Guillaume Soulez


Écriture numérique de l’Histoire : de la recherche à la formation 

Leçons d’une expérience : Plateforme 14


Lancement de la Cité des Écritures de la Sorbonne Nouvelle, 29 juin 2022.

Table-ronde « Écritures : l’articulation entre recherche et formation »

 

 

 

Écriture numérique de l’Histoire : de la recherche à la formation 

Leçons d’une expérience : Plateforme 141

 

 

Guillaume Soulez (Université Sorbonne Nouvelle)

 

 

Il y a plus de cent ans, la Guerre de 14-18 endeuilla de nombreuses familles, dont celle des Résal, famille d’ingénieurs vivant dans la région de Bordeaux. Laurent Véray, mon collègue historien du cinéma du début du XXe s. au département Cinéma et Audiovisuel de la Sorbonne Nouvelle, a eu accès à l’abondante correspondance familiale échangée par tous les membres de la famille et a réalisé un documentaire, La Cicatrice. Une famille dans la Grande Guerre, pour France Télévisions en 2014, avec le soutien du CNDP-Scéren. Seule une petite partie des lettres a pu être utilisée dans le film (80 sur 3 500 environ), ainsi que quelques photographies (les Résal étant des photographes amateurs) sur un ensemble de 300 environ (Fig. 1).


Fig. 1. Le corpus

  D’où l’idée, qui germe en cours de tournage (2011/12), d’une mise à disposition en ligne de l’ensemble du corpus pour que les enseignants de l’Education nationale puisse conduire des activités pédagogiques en classe, en particulier à l’occasion du centenaire de la Guerre. Laurent Véray se tourne alors vers moi, connaissant mes travaux sur le webdocumentaire (genre émergeant depuis 2008 avec Gaza/Sderot, puis en 2010 avec Prison Valley de David Dufresne, beaucoup plus complexe), pour envisager un webdocumentaire qui aurait un double public : les élèves du primaire et du secondaire (et par extension le grand public intéressé par l’histoire de la Guerre puisque le site serait accessible à tout internaute) mais aussi nos propres étudiants du Département, notamment en master, qui pourraient contribuer à la future plateforme que nous commençons à envisager.

 

1. Le projet scientifico-pédagogique : écrire l’Histoire avec des outils numériques

 

En master, en effet, notre département développe une réflexion avancée sur « l’écriture audiovisuelle de l’Histoire » (EAH), dans la lignée des travaux « Cinéma & Histoire » de Marc Ferro, Pierre Sorlin ou Michèle Lagny. Il s’agit de montrer, suivant les pistes proposées par De Certeau (et Paul Veyne) pour l’écrit, que toute « écriture de l’Histoire » suppose une mise en récit, une organisation des événements selon un projet social ou politique, des mises en sourdine d’éléments contradictoires, etc. et que l’audiovisuel a son propre langage, sa propre mise en récit en images et en sons, ses propres modes d’invisibilisation, etc. nourri d’une histoire critique du genre documentaire (notamment du documentaire d’archives, et plus particulièrement de l’utilisation de l’archive dans les documentaires historiques). L’analyse du webdocumentaire, au croisement entre la tradition documentaire et la « culture internet » (ou des interfaces, plus généralement, du CD-Rom au jeu vidéo), permet alors d’explorer à son tour une « écriture numérique de l’Histoire » (ENH) en mettant à l’épreuve les hypothèses de l’EAH sur de nouveaux corpus et de nouveaux modes d’écriture. Par un concours de circonstances heureux, ce sont aussi les débuts du LabEx ICCA (Industries culturelles et création artistique) qui s’engage à hauteur de 13 000 euros pour financer une maquette (V1) qui figurera une année environ sur le site du Centenaire vers la fin de l’année 2013, et nous permettra d’aller plus avant.

 

A la différence d’un simple site ou d’une base de données, un webdocumentaire propose des parcours (sur le modèle du « livre dont vous êtes le héros ») qui permettent à l’internaute de constuire progressivement son appropriation et sa réflexion à l’aide des éléments documentaires que lui fournit l’interface. Suivant la définition simple et claire d’Evelyne Broudoux, un webdocumentaire est un « documentaire réalisé en vidéos, en bandes sons, en textes et en images, dont la scénarisation tient compte de l’interactivité, d’une part, dans la fragmentation des récits et, d’autre part, dans l’interface graphique, et qui s’insère dans un dispositif personnalisant la communication avec l’internaute (réseaux sociaux, commentaires, etc.) »2. On voit que surgit d’emblée – d’où mon intérêt pour ce format en tant que chercheur en pragmatique du cinéma et de l’audiovisuel – un enjeu qui met en avant une participation forte du lecteur, ou plus exactement une lecture-action (avec le clic) pour penser cette (nouvelle) écriture numérique. Deuxième axe de recherche sur le webdocumentaire, le rapport du spectateur/visiteur au genre documentaire change : là où, dans la tradition issue d’une célèbre conférence de Jean Vigo en 1930, le documentaire se définit comme résultat diffusable d’une enquête – « un point de vue documenté » - le webdocumentaire propose plutôt des matériaux organisés pour fabriquer son propre point de vue sur un événement ou un dossier (qu’il s’agisse de confirmation, bifurcation, élargissement, modification du point de vue…), en fonction de sa circulation dans le webdoc mais aussi en fonction d’autres liens que propose l’interface : « une documentation du point de vue ». Bien sûr, les matériaux offerts par une interface constituent déjà un choix, de même que les circulations proposées, la situation réelle est donc hybride (de même que la lecture du documentaire classique, rétrospectivement), mais nous n’entrerons pas dans ce détail ici, qui met en jeu la pluralité des expériences proposées et celle des ressources culturelles et politiques qui peuvent s’activer au cours d’une lecture. Il reste que la documentation fournie par le (web)documentariste change de sens : elle peut être à son tour l’objet d’une analyse critique et mise à distance, ce qui modifie la part et la place de chacun, documentariste et spectateur-usager.

 

Sur le plan scientifique, nous nous lançons dans une réflexion sur ces enjeux sur un mode traditionnel (articles, présentations publiques, organisation d’une journée d’études)3, tandis que sur le plan pédagogique, Laurent Véray et moi-même instaurons à partir de 2012/13 un séminaire de master qui vise à introduire au questionnement scientifique et conduire de l’EAH à l’ENH. Nous y accueillons différents professionnels de la mise en images, de la mise en exposition et de la mise en ligne de l’Histoire (cinéaste, médiateurs, pédagogues, producteurs, etc.). Aimantés par le désir de faire participer davantage les étudiants, nous nous engageons en 2013/14 dans un séminaire de M2 (l’idée étant de capitaliser les savoirs acquis en M1), en lien avec l’équipe audiovisuelle de la Sorbonne Nouvelle (alors rattachée à l’ENEAD), intitulé « faire un webdoc historique » où nous recourons à un logiciel d’arborescence basique (Prezi) présenté par Marie-Christine Bonneau et tout de suite adopté par les étudiants. L’année suivante (2014/15) au sein du Master Didactique de l’image de notre département, qui comprend la formule « Créations d’outils pédagogiques et art de la transmission » dans son titre, nous conduisons une nouvelle expérimentation pédagogique associant notre séminaire de recherche à une mise en œuvre concrète de modules vidéo par les étudiants.

 

Une manière d’entrer en matière et en dialogue avec les étudiants était de leur montrer le « selfie » de Louis Résal (Fig. 2) en mission dans son avion de reconnaissance pour les introduire, d’une part, au rôle de l’image dans l’écriture de l’Histoire et, d’autre part, à la place des acteurs « ordinaires » (ici un photographe amateur) que documentait particulièrement bien cette correspondance familiale (même s’il ne s’agit pas tout à fait d’une famille ordinaire sur le plan social et politique). Cet anachronisme régulateur (montrer par la contradiction que nous n’imaginons pas aujourd’hui un selfie sans téléphone mobile alors que, dès les débuts de la photographie, l’autoportrait fait partie des usages courants, y compris pendant et en marge d’une mission militaire !) permettait aussi d’introduire l’épaisseur temporelle qui faisait de cette famille des êtres humains en quelque sorte proches et familiers, mais aussi très différents de nous (notamment à travers leur patriotisme chevillé au corps et leur haine du « Boche » très éloignée de notre «couple » franco-allemand actuel – Louis veut venger son frère tombé dès 1914).

Fig. 2. Le « selfie » de Louis Résal 

Pendant ce temps, le projet de plateforme avançait avec le soutien décisif de la Direction du numérique de l’Education Nationale qui apporta 80 000 euros, le Scéren nous proposant de faire appel à un concepteur de bases de données à fonction pédagogique (Hégyd). Passons sur les détails d’un financement où interviennent, parfois en nature (ECPAD), un grand nombre d’institutions (Ministères ; réseau UDPN…) ou entreprises (La Poste) pour indiquer simplement que le projet, logé à la Direction de la recherche de Paris 3 (DIRVED) et hébergé par le système web de notre université (où il figure encore), a atteint une somme de 200 000 euros environ. Malheureusement, au moment d’un choix crucial, croisant délais et coûts, le poids financier et logistique de l’Education Nationale l’emporte sur le nôtre : en dehors d’un « agenda visuel » (Fig. 3) qui vise à accueillir et cadrer de façon cognitive le parcours de l’internaute4, l’essentiel de Plateforme 14 demeure une base de données (lettres, photos, notices, films de l’ECPAD, etc.5), dont les enseignants du primaire et surtout du secondaire peuvent s’emparer pour mener des ateliers pédagogiques sans que la dimension webdocumentaire puisse s’exprimer à travers des arborescences. Nous reviendrons sur les leçons que nous avons tirées de cette expérience inachevée (à ce stade).

Fig. 3. L’agenda visuel. L’internaute tombe sur un agenda ouvert à la semaine de l’année 1914 à 1918 qui correspond cent ans avant à la semaine de 2014 à 2018 pendant laquelle il se connecte. Il y trouve à gauche les lettres envoyées cette semaine-là, et à droite la liste des personnes de la famille, une carte qui localise les lieux cités et les thèmes présents dans les lettres (thèmes calqués sur le programme scolaire). Plus à droite, sur la « table de lecture », des données numériques liées aux lettres (tant de lettres, de photos, de films, etc.) donnent accès à d’autres documents, tout à gauche le système de navigation accessible via des icônes (par personnes, par thèmes, etc.).

2. L’objectif pédagogique : quatre enjeux pour penser/former à l’écriture numérique de l’Histoire

 

Quel était plus précisément l’objectif pédagogique pour nos étudiants, cette formation à la recherche et par la recherche dont cet agenda visuel est la trace la plus visible aujourd’hui ? Précisons d’emblée que nous n’avions pas exclu, loin de là, la possibilité pour un élève ou un visiteur ordinaire de se servir d’arborescences pour développer un point de vue distancié sur la Guerre, voire sur cette expérience familiale de la Guerre, à une époque où la valorisation de l’expérience et du témoignage individuels (voire la victimisation) peuvent défier ou fausser le travail des historiens, tout sensibles soient-ils à leur propre position dans le temps et l’espace. Mais nous commencions par tester nos hypothèses avec les étudiants que nous formions. Par ailleurs, nous étions d’accord (un point important lorsqu’on collabore entre chercheurs !) pour ne pas verser dans la thèse d’une écriture-fiction de l’Histoire (version radicale de l’ « écriture de l’Histoire » chez Hayden White - qui considèrent la vérité du passé comme inaccessible et l’«écriture» comme toujours fictionnelle) et lui préférer la position opposée de Carlo Ginzburg, qui voit dans le discours historique un système qui l’apparente davantage à l’argumentation (judiciaire), notamment dans son rapport à la preuve6. Précisément, la « délibération des images », hypothèse centrale dans ma recherche, qui considère que tout lecteur ou spectateur est doté d’une capacité réflexive a priori (sans qu’il ait besoin, notamment, qu’on la sollicite chez lui par des actions de distanciation sur un mode brechtien), parallèlement à sa capacité portée à la reconnaissance (disons, mimétique, pour simplifier) et en tension avec elle comme on le constate en étudiant la «réception » des productions culturelles, s’articule parfaitement avec cette capacité de mise en travail de la lecture d’archives proposées en ligne au sein d’une interface. Ceci suppose de ne pas chercher à réduire cette lecture à un programme thématique (ou idéologique) pré-déterminé (en excluant par avance certains choix), ni à renoncer à la capacité de discussion de tout lecteur-spectateur-internaute (qui serait nécessairement absorbé, aliéné (etc.) par les illusions d’une écriture de l’Histoire-fiction)7. De ce point de vue, l’enjeu est tout autant civique, voire politique, que scientifique quand nous formons des étudiants qui vont travailler à terme dans le champ du cinéma et de l’audiovisuel. Et on voit tout de suite que derrière les « rapports de force » inévitables entre partenaires (Education nationale et Université en l’occurrence), en fonction des parts de chacun (conception, financement, mise en œuvre, usages…), se joue bien plus qu’une collaboration entre institutions.

 

Ces points étant précisés, nous pourrions donc reformuler l’objectif pédagogique de notre formation à/par la recherche ainsi : il s’agissait de faire mesurer aux étudiants la part du langage audiovisuel et numérique dans l’écriture de l’Histoire de la Première Guerre mondiale, à la fois en partageant avec eux cette problématique historienne contemporaine, tout en la leur faisant mesurer « avec les mains » par des exercices pratiques et la production de petits modules et/ou arborescences à partir du corpus Résal, en soulignant l’importance des matériaux et des choix de mise en récit (ou discours). D’où un progrès d’une année sur l’autre dans le projet : séminaire d’initiation à la problématique de l’ENH avec des invitations de professionnels, puis séminaire croisant les perspectives recherche-création (de la théorie au faire), puis, in fine, séminaire didactique combiné avec un atelier vidéo proposé aux étudiants du Master Pro afin de réaliser des capsules vidéo pour la plateforme, ce qui supposait une certaine coordination avec les professionnels enseignant dans l’atelier et ayant leurs propres objectifs pédagogiques (et notamment des normes d’écriture pouvant aller à l’encontre de la réflexivité recherchée).


Mis à part les réflexions proprement scientifiques qui ont donné lieu à des publications et continuent d’agir dans nos travaux, les leçons que nous avons tirées de l’expérience sur le plan de la formation sont multiples. Le premier niveau est celui des « savoirs de base » nécessaires à la bonne réalisation de cette action de recherche-création-pédagogie. Nous avons tout d’abord découvert la faible connaissance des étudiants de la Guerre elle-même, d’où la nécessité de rappeler quelques éléments fondamentaux (les protagonistes, les fronts, les dates importantes pour se repérer, etc.) avant de pouvoir présenter 1/ la question de son « écriture » depuis 1919 jusqu’à aujourd’hui, d’autant qu’il s’agit précisément d’une guerre largement écrite, photographiée, filmée ; les instruments médiatiques se sont particulièrement perfectionnés, diffusés et ont joué un rôle dans la Guerre elle-même (outils de description et d’analyse, bataille de l’opinion…, développement de la section photographique de l’Armée notamment pour documenter les destructions allemandes au Nord et à l’Est… ancêtre de notre partenaire, l’ECPAD, etc.), ainsi que 2/ les débats historiographiques contemporains (pertinence d’une Guerre « vue d’en bas », cruciale pour notre corpus – en particulier autour de la création de l’Historial de Péronne en 1992). Non seulement bien sûr il importait de mesurer l’importance de l’«empathie » en Histoire8, un très grande nombre de familles françaises (ou d’une ancienne colonie) ayant eu à compter au moins un mort, mais il fallait éviter aussi des effets de grossissement incontrôlés (par exemple s’intéresser à un élément mobilisé par le corpus – la médecine, la place des transports, le rôle des femmes, le colis postal, l’histoire de la photographie – sans le situer dans son contexte plus large).

Le deuxième niveau portait sur des enjeux proprement liés à l’unviers numérique : pendant le tournage auquel j’avais assisté vers la fin, des lettres étaient filmées, leur fragilité m’apparut particulièrement notable (elles étaient protégées par des bordures, enveloppées, rangées avec soin après leur passage devant la caméra, etc.) et devant les pratiques de photoshop, remix et mashup coutumières à certains étudiants peu sensibles à la source matérielle d’origine, il me semblait indispensable de faire mesurer cette matérialité aux étudiants, et par extension à tout internaute. Nous leur montrâmes aussi des plaques photographiques dans le même esprit. D’où une piste pédagogico-scientifique autour de l’ « archimage », cette image numérique de l’archive qui peut, du fait de sa plasticité liée à la numérisation, être transformée, coupée, colorisée, etc. et sembler à la fois malléable et pérenne, là où sa fragilité, sa dimension, le fait qu’elle se trouve dans tel dossier de la famille, au côté de telle autre lettre, etc. est absolument fondamental pour comprendre l’expérience de la lettre ou de la photographie au moment où les destinateur et destinataire en avait l’usage. Un des enjeux étaient donc d’attirer l’attention en ligne sur ces détails qui renvoient, via un hors-champ décrit le mieux possible, afin de « rematérialiser » l’archive et renvoyer à ces conditions de fabrication et lecture (par exemple une main discrète qui maintient un enfant pour qu’il reste dans le cadre pour réaliser une bonne « photo de famille »).

Le troisième enjeu était lié à la compétence de l’enseignant : même si le duo historien - « spécialiste » du webdoc fonctionnait parfaitement (grâce en particulier à une culture partagée de l’EAH), Laurent Véray étant aussi un réalisateur de film, et chacun de nous, étudiants comme enseignants, ayant une pratique au moins amateure de la photographie et/ou du film, la connaissance professionnelle de la pratique des interfaces et de la réalisation vidéo demandaient des compétences autres que celles qui pouvaient émerger à la croisée entre expériences diverses et analyse pluri-disciplinaire de photographies et films (analyse technique, formelle, historienne, discursive, etc.). Nous avons donc fait appel à des professionnels de la médiation et de la technique audiovisuelle et numérique de façon ponctuelle avant de préférer coupler le séminaire recherche-action avec l’atelier de réalisation vidéo prévu par la formation (saluons au passage  la souplesse de l’équipe à la tête du Master Pro Didactique de l’image !). Il a été clairement plus aisé de fabriquer des capsules vidéo courtes à greffer sur la plateforme (deux furent particulièrement réussies mais ne furent pas retenues par l’Education nationale) que de véritables maquettes d’arborescence dans la mesure où, autre découverte, si les étudiants de cinéma et audiovisuel ont une pratique réelle des nouveaux outils numériques, peu connaissaient le webdocumentaire, et surtout les modalités de fabrications des « nouveaux médias » (principes, modèles et logiciels, design graphique, backoffice…) - alors même que nous ne leur demandions pas de compétence en codage informatique bien sûr - faute de formation ad hoc (celle qu’a pu proposer David Dufresne aux étudiants de notre master, mais après la fin du projet, deux ans plus tard).

 

Quatrième enjeu de cet apprentissage de l’ENH, la question de la médiation pédagogique, dont ni Laurent Véray ni moi-même ne sommes réellement spécialistes (mais nous espérions un bagage minimum de la part de nos étudiants du Master Didactique), même si nous avons été confrontés par le passé, l’un ou l’autre, à ces problématiques (formation de formateurs, éducation aux médias, théorie de la médiation de Pierre Schaeffer, etc.). La réflexion d’une chercheuse, avec laquelle j’avais autrefois collaboré (au sein de la revue MédiaMorphoses), à la croisée entre sciences de l’éducation et théorie de la communication, Geneviève Jacquinot- Delaunay (1937-2014), qui nous quitta juste à ce moment-là, me servit de cadre pratique et théorique. Jacquinot-Delaunay distingue l’ « interactivité transitive » de l’ « interactivité intransitive » ; ainsi, un outil technique de médiation (cassette vidéo, CD-Rom, site) comporte les deux dimensions, l’une visible et actionnable (transitive), l’autre plus déterminante mais moins apparente (intransitive) fondée sur le type de relation envisagée (pédagogie, jeu, entrée dans une fiction, etc.)9. Elle précise bien que le choix de l’une a toujours un effet sur l’autre (un exemple simplissime est celui du QCM interactif via lequel l’élève progresse en fonction de ses réponses, où les choix transitifs engagent évidemment une certaine conception de la pédagogie et de l’apprentissage, et réciproquement), ce qui n’exclut pas des détournements d’usage (s’amuser à répondre « n’importe quoi » pour voir comment la « machine » réagit, de même que les films les plus pédagogiques peuvent susciter la rêverie ou l’échappée imaginaire).

Nous pouvions ainsi mettre des mots sur ce que les étudiants redécouvraient par la pratique : savoir à qui on s’adresse (ou à quelle catégorie de compétence, profil social et/ou culturel…) pour dire quoi et dans quel cadre (quelle médiation identifiable) s’avère plus essentiel que la médiation technique elle-même (qui « ne résout pas les problèmes » de ce type mais, pourrait- on dire, les révèle), alors même que nous devions aussi tenir compte, les uns et les autres (étudiants comme enseignants) d’une « culture internet » (et/ou jeux vidéo) – ou Web 2.0 (web dit « participatif ») - très disparate mais déterminante puisqu’une plateforme web n’est qu’un site parmi d’autres sur l’immense toile (y compris la «toile pédagogique »). Comment « retenir » l’internaute, quelle durée et rythme envisager pour une capsule consultée par un clic, quel site ou réseau social peut conduire, et à quel endroit, dans notre plateforme, peut-on envisager des contributions ? etc.


3. « Nouvelles écritures » de l’Histoire : construire des arborescences réflexives

 

Si nous avions pu aller jusqu’au bout de cette démarche – et peut-être un jour le pourrons-nous, ou transposerons-nous cette démarche sur un autre objet – nous aurions construits avec les étudiants des arborescences « réflexives » (c’est un raccourci : en réalité, c’est l’action de l’internaute qu’il l’est, mais l’interactivité intransitive doit pouvoir la favoriser – sans la garantir - par une sorte de pression contextuelle qui détermine telle pertinance cognitive) fondés sur les trois principes suivants inspirés de l’EAH : distance critique (par rapport à la source par exemple) ; comparaison entre deux traitements de la même archive, ou deux traitements du même événement par deux archives différentes (corpus Résal/autre archive, par exemple) ; « écriture de l’histoire » elle-même (choix des sources, traitement critique, options historiographiques mises en œuvre concrètement par les choix formels, narratifs et discursifs des images et des sons, etc.). Ainsi, nous envisagions trois types de réflexivité par le clic - sur le mode de la réflexité par le montage que pratiquent, entre autres, des documentaristes comme Chris Marker dans Le fond de l’air est rouge (1977), ou Hervé Le Roux dans Reprise (1997). Prenons, par exemple, le cas de la représentation des Allemands : on pouvait, tout d’abord, imaginer une arborescence par laquelle le clic joue le rôle de contre-champ ; l’ennemi a le même point de vue que les Résal, donc ce n’est pas un Autre absolu, et l’on peut se renseigner sur la correspondance de guerre vue « de l’autre côté » (voir la proposition Germans love their soldiers too – Fig. 4), ce qui permet de « sortir » de la monologie induite par le corpus, de jouer sur une référence bien connue et plus proche de nous (sans être stricto sensu de notre temps), de noter que le « casque à pointe » honni est ici intégré dans une image sentimentale, etc.

Germans love their soldiers too. (contre-champ)

Fig. 4. Exemple d’un contre-champ proposé par rapport à la correspondance Résal

Deuxième arborescence menant d’une lettre ou d’une photographie Résal à d’autres sources/archives/discours : le clic comme flashback ; en remontant de lien en lien, on décompose la représentation (la représentation n’est qu’une représentation parmi d’autres) et on étudie « l’ennemi » comme un construit verbal et visuel, de sorte que le point de vue du scripteur, photographe, dessinateur a une histoire, ce n’est qu’un point de vue parmi d’autres possibles (permettant de retracer une « petite histoire des stéréotypes sur les Allemands » à travers la correspondance Résal, à rebours de l’ « empathie »). Enfin, troisième arborescence « de travail » de ce type : la surprise (création d’un lien insolite pour provoquer une réflexivité rétroactive du clic) : un module « pour prolonger : une lettre de Julie sur le patriotisme » peut nous introduire à un passage discret mais authentifiable où Julie (la mère, qui a perdu un de ses fils entretemps) se met à la place d’un Allemand en essayant de deviner ses sentiments, le temps d’une phrase, avant de reprendre sa position anti-Boche dans la phrase suivante. Cette surprise peut permettre de penser les déterminations sociales, le poids des représentations en temps de guerre, l’évolution dans le temps du rapport des Français aux Allemands, etc. De l’intérieur de la correspondance, on peut ainsi disposer d’un levier pour penser ce corpus spécifique (ses contradictions), le rôle de l’archive (la place d’une correspondance familiale dans l’Histoire), l’écriture de l’Histoire appuyée sur ce genre de documents et son ouverture possible à condition de savoir « monter » ou « mettre en réseau » ces documents (comme le fait un historien d’ordinaire dans son écriture), etc. Dans le fond, l’objectif final pour nos étudiants, comme pour tout internaute après eux, était de les sensibiliser à l’esprit historien à partir d’une expérience numérique en leur faisant prendre conscience de cette interactivité intransitive qu’elle pouvait leur révéler en la pratiquant eux-mêmes, la main à la pâte dans l’archive.

 

En bonne pragmatique, on pourrait aussi dire que l’écriture renseigne sur la lecture et que, dans le fond, savoir écrire numériquement – jusqu’à la maîtrise d’une forme de réflexivité (qu’on pourrait comparer à l’utilisation réflexive d’un méta-langage lorsqu’on maîtrise suffisamment bien un langage) - c’est savoir lire numériquement. C’est-à-dire, tout comme un bon journaliste ou un bon romancier connaît les tenants et aboutissants du processus de lecture de son article ou de son roman (héritage culturel et linguistique, contexte historique, contexte de publication, co- texte de diffusion, public plus ou moins visé, etc., etc.), un bon concepteur web sait « lire » ce qui nous apparaît comme un simple texte ou hypertexte en y voyant tous les choix qu’ont fait d’autres concepteurs et toutes les hypothèses qu’ils ont faites sur les possibles lectures que nous allons pouvoir engager par le clic, et ainsi de suite.

 

4. Leçons logistico-créatives : des briques de formation à un MédiaLab de la Sorbonne Nouvelle ?

 

Nous demandions donc beaucoup à nos étudiants… connaître suffisamment la Première Guerre mondiale pour en faire une médiation informée, « intéressante » (production de documents authentiques et mise en contexte) mais aussi réflexive afin d’aider les élèves, et tout internaute, à comprendre comment s’écrit l’Histoire, même - et surtout - en ligne (où la régulation des contenus est une tout autre affaire que dans l’édition scolaire ou grand public). Ce qui supposait un ensemble de briques de savoirs et de savoir-faire susceptibles de s’articuler le plus harmonieusement possible. Si l’on retient le « meilleur » de cette expérience, on pourrait dire que, à un premier niveau, quatre blocs de savoir (Ecriture de l’Histoire et savoirs sur la Première Guerre mondiale ; EAH ; Webdoc et ENH ; médiations) pourraient être de 25 heures chacun afin d’éviter des synthèses trop rapides, de rencontrer des professionnels « au charbon » avec ces questions, et pour mettre à l’épreuve certaines hypothèses par des travaux sur le corpus choisi, et sur d’autres corpus (pour croiser les regards et identifier les paramètres spécifiques d’une archive, etc.).

 

A ces séminaires (100h) pourrait s’articuler un bloc d’un TD et deux stages : le TD serait consacré à la médiation audiovisuelle à travers des exercices de médiation par l’image et le son (éventuellement avec une classe-témoin ou tout groupe témoin qui serait le destinataire principal du webdoc ou équivalent) car c’est véritablement ce qui nous a manqué lors de notre expérience, d’autant que l’une des vertus bien connues d’un projet de ce type est de solidifier les savoirs acquis les uns sur les autres, ce que la plupart des étudiants ont réussi à faire (apprendre suffisamment sur la Guerre 14-18 et les questions d’archive pour pouvoir ensuite utiliser les archives à bon escient, puis, symétriquement, apprendre à se servir d’une caméra pour tourner un mini-documentaire à mettre sur le web sans dénaturer par une mise en scène trop attendue la richesse d’une archive de cette guerre tout en laissant d’éventuelles pierres d’attente pour des clics à venir, etc.). On pourrait imaginer un TD (25h) qui commencerait en même temps que les cent heures de séminaires plus haut, puis se prolongerait au second semestre (25h) pour approfondir la maîtrise technique et l’appropriation des savoirs et des médiations. Parallèlement, deux stages seraient utiles : l’un dans une agence web externe qui sensibiliserait les étudiants aux pratiques professionnelles actuelles dans le champ des nouveaux médias pour l’éducation et la culture (un mois), l’autre en interne (trois mois) pour réaliser avec le temps nécessaire un objet abouti, avec un concepteur web formé (et formateur) à la réalisation d’objets numériques, qui constituerait l’essentiel du second semestre et qui consisterait à passer de l’audiovisuel au numérique (et retour bien sûr, car le caractère clicable d’un segment filmique ou de la légende qui l’accompagne a des effets sur l’écriture audiovisuelle elle-même, a minima à la manière d’un chapitrage, mais on se doute que les effets cognitifs sont bien plus déterminants). Là aussi, c’est un travail que nous n’avons pu qu’ébaucher et que seul un « vrai » professionnel du numérique peut mettre en œuvre en lien avec chercheurs et étudiants, et ce à demeure (nous allons y revenir). Enfin, étape indispensable (pour les étudiants mais aussi les enseignants- chercheurs) et inspirée d’autres pratiques de recherche-création, un moment de présentation et restitution est indispensable, idéalement avec les trois publics-types concernés : le public-cible (ici des élèves et plus largement le grand public), le public universitaire (étudiants et enseignants- chercheurs) et enfin des professionnels des nouvelles écritures. D’où le schéma récursif idéal (Fig. 5.) que nous proposons à partir de notre expérience, permettant de modifier la formation initiale en fonction des leçons de la pratique (par exemple la découverte de l’importance de la « matérialité » de l’archive en cours de route).

Fig. 5 Cycle et structure de la formation à l’ENH

Il s’agit en quelque sorte de construire les conditions d’une autonomie universitaire dans ce domaine des nouvelles écritures dans la mesure où les modèles cognitifs que nous souhaitons mettre en œuvre ne correspondent pas nécessairement aux normes professionnelles courantes (voire les contestent, comme c’est le cas de certains « films de chercheurs » face aux documentaires d’histoire grand public ou aux films pédagogiques sur l’histoire), sans pour autant perdre en qualité et finition professionnelles. Un concepteur web maison pourrait ainsi développer progressivement une culture web proprement universitaire en lien avec les demandes qui lui serait faites, lui permettant de trouver des solutions technico-scientifiques ou technico- pédagogiques appropriées, à la manière dont le MédiaLab de Sciences Po, dirigé par Dominique Cardon, fait se croiser les savoirs des chercheurs sur les données extraites du web (leurs biais, leur heuristique possible en lien avec des questions sociales et politiques) et les savoir- faire des ingénieurs de recherche sur la production et la visusalisation des données, dans un affinage réciproque des outils et des hypothèses. Ce genre de recherche-action (ou création) qui peut impliquer (mais pas nécessairement) les étudiants suppose de comprendre que c’est pour le chercheur un moyen de poursuivre sa recherche avec d’autres moyens d’écriture, et non pas une valorisation d’une recherche déjà faite : de même qu’écrire un article scientifique, ou réaliser un film de chercheur sont des activités proprement scientifiques (il n’y a pas de recherche sans recherche sur le langage et les outils qu’on emploie, comme on le mesure très aisément lorsqu’on écrit un article scientifique dans une autre langue que sa langue maternelle), où le système de preuve et les modalités discursives sont spécifiques et en partie propres au médium, de même réaliser un webdocumentaire, c’est faire un autre type de recherche, avec d’autres outils, d’autres systèmes de preuves (même si les méthodes et les objectifs généraux demeurent). Ultime leçon de l’ « écriture de l’Histoire » qui s’applique à toute écriture scientifique. Ou alors on peut dire que la valorisation dans le champ des sciences humaines est une poursuite de la recherche par d’autres moyens, contrairement à d’autres types de valorisation dans d’autres champs académiques où une « découverte » scientifique (propriété d’un matériau) peut donner lieu à un brevet (pour se servir de cette propriété).

 

En effet, s’il n’a pas été facile d’introduire progressivement des services audiovisuels dans les universités, d’autant que notre propre département s’est toujours défini à distance de la pratique pour éviter la confusion entre « école de cinéma » et formation universitaire sur le cinéma (et l’audiovisuel), ces services ont souvent été d’importants adjuvants pour les projets de chercheurs et d’étudiants, mais la maîtrise de la création web suppose le recrutement d’un professionnel qui ne soit ni un informaticien, ni un technicien audiovisuel, fussent-ils très chevronnés et ouverts. C’est pourquoi cette expérience de Plateforme 14, où nous n'avons pas pu exploiter ce deuxième niveau – réflexif – de la plateforme (qui aurait été davantage encore notre apport à ce projet éducatif en tant qu’universitaires), faute de disposer non des moyens mais de la ressource humaine nécessaire pour la mettre en œuvre par un dialogue continu pendant les trois années de sa mise en place, m’a conduit à envisager le besoin d’un MédiaLab propre à notre université. Ce MédiaLab pourrait ainsi, sur plusieurs années, suivre deux ou trois projets par an, qu’ils soient scientifiques, pédagogiques, ou les deux (comme Plateforme 14), en donnant aux équipes d’enseignants-chercheurs et d’étudiants l’espace, les matériels et l’accompagnement humain qui permettrait de le faire vivre. Une piste pour la Cité des (nouvelles) écritures de la Sorbonne Nouvelle ?

1 Ce texte reprend, et développe parfois, mon intervention lors du lancement de la Cité des Ecritures. Il doit beaucoup, cela va sans dire, au travail fait en commun avec Laurent Véray, mais aussi au soutien du Master Didactique de l’image, et à la collaboration avec les équipes du Ministère de l’Education nationale, notamment Marie-Christine Bonneau-Darmagnac et Pierrick Hervé. Chef de projet web de la V1 : Chloé Delaporte. Concepteur de la V2 : agence Hegyd, avec la participation d’enseignants d’histoire de l’Education nationale.

2 Evelyne Broudoux, « Le documentaire élargi au web », Les Enjeux de l’information et de la communication, 2011. DOI : 10.3917/enic.hs03.0003

3 Voir Laurent Véray, « La mise en forme visuelle de lʼhistoire dʼune famille pendant la Grande Guerre. Du documentaire télévisuel à lʼoeuvre multimédia interactive. Lʼexemple de Plateforme 14-18», in Historiens et Géographes, 2016 (hors-série).

4 « L’agenda visuel », produit par tâtonnements successifs, a « retrouvé » (ou correspond à) la double fonction de l’écran numérique identifiée par Lev Manovich dans Le langage des nouveaux médias, Presses du réel, 2010 (2001) : fenêtre immersive (dans la tradition perspectiviste) pour entrer dans autre espace et interface de contrôle (dans la tradition cybernétique). Il permet à la fois une implication dans le passé, tout en faisant mesurer une distance (au moins temporelle : cent ans) qui favoriser une posture réflexive chez le visiteur.

5  https://www.plateforme1418.com/

6 Pour ma part, je m’appuie principalement sur son Rapports de force. Histoire, rhétorique, preuve, Seuil, 2003 (1999) qui combat la position d’Hayden White. Ce n’est pas la moindre des difficultés que d’introduire – et si possible rapidement pour pouvoir aborder les autres questions - les étudiants, même avancés, à comprendre que l’histoire est « écriture » mais sans perdre de vue sa pertinence scientifique (on rencontre la même difficulté lors d’un cours ou séminaire sur la « mise en scène » documentaire qui n’invalide pas la capacité d’un film à documenter des réalités sociales ou politiques).

7 Sur ces enjeux scientifiques et pédagogiques – mais aussi éthiques : il serait en effet paradoxal d’enseigner aux étudiants à leurrer de futurs internautes en sachant manier parfaitement une écriture de l’Histoire-fiction -, je me permets de renvoyer à : Guillaume Soulez, « Le moment du choix. Délibération, écriture de l'Histoire et webdocumentaire historique », Revue française des sciences de l’information et de la communication [En ligne], 10 | 2017, mis en ligne le 01 janvier 2017. DOI : 10.4000/rfsic.2682 (qui aborde également certains points que j’évoque ici par la suite).

8 Une discussion relancée comme on sait par Walter Benjamin dans son Sur le concept d’histoire (1940).

9 Geneviève Jacquinot, « Du cinéma éducateur aux plaisirs interactifs, rives et dérives cognitives », in Cinéma et dernières technologies (F. Beau, Ph. Dubois, G. Leblanc dirs), Paris, INA/De Boeck, 1998, pp. 153-168.

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Sitographie (outre la plateforme elle-même dont l’adresse figure ci-dessus note 5) :

 

-  Présentation du projet sur le site de la Sorbonne Nouvelle : http://www.univ-paris3.fr/plateforme-14-236781.kjsp

-  Présentation de la journée d’études sur le webdocumentaire :

http://www.univ-paris3.fr/un-etat-du-webdoc-aujourd-hui-247449.kjsp?RH=1505727285324

 

-  Présentations de la plateforme au sein de l’Education nationale :

 

https://contrib.eduscol.education.fr/numerique/tout-le-numerique/veille-education- numerique/archives/2016/janvier-2016/une-famille-dans-la-grande-guerre

 

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/pages/2015/12/18122015article635860200114098488.aspx