Jeudi 10 Décembre 2020 - Olivier Chartrain
Une enquête internationale révèle que les élèves français sont parmi les plus mauvais dans les disciplines scientifiques. Un résultat qui s’explique par les choix pris depuis trente ans.
Ah, la fameuse « bosse des maths » ! Héritage lointain de la phrénologie – cette discipline pseudo-scientifique raciste qui, au XIXe siècle, prétendait déterminer les capacités cognitives des personnes à partir de la forme de leur crâne –, elle n’a pas manqué d’être évoquée depuis la publication, mardi 8 décembre, des résultats de l’enquête Timss 2019. On vous épargnera la traduction de l’acronyme : il s’agit d’une enquête internationale qui, tous les quatre ans, évalue les performances des élèves en mathématiques et en sciences. Or pour la France, les résultats de ce travail de référence, évaluant cette année les élèves de CM1 et ceux de 4e, sont catastrophiques.
En mathématiques, les élèves de 4e actuels ont le niveau des élèves de 5e d’il y a 25 ans…
En CM1, la France se classe avant-dernière des pays de l’OCDE et… dernière de l’Union européenne, loin derrière des pays comme Chypre, la Bulgarie ou Malte. Pour les 4e, c’est pire. La France reste loin des moyennes UE comme OCDE et précède à grand-peine la Roumanie ou la Nouvelle-Zélande. Surtout, les résultats plongent depuis la dernière enquête sur les 4e, en 1995 : alors que les collégiens de l’époque arrivaient au score moyen de 530 points, leurs successeurs ne font pas mieux que 483 points. Un écart équivalent à une année scolaire de retard – ou, pour le dire autrement, en mathématiques, les élèves de 4e actuels ont le niveau des élèves de 5e d’il y a 25 ans…
Voilà les faits, qui ont fait ressurgir du crâne de certains cette fameuse « bosse des maths », que les jeunes Français n’auraient donc pas. C’est un peu court. Reste à trouver ce qui peut expliquer cette situation, qui n’a « pas surpris » Sébastien Planchenault, le président de l’Association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public (Apmep). Ce dernier souligne que « c’est cohérent avec les résultats des enquêtes internationales précédentes ». Il n’y a pas, c’est une évidence, une seule explication, qu’il suffirait de pointer du doigt pour résoudre le problème.
Une formation initiale « trop différente selon les académies »
Premiers sur le banc des accusés – on allait écrire « évidemment » : les enseignants. Particulièrement les professeurs des écoles (PE), accusés d’être trop majoritairement issus de filières littéraires, donc insuffisamment formés aux matières scientifiques pour les bien enseigner. Certes, remarque Sébastien Planchenault, le recrutement désormais à bac +5 fait que « les étudiants de filières littéraires n’ont parfois pas eu l’occasion de faire des maths depuis le bac, voire bien avant avec l’abandon des maths dans le tronc commun au lycée ». On relèvera aussi les difficultés de l’éducation nationale à recruter des « matheux » pour le concours de professeur des écoles, ceux-ci trouvant aisément ailleurs de meilleures perspectives de carrière et de salaire… Une situation qui ne risque pas de s’arranger avec la réforme du bac, puisque les maths, pas réintégrées dans le socle commun, font désormais l’objet d’une spécialité réputée difficile « que choisissent avant tout des élèves désireux de s’orienter vers les grandes écoles », et plus du tout vers les carrières de l’enseignement, note le président de l’Apmep.
Mais il y a un sacré problème avec cette explication « littéraire » : Timss 2019 montre exactement le contraire. L’enquête relève en effet qu’en CM1, les PE diplômés en mathématiques obtiennent de moins bons résultats que les autres. « Ceux qui ont suivi des filières littéraires ont peut-être reçu plus de formation pédagogique », hasarde le président de l’Apmep. Il déplore également le « manque de licences pluridisciplinaires » et pointe aussi une formation initiale « trop différente selon les académies : le volume horaire de la préparation au concours de PE peut varier de 200 à 600, voire 800 heures ».
Inégalités sociales
On trouve pourtant dans Timss elle-même d’autres facteurs d’explication. Parmi celles-ci, les inégalités. L’enquête relève ainsi un gouffre (presque 100 points d’écart !) entre les élèves qui ont dans leur famille un accès aisé à la culture (livres…) et les autres. Même différence entre les élèves issus d’établissements qui comptent beaucoup d’élèves défavorisés et les autres. Ou entre les élèves de langue maternelle française et les autres – comme si on découvrait que pour comprendre l’énoncé d’un problème de maths, il faut d’abord être bon… en français. Autant de facteurs que ne risque pas d’améliorer la destruction, programmée par Jean-Michel Blanquer, des réseaux d’éducation prioritaire. Ou « la baisse des horaires de maths et de français au collège ces dernières années », relève Sébastien Planchenault.
Pour lui, si le plan Villani-Torossian « va dans le bon sens » en proposant aux enseignants des formations en mathématiques, remettre les maths dans le tronc commun des enseignements au lycée est urgent, tout comme revaloriser vraiment une profession qui n’attire plus les compétences. Mais peut-être la principale clé du problème est-elle ailleurs : à savoir dans cette formation initiale des profs qui, depuis 30 ans, a choisi de privilégier les compétences matière, le savoir, tout en réduisant – voire détruisant – tout ce qui permettait l’acquisition des compétences pédagogiques, le faire savoir. Timss 2019, en tout cas, ne dit pas le contraire...
Le tweet d'Anne Rosencher, directrice déléguée de la rédaction de l'Express (copie d'écran).
Jeudi 10 Décembre 2020 - Olivier Chartrain
La fédération des parents d'élèves assigne l'Express devant les tribunaux pour de fausses accusations dans l'affaire Samuel Paty.
Il y a d’abord eu, le 7 décembre, sur le site Web de l’Express, une interview de Bruno Modica. Interrogé au sujet de l’enquête de l’éducation nationale sur l’affaire Samuel Paty, ce professeur d’histoire-géographie y confiait s’interroger sur « le rôle joué par certaines fédérations de parents d’élèves dans l’affaire de Conflans-Sainte-Honorine, et notamment sur celui de la FCPE ». Et il citait le fameux rapport : « La FCPE, estimant qu’elle était “dépassée” dans l’exercice du rôle de modérateur qui est le sien, a conseillé au père, s’il considérait qu’il y avait harcèlement, de déposer plainte. »
Maelstrom de haine
Insinuation reprise le lendemain, sur son compte Twitter, par Anne Rosencher, directrice déléguée de la rédaction du magazine, en ces termes : « La FCPE a conseillé au parent d’élève de porter plainte contre Samuel Paty. » Aussitôt, la première fédération de parents d’élèves de France (un statut largement confirmé lors des récentes élections) devenait la proie, sur les réseaux sociaux puis dans certains torchons de la droite extrême, d’un maelstrom de haine, certains allant même jusqu’à appeler… à sa dissolution.
Déja prise pour cible par Blanquer
Le problème, c’est que la FCPE n’a jamais conseillé au père d’élève de porter plainte contre Samuel Paty, explique son coprésident, Rodrigo Arenas : le passage auquel l’Express fait allusion concernait une affaire antérieure de harcèlement. Mais le mal est fait. Déjà prise pour cible l’an dernier – par Jean-Michel Blanquer en personne – pour une affiche montrant une mère d’élève portant foulard et affirmant « Oui, je vais en sortie scolaire, et alors ? », la FCPE persiste à défendre une conception à la fois exigeante et ouverte de la laïcité. Voilà ce que ne supportent pas ceux qui voudraient faire de cette dernière une arme de combat contre une partie de la population française. Mercredi soir, la FCPE annonçait qu’elle allait assigner Anne Rosencher en justice pour diffamation.
Mercredi 9 Décembre 2020 - Christophe Prudhomme
Christophe Prudhomme est médecin au Samu 93.
Le gouvernement essaye de profiter de la crise liée à l’épidémie de Covid-19 pour faire voter par le Parlement des réformes accélérant la mise en place du monde libéral auquel il aspire. C’est le cas avec la proposition de loi déposée par la députée LaREM Stéphanie Rist. Un article vise à créer des professions médicales intermédiaires pour, notamment, remédier au manque de médecins. La raison invoquée montre la constance de la logique libérale à l’œuvre depuis les années 1980, puisque ce déficit démographique a été sciemment créé pour justement pouvoir proposer ce type de solution.
Médecine des riches et médecine des pauvres
En fait, cette appellation renvoie aux officiers de santé qui existaient au XIX e siècle et dont la mission était réduite aux premiers secours aux malades et aux blessés. Ils étaient considérés comme une « classe moins relevée dans la hiérarchie médicale ». Dans la société très inégalitaire de cette époque, les médecins exerçaient plutôt dans les villes auprès d’une patientèle plutôt fortunée, alors que les officiers de santé maillaient les campagnes et les faubourgs. Il s’agit donc bien d’accélérer le processus en cours d’une médecine des riches et d’une médecine des pauvres.
Glissement de tâches
Heureusement, les multiples protestations provoquées par cette proposition ont permis un premier recul, avec la suppression de la référence à ces professions médicales intermédiaires. Mais, l’affaire n’est pas close pour autant, car le sujet reste d’actualité avec la création, par la loi dite Buzyn, des infirmières de pratique avancée. Le dispositif mis en place est présenté comme une réponse à une aspiration légitime, de la profession d’infirmière, d’une reconnaissance de l’élévation de leur qualification, sanctionnée par des diplômes de type master. Mais ce qui se passe sur le terrain est complètement différent, avec un glissement de tâches entre les médecins en sous-effectifs et les infirmières, le tout dans une visée uniquement financière : une infirmière « coûte » moins cher qu’un médecin. D’autant que, pour l’instant, les niveaux de rémunération promis ne correspondent absolument pas à un niveau de qualification bac + 5. Attention, cette question n’est pas uniquement catégorielle, mais concerne l’ensemble de la population en termes d’égalité d’accès aux soins.
Lundi 6 Juillet 2020 - Loan Nguyen
De la Bretagne à la Corrèze, la bataille contre les plans de licenciement mobilise bien au-delà des salariés concernés. Samedi, Tulle a défilé pour soutenir les Borgwarner et Lannion pour défendre l’emploi chez Nokia.
Alors que le gros de la crise sociale liée à l’épidémie de Covid-19 et au confinement est encore devant nous, des centaines d’emplois font déjà les frais de stratégies d’entreprise délétères, risquant de porter un coup à des territoires qui dépendent fortement de cette activité. Samedi, en Bretagne comme en Corrèze, ce sont des villes entières qui se sont mobilisées pour faire entendre leur refus des licenciements massifs à venir. À Tulle, environ 2 000 personnes ont défilé pour protester contre la fermeture annoncée de l’usine Borgwarner, située à Eyrein, pour 2022, qui se traduirait par 368 suppressions de postes directs chez l’équipementier automobile. « Mais en comptant l’impact sur les sous-traitants, on se rapproche du millier d’emplois », précise Mickael Morel, secrétaire général de la CGT de l’établissement et secrétaire de l’Union syndicale des travailleurs de la métallurgie (USTM) en Corrèze. « Ça fait cinq ans qu’on nous balade alors qu’on demande des productions qui nous assurent un avenir », dénonce Alexandre Brigoulet, délégué CGT chez Borgwarner.
Une solidarité qui s’étend au-delà des limites du département
Conscients des conséquences qu’une telle décision aurait sur le bassin d’activité dans son ensemble, de nombreux élus locaux ont également manifesté. « Beaucoup de commerçants avaient baissé leur rideau ou affiché des petits mots de soutien sur leurs vitrines », témoigne Alexandre Brigoulet. Une solidarité qui s’étend même au-delà des limites du département. « On y a été complètement naturellement pour montrer aux Borgwarner qu’on est à leurs côtés pour se battre contre cette logique purement financière qui brise des vies », explique Vincent Labrousse, élu CGT à la Souterraine Industrie, ex-GM & S, qui n’a cessé de se battre avec ses camarades contre la liquidation de leur usine dans la Creuse. Pour lui, il faut « faire pression sur les hommes politiques pour qu’ils agissent sur les dirigeants d’entreprise ». « Parce qu’en dépit des promesses de Bruno Le Maire de ne laisser personne sur le carreau dans notre cas, il n’y a que 46 anciens de GM & S qui ont retrouvé un CDI sur 157 licenciés. »
« L’histoire des télécoms dans la ville remonte aux années 1960 »
Du côté de Lannion (Côtes-d’Armor), ce sont environ 6 000 personnes qui ont manifesté pour dénoncer un énième plan de licenciement chez Nokia, ex-Alcatel-Lucent. Le géant des télécoms finlandais a en effet annoncé le 22 juin son intention de supprimer 1 233 postes, dont 402 à Lannion, essentiellement dans la recherche et développement. « Nokia est le troisième employeur de la ville derrière l’hôpital public et Orange », explique Philippe Mulot, délégué syndical central CGT chez Nokia et salarié basé à Lannion. « L’histoire des télécoms dans la ville remonte aux années 1960, tout le monde connaît quelqu’un qui travaille pour l’un de ces trois employeurs, ce qui explique l’attachement des habitants à notre entreprise », précise-t-il. Si ce soutien des habitants et des élus locaux est évidemment précieux aux yeux des salariés en lutte, ceux-ci se méfient aussi de la stratégie des pouvoirs publics en la matière. « On a rencontré des élus qui nous ont dit qu’ils étaient prêts à verser des aides publiques pour conserver les emplois… mais ça fait des années qu’ils font la même chose. Qu’ils aident les entreprises, d’accord, mais il faut qu’il y ait de réelles contreparties », insiste Philippe Mulot, qui rappelle que Nokia n’a pas respecté ses engagements de maintien des emplois en France, pris au moment du rachat d’Alcatel-Lucent. Une nouvelle manifestation doit avoir lieu mercredi à Paris pour protester contre ce plan.
Vendredi 29 Mai 2020 - Christophe Prudhomme
Christophe Prudhomme est médecin au Samu 93.
Les personnels hospitaliers sont confrontés à une pénibilité inévitable du fait de la nécessité d’assurer la continuité du service public, 24 h sur 24 et 365 jours par an. Les horaires décalés constituent aujourd’hui un des premiers facteurs influant négativement sur la santé des travailleurs. Nos métiers sont très féminisés et il faut savoir par exemple que le travail de nuit modifie notamment les cycles hormonaux, ce qui représente un facteur de risque du cancer du sein. Des pays comme le Danemark reconnaissent même celui-ci comme une maladie professionnelle pour les salariées soumises à ces contraintes.
Il est possible de soulager le travail en aménageant et en réduisant les horaires. La réduction du temps de travail à 32 heures par semaine pour les équipes de nuit constitue une avancée. Mais ces dernières années, la compensation par ce qu’on appelle la catégorie active, c’est-à-dire le fait de bénéficier d’un départ en retraite anticipé de 5 ans quand on a travaillé pendant 15 ans dans les métiers concernés, a été mis à mal. Une première fois par Roselyne Bachelot qui a vendu le passage en catégorie A, c’est-à-dire cadre, pour les infirmières avec comme contrepartie la perte de la catégorie active. La deuxième lame est constituée par la réforme des retraites votée en catastrophe juste avant le début de l’épidémie. Elle prévoit la suppression pure et simple de ce droit : il s’agit donc de travailler 5 ans de plus sans contrepartie. Cette mesure est particulièrement injuste quand on sait par exemple que plus de 30 % des aides-soignant.e.s partent aujourd’hui en retraite, en général vers 60 ans, avec un pourcentage plus ou moins important d’invalidité.
Pour le fameux « monde d’après », nous demandons l’abrogation de la loi sur les retraites, le maintien de la catégorie active pour les salarié.e.s qui en bénéficient encore, son rétablissement pour les infirmier.e.s qui l’ont perdue et son extension aux métiers qui en étaient jusqu’à présent injustement exclus.
Lundi 04 Mai 2020 - Camille Bauer
Malgré le cadrage qu’offre la loi, la création de deux fichiers nominatifs, et consultables par un large éventail de professionnels, interpelle les défenseurs des libertés.
Pour lutter contre les chaînes de transmission du virus, un quadrillage et un fichage sans précédent de la population se mettent en place. Deux fichiers doivent permettre l’échange de données sur les personnes atteintes du Covid, a indiqué samedi le ministre de la Santé. L’un, Sidep, va centraliser les résultats des laboratoires, et listera les personnes testées positives ; l’autre, Covid contact, répertoriera les personnes ayant été en contact avec chaque malade. « Le gouvernement a pris des précautions législatives. Mais celles-ci pourraient nous faire oublier la question de fond. Parce qu’il est très rare qu’on ait à légiférer pour des impératifs de santé publique, nous manquons de point de repère sur ces dérogations aux libertés que nous sommes prêts à accepter en la matière », observe Stéphanie Hennette Vauchez, professeure de droit public.
« Le fait d’être fiché pourrait avoir des conséquences pour le malade »
En attendant l’avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, qui devrait se prononcer rapidement, plusieurs aspects interrogent. « Je trouve inquiétant que ces fichiers soient nominatifs. Les déclarations obligatoires à la Sécurité sociale pour certaines maladies, comme le sida ou la rougeole, elles, ne le sont pas », souligne Maryse Artiguelong, vice-présidente de la Ligue des droits de l’homme. La loi précise que le système d’information créé ne peut servir « qu’aux seules fins de lutter contre la prorogation de l’épidémie de Covid-19 ». Mais Maryse Artiguelong s’inquiète d’une éventuelle extension de son usage. « Le fait d’être fiché pourrait avoir des conséquences pour le malade, par rapport aux assurances ou aux employeurs. Se déclarer malade pourrait être risqué », estime-t-elle. Autre problème, le fichage se fera, « le cas échéant, sans le consentement des personnes intéressées ». C’est vrai pour les personnes malades, mais plus encore pour les cas contacts, dont les noms seront donnés par le patient à son médecin.
L’éventail de ceux qui auront accès à ces fichiers est, en outre, très large. « On est là dans une extension du cercle qui va bien au-delà des professions qui sont tenues par le secret médical », s’inquiète la professeure de droit.
« C’est mieux que l’appli Stop Covid. Et faire du traçage contre l’épidémie paraît logique. Mais se pose la question de la sécurisation des données, et de leur durée de stockage », souligne-t-on à la Quadrature du Net. Sur ce point aussi, le gouvernement donne des garanties. La loi limite l’existence des fichiers « à la durée de l’épidémie ou, au plus tard, à une durée d’un an à compter de sa publication ». Mais le précédent des lois d’exception contre le terrorisme, finalement entrées dans le droit commun et sources de nombreux abus, n’est pas de nature à rassurer.
Dimanche 03 Mai 2020 - www.viavosges.tv
Dans une tribune commune, 4 partis vosgiens de la gauche de l'échiquier politique - Europe Ecologie Les Verts, La France Insoumise, le Nouveau Parti Anti-capitaliste et le Parti Communiste Français - demandent aux maires du département de ne pas rouvrir les écoles le 11 mai prochain, date annoncée du déconfinement.
Comme plusieurs syndicats enseignants, EELV, LFI, NPA et PCF s'inquiètent tout d'abord des risques sanitaires de cette rentrée, pour les élèves et les professeurs, demandant une grande décbauche d'énergie et de moyens cela pour seulement 15 jours effectifs à l'école avant le début des grandes vacances.
Ils auraient souhaité une reprise en septembre comme d'autres pays européens voisins : l'Italie, l'Espagne, une décision plus sage. Les 4 partis vosgiens dénoncent la véritable raison pour eux de cette réouverture : la raison économique : "l’école deviendrait une garderie géante pour que les parents puissent aller travailler" et souhaitent que l'on ne reproduise pas l'erreur des municipales : "Ne faisons pas de nos enfants la première ligne d’une deuxième vague épidémique".
Cette tribune commune est à retrouver ci-dessous.
COMMUNIQUE DEPARTEMENTAL COVID-19 de EELV, LFI, PCF, NPA
Le 28 avril devant le Parlement, le premier ministre a exposé son plan de déconfinement, en mettant en avant la réouverture des écoles à partir du 11 mai. Ce plan est pour nous dangereux à plusieurs titres. A ce jour nous ne connaissons pas tous les modes de contagiosité du Covid-19 et cette décisionnous paraît très risquée.
La gestion hasardeuse, le manque de garantie et d’explications de la part de l’Etat concernant la sécurité sanitaire de nos enfants ne va pas dans le bon sens et ne nous rassure pas. Nous assistons à une grande méfiance des concitoyens envers la capacité de gestion de cette crise pour aujourd’hui mais aussi pour l’après.
Les décisions prises par le gouvernement se sont faites en dehors de toutes concertations avec les syndicats d’enseignants, sans véritablement s’assurer de l’avis des collectivités locales mais en leurs faisant porter la responsabilité tout en diminuant les budgets.
Quand on regarde les chiffres et en faisant un calcul simple, nous nous apercevons que cela représente 15 jours effectifs par élève jusqu’aux vacances scolaires. Pour les plus sceptiques et en restant pragmatique, pourquoi devrions-nous utiliser autant d’énergie pour un résultat aussi faible.
Notre région et notre département qui est d’ailleurs en « zone rouge » ont été et sont encore fortement touchés par cette épidémie. Ne commettons pas l’erreur d’un déconfinement hâtif. L’Italie et l’Espagne, deux pays aussi touchés que la France ont décidé de reporter la rentrée des classes en septembre, c’est le cas également pour l’Irlande, le Portugal et la Roumanie. Ces pays seraient-ils plus soucieux de la santé de leurs enfants ? Le Japon et la Corée du sud ayant opté pour un déconfinement anticipé sont revenus sur leur décision et finalement sont contraints au reconfinement.
Les élèves allant de la maternelle à la 5ème, c’est-à-dire les âges auxquels un enfant ne peut pas rester seul à la maison sont censés retourner en cours à partir du 11 mai. Nous connaissons la raison profonde de cette rentrée prématurée, il s’agit de la raison économique : Cette décision est dictée exclusivement par la reprise de l’économie, « comme avant », le plus rapidement possible sans tenir compte de la santé de nos enfants, l’école deviendrait une garderie géante pour que les parents puissent aller travailler. L’école n’a pas vocation à servir de base arrière de l’économie, c’est un lieu d’apprentissage des connaissances et pas une garderie. Nous savons que l’économie ne reprendra pas comme avant et notre modèle économique devra changer.
Souvenons-nous, le 1er tour des élections municipales n’aurait pas dut avoir lieu, nous le savons maintenant, ne réitérons pas les mêmes erreurs avec une reprise des cours prématurée.
Ne faisons pas de nos enfants la première ligne d’une deuxième vague épidémique.
Il va de soi que nous ne sommes, pas plus que le gouvernement, experts en maladies contagieuses et en déconfinement, cette situation est une première pour tous. Par contre, nous sommes soucieux du principe de précaution et de la santé physique et sociale des vosgiennes et vosgiens. Pour nous, la motivation doit être à la fois sociale et pédagogique, une rentrée doit être dans l’intérêt des enfants et non des entreprises c’est le but de cette interpellation.
Nous sommes conscients que dans notre département des inégalités existent en termes d’accès à l’éducation mises un peu plus à jour avec la pandémie. La fracture numérique et le manque de moyens financiers de certaines familles ne permettant pas non plus l’acquisition du savoir dans cette période ne doivent cependant pas précipiter les collectivités locales à prendre des décisions contraires à l’intérêt de l’enfant. L’urgence est plutôt à construire une vraie rentrée pour septembre, rentrée qui prendra en compte et tentera de résoudre les inégalités sociales, numériques et organisationnelles. Une rentrée, ça va de soi sans aucune suppression de classes ou d’écoles sur le département, un recrutement massif du corps enseignant (professeurs, atsem).
En conséquence, nous demandons à tous les Maires des Vosges et au Conseil Départemental de faire preuve de sagesse et de responsabilité en refusant de rouvrir les écoles élémentaires et maternelles le 11 mai (et remettre la rentrée à septembre)
Tribune signée par Sandra Blaise, secrétaire fédérale du PCF, Gilles Billot, représentant départemental d'EELV, Fabrise Pisias, représentant départemental de LFI et Eric Defranould, représentant départemtal du NPA.
Samedi 2 Mai 2020 - Jean-Jacques Régibier
Alors que le gouvernement prétend s’arroger le droit de distribuer des bons points aux journaux et classer les médias entre ceux qui disent la vérité et les autres, un rapport très officiel éclaire un peu plus la conception toute particulière de l’exécutif quant à la liberté de la presse et la liberté d’expression. En effet, dans son rapport sur « l’offensive contre la liberté de la presse », le Conseil de l’Europe classe la France dans le groupe des 10 pays « à suivre », en raison des violences policières à l’encontre des journalistes couvrant les manifestations. En ce 3 mai, Journée mondiale de la liberté de la presse, Emmanuel Macron saluait pourtant sur Twitter le travail des journalistes "de par le monde", rappelant que la liberté de la presse était "garante de la vie démocratique"...
À la veille de la Journée mondiale pour la liberté de la presse (3 mai), c’est une place en tête du classement dont le gouvernement français se serait sans doute passé. Sur les 47 pays membres du Conseil de l'Europe, la France fait partie du groupe des 10 pays que l’institution européenne de défense des droits de l’homme critique le plus gravement pour le nombre d’agressions contre les journalistes perpétrées par les forces de police. Un groupe dans lequel la France côtoie des pays comme la Turquie, l’Azerbaïdjan, l’Ukraine, la Hongrie, ou bien la Fédération de Russie.
« La France fait partie des pays qui ont fait l’objet du plus grand nombre d’alertes publiées sur la Plateforme en 2019 », note le rapport, précisant que la plus grande partie de ces alertes concerne « les violences ou des mesures de police agressives contre les journalistes couvrant les manifestations ».
La plateforme mise en place par le Conseil de l’Europe, qui recueille les informations sur les atteintes aux droits des journalistes, bénéficie du partenariat de 14 organisations internationales indépendantes œuvrant dans le domaine de la défense de la liberté de la presse, comme la Fédération internationale des journalistes, l’International Press Institute, ou Reporters sans frontières.
"Un usage excessif de la force lors des manifestations des gilets jaunes"
Le rapport replace les très nombreux cas de violences policières de l’année 2019 dans une tendance déjà enregistrée les années précédentes, remontant notamment à décembre 2018, où avait été constaté « l’usage excessif de la force par la police lors de manifestations des gilets jaunes ». En 2019, de nombreux journalistes ont été victimes de menaces ou d’agressions de la part des forces de l’ordre, certains ayant souffert, précise le rapport, de blessures comme des fractures de la main, des côtes cassées ou de blessures plus graves encore, comme celle de la perte prévisible d’un œil pour un photographe touché par une grenade de désencerclement, le 5 décembre 2019.
"En un an, en France, près de 200 cas de journalistes molestés, blessés, initimidés ou empêchés de travailler"
Une nouvelle fois, l’usage des lanceurs de grenades et des LBD est dénoncé par le Conseil de l’Europe. En un an, le rapport relève « près de 200 cas de journalistes molestés, blessés, intimidés ou empêchés de travailler par des policiers, des gendarmes ou des magistrats », en France, avec une « escalade de la violence contre les médias », à partir de la manifestation des gilets jaunes du 2 mai 2019.
Le journaliste David Dufresne a comptabilisé de son côté, pour 2019, 90 journalistes victimes de violences policières, dont 26 ont reçu des coups, 24 ont été touchés par des tirs de LBD, et 15 blessés par des grenades de désencerclement.
Le Conseil de l’Europe rappelle que la France a déjà fait l’objet de critiques de la part de la Commissaire aux droits de l’homme du Conseil, ainsi que de plusieurs organes des Nations Unies, pour les cas de violences policières lors des manifestations.
Champ de bataille et impunité
Difficilement imaginable il y a quelques années, l’Europe est donc devenue l’un des continents où l’activité des journalistes est la plus mise à mal, « un champ de bataille intense et souvent dangereux pour la liberté de la presse et la liberté d’expression », déclare le Conseil de l’Europe, qui rappelle qu’au cours de l’année passée, deux journalistes ont été tués dans deux des États membres du Conseil : Lyra McKee, abattue alors qu’elle couvrait une émeute en Irlande du Nord, et Vadym Komarov mort de ses blessures après une agression en Ukraine.
Dans d’autres meurtres commis au cours des années précédentes (le rapport cite 22 cas), les auteurs bénéficient d’une impunité, « ce qui remet en question l’engagement collectif de l’Europe en faveur de l’État de droit », avertit gravement le Conseil, qui rappelle que dans deux des meurtres des dernières années les plus emblématiques contre des journalistes – celui de Daphne Caruana Galizia à Malte en 2017, et celui de Jan Kuciak et de sa compagne Martina Kusnirova en Slovaquie en 2018 –, les assassins présumés n’ont toujours pas été traduits en justice.
C’est pourquoi, constatant que « la liberté des médias en Europe est très insatisfaisante », le Conseil de l’Europe adresse un puissant signal d’alarme à tous les États, considérant que « les tentatives politiques de mainmise sur les médias et l’incapacité de nombreuses autorités nationales à maintenir un cadre crédible de protection de la liberté des médias, sont désormais systémiques »
Mercredi 29 Avril 2020 - Pauline Josse
Si les mesures de confinement rendent impossible la tenue des traditionnels défilés du 1er mai cette année, les initiatives syndicales pour fêter les travailleuses et les travailleurs ne manquent pas. Tour d’horizon.
Plus que jamais le 1er mai » : c’est la ligne commune défendue par l’intersyndicale regroupant la CGT, FSU, Solidaires, Fidl, MNL, Unef et UNL pour la journée internationale des travailleuses et des travailleurs. Malgré le contexte inédit, il est hors de question pour les organisations syndicales de faire une croix sur cette journée de mobilisation à cause du confinement. « C’est une journée indispensable. Peu importe le pays, toutes les travailleuses et tous les travailleurs sont confrontés directement à cette crise sanitaire, ainsi qu’à ses conséquences économiques et sociales », explique Éric Beynel, codélégué général de Solidaires. Mais faute de masques en nombre suffisant pour protéger les manifestants et vu la situation encore tendue dans les services de réanimation à l’hôpital, Éric Beynel juge irresponsable d’appeler à manifester ou à se rassembler dans ce contexte : « C’est contraire à notre principal objectif : que tout le monde puisse être aussi bien protégé face au Covid. »
Il a alors fallu penser de nouveaux espaces pour faire entendre les revendications et défendre les droits des travailleur·ses. Notamment les fenêtres, balcons et halls d’immeuble à travers des affiches et des banderoles. « Cela peut même être avec un simple pull rouge attaché dans son jardin ou à sa porte si on n’a pas d’autres moyens », explique le codélégué général de Solidaires. Des kits de visuels et de slogans ont été mis à disposition par les différents syndicats : « À défaut d’être tous ensemble, on se doit d’être partout. »
Manifestations virtuelles
Pour manifester depuis chez vous, les syndicats permettent de télécharger des kits de visuels et de slogans, par exemple sur le site de la CGT et celui de Solidaires : à imprimer, dessiner, accrocher à votre porte ou votre fenêtre !
Les réseaux sociaux pourraient bien remplacer le terrain habituellement occupé par les manifestants chaque année dans la rue, notamment à travers des Facebook Live, des hashtags ou encore la publication de photos de manifestants avec des pancartes « Le jour d’après je veux… ».
L’occasion, selon Nathalie Verdeil, secrétaire confédérale de la CGT, de permettre aux syndiqués et à tous ceux qui le souhaitent d’exprimer leurs propres revendications, « d’être acteur de ce 1er mai et pas seulement spectateur ».
La CGT compte bien profiter de cette journée pour faire entendre son message : celui de « l’urgence à faire naître un autre monde : juste, durable et solidaire », en essayant de répondre à la fois aux besoins de protection des salariés dans la crise actuelle, « sans pour autant oublier ce qui nous attend à la sortie », précise la secrétaire confédérale. Une pétition a également été lancée par 25 organisations associatives et syndicales après la publication de la tribune « Plus jamais ça, préparons le jour d’après ». Elle recense actuellement près de 150 000 signataires et sera discutée ce jeudi 30 avril à 18 heures lors d’une table ronde en ligne sur le site de Mediapart.
Pour coller à la dimension internationale de l’événement, la CGT prévoit également de participer à un concert mondial diffusé à partir de 11 heures, heure française, le 1er mai. Philippe Martinez, secrétaire général du syndicat, a préparé un discours traduit en plusieurs langues pour accompagner l’événement. « Même confinés, on n’est pas bâillonnés », affirme Nathalie Verdeil.
De son côté, Force ouvrière a lancé sa propre campagne sur les réseaux sociaux :
« On profite de ce confinement pour ressortir toutes les affiches de FO depuis sa création. À travers ce retour dans le temps, on souhaite revenir sur ce qu’est véritablement le 1er mai, à savoir la solidarité et l’internationalisme », précise Cyrille Lama, secrétaire confédéral de Force ouvrière. Ce vendredi, des photos des dernières mobilisations compilées par les unions départementales ramèneront à notre époque les luttes du syndicat. « On n’a reçu quasiment que des images des manifestations contre la réforme des retraites », se félicite le secrétaire confédéral. Quant aux revendications, l’accent est mis cette année sur la santé, « qui doit être un droit fondamental pour tous ».
Originalité et créativité à l’échelle locale
Les syndicats se reposent également sur leurs ramifications locales pour faire vivre la mobilisation et les revendications partout en France. Dans le Nord, l’union départementale CGT va passer à l’antenne de trois radios associatives tout au long de la journée. À Pontivy, l’union locale CGT organise des prises de parole en ligne diffusées dans toute la Bretagne. Pour Ronan Le Nezet, secrétaire de l’union locale, « on ne pouvait pas se contenter de ne rien faire, cette crise rappelle l’utilité des premières mains de l’emploi, oubliées depuis tant d’années ».
De façon plus informelle, le syndicaliste prévoit de déposer en petit comité une affiche et un brin de muguet dans un lieu symbolique pour rappeler que « malgré le confinement et les mesures de restrictions de liberté, on est là et on s’exprime ». D’autres rassemblements de ce type en effectif limité sont prévus un peu partout sur le territoire. En Haute-Corse, l’union locale de la CGT semble avoir trouvé un compromis pour à la fois occuper l’espace public et respecter les mesures de distanciation sociale : un défilé en voitures s_’élancera de l’_hôpital de Bastia à partir de 10 heures pour rendre hommage à tous les personnels du secteur de la santé. Il s’achèvera devant la préfecture.
Cette année plus qu’une autre, le 1er mai aura une coloration symbolique. Pour autant, à travers les différentes formes de mobilisation, les syndicats espèrent faire de cette journée un premier point d’étape pour prouver au gouvernement qu’il devra traiter avec eux pour construire une société post-Covid.
Mercredi 4 Décembre 2019 - Mediapart
Le 5 décembre, ce n’est pas seulement la réforme des retraites qui est visée par les grévistes et les manifestants. Depuis les débuts du quinquennat, une somme de colères s’est accumulée contre le gouvernement. Une douzaine d’invités en témoignent dans notre Live.
Avec :
0:00 Agathe pour le collectif Nos retraites
10:00 Thierry Babec, secrétaire général de l’Unsa RATP
18:00 Bérenger Cernon, secrétaire général du syndicat CGT des cheminots de Paris gare de Lyon
28:00 Caroline De Haas, militante féministe, membre de #NousToutes
41:00 Rachel Keke, gouvernante à l’Ibis Clichy-Batignolles
46:00 Estellia Araez, présidente du Syndicat des avocats de France
55:00 Sarah Massoud, secrétaire nationale du Syndicat de la magistrature
1:05:00 Vincent Viau, enseignant en lycée, proche du collectif Bloquons Blanquer
1:14:00 Mélanie Luce, étudiante en droit, présidente de l’Unef
1:23:00 Léna Lazare, membre de Youth for Climate
1:30:00 Nicolas Galepides, secrétaire général de SUD PTT
1:40:00 Anne Heideiger, « gilet jaune » en Meurthe-et-Moselle
1:53:00 Youcef Brakni, militant des quartiers populaires, membre du comité Vérité et justice pour Adama Traoré
Mardi 4 Juin 2019 - Thinkerview