"Nous sommes
des facilitateurs"
des facilitateurs"
Claude Breune a dirigé pendant neuf ans l’APF (Association des paralysés de France) du Haut-Rhin. Il s’est lui-même engagé dans la démarche Dedici comme « intervenant bénévole », anime des « ateliers de renforcement » qui préparent les « cabanes ».
Je suis moi-même une personne handicapée physique et la problématique m’intéresse.
J’ai été pendant neuf ans directeur de l’APF du Haut-Rhin. Dans ce cadre-là, j’ai été amené à me préoccuper de la situation des personnes handicapées. Dedici m’a contacté il y a trois ans, je venais de prendre ma retraite.
Je dois avouer qu’au départ, j’étais dubitatif. Il m’a fallu un certain temps pour rentrer dans la logique de Dedici. Je bloquai un peu sur la notion de « défenseur ultime », le terme ultime pour moi, renvoie à la mort.
Mais les choses ont évolué. Y compris dans la manière de parler de ce rôle, qui n’est pas une personne unique mais peut être joué par plusieurs personnes qui sont des parents ou proches aidant.
Ce qui m’intéressait, c’est de pouvoir faire un travail de terrain
ne pas rester dans une dimension théorique. J’ai accepté ce travail, avec l’APEI Centre Alsace et son service d’accueil de jour, le Moulin, à Châtenois. Je précise que je n’avais pas d’expérience dans le milieu du handicap mental.
En quoi consiste exactement votre
mission d’intervenant bénévole ?
J’accompagne des groupes au Moulin, j’interviens également en binôme à Mulhouse (Sinclair).
Des groupes de parents, de salariés (personnes référentes des personnes handicapées), de personnes accompagnées. Nous animons des « ateliers de renforcement », pour aider les personnes dans la démarche Dedici, en amont des « cabanes ». Ces ateliers ont lieu tous les mois, ou tous les mois et demi.
Je suis un groupe de sept personnes en situation de handicap qui ont la possibilité d’exprimer leur souhait et leur projet par rapport à leur avenir. [Ce qui arrive en premier lieu, c’est le souhait d’avoir un logement autonome. Ça peut être aussi, pouvoir passer le permis de conduire, s’occuper d’animaux...]
J’accompagne un groupe de parents (familles ou proches aidant). Dans une première phase, ils se sont surtout exprimés sur les difficultés qu’ils rencontraient. On a progressé ensuite sur le souhait de pouvoir aborder différentes thématiques. [Il y a la préoccupation de l’avenir matériel et financier des personnes en situation de handicap quand les parents auront disparu, la question de l’emploi et des activités des personnes handicapées...]
Avec le groupe de professionnels, on aborde la question de leur positionnement, dans une structure où les personnes accompagnées on un référent professionnel et où chaque professionnel est référent de trois ou quatre personnes accueillies. Ils jouent un rôle essentiel dans la mise en place des « cabanes », c’est eux qui poussent à la roue.
Dans le groupe famille, les personnes qui ont souvent expérimenté des choses peuvent communiquer entre elles, je vois un côté très positif, la mise en place de la pair-aidance. Les familles n’ont pas vraiment de lieu pour cela.
J’aime ce terme d’atelier de renforcement.
Il décrit bien ce qu’on essaie de faire :
renforcer les gens
leur donner un petit plus
plus de pouvoir sur eux-mêmes
plus de confiance en eux-mêmes.
Pour les trois entités, personnes en situation de handicap, parents ou proches aidant, professionnels, je fais le même constat : tous sont contents de retrouver le groupe. Même pour les professionnels qui n’ont pas forcément l’occasion d’échanger ainsi librement ailleurs, dans un cadre différent d’une réunion sur le fonctionnement habituel de la structure.
Ce qui est positif aussi, c’est que les professionnels ont accepté facilement d’entrer dans cette démarche. On a pu démontrer par la pratique qu’on apportait peut-être un plus, à eux de s’en saisir.
Le bilan que j’en tire, c’est l’importance d’avoir des lieux de rencontres et d’échanges libres pour chacun des groupes. Où les gens peuvent s’exprimer en toute confiance.
Nous sommes le réceptacle de choses.
On essaie de faire le maximum pour inciter les personnes à porter elles-mêmes les difficultés, les partager. Nous ne sommes pas habilités ni en capacité d’intervenir. Notre souhait, c’est que les personnes se saisissent des questions qui les préoccupent. Nous sommes des facilitateurs. Nous ne jouons pas le rôle d’intermédiaire, mais en même temps, nous pouvons avoir une connaissance fine des difficultés. Notre rôle, c’est de mettre de l’huile dans les rouages.
Propos recueillis par F.M