Le balayage scrupuleux, méthodique, de la presse marocaine, travail fastidieux et peu productif, permet de tomber sur quelques pépites, comme cette photographie de 1952 du R.P. Adrien Millan, mais celui qui est le plus identifiable reste le caïd Ali. Cérémonie du 11 novembre 1918 qui se tint où ? Au cimetière français ? Au Monument ? Pas d’indication, mais la remise de la légion d’honneur, se tint en ville, peut-être sur la Place de France.
LA VIGIE MAROCAINE 15 novembre 1952 (Source, gallica.bnf.fr / BnF)(reconnaissance OCR avec corrections manuelles et respect de l’orthographe des noms propres)
Un aumônier militaire, ancien combattant de 14-18 est décoré de la Légion d'honneur à Kasba-Tadla
Au cours de la prise d'armes qui se déroula à Kasba-Tadla, à l'occasion du 11 novembre, le R.P. Adrien Millan, aumônier militaire a été décoré de la Légion d'honneur par le colonel de Dampierre, commandant d'armes de la place.
© Copyleft Q.T. 13 août 2024
LES SAINTS PATRONS des Églises du Maroc, Maroc-Monde (indexé Casa cité sur le site de la BnF), 25 juillet 1953 (Source gallica.bnf.fr / BnF) (reconnaissance OCR avec corrections manuelles et respect de l’orthographe des noms propres)
Monsieur le Directeur,
Votre collaborateur, M. Bilon, n'a sans doute jamais eu l'occasion de lire l'ancien bulletin officiel du Vicariat de Rabat, « Ensemble ». C'est dommage. Il y aurait trouvé la réponse à la préoccupation que manifeste son article sur « St Cassien du Maroc ». Les Missionnaires d'ici ont pensé à donner pour patron à leurs paroisses des saints du pays ou, au moins, comme il le désire, « des saints qui aient des attaches avec la terre marocaine ... » Dès 1922, l'église d'Oued-Zem à été dédiée à Saint Augustin, comme à la plus grande gloire de l’Église d'Afrique. Et dès ce moment, le bâtisseur avait exprimé sa volonté de donner le nom de St Cyprien à la prochaine église qu'il aurait l'occasion de dresser.
Cette occasion s'est présentée deux autres fois, mais chaque fois le titre de son nouveau sanctuaire avait été réservé par ses prédécesseurs, qui avaient donné un patronage à leur baraque-chapelle. L'église de Kasba-Tadla, bâtie en 1923, a pris le titre de « Notre-Dame du Tadla » qui lui était réservé. Et l'église provisoire d'Agadir s'est appelée « Paroisse Ste Croix », héritage de la chapelle militaire.
J'espère qu'il se trouvera parmi les bâtisseurs de demain un prêtre assez ami du passé héroïque de l'Afrique chrétienne pour offrir un sanctuaire à St Cyprien de Carthage, à St Fulgence de Ruspe et à Ste Monique.
L'article d’« Ensemble » auquel je me réfère (Ensemble, 12 janvier 1951) fait remarquer que la plupart des vieilles paroisses de chrétienté sont dédiées à leurs fondateurs, missionnaires de l'époque gallo-romaine ou du haut Moyen-Age. Ces saints, bien qu'étrangers d'origine, « avaient une attache toute particulière » avec leur fondation, puisqu'ils avaient adopté cette terre pour y travailler et y mourir. Or deux églises marocaines sont dédiées à de tels missionnaires : « Les Saints Martyrs de Marrakech », Patrons du Vicariat Apostolique, et la chapelle militaire du même Marrakech, première église paroissiale, dédiée au Bienheureux Jean de Prado, franciscain, martyrisé lui aussi dans la vieille capitale du Moghreb en 1636.
L'article d'« Ensemble » explique pourquoi le Maroc (Maurétanie Tingitane) n'a pas eu le temps d'être évangélisé un peu profondément et par conséquent de produire des saints.
La foi n’y a été portée qu'aux dernières heures de la puissance romaine, quand toutes les frontières de l'Empire cédaient sous la poussée irrésistible du barbare.
Les deux saints martyrs de Tanger, le centurion Marcel et le greffier Cassien, étaient des fonctionnaires militaires, probablement gaulois, envoyés administrativement dans ce pays, arrêtés et mis à mort, en exécution des décrets de persécution contre les chrétiens. Eux aussi appartiennent bien au Maroc où ils ont été conduits par la Providence. Ils ont pris possession de sa terre en l'arrosant de leur sang. Ils ont donc tous les titres à y être choisis pour patrons. Mais il n'appartient pas à un particulier de leur rendre un culte public, ni de donner leur nom à une église. Seule la Congrégation des Rites peut autoriser leur culte. Il faut pour cela que l'autorité diocésaine lui en fasse la demande. La réponse favorable sera accompagnée d'un office pour le bréviaire et d'une messe avec oraison propre. Un jour leur sera aussi assigné pour la célébration de leur fête. Dès ce moment les paroisses en formation pourront leur dédier leurs églises.
P. André DAPZOL o.f.m.
Commentaires : Article qui semble anecdotique tout en apportant beaucoup. Notre Dame du Tadla aurait dû s’appeler Église Saint Cyprien, mais elle hérita du nom de la tente-église où les premiers hommes d’église de Kasba-Tadla, l'abbé de Pitray et R. P. Alfred Ferrières, officièrent ; lequel des deux décida du nom de l’église, Notre Dame du Tadla ?
Le bulletin « Ensemble » existe toujours, on peut consulter les derniers numéros (le plus ancien en ligne étant le numéro 88 de mars 2009 sur le site de l’Archidiocèse de Rabat (https://dioceserabat.org/fr/) ; l’onglet archive de ce site étant en construction ; vous y verrez les heures des messes (fin d’année 2023) à Beni Mellal dont les cordonnées (adresse, téléphone et adresse courriel) de l’Église Saint Paul sont précisées. On y trouve également une page consacrée à Charles de Foucauld et d’autres éléments à fouiller ; on notera également l’existence d’une chaîne YouTube.
o.f.m., après André Dapzol, demeure énigmatique pour moi.
© Copyleft Q.T. 27 janvier 2024
Cinquantième année de sacerdoce du R.P. DAPSOL, Maroc-Monde (indexé Casa cité sur le site de la BnF), 25 juillet 1953 (Source gallica.bnf.fr / BnF) (copie du texte avec corrections manuelles et respect de l’orthographe des noms propres)
On a fêté, dimanche dernier, les noces d’or sacerdotales du R.P. Dapzol.
Prêtre depuis cinquante ans, le R.P. Dapzol sert l’église au Maroc depuis trente-sept ans. C’est à lui que Kasba-Tadla, Oued-Zem et Agadir doivent leurs églises et, à plusieurs reprises, il a bien voulu confier à « Maroc-Monde » ses souvenirs de l’Église dans ce pays.
Ce pionnier de l’Église du Maroc est né dans le midi de la France et appartient à une famille auvergnate. Avant de venir au Maroc, il se trouvait à Verdun comme aumônier d’une division de chasseurs à pied, et c’est en juillet 1916 qu’il débarque à Casablanca.
Mais sa carrière d’aumônier militaire devait se poursuivre pendant de longues années encore, durant toute la pacification du Tadla et du Rif. Très vite, le Père Dapzol est nommé à Kasba-Tadla où il restera jusqu’en 1925, et d’où il doit desservir des garnisons éloignées, comme celle de Khénifra. En 1922 la première église de Oued-Zem est construite, en 1923, celle de Kasba-Tadla.
C’est ensuite avec un bataillon de tirailleurs marocains que le Père Dapzol participera à toute la campagne du Rif, laquelle se prolonge pendant un an et demi. Enfin en 1937, c’est son dernier mois de service comme aumônier militaire, à l’hôpital de Guercif.
Jusqu’à présent prêtre-soldat (il l’a été pendant une quinze années de sa vie) et bâtisseur d’églises, le Père Dapzol va devenir, pour plus de treize ans, curé de l’église Saint-François, à Casablanca. C’est alors qu’il fonde la première troupe de scouts du Maroc. Le Père Dapzol est toujours resté très aimé de ses paroissiens, qui se souviennent de la douceur et de l’indulgence de son regard. En 1940, il est remplacé par le R.P. Février. Pendant un peu plus d’un an il enseignera dans le couvent des Franciscains, à Rabat, en sa qualité de spécialiste biblique.
Pendant huit ans, le Père Dapzol reste ensuite curé d’Agadir et c’est lui qui y fera construire l’église. Enfin, depuis 1949, il est aumônier du Carmel Saint-Joseph de l’Oasis. Après tant d’années de travail et de combat, il vit retiré, à proximité du Carmel, avec ses livres et les souvenirs qui lui sont chers.
« Maroc-Monde » est heureux, avec les catholiques du Maroc, d’exprimer au Père Dapzol sa respectueuse gratitude.
Commentaires : Article qui permet de cerner un peu plus la personnalité du Père Dapzol, semble-t-il très attaché au Maroc – en parlait-il la langue ? – et bâtisseur d’églises dont on sait (voir article de cet onglet) qu’il dressa les plans (Oued-Zem et Kasba-Tadla) et en y investissant sa foi et une partie de sa solde d’aumônier militaire.
© Copyleft Q.T. 21 janvier 2024
MAROC-MONDE ou CASA-CITÉ du 26 janvier 1952, (Source gallica.bnf.fr / BnF) (reconnaissance OCR avec corrections manuelles - nombreuses erreurs typographiques -, respect de l'orthographe des noms propres)
À TRAVERS LE DOYENNÉ RURAL SAINT-AUGUSTIN
OUED-ZEM ... juillet 1916
À ce moment la ville n'était qu'un point d'eau. C'était l'avant-dernière étape sur la route de Kasbah-Tadla qui était le centre de la subdivision militaire. La dernière étape avant l'arrivée était Boujad.
C'était un coin de bled désolé comme presque tout le Maroc d'alors. Pas un arbre à perte de vue et pendant six mois de l'année, pas une touffe d'herbe à l'horizon. Ce coin ne devait la petite vie factice qu'on y constatait qu'à la présence de sa source, celle de l'oued Zem. Quinze mètres au dessous du jaillissement de la source on avait élevé une murette pour retenir l'eau. On avait ainsi créé une petite mare où les troupiers remplissaient leurs bidons et où s'abreuvaient les brèles [mulet en argot militaire, note de Q.T.] et les chameaux.
Mais naturellement ce breuvage paraissait un peu insipide aux passants pécunieux. Les Grecs avaient pourvu à ce soin, ils avaient déjà dressé deux baraques en bois où on trouvait à boire et à manger. Ces deux baraques couvertes en tôle furent les deux premières habitations de l'Oued-Zem actuel.
A trois cent mètres de là, à l'Est, sur la hauteur en direction de Boujad, l'armée avait installé des services : le bureau des A.I., le Trésor et Poste, le parc de l'Intendance, Subsistances militaires et campement, un hôpital de campagne, un parc d'artillerie et quelques logements pour le personnel de service et pour les passants. Tout cela était en bois, en vastes baraques coloniales. Les baraques Adrian n'étaient pas encore en vogue si déjà elles existaient. Seul, comme il convient, le bureau des A.I. était construit en maçonnerie.
On était en pleine guerre. Il n'y avait de civils à Oued-Zem que les deux tenanciers grecs des auberges-bistrots. On ne pouvait donc parler encore de paroisse. Mais les militaires employés dans les services du camp formaient une assez belle clientèle pour l'aumônier de la Subdivision, seul prêtre de la région naturellement. Quand il pouvait venir de Kasbah-Tadla, on mettait à sa disposition un local assez spacieux de la baraque centrale. Mais il ne pouvait venir qu'assez rarement. Songez que la route de Casablanca s'arrêtait alors à Ben-Ahmed, ainsi que la voie de 60 [voie ferrée, note de Q.T.]. La piste était coupée à Boujad où l'autorité militaire faisait commencer le bled siba. On ne pouvait donc parcourir la première partie du chemin Kasbah-Tadla - Boujad que sous la protection d'une escorte. Il fallait partir par conséquent les jours de liaison. La plus grande partie des troupes était concentrée à Kasbah-Tadla autour du général et de l'État-major. Il y avait là constamment environ 4 000 hommes parmi lesquels de douze cents à quinze cents chrétiens parmi les cadres, les services, les corps purement français comme l'artillerie et le génie, quelques éléments de la Légion étrangère. Le bon sens imposait à l'aumônier de consacrer son principal effort à cette paroisse importante, sinon très pieuse ... Et puis, l'aumônier était souvent en colonne et devait encore visiter les postes les plus proches de son centre surtout quand ils avaient des unités européennes.
En 1916, j'avais été précédé dans le Tadla par deux aumôniers, l'abbé de Pitray, petit neveu de la comtesse de Ségur, qu'on disait le héros d'« Un Bon petit diable ». Il fut envoyé à Tadla, au commencement de 1914 et en partit avec la troupe, à la mobilisation d'août. Je l'ai rencontré à la ferme des Voques en septembre 1915, au moment de la grande offensive de Champagne. Et c'est par lui que j'ai entendu prononcer, pour la première fois le nom de Tadla où rien ne pouvait faire prévoir que je serais envoyé un jour. Ce premier aumônier n'avait laissé aucun souvenir à Oued-Zem.
A son départ pour le front en 1914, l'abbé de Pitray fut remplacé par le Père Alfred Ferrière, qui, arrivé depuis un an au Maroc, avait été affecté à la chapelle française du boulevard d'Anfa, à Casablanca où, en quelques mois, il avait fondé une foule d'œuvres sous l'œil effaré du vieux père Urbain de Megrou, le premier supérieur de la Mission française.
Il avait d'abord créé une publication mensuelle, « L'Étoile Marocaine », puis fondé un cercle militaire, dressé un théâtre où jouaient les soldats et où se réunissaient les premiers groupements paroissiaux.
Naturellement, ce grand remuant reprit son activité à Kasbah-Tadla. Il avait aménagé une jolie chapelle dans le Parc du Génie, à la Kasbah et il avait fondé un groupe d'amitié militaire.
Faute d'un local pour recevoir les hommes, il avait séparé par un rideau le chœur du reste de la chapelle. Il avait installé de grandes tables sur tréteaux dans la partie laïcisée de son église et c'est là qu'il recevait les soldats.
Le Père n'avait pas négligé Oued-Zem. Il avait installé un autel permanent dans le local-chapelle et il profitait de toutes les occasions pour venir visiter son groupe chrétien du poste.
En juin 1916, alors que le groupe mobile, sur les ordres du général Garnier-Duplessis, campait devant Beni-Mellal, le Père tomba gravement malade et dut être évacué d'abord à Oued-Zem, puis à Casablanca.
Il n'avait pu reprendre son service, quand en juillet 1916 j'ai débarqué à Casablanca, venant du front de France. J'avais quitté ma belle division de chasseurs au moment où un ordre du maréchal Joffre la jetait dans l'enfer de Verdun. Je l'avais beaucoup regretté et j'éprouvais un pénible sentiment de honte d'avoir l'air de fuir le danger où marchaient tant d'amis.
Heureusement, j'avais la conscience tranquille. Non seulement je n'avais jamais pensé au Maroc, mais j'ignorais totalement comment mon nom avait pu être donné au ministre de la Guerre. Je pensais d'ailleurs que mon séjour dans ce pays ne dépasserait pas la durée de la guerre. Voilà 35 ans que se passait ce maigre événement et je suis toujours là.
Quelques jours après mon débarquement, je fus envoyé au Tadla où je devais rester 9 ans et demi. Jusqu'à l'armistice de 1918, je continuais ce qu'avait fait mon prédécesseur. Dans l'intervalle des colonnes je donnais les deux tiers de mon temps à Kasbah-Tadla et un tiers à Oued-Zem.
La fin de 1918 et l'année 1919 marquèrent une date à Oued-Zem. À la démobilisation, plusieurs réservistes et territoriaux se firent libérer sur place et formèrent le premier contingent de civils qui s'installèrent dans le pays. Quand ils purent se loger, ils firent venir leur famille et ainsi la paroisse commença.
Un événement très important en précipita le recrutement. En entaillant le rebord du plateau qui forme, au nord, la cuvette d'Oued Zem, on découvrit les phosphates. On s'assura tout de suite que le gisement découvert n'était pas une simple poche en ouvrant sous le plateau quatre galeries de prospection. Le précieux minerai était partout à faible profondeur, en couche uniforme et d'une très riche teneur.
Alors la Résidence lança un appel aux colons pour venir s'installer à Oued-Zem. On leur promit de les aider et dans l'enthousiasme du moment l'Administration traça un magnifique plan de la cité future dans la coulée de rochers qui est à l'Est de la bourgade actuelle. Les colons accoururent. On ne parlait partout que des « phosphates d'Oued-Zem ».
Puis tout d'un coup, silence du côté de Rabat. On renia toutes les promesses de secours qu'on avait faites et on défendit même d'appeler le gisement : phosphates d'Oued-Zem.
Plusieurs des nouveaux venus, ceux qui ne comptaient que sur le soutien officiel, s'en allèrent. Les colons courageux restèrent.
Pour eux, pour leurs femmes et leurs enfants, il fallait faire quelque chose. J'obtins alors, dès 1919, pour y ouvrir la première chapelle, l'octroi d'une baraque, petite, mais confortable, qu'on monta près de l'étang, désormais aménagé, et qu'on commençait à appeler pompeusement « le lac d'Oued-Zem ». Cette chapelle fut baptisée, par l'officier qui l'avait offerte : « Saint-Saturnin », parce que le calendrier portait le nom de ce Saint Évêque de Toulouse, le jour où la baraque fut installée. Il va sans dire que ce nom ne fut pas retenu.
Mais pendant deux ans, ce fut dans cette baraque, ou devant sa porte. que les premiers fidèles d'Oued-Zem assistèrent à la messe. Ce fut là que furent administrés les premiers baptêmes et bénis les premiers mariages.
Je venais désormais de Kasbah-Tadla tous les 15 jours. Pendant presque toute l'année 1919, où j'étais souvent en colonne, la messe fut assurée tous les dimanches par un prêtre soldat.
Quand la guerre fût finie en Europe, le général Lyautey (il ne fut nommé maréchal qu'en 1921), qui tenait à accomplir dans la paix son œuvre de restauration du Maroc, donna l'ordre de hâter la pacification sur toutes les frontières de l'Empire. Avec les Zaians, cette pacification ne pouvait se faire sans emploi de la force.
Il fallut donc étoffer le groupe mobile du Tadla et créer de nouvelles garnisons. Oued-Zem reçu à ce moment un bataillon de Sénégalais, deux batteries d'artillerie coloniale, une compagnie du Train et la portion centrale du 2e Bataillon d'Afrique. L'hôpital militaire fut mis dans des murs et son importance fut doublée. Les cadres français de ces diverses unités doublèrent aussi la paroisse et l'enrichirent d'un élément de haute valeur.
Il fallait absolument une église pour accueillir cette belle population chrétienne. C'est alors que se précisa le projet de construction de Saint-Augustin.
La période des projets est toujours très riante. Il n'y a qu'à laisser trotter l'imagination. Elle évoque les plus beaux monuments gothiques, elle emplit vos rêveries de lignes harmonieuses, d'ogives aériennes, de chapiteaux délicatement fouillés. Mais quand vient l'heure de l'exécution, il faut bien se colleter avec la prosaïque réalité.
À Oued-Zem, cette réalité s'avéra spécialement décourageante dès la première heure, à raison du tempérament du curé et de l'état d'âme des paroissiens. Le pasteur, bien qu'appartenant à un Ordre mendiant, avait une frayeur maladive de tendre la main. Et ses fidèles, déshabitués de donner par l'administration providence, vous répondaient tous « Ce n'est pas à vous ni à nous de faire cela, c'est au gouvernement. Quoi, on bâtit des mosquées aux indigènes avec l'argent des contribuables français et on n'aiderait pas les chrétiens à bâtir leur église ! ».
Néanmoins, quand les meilleurs des fidèles virent leur pauvre curé prêt à flancher, ils se mirent à lui prodiguer encouragements et promesses : « Allez de l'avant, mon Père, on vous aidera. Quand les gens verront les murs sortir de terre, ils ouvriront leurs porte-monnaies. Quel colon pourrait vous refuser le transport d'un tombereau de sable ou la charité de deux sacs de chaux ? »
Comme je n'avais encore jamais entendu cette belle chanson, je m'en laissais émouvoir et ma décision fut prise.
Mais au moment de commencer, une dernière tempête fut déchaînée par l'Administration. On me fit appeler au bureau des A.I. et on me demanda où je comptais édifier mon église. Je répondis : « Mais, sur le terrain même que vous m'avez concédé pour cela, au milieu du bourg existant ». On me notifia alors la volonté formelle de Rabat. Je devais bâtir mon église à l'endroit qui lui avait été assigné sur le plan de la cité future, à un kilomètre des habitations. Je répondis vivement : « Mais ce projet, vous l'avez abandonné vous-même et vous avez laissé les
pauvres gens bâtir eux-mêmes leurs maisons sur la route de Casablanca et autour du petit lac. Pensez-vous qu'ils vont abandonner ces demeures pour en construire d'autres autour de l'église ? » L'honnête capitaine de Franclieu, chef du bureau, qui sentait l'absurdité et l'odieux de la décision qu'il me signifiait, n'insista pas. Mais ses adjoints me firent répéter que puisque j'agissais à ma tête, je n'attendrais aucun secours officiel. C'est ainsi que l'administration se dégagea des vagues promesses qu'elle m'avait faites.
On se mit à l'œuvre.
Depuis deux ans, je mettais de côté la plus grosse partie de ma solde en prévision de cette heure. J'avais aussi demandé secours à mes meilleurs amis militaires. Et, enfin, en dernier lieu, je m'étais forcé à faire la visite des paroissiens. J'avais ainsi réuni 37 000 francs, ce qui était une somme en 1922.
C'était néanmoins insuffisant pour payer un architecte et un entrepreneur. On s'en passa. J'allais chercher au fond de ma mémoire les notions élémentaires de dessin géométrique que m'avaient appris les Frères quand j'avais 12 ans. Je pus, avec cela exécuter un croquis côté, que mon maçon européen déclara suffisant.
Pendant qu'on creusait les fondations, je partis à la caserne du Train pour toucher les trois arabas [charrette tirée par des chevaux ou de bœufs, note de Q.T.] qu'on m'avait promis pour porter les pierres. En me voyant arriver l'officier s'éclipsa et l'adjudant me dit qu'il n'avait aucun ordre pour me livrer ces véhicules. J'insistais tellement que ce sous-officier se décida à faire atteler deux arabas. Je les conduisis moi-même à la carrière où mes tringlots [soldat d'un régiment du train, note de Q.T.] marocains refusèrent de charger les pierres, malgré ma promesse d'un fabor [darija, « arabisation de faveur », synonyme de bakchich pour certain.e.s, note de Q.T.]. J'exécutais moi-même la corvée et portais ces premiers matériaux sur mon chantier.
Le lendemain, le lieutenant du Train à qui j'avais rappelé ses engagements, envoya ces deux mêmes arabas. Mais les conducteurs ne me voyant pas, allèrent se cacher derrière une maison abandonnée. Je les découvris au bout d'une heure. Comme il faisait très chaud, ils avaient solidement calé leur araba et s'étaient couchés dessous pour dormir à l'ombre.
J'interrompis brusquement leurs sieste à coups de canne et on partit en grognant pour la carrière. On devine quel rendement pouvait donner un travail exécuté avec cet entrain. Je rendis sa parole au lieutenant du Train et on paya un transporteur.
Heureusement le maître maçon qui dirigeait la construction était compétent et consciencieux. La bâtisse s'élevait dans de bonnes conditions. Mais quand les murs avaient atteint 3 mètres, je dus partir en colonne. J'allais passer cinq mois et demi en dehors. J'arrêtais les travaux.
J'étais parti depuis une semaine, quand je reçus, en colonne, la lettre d'un employé des Affaires Indigènes me suppliant de faire reprendre les travaux qu'il s'offrait à surveiller gratuitement. Cette lettre était accompagnée d'un billet du capitaine des A.I. me garantissant la compétence et l'honnêteté du candidat. Devant cette assurance je redonnais l'ordre de reprendre les travaux.
Hélas, en signant cette décision, je soumettais mon œuvre à la plus redoutable épreuve qu'elle ait subi. Au bout de quelques jours la construction était complètement abandonnée, les échafaudages, prêtés par le service des Transmissions, étaient démontés, sciés et volés. Tout mon argent, déposé au bureau des A.I. était enlevé par petits paquets à l'aide de faux bons signés par mon prétendu surveillant. Et pendant ce temps, je recevais des lettres me décrivant l'avancement des travaux, la pose de la charpente et du toit.
Quand je rentrai, au bout de cinq mois et demi, pour inaugurer mon église, je trouvais mes murs à la hauteur où je les avais laissés mais tout ravinés par la pluie et je voyais traîner dans les rues de Oued-Zem les derniers débris des échafaudages.
Au récit de la catastrophe, mon supérieur me donna l'ordre de tout abandonner. Mais je me raidis au contraire. Je fis reprendre les travaux rien qu'avec ma solde et le prix de ma pension. Je ne paraissais presque plus à ma popote, d'excellents amis me recevaient presque chaque jour à leur table.
On travaillait 15 à 20 jours, selon les ressources, et on s'arrêtait jusqu'à la solde suivante. C'est dans cette misère que s'est achevée l'église paroissiale de Oued-Zem.
À l'inauguration. elle n'avait ni portes, ni fenêtres et les enduits intérieurs étaient à peine secs.
Je n'ai pu faire exécuter les enduits intérieurs avant mon départ subit d'Oued-Zem en janvier 1925. Il avait fallu, pendant les deux ans qui suivirent l'inauguration, achever de payer les dettes et construire la chapelle de Kasbah-Tadla.
C'est mon successeur, le Père Yves Blanchard, qui, poussé par le contrôleur civil M. Croix-Marie, fit bâtir le clocher.
Avant d'édifier ce complément de toute église catholique, M. Croix-Marie me demanda si j'avais conçu un projet de clocher. J'avais, en effet, pensé à doter mon église d'un clocher qui aurait rappelé celui de beaucoup de nos églises rurales de France. Je pensais le placer au milieu de la façade et le faire reposer sur quatre forts piliers réunis par une voûte formant porche qui aurait épousé la forme et la dimension de la grande porte. Ce porche aurait préservé la porte de la brûlure du soleil et la construction aurait préservé la façade.
J'ai envoyé ces explications avec un dessin à M. Croix-Marie. qui m'a remercié et fait exécuter un autre projet.
Il faudrait ajouter à ces détails l'histoire de la cloche qui est assez piquante. Mais ce travail est déjà trop long. Je tâcherai d'écrire cela plus tard.
Kasbah-Tadla resta beaucoup plus tard que Oued-Zem une cité purement militaire.
Mais quand la paix revenue en Europe, on autorisa les officiers et sous-officiers à faire venir leur famille, le poste changea complètement d'aspect. Il fallu bâtir pour recevoir les nouveaux venus.
Les familles attirèrent les commerçants et les artisans européens. Tadla devint à son tour une région civile. Il fallut songer à abandonner la baraque Adrian de la kasbah. La grande entrée de la forteresse était gardée nuit et jour par des Légionnaires ou des Tirailleurs en armes.
Ce n'était guère invitatoire pour les petites files qui allaient au catéchisme. En 1923, avant d'avoir fini de payer Oued-Zem, il fallu s'atteler à la chapelle de Tadla. Je n'en ai pu faire que la nef. Mais j'ai amorcé le transept et dessiné le chœur sur le sol pour qu'on achève fidèlement mon projet.
Il faudrait maintenant parler de l'église spirituelle. Elle débordait largement le doyenné actuel. Je visitais régulièrement Beni Mellal et Boujad.
J'ai aussi inauguré le culte aux Phosphates. La première a été ouverte à Boujniba. C'est là aussi qu'a été dite la première messe. Mais ensuite l'exploitation a été portée à Khouribga, (coin de bled qui n'avait pas de nom jusque là). La première chapelle a été le magasin à outils. Mais les jours de fête, on célébrait en plein air. J'ai présidé là, à d'innombrables communions solennelles. Je faisais porter par la mine, de Kasbah-Tadla, la statue de la Vierge et l'harmonium. On chargeait au passage l'organiste à Boujad. C'était un secrétaire d'État-major, clerc lazariste de son état.
André DAPZOL
MAROC-MONDE, dans son numéro du 27 octobre dernier, ayant longuement présenté Beni-Mellal, le Père Curé ne veut aujourd'hui parler de sa vaste paroisse que parce qu'elle a sa place parmi les sept paroisses qui forment le Doyenné de Oued-Zem.
C'est en 1916 que la première messe a été célébrée par le père Dapzol, aumônier militaire, aux abords de la petite ville, près de la route actuelle de Kasbah-Tadla.
Il remplaçait lui-même le Père Ferrière qui, gravement malade, avait dû être transporté en ambulance - hippo, à Casablanca.
Après la prise de la ville, en septembre 1916, par le général Aubert, le camp militaire s'installa à droite de la ville, au Sud-Ouest. C'est là que sous une tente, tant que fut maintenue à Beni-Mellal la garnison européenne, le premier autel fut dressé.
Plus tard, quand il n'y eut plus qu'un Goum, les premiers Européens venus se fixer dans le pays, allaient entendre la messe au poste des A.I.
Jusqu'à la fondation de la Paroisse, Beni-Mellal dépendra de Kasba-Tadla, au point de vue religieux.
Le 3 décembre 1950, le Père Henry Pineau, premier curé nommé, célébrait la première messe paroissiale dans la maison de la famille Doerfler, qui depuis 15 ans servait de lieu qu culte.
Dix moins plus tard, Monseigneur Lefèvre, Vicaire Apostolique du Maroc, inaugurait la chapelle provisoire, qui se dresse, majestueuse, en pleine campagne, dans un angle du terrain de 5 000 mètres carrés, offert généreusement par deux familles, pour la future cité paroissiale.
« ... Je vous préviens, je vous envoie en fondation, vous n'avez rien ... rien ... ni chapelle, ni église, ni presbytère ... tout est à réaliser. Mais je vous donne toute mon affection et ma bénédiction ... » disait Monseigneur Lefèvre au Père Pineau qui venait d'accepter cette charge, après avoir visité ce vaste secteur.
« Monseigneur qui est Normand ... parle comme un Normand », pensait tout bas le nouveau curé « car, tout de même Monseigneur me donne bien quelque chose, il est même généreux dans ses ... dons. Trois gros centres sur les bras : Beni-Mellal, Afourer, Bin-el-Ouidane ... Une paroisse de plus de 70 kilomètres de longueur, avec, en son milieu, le Moyen-Atlas et ses 263 virages à avaler chaque dimanche pour porter Dieu à une population de 3 à 4 000 âmes. »
Quittant l'Aumônerie Militaire, le nouveau curé ne fut pas un instant dépaysé dans sa paroisse. Il y retrouvait un peu la structure militaire.
Si la population de Beni-Mellal est surtout formée de colons et d'industriels, celle des barrages d'Afourer et de Bin-el-Ouidane a tout de la hiérarchie militaire : directeurs, ingénieurs, polytechniciens, puis chefs de services et de chantiers, et les ouvriers et manœuvres.
Si Monseigneur ne donnait ni église, ni presbytère à ce premier curé, il lui offrait quand même une grande famille, où il trouva, dès la première heure, une vibrante sympathie, un vrai courant de générosité et de réels dévouements, en même temps qu'un esprit chrétien profond dont il fut tout surpris. Y a-t-il beaucoup d'églises du bled, où l'on trouve à la messe d'un dimanche ordinaire, 17 hommes agenouillés à la Table de Communion ? En un an, c'est un Pain eucharistique de 1 200 hosties, qui a nourri cette jeune église.
Belle et bonne chrétienté actuellement, Beni-Mellal selon les pronostics humains, doit être une paroisse d'avenir, car si la population des barrages ira en diminuant, selon l'avance des travaux, la ville future de Beni-Mellal, dont le plan est imposant, ne manquera pas de se développer lorsque les eaux des barrages viendront en fertiliser la plaine.
À ce moment-là, nous en reparlerons ... Pour le présent, modeste, ayant tout juste un an, la paroisse de Beni-Mellal, à l'exemple de son Saint Patron : Saint Paul, n'aspire qu'à pousser profondément ses racines dans le Christ, afin de contribuer, chaque jour un peu plus, à l'extension de son règne, et de porter comme l'Apôtre des Gentils, son nom à tous ceux qui ne Le connaissent pas où ne Le connaissent plus.
H.P. [Henry Pineau, probablement, note de Q.T.]
N.B. Horaire des messes du dimanche : 7 h 30 : Bin-el-Ouidane ; 9 h 30 : Afourer ; 11h : Beni-Mellal.
AVANT à faire l'historique de la paroisse je commencerai (après avoir consulté les anciens) par faire savoir que le premier prêtre de sainte mémoire pour le Tadla fut l'abbé de Pitray, prêtre séculier militaire et petit-neveu de Mme la Comtesse de Ségur, lui-même auteur d'un livre encore en vogue, intitulé « Un bon petit Diable ». Il exerça son ministère auprès des militaires de Tadla au début de 1914.
Après lui vient le R. P. Alfred Ferrières, Franciscain, qui dessert le poste comme son prédécesseur, sous la tente, de 1915 à 1916, au milieu des soldats. Ce Père partit ensuite de Kasba-Tadla pour Casablanca où il devait fonder la première église Notre-Dame de Lourdes, rue de Reims, dont l'inauguration eut lieu le 15 août 1917, et qui fut prêchée par le R. P. André Dapzol, qui avait pris sa succession ici à Tadla.
Comme nous venons de le dire le troisième prêtre envoyé ici fut le R. P. André Dapzol. Il prend possession de ce poste le 15 juillet 1916 et demeura à Tadla jusqu'en fin janvier 1925. Pendant ces neuf années, il eut un ministère fort chargé surtout à cause des déplacements très difficiles et des colonnes qui lui prenaient parfois plusieurs mois, au cours desquels il baroudait avec les hommes, les officiers dans le bled et dans la montagne, jusqu'à Ksiba toujours insoumis, et Kebbab où se trouvait alors le commandant Guennour de Tizi-Ouzou. Quant à Tadla, le R. P. André Dapzol encore logé à la Kasba, s'occupe activement, avec le concours des militaires de la place, d'édifier un sanctuaire en l'honneur de Notre-Dame du Tadla qui subsiste toujours et comprend seulement la nef actuelle de notre trop petite église d'aujourd'hui. C'était en 1923. Par ailleurs le R. P. André Dapzol officiait aussi en d'autres postes.
À Beni-Mellal à partir de décembre 1916, chaque mois environ, ainsi qu'à Boujad où stationnaient alors deux bataillons, à Oued-Zem aussi, mais le dimanche en alternant avec Tadla, la troupe seule s'y trouvait en ce temps. Enfin à Ben-Ahmed, où il y avait les ateliers de réparation des machines de la voie de 60. C'était en 1919 sous le contrôle de M. Croix-Marie. Les civils faisaient leur apparition et c'est ainsi qu'en 1920 le R. P. Dapzol eut la joie de faire faire la Communion Solennelle à 13 enfants au cours d'une messe en plein air, car c'était le début, et les constructions étaient trop étroites pour y recevoir une assistance nombreuse.
Après le départ du R. P. André Dapzol, en fin janvier 1925, ce fut le R. P. Yves Blanchard, un Orléanais, qui fut désigné pour tenir ce poste en qualité d'aumônier militaire, il dessert les mêmes postes que son prédécesseur jusqu'à Kenifra, ce dernier poste étant passé sous la juridiction de Meknès en 1928.
À Tadla, le R. P. Yves Blanchard laissa un souvenir par la construction du presbytère actuel contigu à l'église, qui, on s'en souvient, s'arrêtait à la nef actuelle. De plus, deux autres dépendances pour sa moto et la prise d'eau sont de son temps.
Les civils suivant les troupes s'établissaient à Tadla, d'abord les Grecs, puis les Européens. En face de l'église on voyait l'école européenne. Les troupes étaient nombreuses. Au camp Nord surtout : Légionnaires, tirailleurs et aviation s'y rencontraient. Tandis que sur la rive gauche de l'Oum-er-Rebia, au camp Sud, se trouvait l'artillerie, face au bled Ksiba, zone d'insécurité. On était en 1931-1932, sous les ordres du général de Loustal, avec le capitaine Guillaume, bientôt nommé commandant et chef d'état-major, aujourd'hui Résident Général de la France au Maroc.
Au R. P. Yves Blanchard, fin 1934, succède le R. P. Laurent Philippe, qui devait administrer la paroisse jusqu'au début de 1941. Pendant ce temps ce nouveau Père vit bon nombre de familles européennes, qui s'installèrent soit en ville, soit autour, le long des routes allant vers Beni-Mellal ou vers Ksiba, c'est alors que la culture commença à l'européenne.
Aumônier militaire comme ses prédécesseurs, le R. P. Laurent voyageait beaucoup, étant seul prêtre pour toute la région s'étendant d'Azilal à Dar-Oul-Zidou jusqu'à Kenifra (revenu au poste de Tadla) et jusqu'aux lacs avec Tit-Mellil et Arbala.
C'est durant ce temps, en 1936, que fut élevé le Monument du Souvenir de la Pacification, rappelant aujourd'hui encore que le groupe mobile du Tadla fut dissous le 1er octobre 1933 après avoir pris pendant plus de 20 ans une part glorieuse à la pacification du Maroc et livré 77 combats classés dont les noms sont gravés sur le monument avec les noms des officiers supérieurs qui les dirigeaient. Pour mémoire, il est bon de rappeler le commandant Mangin, qui fit faire les premiers combats pour Kasba-Tadla, Beni-Mellal et Kasba-Zidania, de 1912 à 1913. La prise de Kenifra et de Beni-Mellal, de 1914 à 1916, par le général Garnier-Duplessis. Les combats de Zaouia-ech-Cheikh, Takebalth, Ouaoumana et l'affaire de Ghorm-el-Alem, par le général Théveney de 1917 à 1921. Le combat de Tizi-R'Nim et la prise de Ouaouizerth par le commandant Freydenberg, de 1921 à 1922 ; et enfin le combat du Plateau des Lacs et l'occupation des points stratégiques les plus importants du Moyen-Atlas par les troupes du général de Loustal, de 1929 à 1933. Au cours de ces opérations on a dénombré 4 347 braves qui ont versé leur sang et qui sont morts pour la pacification de la région du Tadla ; tant parmi les officiers, sous-officiers, hommes de troupe que partisans. Ils sont tombés glorieusement de 1912 à 1933 et ce monument élevé à la gloire des quatre colonnes rayonnant autour de Kasba-Tadla en rappelle le souvenir.
Néanmoins, malgré ses nombreux déplacements le R. P. Laurent fut aussi un constructeur, il achève l'église commencée par le R. P. André Dapzol en lui donnant un chœur et un transept, en maçonnerie extra sous lesquels il sut aménager une crypte à l'usage des œuvres et des catéchismes. Pour atténuer l'ardeur du soleil d'été ce Père construisit lui-même une véranda spacieuse devant le presbytère, tandis que du côté opposé à l'église, il entretenait son jardin potager, le tout entouré d'un petit mur. Le bled de Kasba-Tadla s'organisait ainsi que son église.
Après le R. P. Laurent, la paroisse fut durant six mois desservie simultanément par deux prêtres militaires de passage : MM. l'Abbé Rallet et Jeanblanc, qui, durant ce temps n'épargnaient pas leur peine pour suppléer à l'impuissance d'apostolat, suivi du Vicaire Économe nommé, le R. P. Adrien - M. Milan, curé de Khouribga. Cet état de choses dura de janvier 1941 à fin août.
Début septembre, fut désigné pour cette paroisse le R. P. Emmanuel Prévot qui, durant son séjour de trois ans, jusqu'en novembre 1944, tout en diminuant les sorties (n'ayant pas de voiture), concentra son action sur place et à Beni-Mellal. Très actif, il travaillait beaucoup en son presbytère qu'il avait su aménager et adapter au mieux pour l'utilité de ses successeurs. Malgré sa santé souvent ébranlée, il n'en continuait pas moins ses visites à ses paroissiens dont plusieurs familles en conservent encore le souvenir reconnaissant
Après le R. P. Emmanuel Prévot, le 4 novembre 1944, le R. P. Adrien - M.Millan fut désigné par Monseigneur Vielle pour venir à Kasba-Tadla en remplacement du R. P. Emmanuel, nommé curé à Khouribga.
Ce Père, tout d'abord en utilisant les cars reprend les visites du bled de Beni-Mellal, Boujad et Ksiba, jusqu'en 1945 où il commença à se rendre au nouveau barrage en construction à Bin-el-Ouidane. N'ayant pas de voiture, il se faisait prendre par un véhicule d'occasion et ainsi, vaille que vaille, arriva à desservir jusqu'à 10 postes en 1950, parmi lesquels Beni-Mellal, Afourer, Talaat, Ait-Ouarda, Bin-el-Ouidane, Oauouizart, Tillouguit (au pied du Grand-Atlas), Ksiba, Zaouïa-ech-Cheikh et Tadla. Il en fut ainsi jusqu'au 1er novembre 1950, quand Monseigneur Lefèvre pour rendre son ministère plus efficace, détacha Beni-Mellal et le barrage en y mettant un prêtre ayant le titre de curé de Beni-Mellal. Depuis cette date la paroisse de Tadla se ramène à quatre postes : Ksiba, Zaouia-ech-Cheikh, Kasba-Zidania et Tadla. Ainsi le ministère y est plus fréquent et le Père Curé étant Aumônier militaire de la place, peut aussi plus facilement se dévouer auprès des hommes stationnés dans les deux camps (Nord et Sud). En outre, Tadla ayant été doté d'un internat réputé, chaque année voit s'augmenter le nombre des élèves du catéchisme, qui en 1951 bat tous les records pour ce petit poste, avec 100 enfants venant de Tadla et de ses environs jusqu'à Khouribga, le barrage et Ouaouizert.
Depuis son arrivée en ce poste, le R. P. Adrien a aménagé et orné son église : de fonts baptismaux, d'une voûte, d'un granito au Chœur, de deux nouveaux autels, d'un local pour enfants et d'une petite bibliothèque qui commence à fonctionner conjointement avec un petit magasin de piété. Actuellement, il fait ouvrir la crypte à une extrémité pour y aménager une salle de cinéma et doit agrandir la véranda du presbytère pour en faire un préau couvert et cimenté permettant de l'utiliser comme lieu de réunion, soit pour les enfants les jours de pluie, soit pour les fêtes ou kermesses.
Quant aux mouvement d'enfants, Cœurs Vaillants et Âmes Vaillantes, ils sont tous deux remplacés par un petit patronage pour les enfants du Tadla : les internes ayant un autre emploi du temps, et les plus grands étant presque tous dans les grandes villes pour y poursuivre leurs études ou travailler. En outre, la paroisse possède les deux groupements d'Action Catholique : l'Union Paroissiale pour les hommes et la Ligue Féminine. L'un et l'autre comptent un certain nombre d'adhérents que nous espérons voir grandir encore en 1952, grâce au nouveau choix des responsables qui se spécialisent particulièrement dans une activité utile à la paroisse, chacun selon ses aptitudes et ses goûts.
Après tout ce qui a été dit sur la paroisse : nous l'avons vu naître en 1914 avec l'Abbé de Pitray, l'auteur de « Un bon petit Diable », et à travers bien des combats durant l'époque héroïque de 1916 à 1933, se former en voyant grandir successivement son église, son presbytère et ses salles d'œuvres, jusqu'à devenir le sanctuaire actuel aux couleurs du Rosaire, dominé par Marie-Immaculée, pour nous toujours, Notre-Dame du Tadla, Patronne de la paroisse depuis 1918.
TESTIS.
Commentaires :
- récit d'André Dapzol : Des précisions rigoureuses par un acteur de premier plan. La construction de l'église de Tadla dans sa première version, la nef qu'on peut appeler chapelle, remonte à 1923. On constate à Kasba-Tadla, comme à Oued-Zem, l'utilisation, dès l'établissement des camps militaires, de tentes, puis de baraques pour y célébrer des messes, avec un autel. On sait que les B.M.C. (bordel militaire de campagne) accompagnaient les colonnes, les aumôniers également, un esprit sain(t) dans un corps vigoureux.
- Henry Pineau anticipe le développement de Beni Mellal, un Beni Mellal très chrétien ... loin de l'actuel ; pourtant en 1951/52, des signaux plus que faibles pointaient, annonçant la fin du protectorat, au minimum des temps nouveaux différents de ceux qui existaient.
- récit de TESTIS : De nouvelles précisions ainsi que la liste des Pères nommés à Kasba-Tadla de 1914 à 1952, même si l'attribution par deux fois de l'écriture de « Un bon petit Diable » à l'abbé de Pitray jette un doute sur le récit de TESTIS. On apprend ainsi que le chœur et le transept, « dessinés » par A. DAPZOL édificateur de la première chapelle, furent édifiés entre fin 1934 et début 1941 (l'intervalle de recherche se restreint), mais rien n'est précisé sur les deux vitraux réalisés en 1950 par les ateliers Gabriel Loire. On notera les déplacements à moto du R. P. Yves Blanchard (sinon pourquoi construire un abri pour sa moto ?) et le courage des successeurs de ce dernier qui non-motorisés, utilisèrent cars et voitures, pour effectuer leur office dans des postes éloignés comme celui de Tillouguit. Autre date importante, le Monument aux quatre colonnes, 1936 (encore une fois, l'intervalle de recherche se restreint) ; en espérant qu'il n'y a pas d'erreur de date comme dans l'article du même journal (Maroc-Monde) du 27 octobre 1951 qui écrivait 1936 au lieu de 1916 pour la première messe à Beni Mellal.
- Aussi bien André Dapzol que Testis évoquent parmi les premiers européens à s'installer au Tadla les Grecs. On se pose immédiatement la question de cette présence et voilà que la mise à disposition de la presse de 1952 propose une explication parfaitement plausible. La Vigie marocaine du 09 août 1952 (voir article ici, onglet les petites).
- Il semble nécessaire de rechercher d'éventuels écrits du R.P. André Dapzol qui par la précision de ses informations permet un bond en avant dans le passé.
Album photographique - surtout l'église de Oued-Zem, ici
- On constatera la proximité architecturale des églises de Kasba-Tadla et de Oued-Zem, dessinées et construites par le même homme.
- Au verso de la photographie A (recopie du texte avec quelques corrections orthographiques) :
Je t'écrirai un peu plus long quand je serai à Casablanca, n'écris rien de tout ça à ma fiancée
Je t'embrasse bien fort ton frère Alphonse
Bien le bonjour à Camille et Henri
Ma chère Josephine
C'est dans ce patelin que tu vois sur cette carte que je suis actuellement à l’hôpital en attendant mon départ pour l’hôpital de Casablanca, mais ne t'alarmes pas surtout, je suis aucunement malade, c'est tout simplement un marocain qui a eu la gentillesse de me loger une balle dans la cuisse et comme elle ne s’accommode pas avec ma viande, il faut qu'elle soit extraite. Il n'y a absolument rien de grave, j'ai attrapé ça le 23 Mai et je ne sens presque plus rien. Ça m'a valu une belle proposition pour la médaille militaire, ce dont je suis fier, il n'y a pas qu'en France qu'on la gagne.
© Copyleft Q.T. 05 février 2023 modifié le 27 janvier 2024
Une image, certes un peu floue, brouillée, entre ce que j'imagine et ce qui a existé ; ... Il ne faut pas trop se préparer pour découvrir. Antoine Hardy - au bout de la route (Christian Bourgois 2005)
Quelques articles paru dans Maroc-Monde que le site gallica répertorie sous le nom Casa-Cité (premier nom de cette publication).
Casa cité du 25 mai 1947 (Source gallica.bnf.fr / BnF) (reconnaissance OCR puis corrections manuelles avec respect de l'orthographe des noms propres)
Une belle Kermesse de Charité se prépare activement en notre Paroisse pour la construction d'une « voûte en briques » en l'Église N.-D. de Tadla, actuellement recouverte seulement de tuiles qui laissent entrer le froid en hiver, la chaleur et le sable en été et, en tout temps, les petits oiseaux avec leur gazouillis et bien d'autres choses ...
C'est à tout cela que nous voulons remédier par ce grand travail qui s'impose pour faciliter le recueillement et la prière dans notre Maison du Bon Dieu.
Vous pouvez tous nous aider, sans doute par la prière d'abord, mais aussi en venant prendre part aux nombreuses attractions qui vous feront passer à tous un bon moment, telles que « Gargantua » toujours généreux, ou le lapinodrome, la pêche, les anneaux, la loterie d'animaux vivants et Guignol, grand ami des petits, ou le cinéma sonore et parlant en plein air, le soir, comme dans les grandes villes.
À ces attractions, en cette journée d'été, il est utile de joindre la buvette, les crêpes et les glaces qui calmeront les ardeurs du soleil de Tadla ; et encore est-il opportun de citer les comptoirs si appréciés et goûtés des ouvrages de dames, déjà si recherchés sur place, et de l'alimentation, qui promettent tous deux un vrai succès pour tous : acquéreurs et vendeurs.
Ainsi donc, en vous récréant et en vous offrant ses petits services, la Kermesse de Tadla du 1er juin 1947 vous procurera la joie d'une excellente journée et le mérite d'une bonne œuvre pour la Sainte Vierge, patronne de notre Église, qui saura vous en récompenser.
La Kermesse aura lieu dans les salles et cours des Patronages autour de l'Église de Tadla : toute la journée du dimanche et le soir jusqu'à minuit.
Moyens de transport : Les cars de la C.T.M., ligne de Beni Mellal.
Aller : Départ de Casablanca, Place de France, pour Tadla, à 6 h et 14h
Retour : Départ de Tadla pour Casablanca à 6 h 30 et 14 h 30.
Quant aux personnes qui ne pourraient pas venir jusqu'ici le dimanche 1er juin, qu'en toute simplicité elles retiennent le n° C.C.P. 81-82, Rabat, du Père Curé de Tadla et lui transmettent leur offrande par virement ou mandat pour l'aider à couvrir son église.
Un mot de remerciement sera envoyé à toute offrande, si modeste soit-elle.
Commentaires : Appel pour des offrandes financières, foi et prières répétées ne suffisent pas, pour « remplacer » la toiture de l'église par la construction d'une voûte en briques ; peut-on formuler l'hypothèse que c'est à ce moment là que l'église sans transept acquit non seulement une voûte en briques mais également son transept ? Aujourd'hui, la « voûte en brique » demeure invisible, masquée par un plafond blanc horizontal, cette « voûte en brique » a-t-elle été réalisée ?
Casa cité du 06 novembre 1948 (Source gallica.bnf.fr / BnF) (reconnaissance OCR puis corrections manuelles avec respect de l'orthographe des noms propres)
Le Père Adrien, curé de Tadla, fait savoir à ses paroissiens du bled qu'il dira la sainte messe en novembre chez eux les jours ci-après :
Dimanche 7 vers 11h, à Beni Mellal.
Mardi 9 à 7 h 30 au barrage de Bin El Ouidane et l'après-midi vers 18 h à Tillouguit.
Mercredi 10 vers 9 h, à Ouaouizert.
Dimanche 14, vers 11 h à El Ksiba (chapelle Sainte Geneviève).
Mardi 16 à 7 h 30 à Afourer.
Mercredi 17, à 7 h 45 à Beni Melal.
Mercredi 24, à 8 h à Zaouia ech Cheikh.
Dimanche 28, vers 11 h, à Afourer.
De plus il a la joie de vous faire part de la visite de Mgr Lefèvre, le dimanche 21 au matin à Kasba Tadla, et l'après-midi à Beni Mellal et Afourer. Lundi 22 au matin à la chapelle de El Ksiba, à Zaouia ech Cheikh, et l'après-midi dans les autres postes de l'Atlas.
Prière de conserver ces annonces et de les communiquer autour de vous.
Merci.
Père ADRIEN.
Nous sommes heureux d'insérer dans nos colonnes la bonne nouvelle du mariage de Mlle Moreno Joséphine, commerçante bien estimée dans notre Centre, avec M. Veillon Jean, employé à Beni Mellal. La bénédiction nuptiale sera donnée à l'épouse le samedi 6 novembre au lieu habituel des Offices (chez M. Doerfler), par le Père Adrien, desservant du Poste.
Nos félicitations et nos vœux les meilleurs aux deux époux et à leurs familles.
Casa cité du 22 octobre 1949 (Source gallica.bnf.fr / BnF) (reconnaissance OCR puis corrections manuelles avec respect de l'orthographe des noms propres)
Beni-Mellal : Chaque 1er et 3e dimanche, (vers 11 h). Heure des messes, chaque mercredi après le 2 et 4° dimanche (vers 7 h).
Bin-el-Ouidane : Chaque lundi, après le 1e et 3e dimanche (vers 18 h)
Afourer : Le lundi après le 2e dimanche (vers 18 h). Le 4e dimanche (vers 11 h).
Aït-Ouarda : Les mercredis après le 1er et 3e dimanche (vers 7 h).
Talaat : Le mardi après le 2e dimanche (vers 18 h)
El-Ksiba : Le 2e dimanche (vers 11 h). Le lundi après le 4e dimanche (vers 18 h).
Ouaouizert : Le mardi, après le 1er dimanche (vers 18 h).
Zaouia ech Cheikh : Le mardi après le 4e dimanche (vers 8 h)
Tillouguit : Le mardi après le 3e dimanche (vers 9 h).
Liste à conserver toujours
Liste à consulter souvent
Votre Curé : Père ADRIEN.
Commentaires : Le R.P. Adrien passe beaucoup de temps en voiture (la sienne ?) pour dire la messe, assurer une présence dans les différents postes du Tadla ; on constate également que Beni Mellal ne possède pas de lieu de culte chrétien et les cérémonies religieuses s'y déroulent chez des particuliers, la famille Doerfler. On note aussi la présence régulière du R.P. Adrien à Bin el-Ouidane où le barrage se construit.
Casa cité du 10 février 1951 (Source gallica.bnf.fr / BnF) (reconnaissance OCR puis corrections manuelles avec respect de l'orthographe des noms propres)
Notre R.P. Curé de Kasba-Tadla avait invité ses paroissiens à assister, le dimanche 28 janvier, à une séance donnée par les enfants du Catéchisme.
Nos jeunes artistes allaient présenter à nos yeux « La Crèche vivante », faire revivre pour nous les scènes si poétiques de la Nativité.
C'était la première séance de ce genre donnée dans notre paroisse et, pour beaucoup de nos jeunes acteurs, leurs tout premiers débuts. On pouvait donc se demander comment cela marcherait et ce que cela donnerait.
Disons tout de suite que ce fut un vrai succès, et les assistants sont encore sous le charme de ces ravissants tableaux vivants qui se succédèrent devant leurs yeux.
Nos jeunes artistes, très à l'aise sur la scène, sachant bien leurs rôles, dans des costumes ravissants dus aux doigts de fées de nos dévouées Dames catéchistes et de plusieurs mamans, nous firent vivre pendant près de deux heures les scènes bibliques de Bethléem.
Une Vierge Marie toute céleste, un Saint-Joseph parfaitement réussi, un Ange Gabriel étincelant, tout un aréopage de petits anges exquis, des Rois Mages imposants et couronnés d'or et même un Roi Mage noir ...
Ce fut pendant toute la séance un véritable charme de voir évoluer si gracieusement tous ces jeunes artistes dans leurs costumes aux couleurs chatoyantes, à la fois vives et très douces, tant elles se mariaient bien entre elles ...
La chorale, avec son talent habituel, accompagna ces tableaux des jolis chants de Noël.
La scène avait été très adroitement montée dans le transept de notre église et des jeux de lumière très réussis donnaient un cachet tout spécial à cette crèche vivante.
Nous eûmes ainsi le plaisir de voir six tableaux s'offrir successivement à nos yeux, chaque tableau séparé du suivant par des intermèdes variés et bien choisis sur Noël : l'Annonce à Marie, l'annonce aux bergers, la naissance de Jésus, l'adoration des bergers, l'adoration des enfants et l'adoration des mages.
Un très joli chœur clôtura ces tableaux.
Des fleurs furent offertes par les jeunes filles et une collecte fut faite par de petits anges ailés, dont le montant sera envoyé à l'œuvre des lépreux de la Guyane française.
Cette très jolie séance fut terminée, comme il se devait, par la bénédiction du T.S. Sacrement.
Tout le monde regretta l'absence de Mgr Lefèvre, retenu à Beni-Mellal par la cérémonie de la pose de la première pierre de la chapelle et par sa visite à Afourer.
Nous ne saurions trop féliciter nos jeunes artistes de leurs si brillants débuts, débuts si prometteurs que nous voulons espérer avoir encore l'occasion de les applaudir.
Nous nous faisons l'interprète du R.P. Adrien en remerciant aussi tous ceux et toutes celles qui, par leur dévouement et leur bon goût, nous donnèrent d'assister à si charmant spectacle.
Une conclusion pratique pour terminer : il nous faut absolument à Kasba-Tadla une salle paroissiale qui nous permette de donner de semblables séances ailleurs qu'à l'église.
Paroissiens de Kasba-Tadla, vous devinez où nous voulons en venir et vous savez ce qu'il vous reste à faire ...
Notre Kermesse Paroissiale se prépare, pensez-y bien.
TESTIS.
Commentaires : On sait maintenant que le 28 janvier 1951, l'église Notre Dame de Tadla possédait un transept et avait probablement son architecture actuelle à l'exception des ouvertures en forme d'ogive de part et d'autre de la porte d'entrée qui datent de ? (voir QUESTIONS SUR UNE ÉGLISE). On note l'appel final aux dons.
Casa cité du 27octobre 1951 (Source gallica.bnf.fr / BnF) (reconnaissance OCR puis corrections manuelles avec respect de l'orthographe des noms propres)
C'est la première fois que Beni-Mellal a l'honneur de figurer dans « Maroc-Monde », car en tant que paroisse, Beni-Mellal n'a pas encore un an. Elle est la dernier-né des paroisses du Vicariat du Maroc.
Dimanche 7 octobre, en la Fête de N.D. du Saint-Rosaire, la Chrétienté de Beni-Mellal était à la joie : elle recevait son Pasteur, Mgr Lefèvre, Vicaire Apostolique du Maroc, venu bénir sa première Chapelle, future salle des Œuvres de cette nouvelle paroisse.
Beni-Mellal ... enfoui dans un nid de verdure et dominé par le majestueux Ghenim, espoir des estivants à la chaude saison, mais tout emmitouflé de neige en hiver.
... Beni-Mellal, dont les oliviers séculaires attirent pour le camping, tant de scouts et groupements de jeunesse, au temps des vacances.
... Beni-Mellal, avec sa source fleurie et chantante, joie et repos des touristes.
... Beni-Mellal, avec ses oliviers argentés, ses blés d'or, ses abricotiers, ses grenadiers, ses orangers, ses fleurs, ses roses renommées.
... Beni-Mellal, porte ouverte sur cette plaine majestueuse et si riche, de laquelle les eaux des barrages de Bin-el-Ouidane et d'Afourer feront bientôt la Californie du Maroc ...
... Beni-Mellal n'avait pas encore un lieu de culte digne de sa renommée et digne de son site enchanteur.
La première Messe y fut célébrée en septembre 1936 par le R.P. Dapzol, aumônier militaire, qui devait construire plus tard les églises de Kasba-Tadla et de Saint-François de Casablanca.
Successivement, les curés de Kasba-Tadla : les RR. PP. Laurent-Philippe et Adrien desserviront Beni-Mellal.
Le Bon Dieu n'y ayant pas de toit à Lui, la famille Doerfler, si dévouée, s'offrira pour l'héberger, chez elle, chaque fois que le Curé-desservant ou un prêtre de passage viendra y dire la Messe.
Pendant plus de quinze ans, c'est dans le salon de cette famille que seront célébrés les Offices, que les Sacrements seront administrés, si bien que les images de Première Communion porteront cette mention :
« Souvenir de ma Première Communion, faite sous le toit familial. »
Des projets de construction naissaient pourtant de temps à autre, mais morts presque aussitôt que nés, s'ensevelissaient dans les cartons.
Par ailleurs, on travaillait à l'établissement d'un plan magnifique et grandiose de la future ville nouvelle de Beni-Mellal dont l'essor suivrait l'adduction fertilisante des eaux des grands barrages de Bin-el-Ouidane.
Les choses en étaient encore au point mort quand nous arriva, le 3 décembre 1950, envoyé par Mgr Lefèvre, le R.P. Pineau, premier Curé-nommé de Beni-Mellal.
Le R.P. Pineau, ancien missionnaire aux Grands Lacs, deux fois volontaire comme aumônier militaire du Corps Expéditionnaire en Syrie, et après le départ des Français de la Syrie, volontaire pour continuer, auprès de nos soldats, son ministère au Maroc, où il restera plus de dix ans aumônier de la Division de Casablanca, exprima, dès sa première prise de contact avec ses paroissiens, sa volonté ferme de marcher de l'avant et de commencer enfin, effectivement, la Cité paroissiale.
Sa parole ardente, directe, fit dès le premier jour l'union de tous autour de sa personne.
Pour la création de cette Cité paroissiale, deux généreux donateurs offraient un ensemble de cinq mille mètres carrés de terrain planté de magnifiques oliviers et situé en plein centre de la ville nouvelle, sur la Place Administrative.
À la fin de sa seconde Messe à Beni-Mellal, le dimanche 10 décembre 1950, le R.P. Pineau annonça que son premier acte officiel de curé serait la prise de possession et la consécration de ce terrain paroissial. C'est ainsi, qu'entourés de la population chrétienne de Beni-Mellal, Brigitte Souville et Michel Cailleau furent baptisés sous les oliviers, à l'endroit même où sera construite notre future église : « Ayons pleine confiance, nous dit-il, nous avons maintenant deux anges protecteurs du Saint Lieu ... », et la foule émue entonna avec lui, d'un seul cœur : « Je suis Chrétien ... »
Les Mellali ne cachaient pas leur joie, ils sentaient qu'on les conduisait sur la voie des réalisations.
Et en effet, le dimanche 28 janvier, Mgr Lefèvre venait à Beni-Mellal poser la première pierre de la Chapelle provisoire, future salle des Œuvres.
La déception fut grande cependant. Une Messe solennelle avait été projetée en plein air ... et jusqu'au dernier moment, les cœurs voulurent espérer, mais le ciel en avait décidé autrement, et ce fut dans une boue indescriptible, sous une pluie abondante que Monseigneur prit la truelle pour maçonner cette première pierre de cette première chapelle, en présence d'une foule imposante, au premier rang de laquelle figuraient les autorités civiles et militaires, ainsi que Son Excellence le Pacha de Beni-Mellal.
Autour de cette première pierre d'autres pierres ... accoururent. Les murs montèrent de jour en jour. Un beau toit de tuiles rouges se détacha bientôt sur le rideau vert des peupliers qui l'entourent, et c'est cette splendide chapelle, bâtie en quelques mois, lumineuse, bien aérée, de dix mètres de largeur sur vingt mètres de longueur et dix de hauteur, que Monseigneur venait bénir et inaugurer solennellement en cette Fête du Rosaire.
Une foule nombreuse avait déjà envahi la vaste enceinte lorsque, à 11 h, Monseigneur fit son entrée, suivi des autorités civiles et militaires.
Après la bénédiction de la Chapelle par Son Excellente, la Schola attaqua avec un brio qui étonna d'abord, émerveilla ensuite les assistants, la Messe à trois voix de Lib.
À l'Évangile, le R.P. Pineau, en termes sentis et qui partaient vraiment du cœur, remercia tous ceux qui s'étaient dévoués par leur travail et leur générosité, à l'érection de cette attrayante Chapelle, si longtemps désirée et dont les efforts étaient aujourd'hui si magnifiquement récompensés. Mais, « ce n'est qu'un commencement, continua-t-il, le gros-œuvre reste à réaliser. Il faut dès maintenant songer à notre église et me pas laisser chômer la truelle ... »
Monseigneur, prenant ensuite la parole, souligna l'importance de ce nouveau lieu du Culte « d'où doit jaillir désormais la vie spirituelle par le Baptême » - où cette vie doit s'alimenter par la Communion - d'où elle doit se communiquer par les nouveaux foyers, où elle doit s'achever en beauté, avant de s'épanouir dans la bienheureuse Éternité ... »
A l'issue de cette réconfortante cérémonie, que beaucoup, faute de place, avaient dû suivre du dehors, la communauté chrétienne de Beni-Mellal s'empressa autour de son Évêque pour lui redire sa joie et toute sa fierté d'avoir pu l'accueillir en cette Chapelle.
A 13 h, à l'Hôtel du Pacha, un déjeuner de famille, mais de famille nombreuse, groupait autour de Monseigneur et des autorités, tous ceux qui, après la fête religieuse, avaient voulu se retrouver autour de la table de famille.
Cet événement, car c'en est un dans la vie de Beni-Mellal, ne s'effacera pas du cœur de tous ceux qui ont eu le bonheur de le vivre.
Merci à Monseigneur d'avoir accepté de partager notre joie.
Merci aux Mellali et à tous leurs amis, d'être venus si nombreux inaugurer notre Chapelle.
Merci à notre cher Père Curé d'avoir déclenché cet élan. Qu'il ne s'arrête pas en chemin, mais qu'il sache bien que tous ses paroissiens sont derrière lui, pour l'aider de leurs conseils, de leur affection, de leurs générosité et dévouement, pour que, dans un avenir assez proche, pointe dans le ciel de Beni-Mellal la flèche ou ... la tour de notre Église Saint-Paul.
UN PAROISSIEN.
N.B. - Qui que tu sois, Mellali, lorsque tu franchis le seuil de cette Chapelle, regarde, à ta gauche, cette pierre de taille saillante, qui porte gravés ces mots : Fidèle à Dieu. Elle est la première pierre de cette Chapelle et ce mot Fidèle est le nom du jeune prêtre, mort depuis quelques années, qui inspira le principal bienfaiteur de cette Chapelle, et marque-lui ta reconnaissance en priant pour lui et aussi pour ceux qui ont œuvré à édifier cette Maison de Dieu.
Commentaires : « La première Messe y fut célébrée en septembre 1936 par le R.P. Dapzol, aumônier militaire, qui devait construire plus tard les églises de Kasba-Tadla et de Saint-François de Casablanca. » Première messe à Beni Mellal en septembre 1936 mais surtout on tient une information importante sur la date d'édification de l'église de Kasba-Tadla à l'initiative du R.P. Dapzol, après 1936 sauf si le paroissien rédacteur se trompe, la phrase ci-dessus ne montrant aucune ambiguïté ...
... dans Le Petit Marocain du samedi 04 août 1934 (Source gallica.bnf.fr / BnF) (reconnaissance OCR puis corrections manuelles avec respect de l'orthographe des noms propres) :
Jeudi matin, à 8 heures, une messe a été dite à l'occasion des obsèques en France du maréchal Lyautey.
Un catafalque avait été dressé dans l'église et quatre officiers de la garnison, sabre au clair, montèrent la garde pendant la cérémonie. L'office fut dit par M. l'aumônier Blanchard.
Nous avons noté dans l'assistance la présence de M. le général de Loustal, le colonel Ract-Brancaz, de Beni-Mellal, les commandants Perrigois, de l'état-major, Ollivain, de l'aviation, Dégé, du génie, M. l'intendant Gaudet, le médecin-chef Baur, le capitaine Larcher, des affaires indigènes, MM. les officiers du centre de Ksiba, ainsi que tous les officiers et sous-officiers de la garnison de Tadla.
Du côté civil : M. Surruges, contrôleur à Boujad, M. Ecorcheville, du contrôle du centre, MM. Padovani, Gontard, Delorme, Amachantous, Charbonnier,Courtilliet, Lamoureux, Fama, Thollon, Millet, etc., ainsi que presque toute la population de Tadla.
Le pacha de Beni-Mellal, le caïd Mimoun, de Tadla, le caïd Ali de Ksiba.
Également était présente une délégation de la communauté israélite.
Après la messe, une réunion eut lieu devant le monument aux morts érigé dans le cimetière de Tadla, où une palme et plusieurs couronnes furent déposées. Une minute de silence fut observée par les assistants.
Un discours fut prononcé par M. le général de Loustal, retraçant brièvement l'œuvre du maréchal Lyautey au Maroc.
Les honneurs étaient rendus par un piquet du 3e étranger et un du 23e train.
La cérémonie prit fin vers 9 h 30.
« Un catafalque avait été dressé dans l'église », le bel échafaudage chronologique imaginé s'effondre, le paroissien mélange des dates, des faits. La recherche de dates précises sur des événements tadlaouis s'apparente à l'ascension d'une dune de sable avec le sentiment que chaque pas en avant s'accompagne d'un recul.
© Copyleft Q.T. 28 novembre 2022 modifié le 27 juin 2023
Édifice d'apparence simple ne posant pas de problèmes : une église construite dit-on en 1916 [la date d'édification est 1923, voir autres articles dans cet onglet], soit trois ans après la prise de Kasba-Tadla, (quel document le prouve ?), aujourd'hui bibliothèque. Jusque là rien à dire. Sauf que la forme de l'église changea au cours du temps. Sauf que des « ouvertures » en forme d'ogive sont aujourd'hui présentes en façade alors qu'elles sont absentes sur les anciennes photographies. Sauf que la forme de la porte a changé.
La date de construction en 1916 paraît bien aléatoire [la date d'édification est 1923, voir autres articles dans cet onglet]. De vieilles cartes postales, avec un « quartier européen », « El Cantirat » (la cantine), bien construit montrent une ville sans église (document A)
L'église sans transept (photographie B) est la première église dont seule la nef est construite, une chapelle, sa façade est étroite avec une porte haute, cloche dominant cette façade.
L'église avec transept et cœur (photographie C) apparaît ensuite, pourquoi ? Quand ? La cloche se trouve au niveau du transept, la porte reste identique.
Aujourd'hui (photographie D) la porte est différente, plus petite, la façade est élargie par deux murs symétriques avec pour chacun une « ouverture » en forme d'ogive, quand cette transformation se déroula ? ; la porte évoluera dans les années 2000 (voir photographie de 2004 et celle de 2012).
Sur un forum, https://meknes-roidelabiere.forumgratuit.org/, un intervenant précise (quelques corrections orthographiques par Q.T.) :
Merci d'avoir mis le nom à l'église de Tadla. Je ne l'avais pas reconnue alors qu'elle était dans la rue juste derrière chez moi. Il n'y avait qu'une seule église dans ce village et ce ne peut être que celle-ci ... Je signale qu'en 1955 la porte d'entrée et une partie de la façade donc celle que l'on voit sur la photo ont sauté lors d'un attentat. Nous avions été réveillés au cours de la nuit par le bruit de l'explosion. Le prêtre qui demeurait à la sacristie juste derrière n'a rien eu (j'étais enfant de cœur à cette époque et membres des cœurs vaillants chaque jeudi sous son autorité ). Le lendemain de l'attentat avec mon petit frère, nous nous sommes rendus sur les lieux pour prendre des nouvelles du curé et déambulions devant cette grande porte en bois éventrée et quelques ruines encore fumantes.
La façade a-t-elle été reconstruite après cet attentat ?
Peut-on faire confiance à cette information quand la même personne intervient ainsi, à propos des deux camps de Kasba-Tadla, sur le même forum (quelques corrections orthographiques par Q.T.) :
Les camps de Tadla : le camp nord où il y avait plusieurs régiments et une piste d'atterrissage pour quelques avions militaires de reconnaissance et le camp sud dans les murailles de la kasbah le long de l'Oum Er Rbia où il y avait entre autre l'infirmerie de la garnison. C'est au camp nord que nous nous sommes réfugiés à plusieurs reprises lors des alertes émeutes notamment pendant les évènements de sinistre mémoire à OUED ZEM à une quinzaine de kilomètres seulement. Mes souvenirs des patrouilles militaires en provenance du camp nord qui venaient garder les administrations et les services du maghzen, mitrailleuses en batterie ; les repas et friandises que notre mère nous demandait de porter aux militaires en faction devant chez nous.
Le Camp Sud est sur la rive gauche de l'Oum Er Rbia, hors casbah, depuis le début de sa construction en 1917 ; il faut parcourir 47 km pour arriver à Oued-Zem depuis Kasba-Tadla. Quand quelqu'un énonce « si ma mémoire est bonne ... », on peut s'attendre à une erreur grossière.
Autre interrogation sur Notre Dame du Tadla : le site https://www.ateliers-loire.fr/fr/gabriel-loire-maroc-kasba-tadla-eglise-notre-dame-du-tadla.php, donne l'information suivante : « Gabriel Loire - Maroc - Kasba Tadla - église Notre-Dame du Tadla ; Créateur : Gabriel Loire ; Type d'édifice : Édifice religieux ; Date : 1950 ; Technique : Dalles de verre ; Dalles de verre, 1950, 2 baies (Maternité divine et virginité de la Vierge Marie), 2 m², Pas de maquettes ni de photos en archives » ; où furent réalisées ces deux vitraux ?
Qui réalisa, et à quel moment, les deux « ouvertures » présentes aujourd'hui sur la façade ? Ces deux « ouvertures » ressemblent étrangement aux « vitraux » visibles aujourd'hui sur chaque côté de la bibliothèque. Une cousine de mon épouse m'offrit un tapis de prières qui présente une convergence de forme avec les vitraux actuels de l'église. Nouvelle interrogation, les « ouvertures » en façades sont-elles l'œuvre d'un artisan chrétien ou musulman ?
© Copyleft Q.T. 12 octobre 2020 modifié le 22 octobre 2024