En entête: statue équestre de Simón Bolívar, Plaza de Bolívar, Carthagène
À la suite de la découverte de l'Amérique par Christophe Colomb en 1492, les Européens se lancent dans l'exploration du « Nouveau Monde ». C’est dans cette foulée que les conquistadors espagnols arrivent sur le territoire actuel de la Colombie quelques années plus tard, vers 1499. En voyant les richesses que possédaient les peuples indigènes et entendant des bribes de la légende d’El Dorado, ils entament des expéditions avec l'intention de rapporter des marchandises précieuses à la cour d’Espagne. En parallèle, ils procèdent à la colonisation du territoire, qu’ils baptisent Nouvelle-Grenade.
Les conquistadors fondent d’abord la ville de Santa Marta en 1525, puis celle de Carthagène en 1533. Cette dernière devient rapidement le principal port espagnol de la côte caraïbe, un « lieu de stockage des richesses extorquées à la population locale avant d’être exportées vers l’Espagne. » (Egerton, 2015, p. 127) La présence de trésors dans la ville attire de nombreux pirates, obligeant les Espagnols à construire des remparts pour se protéger des attaques. Cette vieille ville fortifiée de Carthagène est aujourd’hui inscrite au Patrimoine mondial de l’UNESCO.
En 1538, une autre cité importante est fondée : Santa Fe de Bogotá, qui correspond aujourd’hui à la capitale de la Colombie. Medellín est créée en 1616 dans la vallée d’Aburrá, mais reste pendant longtemps une simple ville provinciale. Ce n’est qu’au XXe siècle qu’elle connaît un essor fulgurant et devient une grande métropole.
Les Espagnols recourent donc à la traite d’esclaves africains pour combler le besoin de main-d’œuvre dans les mines et les champs agricoles. Ces deux secteurs constituaient le cœur de l’activité économique de la colonie.
En ce qui concerne la vie politique, la couronne espagnole permet d’abord aux conquérants d’organiser leurs propres gouvernements locaux. Toutefois, elle décide rapidement d’imposer une plus grande autorité pour contrôler le territoire.
C’est ainsi qu’en 1549, elle crée la Real Audiencia de Santa Fé (Audience de Santa Fé), une juridiction avec des pouvoirs civils et militaires sous la direction d’un gouverneur nommé par le roi d’Espagne.
En 1717, la croissance de l’Empire espagnol mène à un bouleversement dans l’organisation politique de la colonie, qui se traduit par l’instauration de vice-royautés dans les colonies américaines.
Un vice-roi est alors désigné pour diriger la colonie, tandis que des capitaines généraux s'occupent de l’organisation des provinces.
Dans cette foulée, la ville de Bogotá devient la capitale de la vice-royauté de la Nouvelle-Grenade, qui englobe les territoires actuels de la Colombie, du Panama, de l’Équateur et du Venezuela.
Ce type d’organisation politique demeure jusqu’à la fin de l’Empire espagnol en Amérique.
Dès les premières expéditions au Nouveau Monde, des religieux accompagnent les colons espagnols. La couronne les envoie principalement pour deux raisons: évangéliser les indigènes et maintenir l’ordre social. Par ailleurs, le système du patronage permet à la couronne de gérer le fonctionnement de l’Église dans ses colonies.
En parallèle, les religieux voient une opportunité de propager leur foi, ce qui devient de plus en plus difficile en Euripe en raison de la Réforme : « la conquête des Amériques [a] donné à l’Église romaine un champ d’expansion immense qui venait à point pour compenser les avancées significatives des réformés en Europe. » (Kourliandsky, 2018) En outre, la présence de missionnaires permet à la couronne espagnole de garder le contrôle sur ces territoires lointains, particulièrement difficiles à gérer depuis la métropole.
À partir du troisième voyage de Christophe Colomb en Amérique, les colons espagnols reçoivent l’ordre de ne pas fonder des villages sans la présence d'un curé. La construction d'églises s’avère inéluctable non seulement pour abriter les religieux, mais aussi pour évangéliser les indigènes et plus tard les esclaves en provenance d’Afrique.
Les colons espagnols réorganisent d'abord les populations locales en les regroupant dans des villages. Ensuite, les missionnaires religieux procèdent à l’enseignement de la doctrine chrétienne en utilisant des illustrations.
Celles-ci permettent de montrer aux indigènes la vie exemplaire menée par les saints afin de les inciter à adopter les valeurs véhiculées par le catholicisme. Par ailleurs, la création de ces villages permet aux colons espagnols d’éviter que les indigènes se révoltent et d'obtenir du même coup les corvées qu’ils attendent d'eux.
Une caractéristique de l’évangélisation en Amérique est l'exploitation de certaines ressemblances entre la religion chrétienne et les religions vernaculaires pour faciliter la transition : « l’incorporation au christianisme d’images familières [rend] plus douce la pente du culte ancien au culte nouveau. » (Bayon, 1959, p.280)
Les bâtiments religieux jouent un rôle primordial dans cette méthode d’évangélisation, car ils constituent le lieu par excellence pour exposer ces images.
Enfin, une autre méthode utilisée par certains missionnaires est d’apprendre les langues locales afin de faciliter les rapprochements avec les indigènes et de gagner leur confiance.
Pour les Espagnols, bâtir des églises en Nouvelle-Grenade se révèle non seulement une nécessité pour évangéliser les indigènes, mais également un moyen de montrer leur supériorité et leur domination sur le territoire.
Les colons désirent construire des églises à l’image de celles de la métropole. N'ayant pas d’ouvriers à leur disposition, ils ont recours au travail forcé des indigènes.
La construction de bâtiments religieux au Nouveau Monde s’est donc effectuée avec une main-d’œuvre aux capacités réduites : « une grande partie du travail dut être simplifiée jusqu’au niveau accessible à l’ouvrier indigène. » (Bayon, 1959, p.279)
En Europe, les savoirs architecturaux étaient transmis de génération en génération depuis des siècles, ce qui avait permis le développement de techniques de construction complexes. Cependant, les indigènes en Amérique n’avaient jamais vu à quoi ressemblaient de tels bâtiments. Par ailleurs, ils étaient traités comme des esclaves, tandis que les ouvriers qui s’occupaient de la construction d’églises en Europe étaient bien payés et fiers de leur profession.
Ces particularités de la main-d’œuvre en Amérique se reflètent par des constructions beaucoup plus modestes et moins impressionnantes que celles qui ont été érigées sur l’ancien continent.
Les premières églises au début du XVIe siècle sont construites en terre crue et recouvertes de paille. Ce n’est que dans la deuxième moitié de ce siècle que l’on commence à construire des œuvres à caractère permanent, avec des structures de bois. Les religieux sont les premiers à concevoir les plans de ces églises, avant que de véritables architectes arrivent d’Europe.
Les moyens libérés par la couronne pour financer la construction d'églises sont toutefois très limités. Chaque village reçoit un ensemble restreint d'objets liturgiques et doit compter sur la générosité des colons espagnols pour assurer le reste. Les colons doivent donc construire rapidement et à faible coût.
Par ailleurs, le territoire de la Colombie actuelle était beaucoup plus pauvre que les principaux centres du Nouveau Monde comme le Mexique, le Pérou ou la Bolivie. Les constructions sont par conséquent beaucoup plus sobres que celles que l’on peut rencontrer ailleurs en Amérique latine : « les conditions socio-économiques de la Nouvelle-Grenade ne se prêtaient pas à des œuvres architectoniques exubérantes. » (Arango, 2013, p.248)
Au XVIIIe siècle, les églises construites lors des débuts de la colonisation se trouvent en piètre état, elles sont donc rénovées ou remplacées par de nouvelles constructions. En parallèle, de nouvelles paroisses sont fondées, ce qui entraîne la construction de plusieurs nouvelles églises.
Vers la fin du XVIIIe siècle, les habitants de la colonie désirent vivement se libérer l’emprise de la métropole. Le premier signe d’indépendance survient en 1781, lorsque la Révolte des comuneros fait rage dans la ville de Socorro. L'objectif? protester contre l’augmentation de taxes et l’exploitation des terres indigènes.
En 1808, les troupes de Napoléon Bonaparte envahissent l’Espagne. Cet événement qui se produit outre-mer mène plusieurs villes de la vice-royauté à déclarer leur indépendance. Le 20 juillet 1810, on assiste à un véritable « cri de l’indépendance » en Nouvelle-Grenade lorsque des Bogotans brisent un pot de fleurs (qu’un commerçant refusait de leur prêter).
Des conflits et des guerres civiles vont suivre entre fédéralistes et centralistes, qui ne s’entendent pas sur la façon de gouverner. L’Espagne va même reprendre la Nouvelle-Grenade en 1815. C’est seulement en 1819 que l’indépendance se concrétise officiellement, avec la victoire de l’armée Simón Bolívar sur les Espagnols durant la bataille du Puente de Boyacá le 7 août 1819.
En 1821, la Grande Colombie est formée. Toutefois, elle ne survit pas longtemps et se sépare en trois états indépendants : la Colombie, le Venezuela et l’Équateur. Les années suivantes sont teintées de conflits entre fédéralistes et centralistes pour déterminer le choix de la nouvelle structure du pays.
En 1886, la Colombie adopte une nouvelle constitution et devient officiellement une République, telle qu’on la connaît de nos jours. Avec une superficie de 1 141 748 km2, la Colombie est le quatrième plus grand pays du continent sud-américain. Son territoire, qui présente la forme d’un diamant, partage ses frontières avec le Panamá, le Venezuela, le Brésil, le Pérou et l’Équateur.