Italie. Un quartier ouvrier. Un matin, en allant faire leurs courses, les femmes du quartier constatent une fois de trop l’augmentation du coût des marchandises. Excédées, elles se révoltent et décident de payer le prix qu’elles auront choisi, et même, pourquoi pas, de ne pas payer du tout !
Antonia, prise dans l’excitation générale, fait comme les autres et s’enfuit, ses sacs remplis. En chemin, elle croise son amie Margherita qu’elle convainc de l’aider. Mais Giovanni, son mari, homme de principes et fervent défenseur de la cause ouvrière, va bientôt rentrer et il ne faut pas qu’il découvre toutes ces marchandises, il ne le supporterait pas !
Antonia, Margherita, Giovanni, Luigi, gendarmes et policiers sont embarqués dans un tourbillon de mensonges, de quiproquos, d’imbroglio sur fond de luttes sociales et de mondialisation.
Dario FO et Franca RAME
C’est en 1954 que démarre leur histoire, par un mariage. Dario Fo est né en 1926 dans un village de Lombardie dans une famille de prolétaires de tradition démocratique et antifasciste. Dès 1952 il écrit pour la radio, fait ses débuts d’acteur et monte des revues de satires sociales et politiques.
Franca Rame née elle aussi en Lombardie en 1929 grandie dans une famille de forte tradition théâtrale. Elle participe dès son plus jeune âge aux pièces montées par ses parents dans des rôles d’enfants.
En 1958 ils créent leur première compagnie théâtrale, Franca Rame en devient l’actrice principale et l’administratrice et Dario Fo le dramaturge et le metteur en scène. En 1968 ils fondent un nouveau collectif « La Nueva Scena » qui deviendra par la suite « La Comune » en 1970. Ils s’éloignent progressivement des circuits traditionnels des Théâtres pour jouer dans des lieux qui n’étaient pas touchés par le spectacle vivant comme des maisons communes, des usines ou des écoles occupées…
Le style de leurs spectacles perpétue la tradition de la Commedia dell’arte, des clowns italiens et de la farce médiévale. Mais le comique, la fantaisie et la satire s’inscrivent dans une perspective éminemment politique voire militante.
En 1977 Dario Fo reçoit le prix Nobel pour l’ensemble de son œuvre et il déclare : » Je dois mon Nobel à cette dame, sans elle je ne l’aurais pas eu ! ».
Sources : Théâtre contemporain.net / Wikipedia / Wikitalie
Quel type de pièce est « On ne paie pas ! On ne paie pas ! » ?
Est-ce une farce burlesque basée sur un comique de situation d’une efficacité redoutable, ou est-ce un brulot politique dénonçant frontalement le capitalisme cynique, la précarisation accélérée des plus pauvres, la corruption, entre autres maux de nos sociétés ?
Difficile de trancher : c’est les deux à la fois. Là est la force du théâtre de Dario Fo et Franca Rame : rendre naturel ce mélange des genres. Le théâtre devient une tribune pour exprimer des idées en même temps qu’il reste un lieu de divertissement. On peut donc divertir en parlant politique ? Oui, ils nous le prouvent dans nombre de leurs pièces et dans celle-ci en particulier.
Quand, avec la troupe Les Envies Polymorphes, nous avons commencé à évoquer la possibilité de travailler sur « On ne paie pas ! On ne paie pas ! », c'était en 2019, en pleine crise des gilets jaunes, et nous étions constamment surpris de constater la proximité entre les faits relatés par les journaux et ceux racontés dans cette pièce.
Il faut croire que bien qu’écrite en 1974 (et remise à jour en 2008 par les auteurs) elle est toujours d’actualité et risque malheureusement de le rester encore un certain temps.
Notre défi sera donc de faire ressortir pleinement le comique de la pièce, et faire entendre tout aussi pleinement le sujet politique. On pourrait penser qu’il faut trancher, mettre l’accent sur un aspect ou l’autre, je suis convaincue du contraire : il faut faire exister les deux à la fois, permettre au public de rire et de s’indigner en même temps.
Pour cela, nous allons suivre la voie tracée par Dario Fo et Franca Rame, la voie d’un théâtre joyeux, burlesque, aux accents forains. Pas trop de réalisme : juste de quoi rendre la situation compréhensible, beaucoup d’énergie, une place pour la fantaisie des comédiens, un rapport direct avec le public...
Les quelques éléments de décor indispensables (porte, lit, armoire...) seront légers et mobiles, pouvant apparaître et disparaître facilement, donnant une impression de précarité et laissant le maximum de place au jeu des acteurs, à la crédibilité des situations et à la parole dite.
Les costumes iront dans le même sens : simples, crédibles et le plus universels possibles, permettant au spectateur quel qu’il soit de s’identifier comme appartenant à ce peuple-là, qui s’exprime sur scène face à lui.