Adaptation cinématographique 2 - Au Bonheur des Dames

" Denise était venue à pied de la gare Saint-Lazare, (...)

- Allons, dit-il, entrez, puisque vous êtes venus... " [ chap. I ]

Le travail consiste, après une analyse littéraire du passage considéré, à se livrer à une étude comparative des mises en scène des deux cinéastes.

L'activité va se concentrer sur l'ouverture du récit : du début du roman où Denise nous est présentée arrivant à Paris avec ses deux frères jusqu'à la rencontre avec leur oncle Baudu.

La version de Julien Duvivier étant un film muet avec des cartons, il peut sembler plus efficace de commencer avec la version d'André Cayatte. De plus, Julien Duvivier ayant situé son adaptation à l'époque où il réalisa son film et présentant Denise comme une orpheline, ces choix peuvent sembler, dans un premier temps, moins fidèles à l'oeuvre d'Emile Zola.

Au Bonheur des Dames de Julien Duvivier (1928) - 8mn37

Au Bonheur des Dames d' André Cayatte (1942) - 7mn15

Cette ouverture de récit peur être envisagée comme une succession de rencontres :

- rencontre avec Paris, dès la descente du train

- rencontre avec le magasin de nouveautés Au Bonheur des Dames, avec ses vitrines, ses étalages, ses employés

- rencontre avec la boutique Au Vieil Elbeulf

- rencontre avec Baudu, à la fois parent éloigné et représentant d'un commerce en voie de disparition.

Des remarques d'ordre divers peuvent être suggérées aux élèves :

1) Il est intéressant de leur faire repérer comment, dès les premières images Julien Duvivier rend cinématographiquement la frénésie de la ville : Gros Plans, fondus enchaînés, différents mouvements et positions de caméra mais aussi situations où règne une grande agitiation.

2) La rencontre avec le magasin Au Bonheur des Dames est traitée de manière assez semblable, compte tenu des époques différentes choisies. Plusieurs matières de l'expression du langage cinématographique sont utilisées : on voit l'immeuble imposant ( évoquant visuellement un paquebot ou supposé habitation de l'Empereur, chez Cayatte), on lit son nom sur la façade (version Cayatte) mais aussi sur les prospectus jetés d'avion, sur les voitures de livraison, sur les ballons publicitaires donnés aux enfants, sur les panneaux portés par les hommes-sandwichs (version Duvivier)

3) Le Vieil Elbeulf est montré petit, triste, sombre, peu accueillant dans les deux versions. Mais si André Cayatte nous le présente étouffé par les maisons à proximité, avec des employés peu chaleureux qui ne répondent que par des signes aux questions posées, Julien Duvivier illustre le déclin du petit commerce par un bâtiment soutenu par des étais, qui barrent physiquement le passage à Denise en faisant obstacle à son arrivée, et dont l'accès se fait en descendant quelques marches.

4) En ce qui concerne le personnage de Baudu, autant Julien Duvivier en a fait un homme abattu, triste, défait, autant André Cayatte nous présente un personnage prêt à lutter contre Mouret, vociférant et prédisant une fin apocalyptique pour le Bonheur des Dames.

Ces différences d'époque, d'identité ( Denise ), de caractère ( Baudu ), permettent, notamment, de sensibiliser les élèves au problème que pose la mise en images d'une oeuvre littéraire et au fait que toute adaptation est une véritable appropriation et une recréation du cinéaste.

A partir des mêmes extraits, une étude comparative peut aussi se focaliser uniquement sur le personnage de Denise: description physique et vestimentaire, réflexion sur le choix de l'actice et de sa physionomie, caractère et attitude dans les premières scènes, ..