J'ai bien aimé lire cette publication scientifique qui, selon moi, se situe à l'intersection des recherches en communication et en éducation. Le postulat de cet article est, me semble-t-il, de comprendre l'importance de développer la littératie numérique des jeunes à l'école. Il s'agit, d'après les auteurs de cette étude, d'une « révolution » qui doit s'effectuée par l'adoption d'une approche éducative dite multimodale. Évidemment - il s'agit s'agit presque d'un lieu commun de le dire ainsi - le numérique a bouleversé nos modes de communication, élargissant du même coup la perception de la littératie. Celle-ci ne s'évalue plus seulement en fonction du « sacro-saint » mode textuel, loin de là. L'environnement communicatif, hétérogène, s'est complexifié pour devenir le lieu de rencontre de plusieurs modes d'expression : des représentations iconographiques/images (mode visuel), des gestes/mouvements (mode cinétique) et des sonorités de tout acabit (mode sonore) (p.74). Conséquemment, il va sans dire qu'un bon communicateur doit aujourd'hui dépasser la simple maîtrise du mode textuel.
Cette « redéfinition pratique et conceptuelle de la communication » (p. 74) remet nécessairement en doute notre propre rapport au savoir et bouleverse notre perception de la profession enseignante. Les auteurs de cet article vont répertorier trois « lieux de résistance » qui, ultimement, nuisent au développement de la littératie numérique en contexte scolaire. Premièrement, les élèves seraient placés dans des situations d'utilisation des médias sans pour autant leur offrir une véritable formation quant à leur mode d'expression et de réalisation. Deuxièmement, la personne enseignante, fossé des générations oblige, se retrouve bien souvent plus désemparée que les étudiants devant la réalité multimodale. Plusieurs enseignants n'ont même pas été formé pour utiliser le numérique à des fins pédagogiques. Finalement, le troisième lieu de résistance identifié par les auteurs découle du deuxième : les environnements multimodaux ne pourront être perçus comme un espace d'apprentissage riche tant que les enseignants n'élaboreront pas des activités structurées.
Les auteurs nous bombardent ensuite de plusieurs statistiques qui, selon ma perception, visent à nous prouver que les jeunes utilisent avec aisance les technologies et que celles-ci font partie intégrante de leur quotidien. Ces statistiques m'auraient semblé pertinentes si nous n'étions pas en 2023. Or, puisque l'article en question a été publié il y a déjà dix ans de cela, les nombreuses statistiques présentés ne sont pas révélatrices pour le lecteur d'aujourd'hui. En revanche, les pistes de solution suggérées dans le dernier paragraphe de cette publication me semblent toujours d'actualité. Les auteurs proposent notamment de réformer la formation des maîtres pour « vaincre » les trois résistances identifiées plus haut. Cela justifie l'existence de plusieurs cours universitaires, dont celui à l'intérieur duquel le présent texte s'inscrit.