GOrbi

Gas chromatography coupled to a FT-Orbitrap-MS for space exploration

Contexte Scientifique

Dans ce projet nous nous intéressons à retracer l’évolution chimique de la matière organique dans le milieu interstellaire en ayant recours à des expériences de simulation en laboratoire. Nous reproduisons les premiers matériaux de l’Univers, que sont les grains de poussières interstellaires et les différents processus énergétiques (effets thermiques, photochimiques..) auxquels ils ont été soumis. Notre objectif est d’établir le lien entre les constituants primitifs des glaces (H2O, NH3, CH3OH, H2CO, CH4, CO2) et les molécules organiques détectées dans les comètes ou les météorites. Nos expérimentations sont ainsi complémentaires aux observations astrophysiques et apportent des informations concernant la composition chimique ainsi que l'évolution chimique des petits corps du système solaire que sont les comètes, les astéroïdes mais aussi les surfaces de satellites planétaires ou d’objets transneptuniens (TNO).

Nos simulations expérimentales consistent dans un premier temps à former à basse température (10-80K) et basse pression (10-9 mbar) un analogue de glace (contenant par exemple H2O, NH3, CH3OH…). Cette glace est ensuite soumise à différents processus physiques ou chimiques (ex. irradiation VUV et/ou réchauffement), simulant ainsi l'évolution d’une surface glacée relative à différents objets. Lorsque ces analogues de glaces altérés sont réchauffés, des composés volatils sont délivrés dans la phase gazeuse. L’analyse de ces volatils s’avère très intéressante pour proposer un inventaire complet des molécules qui peuvent être détectées dans l’environnement gazeux d'objets astrophysiques telles que les comètes (projet VAHIIA, ANR-12-JS08-0001-01, 2012-2015). Les résultats obtenus permettront à terme d'apporter des informations quant à la nature et l'abondance de ces COV, données essentielles pour le traitement de données provenant de missions spatiales telles que la mission Rosetta. Ces composés volatils, avant leur désorption, sont également des précurseurs permettant la formation de molécules plus complexes et plus réfractaires. Le résidu organique ainsi formé après désorption de l'eau (molécule majoritaire de ces glaces) est considéré comme un analogue de la matière organique susceptible d'être présente au sein des objets interplanétaires (comètes, astéroïdes). Il est même probable qu’il soit à l’origine de la couche sombre observée par la sonde Rosetta, lors du survol de la comète 67-P. Ces résidus sont constitués d’une multitude de composés réfractaires qui, par leur solubilité importante dans l'eau, peuvent avoir un intérêt majeur pour la chimie prébiotique (chimie qui a précédé l’émergence du vivant sur Terre). En utilisant différentes techniques analytiques, notre but est de déterminer la composition chimique globale de ces résidus, ainsi que les différentes étapes qui ont mené à la formation de cette matière organique (projet RAHIIA, ANR RAHIIA_SSOM, 2016-2021).


Objectifs Scientifiques

En 2013, le PIIM a développé avec un financement de l'ANR (ANR VAHIIA) un système novateur permettant d'analyser les COV provenant du réchauffement d'analogue de glaces astrophysiques. Par rapport aux systèmes existants, l'approche développée est la seule actuellement qui permet de quantifier les espèces présentes au sein de la phase gazeuse. Cette quantification a ainsi été possible en couplant la chambre de simulation à un chromatographe en phase gazeuse couplé à un spectromètre de masse (GC-MS). Ainsi, les données obtenues peuvent être directement comparées aux observations. Cependant, le spectromètre de masse utilisé ne présente qu'une résolution unitaire, rendant l'identification des COV difficile. En parallèle de ces analyses de COV, le PIIM a développé une stratégie analytique innovante permettant de tester les potentialités de la technologie orbitrap qui est un analyseur de masse à très haute résolution, pour l'analyse de la matière organique réfractaire (résidus) formée lors des expérimentations. Cette matière organique étant considéré comme un analogue de la matière organique soluble de météorites, ces expérimentations ont permis de mettre en évidence la pertinence d'utiliser une telle technologie pour l'analyse de la matière organique d'objets astrophysiques. Le CNES soutient fortement ces deux démarches. Par ailleurs, la spatialisation de l'orbitrap est actuellement en cours de développement au sein du consortium CosmoOrbitrap à travers une R&T CNES. La présente demande a pour objectif de démontrer les potentialités apportées par le couplage d’un chromatographe en phase gazeuse à un spectromètre de masse haute résolution, l'orbitrap, pour l'analyse de COV issus d'objets astrophysiques. Le second objectif est de démontrer là aussi la capacité d'un tel système pour l'analyse de molécules cibles (acides aminés, sucres…) à travers l'expérience développée par l'ICN pour analyser la matière organique soluble. Ce GC-orbitrap qui est une technologie de pointe et très récente (aucun GC-orbitrap n'est encore disponible dans les laboratoires académiques en Europe) sera un élément central des recherches en astrochimie et astrophysique du Pôle de Sciences Planétaires et de la région PACA. Les données issues de ces recherches seront donc les premières à être réalisées à partir d'une telle technologie dans un contexte de compréhension de l'évolution des objets interplanétaires et dans l'optique de démontrer l'intérêt d'une spatialisation d'un dispositif GC-orbitrap pour l'analyse in situ de la matière organique extraterrestre.

Au-delà de l'objectif même de ce projet, l'acquisition d'un GC-Orbitrap créera un pôle d'attractivité important en recherche analytique que ce soit au niveau de l'Université d'Aix-Marseille, de la région PACA et au niveau national, étant donné qu'aucun dispositif de la sorte n'est encore disponible dans le milieu académique. Cette nouvelle technologie sera testée sur un ensemble d'échantillons et de thématiques différentes, puisqu'il est convenu au sein du projet PILSE que 25% du temps d'expérimentation sera rendu disponible à la communauté scientifique autre qu’astrophysique.