2014 Juin-Juillet - Fidji

2014 juin-juillet : Fidji

Après l'enchantement de Wallis, nous sommes circonspects sur ce que nous allons trouver aux Fidji. Heureusement nos amis Anna et Paolo de Zoomax nous ont donné des tuyaux pour apprécier les plus beaux endroits de cet immense archipel composé de deux grandes îles Viti Levu et Vanua Levu et plus de 300 îles éparses. Pour vous donner une idée, l'étendue de l'archipel correspond à presque la moitié de la Méditerranée.

Cela explique pourquoi nous sommes souvent seuls aux mouillages et que les retrouvailles avec les bateaux connus ne sont que fortuites, chacun ayant des objectifs différents.

Les Fidji sont exactement de l'autre côté de la terre par rapport à la France.

Il nous faut faire notre entrée aux Fidji dans l'un des 5 ports autorisés. Nous choisissons le plus proche sur notre route : Savusavu sur la grande île de Vanua Levu.

Reine et Yves de Zeecada nous accueillent à Copra Shed Marina et complètent nos infos sur l'archipel. C'est leur deuxième tour du monde et ils connaissent déjà très bien les Fidji pour y être venus en 2006.

Nous profitons de la grande ville de Savusavu pour faire des courses de frais, de clé 3G pour internet, de gaz pour la cuisine (tous les types de bouteille sont acceptées contrairement en NZ), de carburant( 1€/l)...

Copra Shed Marina à Savusavu sur l'île de Vanua Levu

Pour découvrir l'intérieur de cette grande île quoi de mieux que de prendre le bus local, sans fenêtre ?

C'est plus lent que le taxi mais on découvre la route, les villages, les habitants et la campagne d'une autre façon.

Nous voyageons vers Labasa au nord à 2h1/2 de route de Savusavu. Nous passons d'un paysage vallonné au sud à un paysage de plaines au nord permettant la culture de la canne à sucre.

Labasa et ses fameux marchés : celui des fruits et légumes, le marché aux poissons (?) celui spécialisé dans le yaqona (racines de poivrier) qui sert à préparer le kava, boisson privilégiée des polynésiens de l'ouest.

Nous en achetons car nous devrons rencontrer les chefs de village des futures îles où nous comptons nous arrêter et pratiquer la coutume du sevusevu .

Le sevusevu est le nom donné au cadeau que l'homme (la femme devant rester discrète) offre au chef du village ou à son représentant. Ce cadeau doit permettre de pénétrer sur le territoire terrestre et maritime du village, visiter les environs, ancrer dans le lagon, éventuellement pêcher. Ce cadeau prend concrètement la forme d'un paquet de 500g de racines de yaqona (quantité conseillée aux plaisanciers). Cette offrande est suivie d'une sorte de bénédiction où le chef (ou son représentant) vous remercie et bénit votre venue en se livrant à un monologue en fidjien ponctué de frappes dans les mains. Le yaqona réduit en une poudre couleur terre est mise dans un linge, mélangé à de l'eau de pluie et pressé dans le tanoa (récipient en bois sculpté) placé devant l'officiant.

La mixture est bien remuée à l'aide d'un bol en noix de coco. Le premier à être servi est le chef puis les hôtes. Chacun son tour , nous buvons dans le même bol et devons boire d'un trait le contenu en lançant au préalable un fort "Bula" prononcer " Mbula". Le bol bu , l'assemblée frappe trois fois dans ses mains. Il s'agit d'une vieille coutume locale et non pas d'une fantaisie touristique. La cérémonie se termine quand le tanoa est vide. Heureusement, certains savent que les touristes ne sont pas aussi friands qu'eux du kava et après avoir bu un bol et pris le temps de parler avec vous , ils vous permettent de partir à la découverte de leur île.

Le kava a un effet relaxant, voir même anesthésiant et soporifique. Nos 2 petits bols bus n'ont pas suffit à nous endormir mais nous avons ressenti une légère anesthésie de la langue... et Sylvie a bien aimé le petit goût de réglisse lui rappelant les bâtons de bois de sa jeunesse...

Un taxi à Labasa nous conduit jusqu'à la côte nord, à Korovatu Beach bien connue des jeunes de Labasa qui viennent y passer le week-end .

Nous nous arrêtons devant le fameux temple hindou Naag Mandir. A Labasa, la population est majoritairement indienne. Au XIXème siècle de nombreux Indiens sont arrivés pour travailler dans les champs de canne à sucre. Aujourd'hui ces Indo-Fidjiens représentent plus de 40% de la population.

En périphérie de Labasa se trouve la Sucrerie de l'île : les tracteurs et les camions chargés de canne à sucre attendent pour décharger. La saison de la récolte vient juste de commencer depuis 2 jours.

Nous avons demandé un permis de croisière pour aller dans tous les archipels des petites îles : nous pensons aller vers l'est, dans le groupe des îles Lau, tout d'abord, même si les vents sont contraires la majeure partie du temps. Loin des circuits de croisière, ces îles sont, paraît-il , restées très authentiques.

Nous nous arrêtons à Namena, l'occasion pour nous de nous régaler une fois de plus avec nos masques. Et nous admirons une multitude de coraux mous qui font la réputation des Fidji.

Puis ce sera un mouillage à Koro avant d'arriver dans le détroit de Somosomo devant l'île de Taveuni. Ces 2 jours de navigation nous permettent d'attraper 3 superbes dorades coryphènes.

Ayant beaucoup cassé de bas de ligne depuis notre départ de NZ, nous testons nos nouveaux leurres confectionnés à base de guirlandes de noël achetées à Savusavu et de restes de leurre à moitié mangés par nos prises. Et ça Marche !!!!!

Notre mouillage à Viani Bay, est bien abrité derrière le récif de corail " Rainbow Reef ". Nous passons une matinée en plongée bouteille avec Rolland du très sympathique et décontracté " resort Dolphin Bay Divers " pour découvrir des sites étonnants : le célèbre mur blanc de corail ou White Wall, que nous longeons après être passé dans un tunnel qui nous conduit de 12m à 20m de profondeur et le Rainbow Reef, jardin de coraux et de poissons. Malheureusement, vous n'aurez pas de photos car notre appareil photo ne descend pas en dessous de 10m !!!

A l'ouest de Taveuni nous nous arrêtons dans l'île de Qaméa et faisons notre premier "sevusevu" . C'est Nabasso un jeune garçon, qui nous accompagne chez le chef.

De Qaméa nous naviguons plein est vers Weilagilala, un atoll que Zoomax nous a recommandé. Malheureusement il y a beaucoup de vent et notre mouillage, même protégé du récif n'est pas confortable. Nous n'aurons donc pas l'occasion de débarquer sur l'îlot pour découvrir les superbes plages de sable blanc... ce sera pour une prochaine fois.

Plein sud maintenant vers Vanua Balavu et ses paysages incroyables.

Après la passe du lagon nord nous découvrons Bay of Islands, un paysage d'Indonésie.

Nous restons deux jours dans le calme et la quiétude. Nous y faisons des découvertes de beaux coraux et gorgones.

Nous allons ancrer devant le village de Dalicoli pour y présenter notre "sevusevu". C'est l'occasion de marcher dans l'île et rencontrer ses habitants.

Le lendemain, j'accompagne Sylvie en annexe au village voisin de Malaka d'où part un "truck" (camion servant de bus local) qui emmène les habitants au grand village de Lomaloma au sud pour faire leurs courses, aller à la poste, à la " banque " ou se faire soigner à l' hôpital de l'île . Je reviens la chercher vers 11h et nous raccompagnons en annexe Simiti un fidjien de 75 ans qui était dans le truck avec Sylvie.

En déposant Simiti au village de Dalicoli, nous avons la surprise de nous faire inviter à la cérémonie du " sevusevu " organisée en l'honneur de notre voisin de mouillage. Cette fois-ci, nous avons le droit au grand jeu et nous devons mettre notre " sulu " avant de rentrer sous le fale(case traditionnelle ouverte).

Nous aurons aussi la chance de partager un véritable repas fidjien à cette occasion : délicieux poisson frit ou cuit avec du "lolo"(lait de coco), feuilles de manioc cuit toujours dans du lolo, racine de manioc cuite à l'eau, bananes légumes et bananes fruits cuites. Le tout joliment présenté... bonjour les féculents !

Belissima à Dalicoli

Nous repartons vers le nord de l'île pour la contourner et changer de mouillage.

Nous prenons une bouée devant le " Royal Exploring Isles Yacht Squadron " où nous sommes très bien accueillis par Villy. Les lieux appartiennent à Tony, australien d'origine mais fidjien de cœur, que nous rencontrons le lendemain. Nous organisons un dîner au Yacht Club avec Tony, Villy et invitons Jeff et son boy fidjien arrivé avec son bateau la veille au soir. Dans la journée deux autres voiliers viennent ancrer dans la baie. Le soir, Belissima régalera 12 personnes au lieu de 6 prévues, autour de bières, de carpaccio de dorade crue, de dorade grillée au barbecue accompagnée de riz , et du fameux brownie au chocolat de Sylvie. Il y en aura pour tout le monde, ne soyez pas étonnés...

Bavatu Harbour sur l'île de Vanuabalavu Vue sur Bay of Islands

Après cette bonne soirée, le lendemain Clémence, une jeune française équipière d'un des voiliers (un Garcia Passoa de 46') nous fait découvrir le domaine de Tony le propriétaire des lieux : c'est la troisième fois qu'elle vient là . Nous découvrons des points de vue magnifiques, le village de fidjiens au service de Tony, des animaux d'élevage, des arbres fruitiers (orangers, citronniers, papayers) et la maison de Tony, superbe. Le premier propriétaire des lieux, un écossais, est enterré sur le domaine qui a ensuite appartenu à un allemand et finalement Tony a racheté le domaine pour le mettre en valeur et en faire une petite merveille.

Nous gardons un souvenir excellent de ces jours passés devant le Yacht club de Tony et poursuivons la découverte de l'île en allant ancrer dans une baie très abritée car beaucoup de vent est annoncé : ce sera Little bay. Nous y restons 3 jours, seuls, bien à l'abri. La petite plage sera pour nous l'endroit idéal pour faire comme les îliens : brûler nos ordures que nous accumulons depuis plusieurs jours. C'est sympa et bien pratique.

Surprise ! Lors de notre découverte du reef en snorkelling (palmes masque tuba), notre 1er requin pointe blanche fidjien vient évoluer près de nous... dommage, l'eau n'est pas très claire , mais Rémi a le temps de le photographier. Il va falloir s'habituer à en voir fréquemment !

Les jours passent, nous sommes dans un rêve, pourtant il nous faut quitter cette île enchantée pour continuer la découverte des Fidji.

Nous naviguons plein ouest vers Ovalau une île importante à l'est de Viti Levu, deuxième grande île des Fidji, où se trouve la capitale Suva.

Ovalau : nous mouillons devant Levuka, l'ancienne capitale, qui a conservé un certain charme des temps anciens :

Il n'y a pas de vent et le mouillage réputé très rouleur est calme. Malheureusement l'usine de conserves de poissons tourne 24h/24 et nous " enivre " de son odeur... Les habitants ici l'appellent " the smell of money " (l'odeur de l'argent) ! Nous vous laissons imaginer...

De là nous remontons vers le nord : c'est l'occasion de passer le Cap Horn... fidjien !

puis nous arrivons à l'île de Makogai, connue dans le temps, comme l'île des lépreux. Aujourd'hui, le gouvernement à qui appartient l'île, y a installé un Centre de Mariculture depuis 2011 : son but, repeupler le reef fidjien avec des clams géants (bénitiers) et des tortues marines. Impressionnant ces clams : ils ont la capacité de filtrer des centaines de litres d'eau par jour. Difficile de les préparer comme les praires farcies !

Nous ancrons dans une magnifique baie et faisons la coutume du " sevusevu " avec Kameli, l'homme le plus âgé du village de Delice. Il nous fait une visite rapide de son village, nous montre l'élevage de tortues marines et de clams géants et surtout, nous confie un livre écrit par Sœur Marie Stella sur l'histoire de la léproserie de Makogai. Nous sommes réellement touchés par l'histoire de cette Léproserie qui de 1911 à 1969 a accueilli plus de 4000 lépreux venant de toutes les îles du Pacifique ouest.

Plus de 2500 patients pourront regagner leurs familles, grâce aux soins des sœurs de la congrégation de Marie.

1241 sont enterrés dans le cimetière de Makogai aux côtés de Mère Marie Agnès, française d'origine. Au dire des patients qui ont été traités ici, l'île de Makogai qui était aussi connue sous le nom de " Devil Island " est devenue " the Happiness Island " grâce aux Soeurs qui ont su faire se côtoyer des dizaines de nationalités différentes.

Nous découvrons les vestiges de quelques maisons de villages des différentes ethnies présentes, de l'ancienne salle de spectacle-cinéma, de la prison, de l'église : ambiance très impressionnante. Des images du livre nous démontrent que la nature a vraiment vite fait de reprendre le dessus.

Aujourd'hui seules quelques cases subsistent et la nature a repris ses droits partout autour du village

Nous allons le dimanche à pied par un petit chemin à travers la forêt , depuis Delice jusqu'au village situé au nord de l'île : Nasau. C'est là qu'habitaient le médecin de la léproserie ainsi que tous les travailleurs aidant les Sœurs aux tâches les plus dures : constructions, entretiens, cultures...

Après 2 jours seuls dans la baie, nous avons la joie de retrouver des bateaux amis que nous avions rencontrés aux Tonga et aux Galapagos ! On finit toujours par se retrouver même si les circuits emprunté sont différents.

De là par étapes nous rejoignons l'archipel des Yasawas à l'ouest des Fidjis.

Arrêt à Nabouwalu sur la côte SW de Vanua Levu pour la nuit, avant de rejoindre l'île de Yaduha, ses réserves marines et sanctuaire des iguanes endémiques des Fidji. L'île est interdite aux plaisanciers, mais nous pouvons ancrer dans une baie plus au nord. En plongée en palmes-masque-tuba nous sommes encore accompagnés d'un beau requin et de très gros poissons.

Nous rejoignons les Yasawas, îles très touristiques des Fidji, à Sawa-i-lau dans un magnifique mouillage au milieu de petites îles creusées de " caves " (grottes sous marines). Là nous rencontrons un bateau ALAMIC, sorte de gulet Turque de 19m en bois de mahogani, avec lequel nous passons tout un après-midi à parler et échanger nos impressions des Fidji. Son propriétaire, Feri, est Turc et navigue depuis 20 ans.

De là nous descendons à Nanuya et le mouillage de Blue Lagoon où nous retrouvons notre ami italien Leopoldo sur son bateau YAYA, un très beau Grand Soleil 46 de 30 ans ! Au mouillage nous sommes 3 AMEL mais nous sommes les plus petits... les deux autres sont un A54 et un A64 : Tulasi, était avec nous sur la zone de carénage à Hyères au moment de notre départ pour le tour du monde.

sur la plage de Blue Lagoon Tulasi - Amel 64, et Belissima - Amel 53 pieds

Avec Yaya nous descendons dans le sud au nord de l'île de Waya pour nous protéger du mauvais temps et de la pluie. Leopoldo et son fils Giovanni viennent déjeuner à bord.

Le mauvais temps passés nous partons pour Lautoka grand port sur l'île de Viti Levu. C'est l'occasion de faire nos courses dans le plus beau et plus grand marché des Fidji.

Coucher de soleil impressionnant sur Lautoka

Malheureusement, à notre retour, nous apprenons par mail le décès de notre amie Marie-Solange voisine de Claix. Nos pensées vont vers son mari Hubert et leurs enfants. Nous gardons un souvenir attachant des fêtes que nous avons partagées ensemble à Claix, à Paris et à Toulouse.

Marie-Solange (à droite) en 2009 à Toulouse

Nous quittons Lautoka dès le lendemain matin car c'est la pleine saison de la canne à sucre, et les vents dominants nous apportent les fumées et cendres collantes de la sucrerie voisine . Belissima n'est pas beau à voir...

Nous partons pour Vuda Point, une marina où nous attendrons quelques jours le moment favorable pour partir vers les Vanuatu (anciennes Nouvelles Hébrides). La marina de Vuda Point est connue des plaisanciers qui souhaitent laisser leur bateau aux Fidji pendant la période cyclonique. Ici les bateaux sont enterrés jusqu'à la coque pour mieux résister aux forts vents éventuels pouvant aller jusqu'à 300 km/h. Heureusement, ce genre d’événement n'arrive pas tous les ans.

Bateaux enterrés à Vuda Point Marina

Les Vanuatu seront notre prochaine étape. D'ici là nous vous souhaitons un bon mois d'août...

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Bilan de notre pêche au gros aux Fidji : 40 kg

- une carangue arc en ciel

- trois dorades coryphènes

- une bonite dos rayé

- un thazard

- un barracuda

- et tous les loupés, lignes cassées, Grrrrrr !

Et un grand merci à Alain cet ami de nos jeunes années en école de voile qui a été inspiré par notre escale à Wallis :

Porté par la houle et le vent, vous voilà donc aux antipodes de notre quotidien,

Egrainant avec extase tels de jeunes " vieux " mariés un chapelet

d'îles au pouvoir " euphorisant " attisant tous les sens !

A vous lire méfiez-vous que nous ne prenions pas Belissima à l'abordage pour se substituer à votre équipage !

A défaut de jouer les pirates continuez à nous ravir de fantastiques découvertes.

Bon vent, le dire c'est un euphémisme, car si l'on en juge par vos appréciations la voilure dans la brise s'apparente davantage à un " string " qu'à " l'oriflamme " qui trône en poupe,

portant haut les couleurs de la France dans ces contrées perdues...