressuscita des morts.

Dans le sacrement de l'Eucharistie, Jésus nous rappelle que notre corps ressuscitera dans la gloire. Tout comme Jésus retourne dans le Sein du Père quand cesse sa présence sacramentelle, ainsi passerons-nous à notre résidence éternelle dans le Sein du Père quand nous cesserons d'exister à travers notre vie terrestre présente. Notre corps, à l'instar de la présence sacramentelle de Jésus après la consommation de l'hostie, semblera ne plus exister. Mais, au jour de la Résurrection universelle, par un très grand miracle de la Toute-Puissance divine, il reprendra vie et, uni à notre âme, il jouira de la béatitude éternelle de Dieu. D'autres, au contraire, s'en iront loin de Dieu pour souffrir d'atroces et éternels tourments.

Le Sacrifice de la messe produit des effets merveilleux, limpides et lumineux. Pourquoi donc les chrétiens en profitent-ils si peu? Pour l'âme qui aime Dieu, peut-il y avoir quelque chose de plus consolant et de plus bénéfique? Le sacrement nourrit l'âme pour qu'elle soit digne du Ciel, et il donne au corps le privilège d'être béatifié dans l'éternelle Volonté de Dieu.

En ce grand jour de la résurrection des corps, un grand événement surnaturel se déroulera, comparable à ce qui se passe au moment où, après que nous ayons contemplé le ciel étoilé et que le soleil apparaît, celui-ci absorbe la lumière des étoiles; mais, même si elles disparaissent du regard de l'observateur, les étoiles gardent leur lumière et restent à leur place. Semblables à des étoiles, les âmes, réunies pour le jugement universel dans la Vallée de Josaphat, seront capables de voir les autres âmes. La lumière acquise et communiquée par le Très Saint Sacrifice et le sacrement d'Amour sera visible dans chaque âme. Mais quand Jésus, le Soleil de Justice, se présentera, il absorbera en lui toutes les âmes saintes. Il leur permettra de toujours exister, pour nager dans les immenses mers des attributs divins.

Et qu'adviendra-t-il des âmes privées de cette Lumière divine? Si je voulais répondre à cette question, je pourrais écrire bien longtemps. Si le Seigneur le veut, je réserverai cette question pour une autre occasion. Jésus me fit comprendre que les corps qui seront réunis à leur âme resplendissante de lumière, seront éternellement unis à Dieu. Mais les âmes qui n'auront pas de lumière parce qu'elles ne voulaient pas participer au Saint Sacrifice et au sacrement d'Amour, seront jetées dans les profondeurs des ténèbres. Et, à cause de leur ingratitude volontairement commise contre le Grand Donateur, elles deviendront des esclaves de Lucifer, le prince des ténèbres. Elles seront éternellement tourmentées par de terrifiants remords.

34.   Dernières préparations de Luisa pour le mariage mystique.    Audio

"Je t'ai mis cette couronne pour qu'il ne manque rien pour
te rendre digne d'être mon épouse"


À la suite des nombreuses grâces que Jésus m'accordait sans cesse, j'étais imbue du saint désir d'être toujours unie à lui, y compris quand mon âme sortait de mon corps et que Jésus me donnait de grandes douleurs à souffrir pour ceux qui manquent d'appréciation pour le Saint Sacrifice de la messe et pour le sacrement d'Amour. Quant à Jésus, il me rappelait souvent sa douce promesse que j'ai déjà mentionnée à propos du mariage mystique qu'il voulait conclure avec moi. Et je le priais souvent en ce sens en disant: «Ô très doux Époux, hâte-toi et ne retarde pas mon union intime avec toi. Ne vois-tu pas que je ne peux plus attendre? Que nous nous unissions par des liens indissolubles d'amour afin que personne ne puisse nous séparer, ne fût-ce que pour un instant!»

Mais, Jésus, qui entretenait en moi le brûlant désir de ce mariage mystique, me dit: «Tout ce qui est de la terre doit être rejeté. Tout! Tout! Et pas seulement de ton coeur, mais aussi de ton corps. Tu ne sais pas comment peut être nuisible la moindre ombre de la terre. C'est un fort empêchement à mon Amour. À ces paroles, je devins audacieuse et je lui dis vivement: «Mon Seigneur, il semble que j'ai encore quelque chose à enlever de moi-même, avant que je te sois complètement agréable? Pourquoi ne pas me dire ce que c'est? Tu sais que je suis prête à faire tout ce que tu veux.» Comme je disais cela, je reçus un rayon de lumière de Jésus par lequel je devins consciente qu'il voulait parler de l'anneau d'or avec son image de crucifié dessus que je portais à mon doigt.

Vivement je lui dis: «Ô Saint Époux, je suis disposée à l'enlever de mon doigt, si tu le désires.» Il dit: «Sache que je te donnerai un anneau plus précieux et plus beau, sur lequel mon Image sera gravée. Il sera vivant, de telle sorte que chaque fois que tu le regarderas, de nouvelles flèches d'amour pénétreront dans ton coeur. Ton anneau n'est plus nécessaire maintenant.» Sur ce, plus satisfaite que jamais, et parce que je ne ressentais aucune passion pour l'anneau, rapidement je l'enlevai de mon doigt en disant: «Saint Époux, maintenant que je t'ai plu, dis-moi s'il y a encore quelque chose en moi qui pourrait être un empêchement à notre éternelle et indissoluble union.»

Après avoir attendu un très long moment rempli de préparations soignées et de consolations élevées, sans souffrance, le jour tant désiré de mon union mystique avec Jésus, l'Époux bien-aimé de mon âme, se présenta enfin. Comme je m'en souviens très bien, c'était à quelques jours de la vigile de la fête de la Pureté de la Sainte Vierge.

La nuit précédente, mon aimable Jésus était tout particulièrement affectueux et dans la jubilation. Il parlait avec plus d'intimité qu'à l'accoutumée. Il prit mon coeur dans ses Mains et il le regarda encore et encore. Après l'avoir très bien examiné, il l'épousseta et le replaça. Alors il apporta une robe d'une grande beauté, qui semblait être faite d'or fin tacheté de différentes couleurs. Je la mis. Il prit deux bijoux précieux, des pendants d'oreilles, et il les plaça à mes oreilles. Il orna mon cou et mes poignets d'un collier et de bracelets faits de bijoux précieux. Il plaça sur ma tête une magnifique couronne, couverte de resplendissants bijoux. Plus tard, il me sembla que les joyaux produisaient un son si beau qu'ils semblaient parler de la Beauté, de la Puissance, de la Bonté, de la Charité et de Majesté de Dieu, ainsi que de toutes les vertus de l'Humanité de Jésus, mon Époux. Il serait impossible de décrire ce que j'entendis pendant que mon âme nageait dans une mer de consolations. Comme il mettait un bandeau autour de mon front, il me dit: «Très douce épouse, cette couronne qui orne ta tête t'est donnée par moi afin que rien ne manque pour te rendre digne d'être mon épouse. Tu me la retourneras après notre mariage, et je te la redonnerai dans le Ciel, après ta mort.»

En dernier lieu, Jésus apporta un voile avec lequel il me couvrit de la tête aux pieds. Dans cette précieuse tenue, je devins profondément pensive, méditant sur la pauvreté de ma personne et sur la signification de chaque ornement dont il m'avait parée la nuit précédant notre mariage mystique. Je peux dire que jamais dans ma vie je ne m'étais sentie dans une si extravagante situation. Cela me fit ressentir le grand fardeau que Dieu peut donner à une créature considérée comme une amoureuse de lui. Oh! quelle sensation vraiment étrange habita mon esprit. Plutôt que de ressentir la sublimité de ce que Jésus venait d'opérer sur ma personne, je ressentais tout l'opposé. Je me suis sentie anéantie d'une manière qui me faisait croire que j'étais hors de mon être, et que j'étais morte. Mais, dans cet état d'anéantissement, j'eus recours à mon bien-aimé Jésus.

Dans ma grande confusion, je n'arrivais pas à croire que c'était Dieu qui avait paré la plus petite de ses servantes avec autant et de si précieux joyaux. Il me semblait inconvenant que non seulement il m'ait fourni une telle tenue, mais qu'encore et plus que tout, un Dieu ait agi comme serviteur de l'épouse qu'il a choisie, un Dieu à qui toute créature obéit au moindre de ses signes. Ainsi je le suppliai d'avoir pitié de moi et de me pardonner.

Pour ce qui est de la signification des diverses parties de ma tenue, chacune considérée séparément, je les passe sous silence, puisque je me souviens très peu de cela maintenant, après tant d'années. Je dis seulement que le voile que Jésus posa sur ma tête et qui descendait jusqu'à mes pieds terrifia les démons qui faisaient le guet pour voir ce que Jésus faisait sur ma personne. Mais aussitôt qu'ils me virent vêtue de cette manière, ils étaient si effrayés et terrifiés qu'ils n'osèrent pas s'approcher de moi ou me molester. Ils avaient perdu toute leur audace et leur témérité.

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Dans les missels de l'époque, cette date est le 16 octobre. C'était en 1888. Luisa avait 23 ans.

35.   Le mariage mystique.   Audio

Jésus a mis la bague à mon doigt. 


Je répète ici mon refrain habituel en disant que je trouve difficile de mettre sur papier ce qui se passa entre Jésus et moi. J'arrive à vaincre ma timidité seulement parce que je veux être obéissante. Je résumerai ma narration en disant qu'en la vigile de la fête de la Pureté de la Très Sainte Vierge Marie, moi, pauvre personne,  j'étais attirée par mon aimable Jésus, qui terrifiait totalement les démons.  Ils fuirent, et les anges de Dieu vinrent avec d'inhabituelles vénérations pour moi, ce qui me fit rougir comme si j'avais commis quelque chose de mal ou de méprisable. Ils vinrent près de moi et me tinrent compagnie jusqu'à ce que mon aimable Jésus fût revenu.

Le matin suivant, Jésus, dans toute sa Majesté et avec un Charme et une Douceur inhabituels, vint à moi, en compagnie de la Très Sainte Vierge Marie et de sainte CatherineJésus demanda aux anges de chanter une hymne céleste et belle.  Pendant qu'ils chantaient, sainte Catherine m'encourageait tendrement. Elle prit ma main pour que Jésus puisse placer un précieux anneau de mariage à mon doigt. Et, dans une ineffable bonté, Jésus m'étreignit et me baisa plusieurs fois.  Ceci fut aussi fait par ma Mère, la Très Sainte Vierge Marie. Je fus témoin d'un céleste entretien dans lequel Jésus parlait de l'attirance amoureuse qu'il avait pour moi. De mon côté, plongée dans une grande confusion à cause de la nullité de mon amour pour lui, je lui dis: «Jésus, je t'aime! je t'aime! Tu sais combien je t'aime!»

La Sainte Vierge m'entretint sur la grâce extraordinaire que Jésus, mon aimable Époux, m'accordait et elle m'exhorta à lui rendre un tendre amour réciproque.

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Sainte Catherine de Sienne, mystique italienne, membre du tiers ordre de Saint-Dominique et docteur de l'Église.

PRÉCISION:

Luisa écrit, en fin du chapitre 53 du texte italien: «Mon Époux Jésus m'a donné de nouvelles règles pour vivre plus parfaitement, mais comme cela fait longtemps, je ne m'en souviens pas bien, alors je les passe à côté.» Bien que le texte italien ne présente pas ces règles, l'édition de "Guy Harvey" a choisi de le faire ci-dessous. 

Selon l'information transmise par l'éditeur officiel du LDC, monsieur Bruno Perrinet, Jésus a donné à Luisa, à l'occasion de ses Noces Mystiques, quatre règles de vie. Elles se retrouvent en appendice 2 de la copie manuscrite du premier volume 🤔

36.   Jésus donne à Luisa cinq règles de vie.   [4 règles de vie selon la copie manuscrite] Audio

Jésus, mon Époux, me donna de nouvelles règles de vie pour que je puisse vivre plus intimement unie à lui et le suivre de plus près. Pour moi, ces règles ne sont pas faciles à expliquer techniquement. Dans leur essentiel et dans leur pratique quotidienne, par la grâce de Dieu, je ne les ai jamais transgressées.

Les voici:

1. 💥 Je dois avoir un total détachement pour tout le créé💥, m'incluant moi-même. Je dois vivre dans un parfait oubli de toute chose, pour que mon intérieur ne soit fixé que sur Jésus. Et je dois faire cela avec un vivant et palpitant amour pour lui, afin que, réjoui de mes actions, il puisse trouver dans mon coeur une résidence permanente. Il m'a dit qu'à l'exception de lui, je ne dois jamais m'attacher à personne — pas même à moi-même. Mes souvenirs sur tout et sur toute chose ne doivent être éveillés qu'en lui, puisque toutes les créatures ne se trouvent qu'en lui. Pour y parvenir, il est nécessaire de toujours agir dans une sainte indifférence et de faire abstraction de tout ce qui se passe autour de soi. Je dois toujours agir dans la rectitude et la simplicité quoiqu'il m'arrive provenant des créatures.

Quand, occasionnellement, je ne mettais pas ces choses en pratique, mon doux Jésus me réprimandait sévèrement en me disant: «Si tu n'en viens pas à un détachement à la fois effectif et affectif, tu ne seras pas complètement investie de ma Lumière. Si, au contraire, tu te dépouilles de toute chose de la terre, tu deviendras comme un cristal transparent qui permet à la plénitude de la lumière de passer à travers lui. De cette manière, ma Divinité, qui est Lumière, te pénétrera


2. 💥 Je dois être détachée de moi-même et vivre uniquement et complètement en Jésus💥. Je dois être prudente en me revêtant d'un véritable esprit de foi. Par cet esprit de foi, je pourrai obtenir les moyens de me connaître et de me méfier de moi-même, de reconnaître que, par moi-même, je suis bonne à rien, d'acquérir les moyens de mieux connaître Jésus, et d'avoir une plus grande confiance en lui.

Il me dit aussi: «Tu sortiras hors de toi-même et tu plongeras dans l'immense mer de ma Providence, après que tu auras appris à te connaître et à me connaître. Ma petite épouse, parce que je suis jaloux, je ne te permettrai pas de prendre le plus petit plaisir ailleurs.  Tu dois toujours te tenir près de ton Époux, devant lui, pour qu'il ne puisse pas douter de toi. Ainsi 💥 tu me donneras une domination absolue sur toi💥, de telle manière que si je veux te caresser ou t'étreindre, ou te remplir de charismes, de baisers ou d'amour ou même te battre, te faire de la peine, t'infliger des punitions je le pourrai. Par amour pour moi, et dans une pleine liberté, tu te soumettras à tout ce que je crois nécessaire, puisque nous avons en commun nos peines et nos joies. Pour aucune autre raison que de nous plaire et de nous satisfaire mutuellement, nous aurons même une compétition pour savoir qui peut endurer le plus de souffrance


3. Il continua en disant: «💥 Non pas ta volonté mais la mienne doit vivre en toi pour dominer comme un roi dans son palais royal💥 . Mon épouse, cela doit absolument prévaloir entre toi et moi. Autrement, nous aurons à supporter la brouille d'un amour imparfait, duquel des ombres s'élèveront sur toi et amèneront le désagrément d'une opération non ajustée à la noblesse qui doit prévaloir entre moi et toi, mon épouse. Cette noblesse t'habitera si, de temps en temps, tu essayes d'entrer dans ton néant, c'est-à-dire si tu atteins la parfaite connaissance de toi-même. Tu ne dois pas t'arrêter là, parce qu'après que tu auras reconnu ton néant, je veux que tu disparaisses totalement en moi. Tu dois faire tout ce que tu peux pour entrer dans la Puissance Infinie de ma Volonté. Par là, tu attireras sur toi toutes les grâces dont tu auras besoin pour t'élever en moi, afin de tout faire avec moi, sans référence à toi-même.»


4.  Et il continua: «💥 À l'avenir, je veux qu'il n'y ait plus de «tu» et de «je». Il n'y aura pas de «je ferai» et de «tu feras». Ces paroles disparaîtront et seront remplacées par «nous ferons💥 ». Tout sera «notre». Comme toute épouse fidèle le ferait, tu feras action commune avec moi et tu guideras les destinées du monde. Toutes les personnes rachetées par mon Sang sont devenues mes enfants et mes frères. Et, puisqu'elles sont miennes, elles seront aussi tes enfants et tes frères. Et parce que, tant parmi elles sont devenues sauvages et se sont éloignées, tu les aimeras comme une vraie mère. Beaucoup sont aussi dévergondées: toi comme moi, nous assumerons leurs souffrances bien méritées. Au prix de très durs sacrifices, tu essayeras de les conduire à la sécurité. Chargées des mérites de tes souffrances et arrosées de ton sang et du mien, tu les conduiras à mon Coeur. Quand mon Père les verra, il sera non seulement miséricordieux et indulgent mais, si elles sont contrites comme le bon larron, elles prendront rapidement l'éternelle possession du Paradis.»


5.  «Finalement, dans la mesure où tu te détacheras de tout ce qui n'est pas totalement mien, tu deviendras toujours plus plongée dans ma Volonté absolue. Alors, grâce à la connaissance de mon Essence qui, jour après jour, deviendra plus vive en toi, tu acquerras la plénitude de mon Amour. En y mettant tout ton amour et ton intelligence comme jamais auparavant, tu trouveras en moi toutes les créatures, comme dans un miroir qui réfléchit la lumière et les images. D'un seul regard tu les verras toutes et tu connaîtras l'état de leur conscience. Ensuite,💥comme une mère aimante et dans un vrai esprit de miséricorde, qui est mon Esprit et celui de ma Mère, tu feras le sacrifice suprême en t'immolant toi-même pour ces créatures.💥 Ce sacrifice sera comme un manteau qui te couvrira comme ma véritable et fidèle imitatrice et épouse.»

37.   Les impressions de Luisa après avoir contemplé la gloire des anges et des saints dans le Ciel.    Audio

Parfois en m'emportant avec lui, il m'emmenait au Paradis. 

Comment puis-je décrire les subtilités de l'Amour de mon aimable Jésus qui, avec générosité, et même avec excès, contracta son mariage spirituel avec moi et me donna mes nouvelles règles de vie. À plusieurs reprises, il emporta mon âme avec lui dans le Paradis, pour que je puisse y entendre les esprits bienheureux chanter sans cesse des hymnes de gloire et de remerciements à la Divine Majesté. Je contemplais les différents choeurs des anges et des saints. Tous étaient immergés dans la Volonté de Dieu, absorbés par son Immensité.

Comme je regardais autour du Trône de Dieu, je vis plusieurs lumières resplendissantes, infiniment plus resplendissantes que le soleil. Ceci me permit de voir et de comprendre les vertus intrinsèques et les attributs de Dieu qui, dans leur essence, sont communes aux trois Personnes Divines. J'étais capable de comprendre que des âmes bénies, ensemble ou en succession, jouissent de cette lumière et en restent ravies. Et malgré les siècles sans fin de l'éternité, elles ne comprennent jamais complètement Dieu. Ceci parce que les esprits créés ne peuvent pas comprendre la Majesté, l'Immensité et la Sainteté de Dieu, un Être incréé et incompréhensible.

De ce que j'ai vu et appris, j'ai aussi compris que les esprits angéliques et les bienheureux participent aux vertus de la Trinité quand ils baignent dans cette Lumière. Tout comme quand nous sommes exposés à la pleine lumière du soleil, nous en sommes réchauffés, ainsi les anges et les saints en présence du Soleil Éternel de Dieu au Paradis, sont investis de l'éternelle Lumière et ainsi ils ressemblent à Dieu. La différence est que Dieu est essentiellement infini par nature, alors que les esprits bienheureux et angéliques sont limités et participent aux attributs de Dieu seulement selon leur capacité propre et limitée. Dieu, le Soleil Éternel et Infini, donne tout de lui-même sans jamais rien perdre. Alors que les créatures, qui sont essentiellement participantes, ressemblent au Soleil Éternel seulement selon la très petite grandeur et magnitude de leur propre soleil.

J'ai nettement l'impression que tout ce que je viens de dire est inexact et inadéquat. Car ce que j'ai appris dans ce voyage béni ne pourra certainement pas être bien compris à partir de mes mots. J'ai l'impression globale de ce que j'ai perçu, mais je ne peux pas clairement le raconter. L'âme sort de son corps pour un bref temps, elle est transportée dans ce Royaume béni, puis elle revient dans la prison de son corps. Il est impossible de raconter tout ce que qui est vu et appris. L'expérience d'une âme à qui Dieu donne un exemple ce qu'il veut qu'elle comprenne, peut être comparée à celle d'un bébé qui peut à peine balbutier et qui est exposé à une grande performance théâtrale. Il voudra dire beaucoup de choses de ses impressions. Mais parce qu'il ne sait pas comment le dire, il a honte et reste muet.

Si ce n'était de l'obéissance, j'aimerais mieux rester muette comme une enfant. Je ne peux que dire absurdité après absurdité. Je continuerai cependant en disant que je me suis retrouvée marchant avec Jésus, mon Époux, dans cette Patrie bénie parmi les choeurs des anges, des saints et des bienheureux. Parce que j'étais une nouvelle mariée, en cercle, ils nous faisaient la cour et participaient en même temps que nous aux joies de notre mariage récent. Il semblait qu'ils avaient oublié leurs propres désirs et qu'ils étaient intéressés seulement aux nôtres. S'adressant aux saints, Jésus dit: «À cause de sa fidélité à ma grâce, cette âme est devenue un triomphe et un prodige de mon Amour.» Puis il me présenta aux anges et leur dit: «Voyez comment mon Amour pour elle a tout surpassé.» Il me plaça ensuite dans le siège de gloire pour lequel il m'a rendu digne. Il me dit: «Ici est ta place de gloire, et personne ne pourra te la prendre.» Je croyais qu'il voulait dire que je ne retournerais pas sur la terre. Mais, hélas, du moment que je fus convaincue de cela, je me suis retrouvée entre les murs de mon corps.

38.   L'amertume insupportable de Luisa d'avoir encore à vivre dans la prison de son corps, exilée de sa patrie céleste.    Audio

« Qu'est-ce qui vous fait tant désirer le ciel ? » 


Comment décrire le fardeau que je ressentis en ayant à rester à nouveau dans mon corps. Comparées au Ciel, toutes les choses de la terre me paraissaient comme des rebuts. Ces choses réjouissent les sens de quelques créatures, mais à moi elles paraissaient misérables. Les personnes qui me sont chères et pour lesquelles j'ai beaucoup de considération, avec qui j'ai passé beaucoup de temps dans des conversations gentilles et polies, maintenant me semblaient ennuyeuses et sans intérêt. Cependant, quand je les regardais comme des reflets de Dieu, mon âme expérimentait une ombre de satisfaction et de contentement, et j'étais capable de les tolérer. À cause de tout cela, mon coeur n'était pas à l'aise, mais je ne fis rien que de me plaindre à Jésus.

Mon désir continuel d'être au Ciel, ma souffrance intérieure, mon ennui par rapport aux choses de ce monde, tout rongeait mon âme. Il m'apparaissait qu'il m'était maintenant impossible de continuer à vivre sur la terre. Cependant mon obéissance à Dieu dans toutes les circonstances commandait que je ne désire pas la mort, mais que je continue à vivre sur la terre aussi longtemps que Dieu le désirerait. Ainsi donc je m'ajustai, quand je fus en contrôle de moi-même. Par obéissance, je voulais rester calme, mais je n'y parvenais pas entièrement. De temps en temps, je perdais toute maîtrise et, je le confesse, j'échouais. Mais que pouvais-je faire? Il était à toute fin pratique impossible pour moi de me contrôler. J'expérimentais un réel martyre, à travers lequel je combattais constamment, me servant de tous les moyens possibles pour maîtriser mon anxiété. Mais un contrôle parfait m'était impossible.

Mon bien-aimé Jésus me dit: «Mon épouse, sois calme. Qu'est-ce qui te fait tant désirer le Ciel?»  Je répondis: «Je veux toujours rester avec toi. Je perds mon esprit quand je suis loin de toi, ne fût-ce que pour un seul instant. Je veux te rejoindre à tout prix.» Alors Jésus me dit: «Très bien, si c'est pour cette raison. Je te plairai en restant toujours avec toi.» Je répondis en disant: «Je serais satisfaite si tu faisais cela, mais tu disparais, ce qui est la même chose que de me laisser seule. Au Ciel, il n'en est pas ainsi, parce que là, tu ne peux pas disparaître. Mon expérience me le prouve.» 

39.   L'héroïsme de Luisa d'accepter de revenir dans son corps après avoir visité le Ciel plusieurs fois.   Audio

«N'êtes-vous pas prêt à souffrir n'importe quelle douleur
pour le salut d'une seule âme ?
»

Jésus sait blaguer avec ses créatures. Pour ceux qui ne le sauraient pas, je dirai comment il a blagué avec moi plusieurs fois. Par exemple, pendant le temps où j'expérimentais ces anxiétés bénies, Jésus vint à moi à la hâte et dit: «Veux-tu venir avec moi maintenantJe répondis: «Pour aller où?» Il dit: «Au Ciel.» Et moi: «Le penses-tu réellement?» Lui: «Oui, oui, hâte-toi et ne tarde pasJe repris: «Très bien, allons-y, même si j'ai un peu peur que tu veuilles te moquer de moi.» Jésus ajouta: «Non, non, je te le dis vraiment, allons. Je veux te prendre avec moi

En disant cela, il attira à lui mon âme de telle manière que je me suis sentie sortir de mon corps et, dans un instant, je me trouvai avec lui dans un envol vers le Ciel. Oh! le bonheur de mon âme! Je croyais que j'allais quitter la terre de façon permanente et que ma souffrance pour l'amour de Jésus était seulement un rêve. Nous arrivions dans les hauteurs des cieux. Je commençais à entendre les chants harmonieux des bienheureux. Je priai Jésus de rapidement me conduire vers ce concert céleste. Mais, graduellement, il ralentissait son vol pour que tout se passe plus lentement. Voyant cela, je commençai à soupçonner que je n'allais pas vraiment rentrer dans la céleste Patrie avec lui, et je me suis dit en moi-même: «Jésus blague avec moi.» Aussi, de temps en temps, pour me rassurer, je lui disais: «Cher Jésus, dépêche-toi. Pourquoi ralentis-tuIl me dit:

«Regarde là-bas, ce pécheur tout près d'être perdu. Descendons sur la terre encore une fois. Essayons de rendre son âme contrite; peut-être qu'il se convertira. Invoquons ensemble la Miséricorde de mon Père Céleste. Ne veux-tu pas que ce pécheur soit sauvé? Attends encore un peu. N'es-tu pas prête à souffrir quelques peines pour le salut d'une âme qui me coûta tant de Sang

À ces mots, je m'oubliai moi-même, j'oubliai le voyage, je renonçai au Ciel et aux chants des célestes choristes et je dis à Jésus: «Oui, oui, tout ce que tu désires. Je suis prête à souffrir pour que tu puisses sauver cette âme.» Et en un clin d'oeil il m'amena à ce pécheur. Pour le convaincre de se rendre à la grâce, Jésus l'informa de toutes les raisons de se préoccuper de son salut. Mais notre espoir fut vain. Alors Jésus me dit tristement:

«Mon épouse, veux-tu prendre sur toi la punition qu'il mérite? Si tu veux retourner dans ton corps pour y souffrir, la Justice divine pourra être apaisée, et je pourrai faire miséricorde à cette âme. Comme tu peux le voir, ni nos paroles, ni nos raisons ne l'ont ébranlé. Pour nous, il n'y a rien à faire que de souffrir la punition qui lui est due. « La souffrance est la voie la plus puissante pour satisfaire la Justice divine et faire accepter la grâce de la conversion par le pécheur.»

Je consentis à la requête de Jésus, et il me ramena promptement à mon corps. Je ne peux pas décrire les souffrances que j'expérimentai quand je repris contact avec mon corps. Ce dernier sembla s'objecter au retour de mon esprit et me fit me sentir toute dilatée. Au même moment, mon âme se sentit oppressée et sans vie, comme si je suffoquais et que j'en étais à ma dernière respiration. Je n'arrivais pas à porter cela. Jésus était le seul témoin de tant de souffrance. Lui seulement pourrait décrire les souffrances atroces et extrêmes que mon âme et mon corps endurèrent. Après quelques jours de souffrance, Jésus me laissa percevoir la conversion de ce pécheur, avec son âme déjà sauvée. Jésus alors me dit: «Es-tu aussi heureuse que je le suis?» «Oui, oui!» lui répondis-je.

Je ne peux pas dire combien de fois Jésus répéta ces blagues. Une fois, il me fit entrer dans le Paradis seulement pour me dire peu après: «Tu as oublié de demander à ton confesseur qu'il te donne la permission de venir avec moi. Tu dois donc retourner à ton corps pour recevoir cette permission.» Je lui dis: «Quand mon âme était dans mon corps et que j'étais sous la direction de mon confesseur, je devais lui obéir. Mais puisque tu es le premier parmi les confesseurs et que je suis avec toi, toi mon Époux, je relève maintenant uniquement de toi.» Jésus me répondit calmement: «Non, non, mon épouse, je veux que tu obéisses à ton confesseur pour tout

Il me fit ainsi retourner à mon corps bien des fois. Ses blagues créaient parfois en moi des ressentiments, et même de l'amertume et de l'impertinence. Alors Jésus les répétait moins souvent. Néanmoins, j'étais continuellement au lit, expiant pour les pécheurs, avec des périodes d'anxiété causées par mon désir d'aller au Paradis avec mon Époux Jésus. Ce désir alternait avec celui de le garder toujours avec moi sur la terre, pour m'éviter d'avoir à aller au Ciel juste pour revenir ensuite à mon corps. J'étais constamment martyrisée.

40.   Jésus prépare Luisa pour le renouvellement de son mariage mystique dans le Ciel avec la sanction de la Sainte Trinité. Il lui parle des vertus théologales [foi, espérance, charité].   Audio

Le mariage en présence de toute la Cour Céleste. 


Un matin, après une période de trois ans, Jésus me fit comprendre qu'il voulait ratifier le mariage qu'il avait effectué avec moi sur la terre, mais cette fois dans le Ciel avec la sanction du Père et du Saint-Esprit et à la vue de toute la Cour céleste. Il m'avisa de me préparer pour cette grâce singulière. Pour lui obéir je fis ce que je pouvais par moi-même. En vérité, cependant, puisque j'étais si misérable et inapte à faire correctement les choses, je le priai, lui qui est le plus grand des artisans, pour qu'il préside lui-même à ce travail de sainte purification. Autrement, je n'aurais jamais réussi à faire ce qu'il me demandait.

Cette très grande grâce me fut accordée à la vigile de la Nativité de la Sainte Vierge Marie10  et voici comment. Ce matin-là, mon toujours aimable Jésus vint en hâte, afin de me préparer pour ce qu'il voulait de moi. 

 

🔥 Les trois vertus théologales: la foi

Il me parla de la foi. Et pendant qu'il parlait, il me laissa à moi-même. Je ne sais pas pourquoi: il allait et venait continuellement. Pendant qu'il me parlait, je me suis sentie pénétrée d'une telle foi vive que mon âme, si compliquée jusque là, devint si simple qu'elle pouvait atteindre Dieu. Ainsi, maintenant, j'admirais la Puissance de Dieu, sa Sainteté et sa Bonté, et tous ses autres attributs. Profondément touchée et dans une mer de stupeur, je dis: «Dieu Tout-Puissant, qu'est-ce que ton Omnipotence ne pourrait résoudre? Ô Sainteté sublime de Dieu, quelle autre sainteté, si haute soit-elle, pourrait oser paraître devant toi?»

Considérant ma misère et mon néant, je me suis vue comme un minuscule microbe recouvert d'une fine poussière, pouvant être rapidement anéanti par un ver. Je ne voulais plus paraître devant la vertigineuse Majesté de Dieu. Mais, comme un aimant, sa Bonté infinie m'attira à lui, et mon âme s'écria: «Oh! quelle Sainteté, quel Pouvoir et quelle Miséricorde habitent Dieu, lui qui nous attire avec une si grande Bonté!»

Il me sembla que sa Sainteté l'enveloppait, que sa Puissance le soutenait, que sa Miséricorde l'émouvait et que sa Bonté l'animait du dedans et l'immergeait totalement. Je considérai chacun de ses attributs individuellement et je sentis que tous avaient la même valeur pour l'esprit humain — tous également incompréhensibles et incommensurables.


Pour y arriver, il faut croire.

Pendant que j'étais plongée dans ces hautes réflexions, mon Jésus continua à me parler de la foi en me disant que, pour obtenir la foi, il est nécessaire de croire, puisque sans croyance, il ne peut y avoir de foi. Comme il y a chez l'homme la tête qui dirige tous ses actes, ainsi, à la tête de toutes les vertus, il y a la foi qui contrôle tout le reste. Mais comme la tête privée du sens de la vue ne peut faire échapper l'homme aux ténèbres et à la confusion, l'âme sans la foi ne peut rien et s'expose à toutes sortes de dangers. Si la tête privée de la vue veut diriger l'homme, elle pourrait bien le conduire où il ne voudrait pas aller s'il avait la vue. Comme la vue sert à guider l'homme dans chacun de ses actes, la foi est une lumière qui illumine l'âme, sans quoi on ne peut voyager sur le chemin qui mène à la vie éternelle.

Pour avoir la foi, trois choses sont nécessaires: — avoir sa semence en soi, — que cette semence soit de bonne qualité, et — qu'elle se développe. Nous savons que c'est le Seigneur qui jette la semence en nous. Et puisque nous ne pouvons pas penser à quelque chose si nous n'avons pas d'abord quelque connaissance sur elle, nous devons être reconnaissants envers ceux qui nous informent sur les choses de la foi. La qualité de cette information n'est pas sans importance et celui qui enseigne doit être habité par ce qu'il enseigne. Si l'enseignement est falsifié, il falsifiera le récipiendaire. Quand nous sommes assurés de la qualité de nos connaissances, notre foi a besoin d'être nourrie pour qu'elle puisse grandir et se développer. Avec nos efforts, elle [la foi] se développe jusqu'à maturité. Elle produit la vertu d'espérance, la sainte espérance, soeur de la foi. L'espérance dépasse la foi et en est l'objet.

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On ne peut déterminer à quelle période elle fait allusion. Il ne s'agit pas du temps où elle était confinée au lit, puisqu'après seulement une année d'alitement interrompu, elle vivait son mariage mystique, et onze mois plus tard la ratification de celui-ci dans le Ciel.

10 Le 7 septembre 1889. Luisa avait 24 ans.


🔥 Les trois vertus théologales (suite): l'espérance 

L'espoir rend l'âme belle et stable. 

En examinant tout à partir du commencement, je peux dire que quand Jésus me parla de l'espérance, Il me fit comprendre que cette vertu fournit à l'âme une couche protectrice qui la rend imperméable aux flèches de l'Ennemi. Par la vertu d'espérance, l'âme accepte tout ce qui lui arrive avec paix,  parce qu'elle sait que tout est décrété par Dieu, qui est son plus grand Bien. Comme c'est merveilleux de voir l'âme habitée par la belle vertu d'espérance, ne se faisant pas confiance à elle-même, mais uniquement à son Bien-Aimé, ne s'appuyant que sur lui. Pendant qu'elle affronte ses pires ennemis, l'âme reste reine de ses passions avec simplicité et prudence. Tout est en ordre dans son intérieur.  Même Jésus est charmé. La voyant opérer avec une ferme espérance, toujours plus courageuse, forte et invaincue, triomphant de tous les obstacles et de tous les dangers, Jésus lui accorde de nouvelles grâces.

Pendant que Jésus m'enseignait ainsi, il communiqua à mon intelligence beaucoup de lumière. Pendant que j'étais complètement immergée par cette lumière et que je réfléchissais pour trouver de quelle manière la belle vertu d'espérance nous aide, cette lumière se retira de moi. Je ne peux pas dire combien de choses j'ai comprises. Je dirai simplement que toutes les vertus servent à embellir l'âme. Cependant, par elle-même, l'âme n'a pas en elle les semences. Après être nées et avoir grandi en elle, les vertus lient l'âme fermement à Dieu. L'espérance dit à l'âme: «Rapproche-toi de ton Dieu et tu seras illuminée par lui. Approche-le et tu seras purifiée par lui, etc.»

Quand l'âme est investie de la sainte espérance, chaque vertu y devient ferme et stable. Comme une montagne, elle ne peut pas être affectée par les intempéries, la chaleur du soleil, les vents violents, les lacs qui débordent et les rivières qui inondent par les grandes masses de neige fondante. L'âme habitée par l'espérance ne peut pas être dérangée par les tribulations, les tentations, la pauvreté ou les infirmités. Aucun incident de la vie ne l'effraie ni ne la décourage, même pour un instant. En elle-même elle se dit: «Je peux tout tolérer. Je peux tout souffrir et tout faire, car j'espère en Jésus.» La sainte espérance rend l'âme presque toute-puissante et immobile, presque invincible et immuable car, à travers cette vertu, notre toujours aimable Jésus accorde la persévérance à l'âme jusqu'à ce qu'elle prenne possession du Règne éternel de Dieu au Paradis.


🔥 Les trois vertus théologales (suite): la charité

La charité fait aimer.

Comme j'immergeais mon esprit dans l'immense mer de la divine espérance, mon bien-aimé Jésus me réapparut et me parla de la charité, la plus grande des trois vertus théologales. Quoique les trois soient distinctes, la charité doit fraterniser avec les deux autres comme si les trois n'en formaient qu'une. La contemplation d'un feu donne une bonne idée des trois vertus théologales s'unissant pour n'en former qu'une. La première chose que l'on observe quand on allume un feu, c'est la lumière qui baigne les alentours. Cette lumière peut symboliser la foi infusée dans l'âme au baptême. Ensuite on ressent la chaleur distribuée tout autour (l'espérance). Petit à petit, la lumière commence à faiblir, presque à s'éteindre, mais la chaleur du feu [la charité] acquiert plus de vigueur jusqu'à ce que le feu soit entièrement consumé.11

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11 Dans cette comparaison, le feu lui-même pourrait désigner la charité. Sans la charité, il n'y a ni la foi, ni l'espérance.


Ainsi en est-il des trois vertus théologales. La foi s'active dans l'âme à la première information reçue sur l'Être Suprême. Ensuite, grâce à la montée continuelle de l'âme vers Dieu, son plus grand Bien, la foi grandit et se développe. L'âme acquiert de Dieu la lumière intellectuelle, qui émane des divers attributs de Dieu. Illuminée par sa foi, l'âme essaie de choisir le meilleur chemin pour parvenir à son plus grand Bien, qui est Dieu. Pleine d'espérance, elle passe d'une montagne à l'autre, traverse vallées et plaines, passe à travers lacs et rivières, navigue à la voile à travers les mers les plus grandes et les plus profondes pendant des mois et des années; tout cela dans le seul but d'acquérir la possession de son Dieu. Le désir dirigé vers la possession de Dieu est appelé la charité; et ses deux soeurs sont la foi et l'espérance.

Jésus me dit: «Mon épouse bien-aimée, observe pourquoi, en traitant des trois vertus théologales de foi, d'espérance, et de charité, je n'ai pas parlé de la Trinité des Personnes divines que tu acquerras sûrement et en permanence: elles resteront avec toi perpétuellement et sans faillir.»

Après quelques minutes, mon adorable Jésus m'apparut encore une fois et il me dit : «Mon épouse, si la foi est lumière pour l'âme et lui sert de vision, l'espérance est la nourriture de la foi, donnant à l'âme l'énergie et l'ardent désir d'acquérir le bien qui est vu par les yeux de la foi. L'espérance  donne aussi à l'âme le courage d'affronter des tâches difficiles dans la tranquillité d'esprit et dans une paix parfaite. Elle l'aide à persévérer dans la recherche de toutes les voies possibles et de tous les moyens d'arriver à un bon résultat.»

La charité, quant à elle, est la substance de laquelle la lumière de la foi et la nourriture de l'espérance émergent. Quelqu'un ne peut avoir ni la foi ni l'espérance s'il n'a pas la charité, de la même manière que personne ne peut avoir la chaleur et la lumière sans le feu. Comme un baume rafraîchissant, la charité se dilate et pénètre partout, amenant à maturité les visions de la foi et les désirs de l'espérance. Dans sa douceur,  elle rend la souffrance douce et parfumée, et elle va aussi loin que de rendre l'âme désireuse de souffrir.

L'âme qui possède une vraie charité, opérant dans l'Amour de Dieu, reçoit de Dieu une fragrance céleste. Si les autres vertus rendent l'âme presque solitaire et peu sociable, la charité, «étant une substance qui répand la lumière, la chaleur et une très douce fragrance», répand chez les autres un baume ayant plus que des effets aromatiques: elle unit et fusionne les coeurs.

C'est ce qui permet à l'âme de souffrir les plus intenses tourments avec joie. L'âme, transformée par l'amour, n'est plus capable de vivre sans souffrir. Quand elle est privée de souffrance, elle s'exclame: «Ô mon Époux, Jésus, tu me soutiens avec des fleurs. Accorde-moi l'amertume de la pomme qu'est la souffrance. Mon âme languit pour toi et ne peut être satisfaite si ce n'est dans ta douce souffrance. Ô Jésus, donne-moi tes plus dures souffrances. Mon coeur ne peut plus te voir tant souffrir à cause de l'Amour ardent et passionné que tu as pour chacun de nous!»

Ensuite Jésus me dit: «Ma Charité est un feu qui brûle et consume. Et quand elle prend racine dans une âme, elle fait tout. Elle n'attache aucune importance aux vertus elle-mêmes. La charité convertit et garde les vertus intimement unies à elle. Ce qui en fait la reine de toutes les vertus. Elle règne sur chacune et les domine toutes. Elle ne peut jamais transférer sa suprématie aux autres.»