Griselles est indissociable de son église puisqu'étymologiquement Griselles signifie « petite église ».
Cette église, pittoresquement située sur la butte-témoin qui domine le village est dédiée à St Valentin. Elle est le témoin d'une des premières occupations religieuses du nord de la Bourgogne.
Saint Valentin un saint local
Valentin, ermite du début du 6e siècle, vécut en ce lieu. Il y fonda une petite chapelle.
Evangélisateur du Châtillonnais, il fut l'un des premiers prêtres de campagne en Bourgogne.
St Valentin de Griselles se fête le 4 juillet, il n'a rien à voir avec St Valentin de Rome patron des amoureux que l'on fête le 14 février.
Son culte, autrefois très important fit de Griselles un lieu de pèlerinage.
Un texte ancien expose quelques faits remarquables de sa vie.
D'après ce récit, St Valentin serait originaire du Lassois, en vallée de Seine, de parents romains nobles. Il serait né vers 519 et aurait passé sa jeunesse à la cour du roi d'Austrasie, Théodebert 1 er, petit-fils de Clovis. Refusant le mariage et la carrière militaire à laquelle son père le destinait, il se retire en secret dans une grotte reculée des terres familiales où il fonde une petite chapelle (ecclesiola) qui devient « Egliselles » puis « Griselles ».
Son ermitage et sa réputation de piété attirent à lui des fidèles. Sa renommée lui vaut d'être ordonné prêtre par l'évêque de Langres. Il meurt vers 547.
Sur son tombeau, l'évêque Tétrice fit édifier une grande église en son honneur. (Le récit de sa vie évoque quelques miracles mais, en réalité, ces faits auraient été empruntés à la vie d'autres saints !).
Le prieuré
En 1018, un monastère est fondé par Ermengarde, comtesse de Tonnerre. A partir de cette date, une communauté de frères s'installe à Griselles pour s'occuper de l'église, honorer la mémoire du saint ermite Valentin et accueillir les pèlerins. Les religieux, dirigés par un Prieur, étaient sous la dépendance de l'abbaye St Germain d'Auxerre. Le prieuré était doté des revenus des églises de Laignes et de Nicey. Petit à petit, il agrandit ses possessions avec de nombreuses terres et vignes (le lieu-dit « la charme au prieur » en garde la mémoire). Le moulin de Griselles et le droit de pêche dans la rivière lui appartenaient également.
Le prieuré Saint-Valentin portait pour armoiries : « De gueules à l'aigle éployée d'or, au chef d'argent chargé de trois tourteaux de gueules ». Ce blason est désormais celui de la commune de Griselles.
Le prieuré fut démantelé lors de la Révolution, tous ses biens et revenus supprimés.
L'église et sa crypte
Sous sa forme actuelle, l'église date du 13ème siècle mais fut fortement remaniée au 19eme siècle.
Le caractère exceptionnel de cette église on le doit à sa crypte et au tombeau qui abrite les reliques de St Valentin.
Elle est une des rares églises rurales de Côte-d'Or à comporter une crypte.
Des travaux menés en 2001/2002 par Christian Sapin, archéologue, spécialiste des sites religieux du Moyen Âge, nous permettent aujourd'hui d'en savoir un peu plus sur l'histoire de ce lieu particulier.
La crypte date du haut moyen-âge et aurait fait place à une construction plus ancienne. A l'état primitif, il s'agissait certainement d'un mausolé funéraire privé situé dans le périmètre d'une villa gallo-romaine.
Le lieu aurait été réutilisé à des fins chrétiennes par St Valentin lui-même (grotte) ou tout au moins après sa mort pour l'inhumation de son corps.
La crypte aurait été agrandie au fil des siècles avec le développement du culte des reliques. L'accès ne s'est pas toujours fait par l'escalier central. Il existait des accès latéraux qui permettaient aux pèlerins de descendre vénérer le tombeau du Saint et de remonter selon un sens de circulation défini.
La seconde salle est moins ancienne et ne devait pas communiquer avec la première. On suppose qu'elle a été créée pour les besoins du prieuré.
Le tombeau (classé monument historique depuis 1936)
Le tombeau de St Valentin qui est installé au centre de la crypte est imposant. Il est composé de trois éléments en pierres massives : une cuve, un couvercle et un sur-couvercle.
La cuve qui contient les ossements de St Valentin est un sarcophage gallo-romain (Ile ou Ille siecle) qui a été réutilisé. Il comporte une inscription dédiée à un dénommé « Sabinus ». Ce qui a pu faire croire qu'il s'agissait de la sépulture du fameux chef lingon Sabinus, époux d'Eponine, qui tenta de soulever la Gaule contre Rome et vécut 9 ans caché dans un souterrain avec son épouse et se jumeaux Valentinus et Sabinus, avant d'être mis à mort sous le règne de Vespasien.
Le couvercle du tombeau est lui aussi de réemploi. Il comporte un décor d'écaille et une ascia (hachette)sculptée.
Le tout est surmonté d'une pierre richement sculptée avec des traces de polychromie datant probablement de la Renaissance. On y voit la Vierge à l'enfant et de part et d'autre St Paul et St Pierre, patrons également de l'église. Sur la face latérale, deux personnages agenouillés entourent la figure de Valentin en habit de prêtre. Une croix sculptée orne la partie supérieure du couvercle.
L'importance de la dévotion à St Valentin est également attestée par la mise à jour de nombreux sarcophages du haut Moyen-âge à proximité de l'église (fouilles de 1988 et 1992). Ces nombreuses sépultures mérovingiennes traduisent la volonté des fidèles de se faire enterrer au plus prêt du corps du saint.
Au I Y siècle, le culte de St Valentin a été remis à l'honneur grâce aux initiatives de l'abbé Garraud puis de l'abbé Lavielle. Des travaux importants furent réalisés sous la direction de l'architecte diocésain Charles Suisse (le même qui réalisa la flèche de la cathédrale St Bénigne de Dijon) : toiture, portail d'entrée, descente à la crypte, restauration de la crypte.
L'abbé Lavielle qui souhaitait que Griselles (re)devienne un centre de pèlerinage pour le Châtillonnais rédigea un essai historique sur la vie de St Valentin (voir Cahier des Amis du Châtillonnais no 112).
D'autres églises ont fait de St Valentin de Griselles leur St Patron :
En Côte d'Or : Chamesson, Menetreux-le-Pitois
Dans l'Aube : Bagneux-la-Fosse ; Lantage
Dans l' Yonne : Arthonnay, Gigny
Les saints de la vallée de la Laignes
La vallée de la Laignes a abrité pas moins de 5 saints :
• Saint Valentin de Griselles
• Saint Vorles de Marcenay
• Saint Robert de Molesme et les Saints fondateurs de Cîteaux (Albéric et Etienne)
Ce qui faisait dire à l'abbé Maurice Trapet, curé de Molesme de 1930 à 1976 : « La vallée de la Laignes, une terre de Saints ».
L'église de Griselles se visite durant la période estivale suivant le programme de l'opération « 1 jour, 1 Eglise en Châtillonnais ».
Notes : Anne Bouhélier, janvier 2021
Mairie de Griselles – avril 2024
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