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La Révolution de 1789 et les guerres napoléoniennes

Sablonnières sous la Révolution

Le 8 août 1788, le roi Louis XVI décidait de convoquer les états généraux pour permettre à ses sujets de s'exprimer. Les villageois âgés de plus de 25 ans inscrits au rôle des impositions, le curé et le seigneur local furent ainsi appelés à prendre part à l'assemblée générale des trois états du bailliage de Meaux qui devait se tenir le 9 mars 1789, pour élire leurs députés et rédiger les cahiers de doléances. Pour ce qui est de la noblesse, le procès-verbal indique que le marquis de Maupeou, appelé pour la seigneurie de Sablonnières et les fiefs de Montchevrel et Montflageol, se fit représenter (1). Le curé de Sablonnières, en revanche, participa en personne à l'élaboration du cahier contenant les pouvoirs et instructions remis, par l'ordre du clergé du bailliage de Maux, à son député. (2)

La Révolution était entamée et, comme dans bien des villages, allait être bien accueillie par la population. D'ailleurs, quelques mois plus tard, les Sablonniérois se firent remarquer par leurs contributions volontaires aux efforts de la patrie. En effet, durant la séance du 2 décembre, le président de l’Assemblée nationale annonçait un don patriotique de la municipalité de « Sabloniere en Brie » qui, n’ayant pas voulu profiter de la diminution dont elle devait bénéficier par l’imposition des ci-devant privilégiés, offrit cette nouvelle somme à la patrie (3). Le président soulignait que si ce don n’était pas considérable, il le devenait par l’influence de l’exemple (4). Le 6 avril 1790, à l’Assemblée Nationale, était lue une adresse de la « Communauté de Sablonnières en Brie » qui, indépendamment des impositions sur les ci-devant privilégiés, offrait 1 909 livres au titre de sa contribution patriotique en précisant que « les pauvres, et même les mendians, ont fait un généreux effort, et auroient rougi de n’être point inscrits sur la liste des contribuables ». (5)

Dans le même temps, était créée une milice populaire à laquelle la plupart des villageois allaient participer : la Garde Nationale.

A cette époque également, plusieurs hommes de la commune partirent grossir les rangs de l'armée républicaine. Le plus connu d'entre eux est sans doute Claude-Théodore Boutillier qui débuta en 1793 une carrière militaire qui lui valut de hautes récompenses. Mais il y eut aussi André Guillard incorporé le 5 août 1792 et qui revint estropié ; son frère Antoine Guillard qui servit comme grenadier au 1er bataillon de la 49e demi-brigade et fut tué au combat devant Limbourg (Belgique) en 1797 ; Jacques Savart (né à Sablonnières le 10 janvier 1775) qui arriva le 1er septembre 1793 à la 105e Demi-Brigade d'Infanterie de Ligne (matricule 289), qui fut promu caporal le 22 frimaire an VII (12 décembre 1798) et qui, après avoir été rayé le 30 frimaire an XI (21 décembre 1802), revint au Vautron où il exerça le métier de vigneron, se maria en 1807 et mourut au même lieu le 15 décembre 1853 ; Louis François Vincent Picart (né à Sablonnières le 22 janvier 1775) qui rejoignit le 12 septembre suivant la même unité (matricule 306) où il fut grenadier le 10 vendémiaire an VIII (2 octobre 1799) et blessé le 13 brumaire an VIII (4 novembre 1799) à la bataille de Fossano d'un coup de feu à l'épaule gauche, fut nommé caporal le 1er germinal an XI (22 mars 1803) puis sergent le 1er pluviôse an XIII (21 janvier 1805), et passa à la gendarmerie impériale le 9 septembre 1809 ; Nicolas Couesnon qui servit comme fusilier au 1er Bataillon du régiment de la Vienne et qui mourut à l'hôpital de Beaulieu le 10 pluviôse de l'an II (29 janvier 1794) ; Jean-Baptiste Labranche (né à Sablonnières le 15 mai 1775), réquisitionnaire arrivé à la formation de la 72e Brigade en août 1793 et qui fit sa première campagne la même année ; Louis Pierre Théodore Moutenot (né à Sablonnières le 8 février 1773 et fils du maire) qui était en 1795 grenadier à la 9e Division de l'Armée de Sambre-et-Meuse, qui revint vivant de ses campagnes, se maria, devint capitaine de la Garde Nationale de la commune en 1814 et finit ses jours à Sablonnières en 1827.

Extrait de l'acte de décès de Nicolas Couesnon (Arch. communales - Photo D. L. 2014).

Ceux dont les intérêts se trouvaient menacés par la Révolution eurent naturellement des réactions bien différentes. On sait qu'un membre du clergé, le vicaire Pierre Lhotellier, quitta la paroisse et fut considéré par les autorités communales comme émigré en 1791, ses biens étant vendus le 6 brumaire de l'an II de la République (27 octobre 1793).

Après 1789, la famille de Maupeou délaissa prudemment son hôtel parisien de la rue Notre-Dame de Nazareth pour le château de Sablonnières, non pas seulement pour fuir les tumultes de la capitale, mais aussi pour servir la cause royale comme relais de la correspondance secrète de Louis XVI : pour éviter que les missives envoyées en Suisse - où se trouvait le baron de Breteuil avec mandat de traiter avec les cours étrangères et de proposer toutes les mesures qui pourraient tendre à rétablir l'autorité royale et la tranquillité intérieure en France - soient interceptées, les lettres étaient dissimulées dans la reliure de livres révolutionnaires qui étaient portés par l'abbé d'Agoult ou par l'abbé de Tressan à Sablonnières chez la marquise de Maupeou (sœur du second) pour qu'ils soient ensuite expédiés à un correspondant par la poste de Rebais. (6)

Cette retraite sablonniéroise ne dura qu'un temps car finalement, René-Théophile II de Maupeou émigra en Belgique en 1791. Le 23 juin 1791, peu de temps après le départ de leur seigneur, les habitants de Sablonnières accompagnés de ceux de Bellot et d'Hondevilliers se rendirent en armes au château pour se faire remettre celles qui s'y trouvaient. Les gens du marquis durent obtempérer et l'intendant Deblaize adressa ses plaintes au district de Rozay.

Le vieux marquis, sans doute malade, mourut en février 1792. A leur retour en France, son épouse et leur fille Amicie-Elisabeth furent arrêtées et placées sous surveillance à Melun. Leur fils Auguste-René, qui resta en France, ne sera que momentanément incarcéré à Chantilly l'année suivante et retournera dans la résidence familiale de Parisis-Fontaine.

En 1793, les villageois s’attroupèrent à nouveau devant le château, cette fois pour exiger sa vente comme bien national. Toutefois, la ci-devant marquise parvint à sauver le domaine de Sablonnières de la vente en le faisant placer sous séquestre et réussit même à conserver la gestion d'une partie du domaine, notamment la ferme de Fontaine-Parée. Elle ne revint cependant pas habiter à Sablonnières mais se retira à Villeneuve-sur-Bellot où résidait sa mère, puis au château de Montrichard dans le Loir-et-Cher, puis à Paris et enfin au château de la Davière, à Courcemont dans la Sarthe.

Durant ces années, la plupart des signes de la féodalité (blasons, inscriptions des pierres tombales) furent effacés dans l'église et les statues religieuses en furent enlevées par les révolutionnaires.

La sinistre période de la Terreur fut aussi marquée par une révolte paysanne qui éclata entre La Ferté-Gaucher et Coulommiers, contre les mesures anti-religieuses et anticléricales. Ce mouvement spontané commença le 13 décembre 1793 sous la forme de processions avec croix et statues, parcourant les rues aux chants des cantiques, au son des cloches et avec des cris d'hostilité envers les républicains. Dès le lendemain, d'autres processions se formèrent dans les villages voisins et convergèrent vers les deux villes. Redoutant que ces manifestations ne se transforment en un soulèvement armé, les autorités civiles de la capitale envoyèrent l'armée qui n'eut aucun mal à y mettre un terme. Le 15 décembre, 800 prisonniers furent enfermés dans l'église de Coulommiers, parmi lesquels se trouvèrent de nombreux prêtres dont le curé de Sablonnières (7). A la suite de ces événements, comme dans les autres communes, l'église fut fermée et le culte suspendu.

Durant l'été 1795, on signale seulement quelques troubles au sujet de l'adjudication de grains provenant de la succession du ci-devant marquis de Maupeou.

Avec ces événements locaux qui s'inscrivent dans l'histoire de la Révolution française, Sablonnières a connu de grands changements politiques et sociaux. Le village et ses habitants ont dû s'adapter à de nouvelles institutions comme la création de la commune et du département, l'adoption du système métrique, la création du franc et du système monétaire décimal. Parmi ces nouveautés, il en fut une qui allait déterminer le destin de plusieurs villageois : la conscription.

(1) DE LA ROQUE (Louis) et DE BARTHELEMY (Edouard), Catalogue des gentilshommes de Champagne qui ont pris part ou envoyé leur procuration aux assemblées de la noblesse pour l'élection des députés aux états généraux de 1789, publié d'après les procès-verbaux officiels, Paris, Pillet, 1886, p. 33-34.

(2) Archives parlementaires de 1787 à 1860, Première partie (1787 à 1799), tome 3 Etats généraux – Cahiers des sénéchaussées et bailliages, Paris, Dupont, 1879, p. 722.

(3) Gazette Nationale ou Moniteur Universel, n° 103 du jeudi 3 décembre 1789 ; Le Point du Jour ou Résultat de ce qui s'est passé la veille à l'Assemblée Nationale, n° CLI du vendredi 4 décembre 1789, Paris, Cussac, 1790.

(4) Journal des Etats généraux convoqués par Louis XVI, le 29 avril 1789, tome VI, Paris, Cellot, 1789, p. 252.

(5) Procès-verbal de l’Assemblée Nationale, imprimé par son ordre, tome XVII, Paris, Baudouin, 1790.

(6) ALLONVILLE (Armand-François comte d'), Mémoires secrets de 1770 à 1830, tome 2, Bruxelles, Wahlen et Cie, 1838, p. 198.

(7) D'après Louis FONTAINE, En Brie champenoise, Paris, Publications Editions Graphiques, 1974, p. 161. Il fut probablement libéré le surlendemain avec la plupart des captifs.

Les guerres napoléoniennes (1803-1814)

Engagés volontaires ou conscrits, plusieurs hommes nés ou habitant à Sablonnières sont partis grossir les rangs de l'armée. Au mois de février 1804, le maire en dénombrait treize sous les drapeaux et, avec la proclamation du Premier Empire, la décennie qui suivit fut marquée par de nouveaux départs. Quelques uns seulement revinrent vivants des campagnes auxquelles ils participèrent, les autres étant morts au combat ou de maladie. Les registres des matricules des régiments de ligne et quelques transcriptions d'actes de décès renferment de précieux renseignements sur ces hommes dont quelques uns ont pu être identifiés :

- Jean Pierre Albassier, habitant de Sablonnières né à Verdelot le 19 septembre 1784, conscrit de 1806, arriva au 7e Régiment d'Infanterie de Ligne (1) le 28 octobre 1806 (matricule 2571), servit à la 8e Compagnie du 2e Bataillon puis au 1er Bataillon de Voltigeurs et mourut le 15 novembre 1810 des suites de fièvre, à l'hôpital de Figueres (Espagne) où il était entré le 7 octobre ; (2)

- Louis François Barbier, né à Sablonnières le 16 septembre 1778, fut incorporé le 11 prairial an VII (30 mai 1799) dans la 66e demi-brigade de ligne, fut promu caporal le 6 pluviôse an XI (26 janvier 1803) puis passa le 4 prairial de la même année (24 mai 1803) au 2e bataillon de la 63e demi-brigade (matricule 1650). Il fit les campagnes du Rhin (ans VII, VIII et IX), de l'ouest (ans X et XI). Il fut au camp de Bayonne les ans XII et XIII puis dans la flottille impériale. Si sa fiche matricule précise qu'il fut fait prisonnier de guerre le 7 frimaire an XIII (28 novembre 1804) et mentionne « n’est pas rentré » (3), on sait qu'il se maria le 29 janvier 1817 à Montdauphin.

- Claude Théodore Boutillier, fort de dix années d'expérience militaire, était sergent-major au 105e Régiment d'Infanterie de Ligne à la proclamation du Premier Empire (matricule 336) (4). A ce titre, il fit les campagnes de l'an XII et de l'an XIII aux camps de Bayonne et de Brest, celle de l'an XIV au 1er corps de la Grande Armée, celle de 1806 au 7e corps de la Grande Armée, celles de 1807 et 1808 au 4e corps de la Grande Armée, celles de 1809 et 1810 en Allemagne, celle de 1811 pour partie en Allemagne et pour partie en Espagne, celle de 1812 en Espagne. Fait baron d'Empire sur le champ de bataille en 1809 par Napoléon 1er en personne, il gravit les échelons, fut nommé chef de bataillon au 16e Régiment d'Infanterie de Ligne en 1813 et servit à ce titre en Espagne jusqu'en 1814. Il revint à Sablonnières, s'y maria en 1817 et y décéda en 1822 ;

- Louis Camus, vigneron né à Sablonnières le 26 septembre 1782 et conscrit de l'an XII (1804), arriva au corps le 7 juin 1805 (matricule 2004) et servit comme fusilier au 2e Bataillon du 88e Régiment d'Infanterie de Ligne (8e puis 3e Compagnie), fit la campagne de l'an XIII à l'armée des côtes de l'océan, puis passa à la grande armée au mois de vendémiaire an XIV (septembre ou octobre 1805) et fut fait prisonnier le 10 novembre 1813 ; (5)

- Pierre Honoré Bonaventure Camus, vigneron né à Sablonnières le 12 juillet 1791 et frère de Louis ci-dessus, conscrit de 1811, arriva au 103e Régiment d'Infanterie de Ligne (6) le 7 mai 1813 (matricule 9429). Grenadier au 4e Bataillon puis à la 4e Compagnie du 5e Bataillon, il mourut de la fièvre à l'hôpital de Metz le 12 mars 1814 ; (7)

- Joseph Tranquille Chérier, manouvrier né à Sablonnières le 5 janvier 1789 et également conscrit de 1809, arriva au 88e Régiment d'Infanterie de Ligne le 5 mai 1808 (matricule 5288) comme fusilier à la 1re Compagnie du 5e Bataillon du puis à la 3e Compagnie du 1er Bataillon. Hospitalisé le 1er janvier 1809, il fut rayé du contrôle pour longue absence le 30 septembre 1809 ; (8)

- Louis Jean Victor Delambre, né à Sablonnières le 17 novembre 1795, fut soldat au 3e Régiment de Tirailleurs de la Garde (9) et décéda le 4 septembre 1814 à l'hospice de Vervins où il était prisonnier de guerre des Prussiens ; (10)

- Louis Antoine Simon Desbrosses, cultivateur à Saint-Siméon né à Sablonnières le 18 juin 1788 et conscrit de 1809, arriva au 88e Régiment d'Infanterie de Ligne le 21 avril 1808 (matricule 5115). Fusilier à la 1re Compagnie du 3e Bataillon puis à la 1re Compagnie du 2e Bataillon, il mourut en Espagne à l'hôpital de (Salnicia?) le 2 novembre 1809, des suites de phtisie ; (11)

- Georges François Desgranges, né à Sablonnières le 9 janvier 1786 et conscrit du 31 octobre 1806, arriva au 7e Régiment d'Infanterie de Ligne le 31 octobre 1806 (matricule 2978). Fusilier à la 7e Compagnie du 1er Bataillon, puis nommé caporal le 12 mai 1809, il mourut au champ de bataille des suites de ses blessures, à Gracia (Catalogne) le 15 décembre 1808, lors de la guerre d'indépendance espagnole dans laquelle son unité était engagée ; (12)

- Pierre Alexandre Gontier, manouvrier né à Sablonnières le 7 avril 1790 et conscrit de 1810, qui arriva le 26 juin 1809 au 88e Régiment d'Infanterie de Ligne (matricule 6337) où il servit comme fusilier avant de mourir à l'hôpital des Jésuites à Augsbourg (Allemagne) le 16 mars 1810 des suites de phtisie ; (13)

- Jean Crépin Hannequin, habitant de Sablonnières né à Essises le 4 décembre 1790 et conscrit en 1809, fut incorporé à la 15e Compagnie de Pionniers et mourut le 13 avril 1811 de la fièvre alaxique à l'hôpital d'Eecloo (Belgique) où il était entré le 4 ; (14)

- Alexandre Pierre Janvier, manouvrier né à Sablonnières le 27 août 1778 et conscrit de l'an VII, qui servit comme grenadier au 1er Bataillon du 88e Régiment d'Infanterie de Ligne (15) où il arriva le 18 février 1803 (matricule 1141), qui fit les campagnes des ans XII et XIII à l'armée des côtes de l'océan, fut hospitalisé le 15 fructidor an XIII (2 septembre 1805) et rayé des contrôles le 30 septembre 1806 ; (16)

- Pierre Alexandre Janvier, né à Sablonnières le 17 août 1781 et conscrit de l'an X , était déserteur amnistié et venait du 88e Régiment d'infanterie de ligne lorsqu'il rejoignit le 32e de ligne (12e Compagnie) le 22 septembre 1807 (matricule 6656). Il passa le 4 novembre de la même année au 3e bataillon (8e Compagnie) et fut réformé le 7 janvier 1808 ; (17)

- Jean-Baptiste Labranche, cité ci-dessus, qui servit non seulement dans l'armée de la République mais aussi dans l'armée impériale à la 40e Demi-brigade de ligne (matricule 1574) et fut tué à la bataille d'Austerlitz le 11 frimaire de l'an XIV (2 décembre 1805) ; (18)

- Antoine Joseph Leroy, berger né à Sablonnières le 8 avril 1789 et conscrit de 1809, entra dans la garde nationale le 23 août de la même année avant de servir comme soldat au 7e Régiment de voltigeurs (2e bataillon, 4e Compagnie) à partir du 1er avril 1810. Il fit ainsi les campagnes de Brabant (1809) et d’Espagne (1811-1812), avant de se trouver en arrière le 25 mars 1814 à la Fère-Champenoise ; (19)

- Jean Joseph Alexis Lourdin, né à Sablonnières le 14 juillet 1786 et conscrit de 1806, arriva le 22 octobre 1806 au 7e Régiment d'Infanterie de Ligne (matricule 2546) et servit à la 4e Compagnie du 1er Bataillon avant de passer à la 3e Compagnie de Pionniers le 5 mars 1807. Il se maria à Sablonnières en 1815 et y mourut le 29 novembre 1874 ; (20)

- François Valentin Perrin, manouvrier né à Sablonnières le 11 septembre 1782, conscrit de l'an XI arrivé au corps le 27 octobre 1805 (matricule 2415), fusilier à la 4e Compagnie du 3e Bataillon du 88e Régiment d'Infanterie de Ligne, mort à l'hôpital du Pont-Couvert à Strasbourg le 19 mars 1806 des suites de la fièvre (une transcription de décès mentionne la mort, survenue à la même date à l'hôpital militaire Saint Jean de Strasbourg, de Jean-François Perrin fusilier à la 8e compagnie du 3e Bataillon du 88e Régiment d'Infanterie, peut-être la même personne) ; (21)

- Pierre Antoine Simon Raux, charretier né à Sablonnières le 19 février 1789 et conscrit de 1809, arriva le 21 avril 1808 au 88e Régiment d'Infanterie de Ligne (matricule 5139). Fusilier à la 8e Compagnie du 3e Bataillon puis grenadier, il était prisonnier le 10 novembre 1817. Il survécut, retrouva sa jeune épouse à Sablonnières et y mourut le 22 novembre 1866 ; (22)

- Jérôme Vincent Mathieu Souard, manouvrier né à Sablonnières le 22 janvier 1793, arrivé le 2 novembre 1813 au 12e Régiment d'Infanterie de Ligne (matricule 10488) et rayé des contrôles le 26 juin 1814, il rentra dans ses foyers avant d'être rappelé le 1er mai 1815 au 1er Régiment d'Infanterie de Ligne (matricule 3371). Il fut porté déserteur le 18 juillet 1815. (23)

La mention « à l'armée » figurant sur certaines listes de recensement des classes révèlent aussi que furent incorporés :

- Claude Hubert Rousselet, manouvrier né à Sablonnières le 11 avril 1790 et conscrit de 1810 ;

- Louis Simon Prudent Cordellier, manouvrier à La Trétoire né à Sablonnières le 5 avril 1791 et conscrit de 1811 ;

- Germain Généreux Gutel, manouvrier né à Sablonnières le 27 mai 1791 et conscrit de 1811. Rentré chez lui, il se maria une première fois en 1819 puis en 1821 à La Trétoire où il s'installa comme cultivateur et mourut en 1853.

Parmi ceux qui rentrèrent dans leurs foyers, citons aussi Pierre Nicolas Cherrier et un nommé Deschamps qui, tout comme Mathieu Souard, furent désignés provisoirement pour servir à nouveau et reçurent l'ordre de se présenter avec leurs effets militaires à Coulommiers, le jeudi 15 décembre 1814 à 9 heures du matin, pour passer la revue du départ et, s'ils n'étaient pas exceptés, être mis en route sur le champ.

Ordre de départ du 11 décembre 1814 (Arch. communales - Photos D. L.).

NB : Les matricules du 88e RIL (n° 1551) mentionnent aussi Louis Joseph Bergeot, manouvrier né à Sablonnières en 1782 (de Mathieu et Cécile Blanchoin), conscrit de l'an XI arrivé au corps le 3 pluviôse XII (24 janv. 1804 ) et qui servit comme fusilier à la 6e Compagnie du 2e Bataillon, fit la campagne des ans XII et XIII des côtes de l'océan avant de passer à la Grande armée (octobre 1805) et de mourir des suites d'une fièvre à l'hôpital militaire d'Heillbronn (Allemagne) le 22 novembre suivant. En réalité, il était né à Bellot le 20 mai 1783 (de François Mathias et Cécile Blanchoin) et domicilié dans cette même commune.

(1) Issu le 1er vendémiaire an XII (24 septembre 1803) de la 7e Demi-Brigade de deuxième formation formée le 22 août 1796 par réunion de la 128e Demi-Brigade de première formation (constituée du 2e Bataillon du 68e Régiment d'Infanterie ci-devant Régiment de Beauce, du 3e Bataillon de Volontaires de l'Eure dit 30e Bataillon des Réserves et du 6e Bataillon de Volontaires de l'Oise), du 2e Bataillon du 49e Régiment d'Infanterie ci-devant de Vintimille, du 1er Bataillon du 83e Régiment d'Infanterie ci-devant de Foix, des 3e et 7e bis bataillons de Volontaires de Paris, du 7e Bataillon de Volontaires de l'Yonne et du 16e bataillon des Fédérés Nationaux), ce régiment prit part en 1808 à la guerre d'indépendance espagnole et s'illustra à El Bruc, Girone, Molins de Rei et Cardedeu.

(2) SHD/GR 21 YC 59, p. 434.

(3) SHD/GR 21 YC 527, p. 278.

(4) SHD/GR 21 YC 763, p. 56.

(5) SHD/GR 21 YC 675, p. 338.

(6) Par arrêté du 1er vendémiaire an XII (24 septembre 1803), la 103e Demi-Brigade d’Infanterie de Ligne formée en 1796 de la 86e Demi-Brigade de Bataille (réunion en avril 1794 du 2e Bataillon du 43e Régiment d'Infanterie ci-devant Royal-Vaisseaux, du 19e Bataillon de Volontaires de Paris dit Bataillon du Pont-Neuf et du 3e Bataillon de Volontaires du Puy-de-Dôme) et de la 162e Demi-Brigade de Bataille (amalgame en avril 1794 du 2e Bataillon du 89e Régiment d'Infanterie ci-devant Royal-Suédois, du Bataillon de la Commune des Arcis et du 6e Bataillon bis du Calvados) prit le nom de 103e Régiment d’Infanterie de Ligne. Ce régiment fut engagé en 1813 dans la campagne d'Allemagne (bataille de Leipzig des 16 au 19 octobre).

(7) SHD/GR 21 YC 754, p. 1573.

(8) SHD/GR 21 YC 677, p. 882.

(9) Le 3e Régiment de Tirailleurs de la Garde avait été créé en 1809 sous le nom de 1er Régiment de Conscrit-Grenadiers. Les 9 et 10 mars 1814, il participa à la bataille de Laon.

(10) Etat civil de Sablonnières.

(11) SHD/GR 21 YC 677, p. 853.

(12) SHD/GR 21 YC 59, p. 502.

(13) SHD/GR 21 YC 677, p. 1057.

(14) Etat civil de Sablonnières.

(15) Formé le 1er vendémiaire an XII (24 septembre 1803) à partir de la 88e Demi-Brigade elle-même issue le 20 février 1796 de l'amalgame de la 112e Demi-Brigade (réunion du 2e Bataillon du 56e Régiment d'Infanterie ci-devant Régiment de Bourbon, du 7e Bataillon de Volontaires du Doubs et du 2e Bataillon de Volontaires des Deux-Sèvres dit 22e Bataillon des Réserves) et du 3e Bataillon de la 173e Demi-Brigade (réunion du 1er Bataillon du 96e Régiment d'Infanterie ci-devant Régiment de Nassau, du 5e Bataillon de Volontaires de la Moselle et du 6e Bataillon de Volontaires des Vosges), il participa en 1805 à la campagne d'Autriche et à la bataille d'Austerlitz, en 1806 à la campagne de Prusse et de Pologne, en 1807 à la bataille d'Eylau.

(16) SHD/GR 21 YC 675, p. 195.

(17) SHD/GR 21 YC 284, p. 14.

(18) SHD/GR 21 YC 350, p. 267.

(19) SHD/GR 20 YC 82, p. 140.

(20) SHD/GR 21 YC 59, p. 430.

(21) SHD/GR 21 YC 675, p. 407.

(22) SHD/GR 21 YC 677, p. 857.

(23) SHD/GR 21 YC 110, p. 51 ; SHD/GR 21 YC 9, p. 65.

A partir de la fin 1813, la région assista à d'importants mouvements de troupes, d'une part l'armée française allant repousser l'envahisseur russo-prussien dans l'est du pays, d'autre part les colonnes ennemies déterminées à marcher sur Paris. Située à l'écart des grandes routes le long desquelles les opérations militaires furent concentrées, la commune de Sablonnières eut néanmoins à subir le passage de troupes, parfois leur séjour et surtout, de nombreuses réquisitions de vivres.

Un premier passage et peut être un cantonnement eut lieu en 1813 (il s'agissait probablement de troupes impériales) puisque Ferdinand Guillaume Debaran vint déposer à la mairie deux fusils de munition (fusils des troupes d’infanterie) abandonnés chez lui avec leur baïonnette, leur capucine et leur baguette, et deux carabines avec leur baguette. On sait aussi que les habitants subirent les premières réquisitions cette année-là.

Le 24 janvier 1814, le maire fut invité à désigner avec le plus grand soin parmi les plus beaux et les plus propres au service, les quatre chevaux de trait que la commune devait fournir parmi les près de 600 qui devaient être amenés à Coulommiers, en vue d'une sélection de 300 bêtes destinés au train d'artillerie. Dans tous les cas, il devait s'agir de hongres ou de juments garanties non pleines, âgés de 60 mois à 9 ans, ayant une taille de 4 pieds 9 à 11 pouces (1 m 54 à 1 m 59) ou de 4 pieds 7 à 9 pouces (1 m 46 à 1 m 54), en bon état de ferrure et garnis d'un licol et d'une longe en cuir. Le propriétaire de chaque animal retenu à Coulommiers recevrait l'ordre de réquisition mentionnant la date à laquelle il devrait le présenter à Melun, l'acheminement se faisant à ses propres frais. Il recevrait 400 francs par tête mais le paiement devant probablement se faire en bons de la caisse d'amortissement, il était demandé aux propriétaires de chevaux d'une même commune d'en faire l'avance et de se répartir le paiement lorsqu'il serait effectué.

(Arch. communales - Photos D. L.).

Au début de l'année 1814, toute la région était en proie aux exactions des cosaques arrivés de Montmirail. Le 8 février, un détachement de 50 hommes des troupes russo-prussiennes entra dans le bourg pour y stationner pendant un jour et une nuit, réquisitionnant pour l'occasion 2 080 livres de pain, 3 pièces de vin, 10 sacs d’avoine, 20 paires de poules, 15 livres de beurre, 12 œufs, 60 kilogrammes de porc et 16 bouteilles d’eau-de-vie. Le 12, 200 cosaques et leurs chevaux bivouaquèrent et 21 d'entre furent logés chez les villageois jusqu’au lendemain. Le lendemain, 25 cavaliers et 50 fantassins français emportèrent 400 livres de pain, 35 boisseaux d’avoine, une pièce de vin et 6 poules. Le 18, une vache fut réquisitionnée par un détachement de volontaires. Le lendemain, les troupes réquisitionnèrent 4 vaches et 3 372 livres de pain alors qu'un détachement de chasseurs prit une pièce de vin, 600 livres de pain et 4 poules. Le même jour, furent livrés à un piquet de cavalerie de 112 hommes et 112 chevaux, 60 boisseaux d’avoine, 50 bottes de foin, 600 livres de pain, 1 pièce de vin et 4 poules ; le maire offrit le dîner aux officiers. Le 27 février, 200 bouteilles de vin et 400 livres de pain furent remises à 210 hommes des troupes alliées. Le 27 mars, 3 500 hommes des troupes alliées logèrent dans les maisons et prirent au magasin de Sablonnières 1 200 livres de pain, du foin et 25 hectolitres d’avoine. Le 22 juillet, au départ de soldats arrivés en cantonnement le 15, 286 livres de pain furent remises. Le 12 août, sur ordre du sous-préfet de Coulommiers pour les troupes cantonnées à Sablonnières, Boitron, Hondevilliers et La Trétoire, furent livrées une vache, 590 livres de pain sur les 780 demandées, deux voitures à deux chevaux, 19 livres et demie de beurre et 17 livres de sel. Le 29 août, pour être emmenés à Vertus avec la compagnie cantonnée à Sablonnières, Boitron, Hondevilliers et La Trétoire : 377 livres de pain (sur 2 000 exigées), 6 litres de pois, lentilles ou haricots, 60 onces de sel (sur les 32 livres exigées) et 2 vaches (sur les 4 réquisitionnées). Du 17 au 21 octobre, le corps des gardes prussiens établi dans la commune prit 46 livres de pain, 18 litres de vin, 7 litres trois quarts d’eau-de-vie, 26 livres de viande, 2 livres et demie de beurre, 13 œufs, 26 onces de sel et 1 corde de bois... A nouveau en juillet et en août 1815, des Bavarois stationnés à Grand-Marché vinrent à Sablonnières pour faire des réquisitions. Au total, les réquisitions subies en 1814 se montèrent à 9 904,57 francs.

(Arch. communales - Photo D. L.).

D'autres documents contemporains font état de 914 hommes logés et nourris par les habitants du 14 juillet au 3 septembre 1814, de 3 militaires et 3 chevaux logés le 14 octobre chez Monsieur Debaran (qui leur fournit 3 rations de vivres et 3 de fourrage), de l'arrivée de 71 hommes accompagnés de 13 domestiques, 3 femmes et 93 chevaux le 15 octobre ; certains précisent que les habitants logèrent et nourrirent 85 hommes et 93 chevaux du 8e régiment de chasseurs à cheval prussiens et du 2e escadron du baron de Horst du 15 au 21 octobre, et 22 hommes et 22 chevaux du 16 au 21 octobre.

Le pire restait toutefois à venir. Au début de l'été 1815, quelques jours seulement après le retour des vaincus de Waterloo dont une partie en provenance de Soissons passa par La Ferté-sous-Jouarre, les armées bavaroise et prussienne envahirent le pays. Le 9 juillet, La Ferté-sous-Jouarre et les environs tombait aux mains du feld-marchal von Wrede ; le 12, ce fut le tour de Coulommiers et de Provins. Non seulement les villes mais aussi les villages étaient occupés et leurs habitants furent contraints de loger et nourrir hommes et chevaux.

Les états de cantonnement conservés dans les archives de la commune permettent de se faire une idée de la présence des troupes coalisées pendant la période du 14 juillet au 30 octobre 1815 :

A chaque passage de troupes étrangères, la commune fut lourdement mise à contribution même s'il ne fut pas toujours possible de livrer les quantités demandées. Un recueil manuscrit de 80 pages, intitulé Registre de toutes les fournitures qui ont été faites pour le soin et la subsistance des troupes alliées, par la commune de Sablonnières en 1815, contient de précieux renseignements sur les réquisitions qui ont pesé quasi quotidiennement sur les Sablonniérois au profit des magasins des villes ou des cantonnements établis dans la région :

On parle aussi de 600 kilogrammes de pain et 2 pièces de vin le 18 juillet ; de 590 livres de pain, 19,5 livres de beurre, 17 livres de sel et une vache le 12 août ; de 377 livres de pain, 6 litres de légumes secs, 60 onces de sel et 2 vaches le 29 août.

Réquisition de vivres par 50 hommes de troupe le 8 février 1814 (Arch. communales - Photo D. L.). Réquisition de vaches (Arch. communales - Photo D. L.).

Réquisition de vin en février 1814 (Arch. communales - Photo D. L.).

Cette situation prit fin en octobre 1815, avec l'évacuation des troupes alliées. Le bilan était certainement très lourd comme dans beaucoup d'autres localités victimes de l'occupation où furent signalées des violences contre les particuliers et les élus, des vexations et confiscations de toutes sortes, les pillages, le ravage des cultures par les chevaux, ou la crainte quotidienne qui poussait les villageois à rester chez eux pour protéger leurs biens et leur famille au détriment des travaux des champs. Une fois encore, la campagne était ravagée et l'économie rurale ruinée.

Si l'approche que l'on peut avoir localement du Premier Empire est essentiellement liée aux événements militaires, il ne faut pas perdre de vue que cette période fut aussi, à son tour après la Révolution, une période de changements dans la vie quotidienne des villageois avec, notamment, la création du code civil et celle du cadastre. Ici comme ailleurs en France, l'Empereur eut ses partisans, au-delà de ceux qui avaient servi dans son armée, comme en atteste l'attribution de son prénom à plusieurs garçons nés sous son règne : Joseph Napoléon Fauvet (né le 23 juillet 1804), François Napoléon Bourguignon (né le 21 février 1807), Jean Napoléon Rousselet (né le 18 mars 1808), Joseph Napoléon Biberon (né le 19 août 1809), Gésime Auguste Napoléon Moreau (né le 24 septembre 1810), Rose Gésime Napoléon Thomas (né le 6 octobre 1811), Hubert Alexandre Napoléon Chérier (né le 11 septembre 1812) et Télémaque Napoléon Perrin (né le 18 février 1813). Sans doute aussi eut-il ses détracteurs, à commencer par des opposants politiques fidèles au courant révolutionnaire ou royalistes, mais aussi parmi une population lasse des pertes humaines, des réquisitions et des privations engendrées par la guerre. Fin 1815, la paix était enfin revenue, mais pas pour très longtemps.

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Dernière mise à jour le 26 août 2018

© Denis Lochouarn

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