Le RTS est un des genres les plus vieux dans l’univers des jeux vidéos. Son ancêtre? les jeux 4X, soit des jeux de stratégie où le but est d'eXplorer, d’eXpandre, d’eXploiter, et d’eXterminer. Explorer un espace donné (pouvant être représenté par une carte, par exemple). Expandre sa base vers de nouveaux espaces. Exploiter les ressources se trouvant dans ces nouveaux espaces. Exterminer son adversaire avec une armée supérieure, construite grâce à ces ressources supplémentaires amassées et aux technologies ayant pu être développées à l’aide de ces mêmes ressources. Le premier jeu du genre remonte à 1982: Cosmic Balance II, publié pour Apple II, un jeu de conquête galactique.
Cosmic Balance II: un jeu de conquête galactique turn-based pour Apple II
Dans l’univers des jeux de stratégie sur plate-forme électronique, deux genres coexistent: les jeux ‘’turn-based’’ (Turn-based strategy ou TBS) comme Cosmic Balance II, où chaque joueur peut avoir autant de temps qu’il le souhaite pour jouer son ‘’coup’’ (à moins d’une limite imposée de l’extérieur, comme une horloge aux échecs rapides), en contraste avec les jeux ‘’Real Time’’ (Real Time Strategy ou RTS) où toutes les actions peuvent être entreprises simultanément par les deux (ou +) joueurs impliqués, tout au long de la partie. Starcraft II (comme Starcraft I) est un jeu Real Time, ce qui signifie que la seule limite à la quantité de décisions pouvant être prises dans le jeu est bien souvent l’habileté mécanique du joueur à exécuter ces décisions à l’aide de son clavier et de sa souris. C’est en 1992 seulement qu’apparut le premier véritable exemple de ce genre: Dune II: The Building of a Dynasty, développé par Westwood Studios. Le titre comportait déjà les caractéristiques qui vont devenir des incontournables du genre, comme la sélection d’unités à l’écran pour leur donner des commandes, la construction de bâtiments technologiques, mini-carte avec Fog of War etc.
Dune II (1992): le premier ''véritable'' RTS
Ce fonctionnement Real Time a des implications profondes sur le fonctionnement général du jeu mais également sur les habiletés devant être développées par chaque joueur afin d’y devenir maître et par conséquent, sur la façon de s’y entraîner. Dans ce style de jeu, chaque joueur impose à l’autre, par ses actions, des changements de contexte pouvant survenir ou s’enchaîner aussi rapidement que leurs habiletés manuelles sur clavier et souris le permettent. Ces changements font en sorte que les fenêtres d’opportunité rendant telle ou telle action avantageuse pour un joueur ou l’autre peuvent s’avérer très courtes. Prenons l’exemple suivant, à 1:59 sur la vidéo:
À 1:59, dans cet exemple tiré de Starcraft 2, un joueur terran (‘’humain’’) et un joueur protoss (race d’aliens très avancés technologiquement) s’opposent.
Le joueur terran est actuellement confiné à sa base principale et souhaite accéder à un terrain secondaire (son expansion dite ‘’naturelle’’) afin de pouvoir la contrôler et de potentiellement exploiter les ressources s’y trouvant. Le joueur protoss contrôle la deuxième base en question avec ses troupes et établit un siège empêchant le joueur terran de contrôler cet espace. Si la situation ne change pas rapidement, le joueur protoss va profiter du confinement de son adversaire pour acquérir beaucoup plus de ressources que son adversaire sur la carte.
Le joueur protoss a la possibilité lancer un certain sort (appelé force field, le gros cristal) qui permet de bloquer l’accès hors de la base principale du joueur terran. Le joueur protoss y voit une opportunité tactique: si il bloque l’accès à la seconde base alors que seulement quelques unes des troupes de son adversaire ont filtré à travers la rampe, il pourra affronter seulement une petite portion de l’armée de son adversaire tandis que lui-même pourra employer toutes ses forces dans la bataille, lui donnant un avantage important et réduisant au final, la masse totale de l’armée de son adversaire comparativement à la sienne.
Dans un jeu qui serait ‘’turn based’’, le joueur terran pourrait ainsi, par exemple, faire parcourir une distance X à une quantité X de ses troupes, puis les ‘’ressources-actions’’ de son tour étant épuisées, le protoss pourrait prendre tout son temps pour constater la nouvelle situation et utiliser les actions qu’il aurait en banque durant son tour pour lancer le sort en question, au rythme lui convenant.
Dans le cadre d’un RTS toutefois, c’est tout autre chose. Les actions des unités n’étant pas limitées par un système de tour, le joueur terran pourrait techniquement acheminer presque toutes ses unités vers sa deuxième base d’un seul coup, pourvu que son adversaire lui laisse suffisamment de temps. Le joueur protoss a donc une fenêtre d’opportunité de quelques secondes seulement afin d’exécuter son plan à partir du moment où le joueur terran passe la commande au jeu de descendre les troupes vers la seconde base.
Pour mener à bien son plan, il est donc vital que le joueur protoss 1- surveille la situation de sorte de pouvoir mettre son plan en action au bon moment et 2- qu’il soit en mesure d’exécuter les commandes permettant de lancer un force field dans un laps de temps moindre que cette fenêtre d’opportunités, donc idéalement moins de deux ou trois secondes. Une fois cette fenêtre d’opportunité passée, l’efficacité de ses troupes au combat en sera nettement réduite autrement et il n’aura pas bénéficié du potentiel offert par l’armée dont il dispose.
On peut donc voir que l’accent ici est mis sur l’habileté mécanique de chaque joueur, plutôt que seulement leur compréhension théorique des possibilités du jeu. Ceci a des implications fondamentales dans la façon dont il faut approcher le jeu en vue de s’y améliorer. Chaque joueur doit non seulement connaître d’un point de vue théorique les tactiques du jeu, mais également être en mesure de les exécuter. Cette exécution implique également certaines connaissances théoriques (par exemple, sur quelles touches appuyer pour effectuer telle ou telle action du plan), mais ultimement ces connaissances vont finir par se confondre avec une mémoire musculaire qui ne pourra s’acquérir qu’à force de répétition. En bref: étudier Starcraft II n’est pas suffisant pour y devenir maître (quoi que cela ne nuira pas, bien sûr, et c'est pourquoi les guides de ce site existent!): il faut pratiquer le jeu également. C’est la conclusion à laquelle je souhaitais en venir et c’est ce qu’il faut retenir à ce stade.