3. Systèmes commandés par réseaux

Systèmes commandés par réseaux

Le troisième domaine de recherche concerne la commande de systèmes communicant avec leur organe de commande par l'intermédiaire d'un réseau de communication numérique. Cette architecture de commande offre en effet de nombreux avantages suivant le type d'application envisagée : répartition de la tâche à accomplir, coopération, contrôle à distance, diagnostic facilité, etc. Parmi les domaines d'application concernés, citons la santé (chirurgie télé-opérée, observation à domicile), les transports (drones, formations de véhicules, équipements automobiles), l'environnement (prédiction et surveillance de désastres par réseaux de capteurs), l'espace (formations de satellites, exploration) et la domotique.

En altérant et raréfiant l'information transitant entre le système et l'organe qui le commande, les réseaux posent toutefois des défis importants pour l'automaticien. En effet, l'une des conséquences de la limitation de la capacité de transfert d'information, liée au caractère numérique des réseaux, est le codage imparfait, sous formes de paquets, des données à envoyer. Celles-ci sont à la fois échantillonnées et quantifiées, ce qui les rend imprécises. Ces phénomènes de discrétisation, propres à tout contrôle de nature numérique, peuvent se trouver grandement amplifiés par l'utilisation d'un réseau de communication suivant l'application considérée. D'autre part, les réseaux utilisés dans les chaînes de mesure pour la commande automatique n'accusent généralement pas réception de l'information transmise: pour la commande temps-réel, toute mesure passée devient très vite obsolète et il serait donc inutile de retransmettre une information qui ne serait pas parvenue à destination. Des pertes de paquets d'information peuvent donc survenir. De plus, lorsqu'un réseau interconnecte différents nœuds (dans le cas de la commande automatique: des capteurs, des actionneurs et des calculateurs) seul l'un d'entre eux peut généralement transmettre son information à un instant donné selon la décision d'un protocole propre au réseau. La connaissance ``instantanée'' que le contrôleur a du système, ainsi que l'action qu'il peut entreprendre par l'intermédiaire des actionneurs pour en modifier le comportement, n'est que partielle et se cantonne à l'information reçue (ou envoyée) à l'instant considéré. Enfin, les réseaux induisent des retards dans la transmission des données. Ceux-ci proviennent du temps de traitement de l'information mais surtout de possibles congestions au sein du réseau et sont donc, en général, de durées variables.

Tous ces phénomènes ont généralement une influence néfaste sur le comportement du système comparativement à une liaison filaire idéale (i.e. analogique). Cette influence ne saurait être négligée dans des applications mettant en jeu un grand nombre de capteurs et d'actionneurs, ou lorsque les nœuds sont physiquement éloignés les uns des autres, ou encore en cas de bande passante particulièrement limitée. Aussi, lorsque la communication entre un système et l'organe qui le commande est effectuée par l'intermédiaire d'un réseau de communication numérique, il convient de développer des lois de commande spécifiquement adaptées et de s'interroger sur les conditions garantissant un fonctionnement acceptable en termes de stabilité, de performances et de robustesse.

La démarche que nous avons entreprise dans ce sens consiste à exploiter la taille relativement grande des paquets transmis afin de compenser les effets induits par le réseau. A chaque envoi d'un paquet de commande, plutôt que la valeur instantanée du signal à appliquer comme dans la commande numérique classique, une prédiction du signal de commande à appliquer est transmise. Ce signal de commande prédictif est élaboré à partir d'un modèle plus ou moins approximatif du système à commander. A la réception par l'actionneur, ce signal est stocké dans une mémoire-tampon et resynchroniser malgré les retards temps-variants grâce à un système d'estampillage des données. Suivant la précision du modèle, cette approche permet de tolérer des retards maximaux (MAD) relativement importants ainsi qu'un temps d'accès entre deux accès au réseau (MATI) significatif. Un compromis analytique entre précision de la modélisation, MATI et MAD garantissant la stabilité de la boucle fermée est donné explicitement [RI.13].

Le problème de la quantification a été abordé séparément. Ce travail consiste à garantir la stabilité et la robustesse de lois de commande exploitant une quantification dynamique des données transmises. Par opposition à la quantification statique qui approxime les données par une valeur fixe arrondie suivant leur valeur réelle, la quantification dynamique autorise une approximation plus fine en faisant évoluer le maillage de l'approximation au cours du temps suivant un algorithme de zoom avant/arrière. Nous avons montré que, sous certaines propriétés d'ISS vis-à-vis d'erreurs de mesures, la boucle fermée après quantification est elle même robuste vis-à-vis d'une certaine classe de signaux exogènes [RI.8].

Les travaux que nous envisageons sur cette thématique sont notamment la prise en compte des aspects intrinsèquement stochastiques des NCS, ainsi que la validation expérimentale des lois de commande développées.