Psychologues freudiens

L'Association des Psychologues Freudiens - http://www.psychologuesfreudiens.org

Bravo à Intervalle.

Le 4 juin 2007 par STELLA HARRISON .

La première après-midi de bilan d'Intervalle, « lieu d'accueil et d'écoute ouvert le week-end » fondé par Catherine Meut, psychiatre psychanalyste, s'est tenue le samedi 2 juin. Elle permit d'entrer dans un nouveau discours, en cette ère de l'évaluation et des programmes standardisés tous acabits où l'on est davantage écrasé sous de scientifiques courbes et coupes (statistiques pour les unes, longitudinales pour les autres), que pétris par les mots. Ton vif, esprit de recherche soutenu ici par la présence de Marie-Hélène Brousse, présence qui, déjà en soi, promettait bon heurt. C. Meut ouvrit la Journée. C'est sur ce moment que je m'attarderai plus particulièrement, bien que chaque intervention ait été en soi une oasis, un joyau. Le politique est de plus en plus préoccupé de la « précarité ». De nouvelles pratiques doivent être convoquées. Il y a, par exemple, nécessité de créer un autre milieu que l'hôpital, dans ce temps particulier du week- end où l'on peut se sentir « banni du monde ». Intervalle est « un relais, refuge, un lieu d'accueil psychanalytique », sans RV réguliers programmés, les accueillants se relaient, et changent. Le praticien n'est pas toujours le même, mais la série des accueillants n'est pas infinie. L'Autre d'Intervalle ne demande rien, pas même la parole, l'on peut juste y boire un café, ou, même ! des mots. « Premier traitement psychique » administré ? C'est la « sensibilisation au traitement de la parole ». Car les accueillants d'Intervalle, apprend-on ici, et cela tout au long de l'après -midi, peuvent parler. Diire des mots ! Apaisants, parfois. Quelqu'un, ainsi, vint « y chercher des paroles, pour se soulager ». C'est dans cette veine que Gudrun Scherer, psychologue accueillante, put nous dire qu'Intervalle, cet Autre inédit, atypique, qui n'exige rien, fut un jour dénommé par un usager un « étranger familier ». Pas de programme thérapeutique, pas de contrat, mais « renouvellement vivifiant de l'écoute ». Les sujets qui s'adressent ici ont un lien difficile à l'Autre, viennent d'Emmaüs, de l'Association Aurore (représentées ici toutes deux par leurs directeurs), de l'Armée du Salut, envoyés par des partenaires sociaux, CHRS, CMP, ou par certains services de psychiatrie, médecins ou psychiatres libéraux. Certains directement, poussent la porte. Angoisses massives, décrochages, ruptures avec l'Autre de la vie conjugale, de la vie amoureuse. Tels sont les mots, bien tenus, de Catherine Meut, qui contiennent ce que Marie-Hélène Brousse nommera joliment : « retenue du diagnostic ». La formation au diagnostic, à la technique analytique est cependant solide, le travail sur les entretiens très sérieux, mais « la structure est légère (...) La solidité du dispositif détermine et fait la clinique, le dispositif est simple, il est incarné par la présence des analystes. », dira C. Meut. Nous sommes ici dans une clinique au-delà du père, au-delà de la signification oedipienne de la famille, clinique qui inclut la dimension de la recherche. Clinique toute prise du dernier enseignement de Lacan. On y travaille avec le sens, mais on accueille le non-sens, opère la coupure. Pas de « type » d'interprétation, à Intervalle, mais elles sont toutes de la même structure : reprise d'un énoncé du sujet au titre de ponctuation. Le transfert ? Il s'opère davantage sur le lieu même d'Intervalle, que sur quelqu'un de particulier. Ainsi s'agit-il d'une modalité particulière de pratique à plusieurs, où chaque accueillant a fonction de psychanalyste. La pratique de la psychanalyse ici est nouvelle, ainsi que le traitement du temps.

Quittons-nous en évoquant ces quelques mots de Freud, choisis à point nommé par Catherine Meut, la Pionnière, qui, avec Intervalle, chaussa ses bottes de sept lieues pour accomplir une part du rêve de Freud. De Freud, « ce visionnaire que l'on voudrait enterrer », ce Freud, soucieux des « pauvres (...) qui ont les mêmes droits à un secours psychique » que les autres, Freud qui appelle à une psychothérapie populaire.

lundi 4 juin 2007 STELLA HARRISON .