Année 2026
Politique et Innovation : de la responsabilité du citoyen et de l’état
Politique et Innovation : de la responsabilité du citoyen et de l’état
Objectifs année 4
Le terme grec politikós désigne à la fois la gestion des affaires de la cité et les citoyens qui y participent. Il soulève une question claire : comment organiser la vie publique et privée, et qui doit y prendre part ? L’innovation s’inscrit une nouvelle fois au cœur de cette interrogation.
Les trois premières années du séminaire ont apporté un regard philosophique et historique sur l’innovation et ses critiques, notamment au XXᵉ et au début du XXIᵉ siècle. L’an passé, nous avons étudié une critique plus vive encore, à partir de la sobriété.
Cette quatrième année portera sur l’innovation politique, depuis la polis grecque (Platon, Aristote) jusqu’aux théories contemporaines de la démocratie radicale (Rancière, Habermas). Nous interrogerons l’innovation citoyenne (Rousseau, Dewey, Foucault), l’éducation comme espace d’émancipation ou de reproduction (Kant, Bourdieu, Illich) et les politiques d’innovation (de Colbert et les Lumières à nos jours). Enfin, nous examinerons en quoi l’art peut être un outil de reconfiguration du politique (XXX, XXX, XXX), tout comme la Commune de Paris (Marx, Proudhon, Bakounine) chercha à repenser une démocratie directe.
Séance 1 : En quoi la politique est-elle une innovation ? L'homme comme animal politique innovant.
Jeudi 22 janvier 2026
Cette séance interroge la politique comme l’une des premières innovations humaines. Des sociétés primitives à la Grèce antique, l’humanité n’a cessé d’inventer des formes de vie commune. La philosophie grecque, de Solon à Aristote, transforme cette pratique en objet de pensée : la cité devient le lieu où la raison, la parole et la délibération organisent le vivre-ensemble. L’homme apparaît ainsi non seulement comme un animal politique, mais aussi comme un animal innovant, créateur d’institutions, de normes et de symboles pour répondre aux exigences du bien commun. Dans un monde en crise, cette perspective philosophique invite à repenser la politique comme une innovation éthique et institutionnelle destinée à refonder notre capacité à vivre ensemble.
Séance 2 : L’innovation citoyenne pour une autre politique. La souveraineté du peuple par ses initiatives et la résistance au pouvoir.
Jeudi 19 février 2026
Le citoyen, d’abord défini comme l’habitant libre d’une cité (Athènes, Rome), devient, avec Rousseau, un acteur de la souveraineté populaire. L’innovation citoyenne, tirage au sort, coopératives, budgets participatifs, monnaies locales, émerge comme une réponse collective aux défis sociaux, écologiques ou politiques. Inspirée par Foucault, elle incarne une résistance aux pouvoirs établis, proposant des alternatives horizontales. Pour Dewey, elle est une démocratie expérimentale, où la participation active et l’adaptation permanente redéfinissent la cité. Ces initiatives, locales et pragmatiques, transforment les rapports de pouvoir en plaçant l’humain et le bien commun au centre.
Deuxième partie, Najat Vallaud-Belkacem, Directrice de l'ONG One France, Présidente France Terre d'Asile, Conseillère Maître à la Cour des Comptes
Séance 3 : L’éducation comme arme politique. Savoir et créativité, esprit critique et responsabilité, les piliers de l'éducation politique.
Jeudi 5 mars 2026
L’éducation, depuis Platon jusqu’à Dewey, est présentée comme le levier central de l’innovation politique. Platon en fait l’outil pour former des gouvernants-philosophes capables de diriger une Cité juste, tandis que Rousseau et Kant y voient un moyen d’émancipation individuelle et collective. Dewey, lui, transforme l’école en un laboratoire de démocratie, où l’apprentissage par l’action prépare les citoyens à agir dans la société. Cependant, Bourdieu et Illich critiquent ce modèle : l’école reproduit les inégalités sociales (Bourdieu) et aliène en monopolisant le savoir (Illich). Pour eux, une éducation libératrice doit sortir des cadres institutionnels et favoriser l’autonomie et la créativité. Arendt, Habermas et Castoriadis proposent des alternatives : une éducation responsable (Arendt), délibérative (Habermas) et imaginative (Castoriadis), capable de cultiver l’esprit critique et l’innovation politique. L’enjeu est de repenser l’éducation non pas comme un outil de reproduction, mais comme un espace de transformation sociale.
Deuxième partie, Thierry Pacquot, philosophe, professeur émerite
Séance 4 : Politiques d’innovation, entre héritage colbertiste, ambition technologique et esprit des Lumières.
Jeudi 2 avril 2026
La séance porte sur la philosophie de l'innovation politique depuis Colbert. De la centralisation monarchique à l’idéal émancipateur des Lumières, puis du technogouvernement de Saint-Simon et Comte à la planification gaullienne, l’innovation apparaît en France comme un projet d’État avant d’être un moteur économique. Cette trajectoire explique le paradoxe national : une excellence scientifique remarquable, mais une faible conversion en innovations marchandes. Le séminaire analyse les ambiguïtés de ce modèle, technocratie, élitisme, imaginaire de souveraineté, et propose d’esquisser une politique d’innovation inspirée par l’esprit des Lumières : rationnelle, émancipatrice, orientée vers le bien commun et consciente de ses responsabilités éthiques et écologiques.
Séance 5 : L’art comme outil d’innovation politique
Jeudi 21 mai 2026
De Platon à Rancière, l’art est un espace de reconfiguration du politique, entre critique et proposition. Les avant-gardes (constructivistes russes, muralistes mexicains) l’ont mis au service de projets révolutionnaires, tandis que l’art activiste contemporain — Banksy, JR, Ai Weiwei, Pussy Riot, détourne les symboles du pouvoir pour révéler ses contradictions. Au-delà de la contestation, l’art devient un outil de délibération : budgets participatifs artistiques, parlements expérimentaux (Parlement des Invisibles) ou interventions dans l’espace public. Face aux défis écologiques, numériques et autoritaires, il invente de nouvelles formes de mobilisation, art écologique (Not An Alternative), art numérique (mèmes, AR Graffiti), ou résistance aux populismes (Hongrie, Pologne).
Deuxième partie, Philippe Aghion, économiste, professeur au Collège de France
Séance 6 : La commune de Paris, l’innovation par le peuple et la démocratie en question. La justice sociale par la radicalité et des politiques alternatives.
Jeudi 18 juin 2026
En seulement 72 jours, la Commune de Paris (1871) représente une innovation politique majeure, rompt avec les modèles traditionnels et expérimente une démocratie directe et sociale : mandats impératifs et révocables, égalité salariale, autogestion des ressources, école laïque et gratuite. Puisant chez Rousseau, Proudhon, Marx ou Bakounine, elle traduit en actes des idées révolutionnaires, mêlant l’héritage des Lumières et le socialisme utopique. Plus qu’une simple révolte, elle propose une refonte des institutions, du travail et de l’éducation, en impliquant directement les citoyens dans la gestion collective. Bien qu’écrasée dans le sang, son expérience résonne encore comme un laboratoire politique, questionnant les limites de la représentation et ouvrant des pistes pour repenser la démocratie, la participation et la justice sociale. Son actualité persiste face aux crises contemporaines de légitimité et d’inégalité.
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