Financement de la Culture
La culture n’est plus un sujet d’État. Suite au premier décret présidentiel (DNU), le flamant président Argentin, Javier Milei, poursuit la consolidation d’un État qui restreint le domaine de la chose publique ou la res publica. Cela se matérialise à travers sa proposition de loi Omnibus, par laquelle le gouvernement décide de la fermeture définitive ou du désengagement financier des organismes essentiels soutenant la création et les diverses pratiques artistiques. La loi annonce, d’un côté, la fermeture définitive de l’Institut National du Théâtre (INT) et du Fond National des Arts (FNA). D’un autre côté, l’État coupe les subventions de l’Institut National du Cinéma et Arts Audiovisuels (INCAA), de l’Institut National de la Musique (INAMU) et de la Commission Nationale des Bibliothèques Publiques (CONABIP).
En Argentine, l’État était devenu l’un des principaux soutiens de l’art, veillant toujours à la diffusion de la culture. Ce rôle a été crucial pour le développement artistique sous toutes ses formes de production, que ce soit au cinéma, au théâtre, dans les arts visuels, la musique ou la littérature.
De nombreux artistes ont exprimé leur rejet face à la loi Omnibus. Tous avertissent de la valeur irremplaçable du financement de l’État dans la production culturelle. Santiago Mitre, réalisateur d’Argentina, 1985, s’est adressé à l’Assemblée Nationale pour mettre en valeur les politiques publiques qui soutiennent la production cinématographique locale. Il assure : “L’Argentine est le pays qui compte le plus de nominations dans la région grâce à sa Loi sur le Cinéma. Les films sont exportés et reconnus dans le monde entier, donnant ainsi une visibilité à l’Argentine à l’échelle planétaire. Pourquoi détruire cela ?”. En coupant ce financement, les artistes et réalisateurs auraient du mal à concrétiser des projets audiovisuels de qualité. Le comédien Jorge Marrale, pour sa part, est catégorique : “l’identité, le patrimoine et l’avenir sont en jeu”.
Le FNA a été supprimé par dérogation de la loi qui concevait sa création. Cet organisme soutenait, jusqu'à aujourd'hui, tous les types de création artistique, que ce soit dans les domaines musical, théâtral, audiovisuel, plastique, de la danse ou littéraire. Des artistes de tous les coins du pays y présentaient leurs projets, espérant les concrétiser grâce au financement de l’État. De la même manière, L’INT a été supprimé. Cette institution a joué un rôle fondamental dans l’essor de l’une des communautés du théâtre indépendant les plus admirées au monde. Projets, salles et festivals en dépendent tout autant.
Quant au monde du livre, la loi qui protégait les petites librairies en garantissant le “prix unique” du livre a également été annulée. De la même manière, les soutiens aux bibliothèques populaires ont été directement supprimés.
Le 16 janvier, toutes les organisations représentatives de la culture se sont réunies au siège de la CGT argentine et ont convenu de manifester ensemble le 24 janvier. Aucune différence n’est jugée significative à ce stade, car l’homme de la tronçonneuse a décidé d’amputer la culture de la vie institutionnelle argentine. Et les rideaux ne sont pas près de se rouvrir bientôt.
1. Le texte complet de la loi omnibus, qui compte plus de six cent articles, est disponible en Espagnol.
2. Instituto Nacional del Teatro
3. Fondo Nacional de las Artes
4. Instituto Nacional de Cine y Artes Audiovisuales
5. Instituto Nacional de la Música
6. Comisión Nacional de Bibliotecas Populares