Mes grands-parents n’avaient pas craint de venir à Sainte-Savine en l’an 1895, pour y créer une entreprise de marbrerie et de monuments funéraires avec comme sigle commercial “Au bon Souvenir” DARSONVAL-ROUSSELOT
La marbrerie de Sainte-Savine
(47 rue Louis Blanc)
Je ne puis évoquer le nom de Dolancourt sans rappeler le nom de mes arrières grands-parents, Edme Alix Darsonval et Antoinette Roblin, vignerons, et descendants eux-mêmes d’une longue lignée de Darsonval et de familles alliées depuis 1608, alors qu’à cette époque naissait Hubert d’Arsonval, fils de Jehan d’Arsonval, lieutenant particulier de justice au baillage de Jaucourt.
Je ne peux vous parler de moi sans vous parler auparavant de mon père et de ma mère. Mon père est né le 7 décembre 1883 à Vendeuvre-sur-Barse, chez ses grands-parents maternels, Joseph Arsène Rousselot et Louise Maillot, mais demeurait avec ses parents à Maison-Neuve, dit le Pont-Neuf, commune de Dolancourt. D’ailleurs voici son acte de naissance :
“ Le 8 décembre 1883 à Vendeuvre-sur-Barse, à neuf heures du matin, par devant Nous Biorgeot Jules Joseph, maire, officier de l’état civil de la ville de Vendeuvre-sur-Barse, chef lieu du canton, département de l’Aube, est comparu Darsonval Jean-Baptiste Martial, âgé de 30 ans, tailleur de pierre, domicilié à Dolancourt, arrondissement de Bar-sur-Aube, lequel nous a déclaré qu’hier sept du dit mois de décembre 1883 à deux heures du matin, est né au domicile de son beau-père Rousselot Arsène, sis en cette ville, rue des Voies de Vienne N° 5, un enfant du sexe masculin qu’il nous présente et auquel il a déclaré donné les prénoms de Léon Arsène Martial, lequel enfant est né de lui déclarant et de dame Rousselot Louise Angèle, âgée de 24 ans, sans profession, domiciliée avec son mari au dit Dolancourt. La dite déclaration faite en présence de Rousselot Arsène, âgé de 53 ans, manouvrier, et de Rousselot René Joseph, âgé de 30 ans, maréchal ferrant, tous deux domiciliés en cette ville, le premier, père et le second, frère de l’accouchée, et ont, les déclarants et témoins, signés avec Nous le présent acte de naissance après que lecture leur en a été faite”.
Mon grand-père Jean-Baptiste Martial, chaque matin, au lever du soleil, se rendait dans les carrières d’Arsonval qui se trouvaient à proximité de sa maison, avec dans sa musette, un frugal repas préparé avec soin par Angèle, son épouse, pour aller y extraire de la pierre et subvenir ainsi aux besoins du ménage. Quant à ma grand-mère, une pièce de sa maison servant d’auberge, servait à qui le demandait, casse-croute et boisson selon le désir de tout chacun, cette maison étant une ancienne ferme relais de diligences. Ils vivaient ensemble une vie calme et laborieuse, élevant avec amour et chrétiennement, leurs deux enfants, Léon et René qui de temps en temps allaient taquiner le goujon sur les bords de la rivière “Aube” qui s’écoulait doucement à proximité de leur maison ou bien beaucoup plus loin au fond du vallon à Arsonval, allaient se désaltérer à la source “Arlette” qui serpente à travers les feuillées, allait se jeter dans l’Aube au centre du village.
Arsonval, où l’on voit la source Arlette qui serpente dans le fond du Vallon.
Mon père, alors âgé de sept ans, adorait ses grands-parents maternels, n’ayant plus de grands-parents paternels, et se montrait très affectueux à leur égard, malheureusement en cette douloureuse année de 1890, alors que le grand-père venait de mourir six mois auparavant, il écrivait ceci :
“ Ma bien aimée mémère, Mon bien aimé parrain, c’est les larmes aux yeux que je viens confier à ce froid papier toute l’amitié que j’ai pour vous. Je voudrai bien vous embrasser en ce jour, je ne le puis aujourd’hui, quoique mon petit cœur était si content d’être auprès de vous mais cette belle rose vous dira tout ce que mon cœur contient d’amour pour vous, que je vous aime beaucoup, que je vous souhaite une bonne année et une parfaite santé et que vos petits enfants soient la joie à votre vie, qu’ils grandissent dans la sagesse et le travail dont vous avez pris votre part. C’est cet espoir, mes bien aimés parents que je vous donne pour étrennes en attendant d’aller vous embrasser bien fort ainsi que mon oncle René à qui je souhaite une bonne année, à Dimanche et au revoir. Je vous aime bien et vous embrasse de tout cœur. Votre petit Léon qui vous aime pour la vie. Léon d’Arsonval. La Maison-Neuve, 30 décembre 1890.
Cette petite lettre de vœux est pleine de sentiments affectueux et filiaux si gentiment exprimés sous la dictée sans doute d’une mère très aimante et fille en même temps d’une mère plongée dans la douleur pour avoir perdu son mari six mois auparavant. Ma grand-mère était une personne chrétienne et très pratiquante et c’est elle qui prit sur elle d’aller trouver le Baron du Val-Suzenay (près Vendeuvre-sur-Barse), pour lui demander son appui afin que son fils Léon puisse rentrer au Petit-Séminaire de Troyes et y faire ses études, mais au bout de six ans de présence en ce lieu, n’ayant pas la vocation pour devenir prêtre, mon père préféra donner à sa jeune vie une autre direction.