Après avoir célébré avec intensité et même émotion les solennités successives du dimanche des Rameaux, de la dernière Cène, de la Passion du Seigneur et de la Veillée pascale, le chrétien risque sans trop sans rendre compte d'escamoter la fête des fêtes, Pâques, le point central et le sommet de toutes les célébrations, "ce jour que fit le Seigneur" sans lequel tout le reste perd son sens. Si le Christ n'est pas ressuscité, vaine est notre foi….et nous sommes les plus malheureux de tous les hommes."
Pâques, événement de foi
Il y a presque dix ans, et je m'en souviens encore, un ami puis un autre me faisaient suivre un courriel annonçant que le 27 août prochain, la planète Mars alors située le plus près de la terre pourrait être observée dans le ciel de l'aurore et apparaîtrait aussi grosse que la lune! Contrairement à mes habitudes, je répliquai à cette information bourrée d'erreurs dont la plus évidente était que ce phénomène visuel annoncé était absolument impossible et que, effectivement plus proche de 60 millions de km de nous, on ne verrait pas la différence quant à la magnitude de la planète rouge. La crédulité des internautes est souvent mise à mal dans le flot d'informations non scientifiques et non vérifiées qui circulent sur la toile.
Que de fausses nouvelles sur Internet!
L'annonce de la résurrection du Christ n'est pas de cet ordre même si l'historicité de l'existence de Jésus de Nazareth est reconnue par tous, même par les non croyants, de même que les souffrances et la mort de Jésus sont réelles et historiquement attestées. La résurrection du Christ est avant tout objet de foi, non vérifiable avec les paramètres habituels de la science:
"La résurrection de Jésus-Christ ne sera jamais concevable pour les esprits forts qui font tout comparaître au tribunal de leur raison. Les témoins de la résurrection sont eux-mêmes objets de foi, dans la mesure où ils font eux-mêmes partie du monde de la résurrection." (F.Trévedy, Etincelles II, p171)
Passage de la mort à la vie
Beaucoup de chrétiens se sont arrêtés au Vendredi Saint et leur vie de foi se retrouve teintée de fatalité, de résignation, voire de misérabilisme. Il s'en trouve pour rappeler le temps où il fallait se mettre à genoux devant le tout-puissant et ceux qui le représentent sur terre, la hiérarchie ecclésiale à qui on devait obéir presqu'aveuglément. "Il s'est fait obéissant" certes, mais par amour! Toute religion qui prêche la résignation et l'obéissance aveugle et irrationnelle à la divinité relève d'un reste de paganisme et du culte des idoles.
Le Concile Vatican II a renversé la tendance qui prônait la soumission plutôt que l'ouverture et l'engagement dans le monde de ce temps, la résignation plutôt que la fierté et la dignité du croyant debout, qui faisait la promotion de la souffrance expiatoire à offrir à un dieu exigeant et sévère qui n'est jamais content, jamais rassasié des sacrifices de ses adeptes: "Le Dieu de Jésus-Christ ne réclame pas le sang. Pas davantage le nôtre que celui de son Fils. Ce qui fait sens, c'est l'amour indescriptible qui le verse, en toute liberté." (idem p179) Le sang compte beaucoup moins, en somme, que le don que l'on en fait, que ce soit Dieu qui le verse ou l'homme à sa suite.
La résurrection de Jésus est objet de foi et il faudrait sans doute adopter l'attitude de Pierre revenant du tombeau "en ce grand matin du premier jour de la semaine". La foi n'advient pas au bout d'un raisonnement mais d'une ouverture, d'une attitude du cœur disponible. Elle est étonnement, lumière rencontrée au retour du tombeau où nos vies trop souvent se buttent. «Il s'en retourna chez lui, tout étonné de ce qui était arrivé.» L'air bienfaisant qui souffle sur le printemps de Pâques annonce que "la mort et la vie s'affrontèrent en un duel prodigieux. Le Maître de la vie mourut; vivant, il règne."
L'aurore du matin de Pâques
Marie-Madeleine, Jeanne, Marie, Pierre et tous les autres après eux se seraient butés à chercher parmi les morts celui qui est vivant. Or la pierre qui protégeait le tombeau est déplacée, le chemin est libre, qui nous relie au Christ pascal vivant hier, aujourd'hui et toujours. Le discours de l'athée moderne, bien qu'il soit stimulant et même salutaire pour notre foi, proclame l'inexistence de Dieu ou sa mort, et conduit à une confusion sur la grandeur de la vie humaine et à une impasse sur le sens de la mort humaine. L'option de foi du chrétien au contraire le plonge (le jeu de mots n'est pas banal) à travers l'eau du baptême dans une vie nouvelle qui n'est plus sans issue et le fait marcher et même courir sur ce chemin de lumière inauguré à l'aurore de ce grand matin de Pâques.
PÂQUES (C) 20 avril 2025
Claude Brissette, ptre