99999.1er dimanche du Carême-A

1-Homélie du 1er dimanche du Carême (A)

05/03/2017

"Le diable a joué sa dernière carte"

Les textes bibliques de ce 1er dimanche du Carême nous parlent de la tentation. Celle-ci peut se présenter à nous de multiples manières : la tentation de conduire trop vite, de trop manger ou boire, de dire une parole moqueuse ou méchante ; c'est aussi la tentation de montrer aux autres le peu de pouvoir que nous avons et d'en abuser à notre seul profit. Toutes ces tentations et bien d'autres cherchent à nous détourner de Dieu et même à nous révolter contre lui.

La première lecture nous dit que l'homme a été créé pour le bonheur, la vie, la joie, l'harmonie. Dieu veut notre bien et celui de notre monde. Et pourtant, il nous arrive de déraper, de le quitter et même de lui tourner le dos. Adam et Ève ont été piégés par « le serpent » ; ils ont voulu être « comme des dieux ». Mais en cédant à la tentation, ils se sont retrouvés dans une situation misérable. Leurs yeux se sont ouverts pour contempler l'homme déchu. Plus tard, à Emmaüs, les yeux des disciples s'ouvriront pour contempler « l'homme nouveau », Jésus ressuscité.

Dans la seconde lecture, saint Paul nous dit que le péché et la mort atteignent tous les hommes depuis les origines. Mais le plus important, c'est la supériorité du don de la grâce. Les dons de Dieu sont bien plus grands que nos nombreux péchés : « Là où le péché a abondé, la grâce a surabondé. » La bonne nouvelle que Jésus nous offre pèse bien plus lourd que la mort. C'est dans la croix et la résurrection du Christ que s'enracine notre espérance d'une victoire sur la mort et le péché. L’Évangile nous parle des tentations de Jésus au désert. Il nous dit que derrière ces tentations, il y a quelqu'un. La Bible le nomme « le diable ». Il est celui qui cherche à faire tomber l'homme. Il est présent dans toutes les luttes de notre vie et il n'en démord pas. Il nous attaque par nos points faibles et il sait déguiser ses attaques. Il est un maître en tromperie. C'est ainsi qu'il a cherché à détourner Jésus de la voie du sacrifice et de l'amour qui s'offre au monde. Il lui a proposé de prendre une route facile, celle du succès et de la puissance.

Mais Jésus refuse d'utiliser son pouvoir de « Fils de Dieu » pour se procurer des satisfactions personnelles. Le succès médiatique ne l'intéresse pas. Il repousse avec décision toutes les tentations. Il répète avec fermeté sa décision de rester fidèle à son Père. Il n'accepte aucun compromis avec le péché ni avec la logique du monde. Et surtout, il ne dialogue pas avec Satan comme Ève l'avait fait au Paradis terrestre.

Jésus sait très bien qu'avec Satan, on ne peut pas dialoguer. Il choisit de se réfugier dans la Parole de Dieu : « Ce n'est pas seulement de pain que vit l'homme ». Manger c'est quelque chose de vital. Être en accord avec Dieu est encore plus vital : « Tu ne tenteras pas le Seigneur. » Ne le provoque pas. À Dieu seul, tu rendras un culte. » Ne te prosterne pas devant les idoles, devant des personnes et encore moins devant le diable. Ces tentations sont aussi appétissantes que le fruit défendu. À nous de choisir si nous voulons ou ne voulons pas enfants vivre en enfants de Dieu et être en relations de fraternité entre nous. Si nous choisissons de marcher à la suite du Christ, nous vivrons ; sinon, c'est la jungle.

Jésus a résisté au tentateur et celui-ci a fini par le quitter. Le Seigneur nous montre comment faire face à toutes ses attaques. C'est vrai que parfois nous succombons à la tentation. Nous nous détournons de Dieu. Mais le Seigneur ne cesse de nous appeler à revenir vers lui de tout notre cœur. Il est toujours prêt à nous relever. Il a vaincu le tentateur pour nous. Et depuis lors « Satan a joué sa dernière carte ». Jésus a remporté la victoire définitive de l'amour.

C'est donc avec le Christ vainqueur que nous entrons dans ce temps du Carême. C'est un temps favorable pour accomplir un chemin de conversion. Comme Jésus, nous sommes invités à nous réfugier dans la Parole de Dieu. C'est ainsi que nous trouverons force et courage dans notre lutte contre le mal. Avec le Christ, nous apprendrons à rejeter toutes les publicités mensongères qui courent à travers le monde et nous détournent de l’Évangile. La Lumière de la Parole de Dieu nous est offerte pour éclairer notre vie.

Le pain que nous recevons de toi, Seigneur, vient renouveler nos cœurs ; il nourrit la foi, il fait grandir l'espérance et nous donne la force d'aimer. Apprends-nous à toujours avoir faim du Christ, seul Pain vivant et vrai et de toute parole qui sort de ta bouche. Amen

Sources : Revues Signes, Feu Nouveau, Fiches dominicales – Pensées sur l’Évangile de Matthieu (Christoph Schönborn) – François Selon Saint Matthieu

Jean Compazieu, prêtre de l'Aveyron ( 05/03/2017)

http://preparonsdimanche.puiseralasource.org/

---------------------------------------------------------------------------------

2-Premier dimanche du carême A

C'est intentionnellement, je crois, que la liturgie de ce premier dimanche de Carême nous invite à relire deux récits de tentation qu'elle met en contraste, et même en opposition. Nous allons donc regarder ces deux récits et, à travers ces deux récits, considérer notre manière de nous situer, aujourd'hui, en fils de Dieu, puisque dans les deux cas, c'est de cela qu'il s'agit

La tentation de Jésus.

Voilà donc Jésus, qui a entendu, au jour de son baptême, la Parole qui le fonde dans son existence humaine : "Tu es mon Fils bien-aimé." Jésus est fils de Dieu. On peut mettre l'accent sur l'un ou l'autre des deux mots de cette expression. Il y a un choix à faire : ou bien il se situera en fils, ou bien il se comportera comme Dieu. Or, tout au long de son existence, il ne voudra être que « le fils de l'homme ». Il ne faudrait pas croire que Jésus n'a connu la tentation qu'au moment de la tentation au désert. C'est tout au long de sa vie qu'il l’a connue, tous les jours. Et ce n'était pas seulement le Tentateur, c'étaient tout son entourage, tous ceux qui étaient avec lui, qui le tentaient, qui lui apportaient chaque jour des raisons pour le faire céder. La tentation venait de Pierre, des disciples, de tous ses partisans, de toute la foule enthousiaste. Pierre, qui vient de lui dire : « Tu es le fils de Dieu », se met en travers de la route quand Jésus annonce que « le fils de l'homme » doit monter à Jérusalem pour y être arrêté, pour y mourir. Et Jésus le rabroue vivement : « Passe derrière moi, Satan. »

Donc, tout au long de sa vie, Jésus va avoir à affronter la même tentation : est-ce que je vais employer les moyens de la puissance, les moyens du sensationnel, employer des « trucs » pour convaincre les gens, les faire marcher avec moi et réaliser ainsi le salut de l'humanité, d'une manière éclatante et pleinement convaincante ? Jamais il ne cédera à la tentation. Il ne veut être que l'homme, pleinement, totalement dans la condition humaine, l'homme qui se bat contre toutes les forces du mal pour vaincre le mal. Dans l'expression « Fils de Dieu », Jésus privilégie donc le mot « fils » et il se comporte en fils obéissant.

La tentation d’aujourd’hui

Revenons maintenant à l'histoire de l'homme et de la femme, du serpent qui parle, des arbres du beau jardin et de ce fameux « fruit défendu ». De quoi s'agit-il ? D'une tentation. Quelle tentation ? L'homme et la femme (vous, moi) ont entendu Dieu leur dire : « Tu es mon enfant bien-aimé. » Dieu a tout mis à leur disposition. La Bible raconte cela en un texte très imagé : le beau jardin arboré, les fruits merveilleux, le bonheur simple, l'arbre de vie et l'arbre de la connaissance du bien et du mal. Et ils vont connaître la même tentation que le Christ. Dans l'expression « Fils de Dieu », ils ne vont retenir que le mot « Dieu » : nous, on peut être des dieux. C'est cela que le serpent insinue quand il leur dit : Dieu, ce n'est pas celui que vous croyez. Vous le prenez pour un père ? C'est un rival. C'est un Dieu cruel, un Dieu jaloux, un Dieu qui a peur de vous. C'est un Dieu pervers. Et ce Dieu pervers, il vous faut le renier. Décidez par vous-même. Décidez de ce qui est bon et de ce qui est mauvais. Ainsi, vous serez comme des dieux, décidant de ce qui est bien et de ce qui est mal. Et l'homme va tomber dans le panneau. Comme nous, toutes les fois, dans notre vie, où nous savons qu'objectivement telle chose est mauvaise, et où nous décidons qu'elle est bonne pour nous. On cède à la tentation.

Nous vivons dans un monde d'apostasie très large. Parlez avec les gens et vous verrez comment, même s'ils ne l'expriment pas, ils vivent en se passant très bien de Dieu. « Dieu pour quoi faire ? On peut très bien vivre sa vie sans Dieu ». Dans ce climat, allons-nous être de ceux qui veulent se conduire en « dieux », décidant de ce qui est bon et de ce qui est mauvais pour l'homme ? Ou au contraire, allons-nous vivre à contre-courant, nous conduisant en « fils » aimants, nous appuyant uniquement sur la Parole d'amour entendue, à l'exemple du Christ ?

http://www.kerit.be/homelie.php#a7

-------------------------------------------------------------------------------

3-Homélie d’Avon : 1er Dimanche de Carême

Frères et sœurs,

Agonie du Christ ! Ce mystère de la vie de Jésus, outre l’évocation, chez certains, amateurs de Poulenc, d’un personnage d’opéra, ne désigne pas tant le Christ qui meurt en Croix (qui agonise) que le Christ au Jardin des Oliviers, disant son « oui » à la volonté du Père. Il pourrait en fait désigner toute sa vie, si l’on comprend le mot « agonie » en son sens premier de « combat ».

En ce début de carême, la scène du séjour de Jésus au désert, de son triple combat face au tentateur, de sa triple victoire, nous en montre le moment inaugural. Mais entre le désert, où le Christ est comme livré à lui-même, et le Jardin où le Christ se livre à son Père avant d’être, durant sa Passion, livré aux hommes, la vie du Christ, sur les chemins de Palestine, peut être lue comme un grand combat, combat pour Dieu et pour les hommes, combat pour la Vérité et pour la Vie. Le désert, le chemin, le Jardin, le programme de notre carême peut se dire avec ces trois lieux évangéliques et ses trois enjeux afférents : le combat spirituel, la suite du Christ, l’accueil émerveillé de son grand amour, où dans sa Passion il donne sa vie pour nous. L’oraison de ce jour résume ainsi ce programme : « mieux connaître Jésus et nous ouvrir à sa lumière pour être fidèle ». Pour cela, laissons résonner, en ce jour, quatre mots de notre évangile : désert, tentation, fils et parole.

Le désert est le lieu biblique de la rencontre et du combat, de la solitude et de l’écoute, de l’exode et du dépouillement. Dans notre vie chrétienne, nous pouvons nous donner des temps et des lieux pour vivre cette expérience. C’est le sens des retraites spirituelles. C’est le sens du Carême. Il y a aussi ces déserts que nous impose la vie. A la lumière de notre évangile, citons-en quelques uns. L’expérience du besoin (avoir faim par exemple) nous fait éprouver notre fragilité. L’expérience de nos responsabilités (se jeter du haut du temple est une expression de la fuite parfois tentante de nos responsabilités) nous fait éprouver notre solitude. L’affrontement sans diversion, sans divertissement, à « l’étrange et difficile contrée de soi » nous fait découvrir les mondes souvent compliqués qui nous habitent. Ce que les bédouins savent du désert, nous pouvons aussi en faire l’expérience : rien n’est plus peuplé qu’un désert ! Ces expériences ne sont-elles pas là pour nous apprendre, en consentant au peu qui suffit, à choisir le Seigneur comme notre maître, comme le fondement et l’horizon de toute notre vie ? Choisir, c’est-à-dire tout à la fois, rechoisir et se laisser choisir.

« A force de passer d’une bouche à l’autre et d’une époque à l’autre, certains mots, âpres et lourds, finissent par n’être plus que d’inoffensifs galets, tout lisses et tout ronds et les fades bonbons du bavardage ». Ainsi en va-t-il du mot « tentation », dont nous demandons chaque jour au Seigneur de ne pas y succomber, tout en nous accommodant facilement de l’argument devenu irrésistible « Laissez-vous tenter » ! On préférera alors parler d’épreuve ou de test, de situations où un choix s’offre à nous, souvent de manière confuse, entre une voie qui s’avère de traverse, tordue voire perverse et une voie, en première apparence exigeante ou peu attrayante mais saine et droite. Cela requiert, dans une écoute profonde, dans un effort de détachement intérieur, discernement et décision. Les épreuves que le tentateur fait subir à Jésus sont exemplaires de celles que nous pouvons traverser. J’en retiendrai deux : recevoir ou se donner l’identité de Fils ; accueillir ou pervertir la Parole de vie.

« Si tu es Fils de Dieu ». Par deux fois le tentateur aborde ainsi Jésus, lui, qui nous dit l’évangile, vient de recevoir le baptême où le Père l’a désigné comme son « Fils bien-aimé ». Qu’est-ce être fils ? Etre tout puissant, à changer les pierres en pain, être le centre du monde, à recevoir l’appui des cohortes célestes dès que s’annonce la chute ? Jésus a perçu qu’il était serviteur et que sa voie était celle du don pour les hommes, au risque de leur refus. Exigence de l’amour ! Accepter cela sera pour ses disciples une épreuve et demandera pour lui du courage. La scène qui suit la première annonce de la Passion le confirme. Pierre ne comprend pas (tentation pour le disciple) mais sa rebuffade sonne pour Jésus comme la voix du tentateur, à laquelle il répond pareillement « Arrière, Satan ! ». Pour nous aussi, accueillir Jésus crucifié passera par le refus d’un Dieu à notre image, boulanger ou parapet mais non pas Père. Pour nous aussi, découvrir notre identité de fils sera toujours l’objet d’un accueil, souvent d’une épreuve. On sait tous les combats qui se jouent autour de cela avec les questions de reconnaissance, de jalousie, d’orgueil. Mais la tentation peut être le lieu du devenir vrai de notre personne. Regardons pour cela Jésus qui renvoie toujours à son Père : seul un autre peut révéler notre identité, seul le tout Autre peut nous révéler celle de fils.

L’autre tentation que je voudrais évoquer est notre rapport à la Parole. Les trois tentations se présentent comme des perversions de la Parole : perversion de la parole qu’est la prière en magie (la parole qui fait le pain au lieu de la Parole qui est pain ; la prière comme monologue au lieu de la prière comme dialogue) ; perversion de la Parole de Dieu par le tentateur qui l’utilise comme une arme contre Jésus voyant que celui-ci y recourt comme une balise (c’est la tentation d’utiliser la Parole de Dieu pour accuser ou se justifier, c’est transformer l’Ecriture en carrière de pierres pour nos constructions humaines : on voit le travail de la perversion qui tantôt transforme les pierres en pain, tantôt transforme le pain en pierre) ; perversion de l’adoration en idolâtrie. Pas de combat spirituel sans écoute assidue, courageuse de la Parole de Dieu, sans résistance à ce qui nous détourne des chemins du Seigneur, sans consentement à la volonté de Dieu. Pas de sortie de la perversion sans conversion.

Terminons en levant une équivoque : le terme de combat, qui ne figure pas dans notre évangile, pourrait laisser entendre quelque chose de volontaire, de difficile, de surhumain. Mais le désert de notre évangile est un espace trinitaire : poussé par l’Esprit, Jésus conduit tout au Père. Le combat dont nous parlons est, lui aussi, spirituel, non qu’il ne concerne pas notre corps, bien au contraire, mais le maître est l’Esprit (et pas nos petites idées), la victoire est du Christ (et pas au bout de nos seuls efforts), le terme est le Père (et pas nos idoles). Nous tourner librement vers le Père, de qui nous tenons tout et à qui nous offrons tout : allons pour cela au désert à la suite du Christ et poussé par l’Esprit ! Je nous souhaite un bon carême : la victoire du Seigneur nous devance !

Amen

Fr. Guillaume Dehorter, ocd

http://www.carmel.asso.fr/Homelie-d-Avon-1er-Dimanche-de-Careme.html

--------------------------------------------------------------------------------

4-Réflexion pour le 1er dimanche du Carême A

«Les tentations humaines»

Les juifs exilés connaissaient les récits de l’origine du monde de leur terre d’exil et ils avaient sous les yeux la splendeur des jardins de Babylone. L’auteur du Livre de la Genèse utilise cela pour raconter que Dieu a proposé une Alliance. Le peuple juif l’a acceptée, mais il l’a trahie. L’auteur raconte la première rupture de l’humain avec Dieu. Ce qu’il raconte d’Adam est notre histoire. Faire alliance avec Dieu, c’est accepter de recevoir, alors que nous voulons construire notre vie à notre manière, par nos propres forces. Cette attitude a été celle d’Adam, c’est aussi notre tentation. C’est la tentation de l'avoir, du pouvoir et de la prétention de se passer de Dieu. C’est la tentation de douter de Dieu, de ne pas lui faire confiance. La relation d’amour avec Dieu est brisée.

En disant que par un seul homme, Adam, le péché est entré dans le monde et que par le péché est venue la mort, saint Paul développe le récit de la première lecture. Depuis le chemin de Damas, Paul connaît la gloire que Dieu nous réserve, il sait ce dont nous nous privons en la refusant. Ce chapitre 5 de l’épître aux Romains a historiquement pris une grande importance depuis que St Augustin s’est appuyé sur ce texte pour fonder le dogme du péché originel. C’est par Jésus ressuscité et la foi en lui que nous sommes réconciliés avec Dieu, que nous entrons dans une relation d’amitié avec lui. Jésus ressuscité est la réponse de Dieu au mal. Dieu ne veut pas avoir avec nous une relation de dominant à esclave. Il veut une relation de partenaire, ce qui suppose que chacun exerce sa liberté. Nous pouvons refuser cette relation. Notre nature humaine suffit à faire que nous soyons tentés. Dans un récit théologique, Matthieu a concentré en trois scènes le combat de Jésus tout au long de sa vie. Une vie remplie d'épreuves, comme la nôtre. Jésus a vraiment été tenté, éprouvé, écartelé entre des tendances opposées. Il a dû faire des choix importants et décisifs. Des choix concernant ce qu'il pressentait comme sa mission. Jésus a été solidaire de nous tous jusque dans ce qui nous assaille intérieurement et qui demeure obscur et quasi inavouable : toutes les pulsions, toutes les envies, tous les fantasmes qui hantent nos esprits et nos cœurs. Tout l’inhumain qui est tapi en nous et qui ne cherche qu’à nous submerger. Humain comme nous, Jésus se voit affamé tant il a faim, aveuglé par l'invitation de séduire les foules en se jetant du haut de la falaise, désarmé devant les grandeurs de la gloire qu'on lui présente. Pour affronter ce chemin, pour refuser cette tentation du miracle pour se sortir d'un environnement non agréable, Jésus n'a qu'un seul atout : son dialogue et sa confiance en Dieu.

Lorsque nos tentations semblent nous submerger, quand tout autour de nous pourrait indiquer l’obscurité et le mal, rappelons-nous que c’est après avoir vécu au désert que Jésus résista à la tentation. Seul et sans défense , exposé à l’absence de Dieu, cette expérience au désert fait partie de la croissance et de la maturité humaine. Le désert c’est la solitude, le dénuement, le silence et l'austérité, mais paradoxalement c'est le plus beau lieu de rencontre avec soi-même et avec Dieu. Ce mouvement vers l'intériorité fait partie de notre passage au désert. Il nous permet d'aller au fond de nous-mêmes, de faire le point, de vivre un abandon à Dieu. Ces déserts prennent diverses formes : insatisfactions, doutes, nuits, tristesse, maladies, solitude, manque, indigences de toutes sortes. Mais comme pour Israël, c'est là que Dieu nous attend. Ce qui nous rendra forts est notre confiance en Dieu.

Nous pouvons faire appel à diverses techniques pour affronter les épreuves du désert. Si vous voulez arrêter de fumer, dites-le à votre entourage; cela semble imparable, cependant ça ne l’est pas. De manière générale, celui qui peut se lier peut aussi se délier. Par exemple, il existe une méthode pour lutter contre la cocaïnomanie chez les médecins américains. Ils écrivent une lettre où ils avouent leurs habitudes et la confient à leur clinicien. Puis ils se soumettent régulièrement à des tests de contrôle. Si le test s’avère positif, il est convenu que la lettre est envoyée aux autorités, sauf si le patient révoque sa lettre de confession dans un délai de quinze jours. Pratiquement tous les médecins ayant été contrôlés positifs ont usé de ce droit, pour immédiatement d’ailleurs se repentir et envoyer une seconde lettre validant leurs aveux. Le problème c’est se croire plus fort que l’humanité, de ne compter que sur soi-même. Chaque fois que l’être humain se retrouve au désert, dans la solitude, il doit faire le choix entre se replier sur soi dans cette solitude, ou en faire un instrument de communion. La tentation est de se refermer sur soi, de ne rechercher que la satisfaction de ses besoins et de ses désirs individuels, de tout ramener à soi. Jésus nous a révélé à travers sa vie d’homme qu’il y a un autre chemin.

Le Royaume de Dieu n’est pas dans la force, le prodige, le spectaculaire, la séduction. Il n’est pas dans la manipulation des consciences. Jésus refuse la divinisation de l’humanité. Jésus n'est pas seulement le chemin vers le Royaume de Dieu, il marche en pèlerin vers nous. Il vient à notre rencontre, il se fraie un chemin jusqu'à nous, en empruntant nos routes. La liturgie nous invite à nous tourner vers l'intérieur de nous-mêmes. Loin de créer une grande division entre Jésus et nous-mêmes, nos propres épreuves et faiblesses peuvent devenir le lieu privilégié de notre rencontre avec Dieu. Le temps de carême nous offre de vivre un pèlerinage intérieur, car dans nos déserts se cache un puits. Dans notre intériorité se trouvent des forces inestimables.

La première lecture demandait : Adam où es-tu ? Et moi, où suis-je ? Qu'est-ce que Dieu attend de moi dans ma vie ?

Serge Lefebvre

D'après diverses sources

http://francoisassise.homestead.com/homelies.html

----------------------------------------------------------------------------------------

5-THE TEMPTATIONS OF CHRIST-Mt 4,1-11 by William Barclay

*Open here

*N.B: William Barclay est théologien protestant