99996.4e Dimanche du carême-A

1-Homélie du 4ème dimanche du Carême

26/03/2017

Guérison de l'aveugle-né

Ce 4ème dimanche du Carême est celui de la joie. C'est la joie d'un peuple déporté en terre d'exil qui entend une bonne nouvelle. Le prophète Isaïe lui annonce que Dieu est là au cœur de ses détresses. Il intervient pour apporter le salut à ce peuple opprimé. C'est aussi la joie des catéchumènes qui vivent la 2ème étape de leur baptême. Des enfants d'âge scolaire et des adultes se sont mis en route pour ce grand événement.

Tout au long de ce carême, nous sommes invités à "changer nos cœurs". Les textes bibliques de ce jour nous invitent à changer notre regard sur les personnes et les événements : "Dieu ne regarde pas comme les hommes. Les hommes regardent l'apparence. Dieu voit le cœur. Avoir le cœur de Dieu c'est voir les qualités et la grandeur de celui qui est petit, faible et méprisé. C'est reconnaître que, lui aussi, est capable de grandes choses.

Au jour de notre baptême, nous avons été introduits dans le monde de la lumière. Saint Paul nous dit que cela n'est devenu possible que par la grâce du Christ. Il est la "lumière du monde". Lui-même nous appelle à vivre en "enfants de lumière". Ce qui doit nous guider c'est la Lumière qui est en Jésus, c'est son amour. Il est toujours là pour nous apprendre à voir les autres avec le regard de Dieu, un regard plein de miséricorde.

Dans l'Évangile, nous voyons Jésus qui guérit un mendiant aveugle de naissance. Il lui ouvre les yeux deux fois. Il commence par lui rendre la vue qui lui permettra de voir les personnes et le monde qui l'entoure. Et dans un deuxième temps, il lui ouvre les yeux de la foi. Tout cela se fait progressivement. Dans un premier temps, l'homme guéri parle de "l'homme qu'on appelle Jésus" ; ensuite il voit en lui un prophète ; puis quand il se trouve devant lui, il se prosterne en disant : Je crois, Seigneur." Comme cet homme, nous sommes appelés à passer des ténèbres à la foi. Nous aussi, nous sommes souvent aveugles ou malvoyants. Cet aveugle-né est le symbole de l'humanité plongée dans les ténèbres. Mais par le baptême, elle découvre la Lumière du Christ. Pour ces nouveaux convertis, c'est une illumination. C'est la Parole de l'Évangile de saint qui s'accomplit : "Le Verbe était la Lumière, qui, en venant en ce monde, illumine tout homme.

Face à cet homme guéri et sauvé, il y a tous ceux qui sont aveugles dans leur esprit et dans leur cœur ; il y a ceux qui s'enfoncent dans leur aveuglement qui est celui du péché. Comme le hibou ou la chouette, ils sont aveuglés par la lumière du jour. La Lumière de Dieu, la Lumière de la Vérité leur fait peur. Mais nous ne devons pas avoir peur de la Lumière de Jésus Christ ; il se présente à nous comme le soleil qui rendra lumineuse notre vie.

Autre constat : il arrive parfois que le soleil se cache : il y a des nuages, des épreuves ; il y a aussi la nuit. Mais quand il fait nuit, il ne nous vient pas à l'idée de douter de l'existence du soleil même si nous ne le voyons pas. L'amour du Seigneur est toujours bien présent, même quand tout va mal. Il est toujours là pour nous éclairer et, souvent c'est lui qui nous porte. Il veut nous conduire jusqu'à la victoire sur le péché et sur la mort. Tout l'Évangile nous dit qu'il est venu pour chercher et sauver ceux qui étaient perdus. "La gloire de Dieu c'est l'homme vivant" dit saint Irénée.

La suite de l'Évangile nous parlera des souffrances, de la Passion et de la mort de Jésus ; c'est là qu'il a assumé toutes les misères et tous les handicaps du monde. Jésus nous révèle un Dieu qui n'explique pas les souffrances, qui ne condamne pas mais qui prend sur lui le péché du monde. Il devient solidaire de tous ceux qui sont "nés comme ça". Et surtout, il devient source de toute guérison et de la santé totale de l'homme.

Dieu ne prend pas son parti de la misère de l'homme. Il l'assume. La croix n'est pas un signe d'échec, de résignation ; c'est une protestation, une victoire sur tout ce qui abîme l'homme. Jésus nous donne un signe de cette victoire pascale en ouvrant les yeux de l'aveugle-né et en lui donnant un accès à une autre lumière, celle de la foi. C'est aussi à cette lumière que la Samaritaine a pu accéder (Évangile de dimanche dernier). Et dimanche prochain, nous découvrirons Jésus qui redonne vie à Lazare. À travers ce signe, il s'affirmera maître de tous les handicaps, y compris le dernier, la mort.

Vivre le Carême, c'est accueillir cette lumière qui vient de Jésus. Cette lumière c'est celle de la foi. Elle nous aide à voir les personnes et les événements avec le regard de Dieu. Comme l'aveugle guéri, nous deviendrons des témoins du Christ. Nous pourrons proclamer notre foi avec fierté : "Je crois en Dieu qui est lumière, Je crois en Dieu, il est mon Père." Amen

Sources : Revues Signes, Feu Nouveau, Fiches dominicales – "C'est dimanche (Emmanuel Oré) – Homélies de l'année liturgique A (Simon Faivre)

Jean Compazieu, prêtre de l'Aveyron ( 26/03/2017)

*Source

-------------------------------------------------------------------------------------

2-HOMÉLIE DE LA MESSE DU 4E DIMANCHE DU CARÊME

Jean 9, l’aveugle né

Pour comprendre cet évangile, il nous faut commencer par la fin. Jésus apostrophe durement les pharisiens : «Si vous étiez aveugles, vous n’auriez pas de péché. Mais du moment que vous dites : ‘nous voyons !’, votre péché demeure».

Le parcours de l’aveugle-né est en effet exemplaire. Celui des disciples est un chemin de conversion tandis que celui des religieux est lamentable. Les disciples sont bardés du catéchisme de leur temps. Ils croyaient que toute maladie était le signe d’un péché.

"Alors, que dire de celui qui était né aveugle ? Qui avait péché ?" demandent-ils à Jésus. "Lui, mais c’est improbable qu’il ait pu pécher avant que de naître ! Ses parents ? Mais Jérémie, Ezéchiel, n’ont-ils pas écrit, il y a déjà longtemps, que les enfants ne souffriraient plus en raison du péché de leurs parents ?"

Jésus se situe beaucoup plus haut. Il voit dans le malheur qui accable cet homme l’occasion offerte à Dieu de manifester sa gloire. Cela seul lui importe.

Il n’est pas venu pour distribuer des blâmes ; il est venu pour guérir. Il n’est pas venu enfoncer les pécheurs dans leur culpabilité, il est là pour qu’ils retrouvent l’espérance et la vie. Il n’est pas venu souligner les défauts, il est venu rétablir la confiance : confiance en soi, confiance en Dieu. Il ouvre les yeux, il ouvre l’avenir.

L’aveugle-né avance pas à pas, de la cécité la plus totale à la vision claire, puis à la confiance, qui illumine les yeux de son coeur. Il accomplit le pèlerinage de la foi : guéri par l’homme qui lui a dit d’aller se laver, il en vient peu à peu à reconnaître le Fils de Dieu venu illuminer sa vie toute entière.

L’aveugle né a pu cheminer vers cette Lumière parce qu’il se sait handicapé. Il sait qu’il a besoin des autres – et du Christ.

Au contraire, les pharisiens, eux, s’enfoncent dans les ténèbres. Ils croient savoir. Ils disent qu’ils voient, et leur assurance les aveugle. Incapables de se réjouir du bien que fait Jésus, ils l’accusent d’être un pécheur ! Ces maîtres de la loi sont aveuglés et ils bafouillent.

Ce renversement de situation est bien dans la manière de Jésus. Et tout cela se déroule en son absence. Il était là, au début et il redonna la vue. Il remet sur le chemin celui dont tout le monde pensait qu’il était hors-jeu.

Le reste se met en branle à partir de là. Tout bouge, parce que Jésus a posé un geste d’amour qui est un geste de vie, de guérison. Avec Jésus, les damnés de la terre font bouger le monde.

Le cheminement de l’aveugle est à l’image de celui de tous les catéchumènes qui, en ce temps de carême, cheminent dans la foi et se préparent au baptême dans la lumière de la sainte nuit de Pâques.

Aveugles, frères et soeurs, nous le sommes tous. D’ailleurs l’expression grecque utilisée par Jean le suggère, il parle de l’aveugle-né, mais sans article défini. Il nous donne à croire que l’aveugle-né représente l’humanité tout entière. Aveugles, nous le sommes tous.

Mais je pense d’abord à tous ceux ici, ou devant leur écran, qui se sentent mal. Je pense à vous qui vous aimez si peu, ou qui ne vous sentez pas aimés du tout ; à vous qui souffrez sans trop savoir pourquoi, à vous qui ne savez pas dans quelle direction vous engager ; à vous qui peut-être pensez avoir raté votre vie.

Ne vous posez pas la question qui brûlait les lèvres des disciples pour savoir qui est coupable. Approchez vous du Christ. Il peut faire en sorte que dans votre souffrance se manifeste aujourd’hui l’amour de Dieu.

C’est à vous que Jésus déclare : «Je suis la lumière du monde». A vous qu’il ne demande qu’une seule chose : «Crois-tu au Fils de l’homme ? Tu le vois, c’est lui qui te parle !». A vous, qu’il veut, aujourd’hui, être présent !

Venez au devant de lui, dites-lui simplement : «Seigneur, que je vois !» Et faites-lui le signe qui lui permette de vous dire à son tour : «Ta foi t’a sauvé».

Aveugles, nous le sommes tous. Je pense à tous ceux, ici et partout, qui, comme moi peut-être, ne s’estiment pas aveugles au fond, mais croyants. C’est pour nous aussi que le Christ se présente aujourd’hui. Nous croyons tout savoir. Peut-être même que si nous nous reconnaissons pécheurs, nous estimons savoir où se situe notre péché.

Malheur à nous si nous en sommes là, car à nous s’adresse alors ce message : «du moment que vous dites : ‘nous voyons !’, votre péché demeure ».

Ce temps de carême nous est donné pour recevoir de nouveau la lumière de l’évangile, là où l’obscurité nous rend aveugles. Alors, demandons, aujourd’hui que cette lumière nous révèle où se situe notre aveuglement.

Parmi la cécité dans laquelle sans aucun doute nous nous débattons aujourd’hui, il y a celle de vivre dans un monde où, membres d’un des pays les plus riches du monde, nous avons laissé la misère s’installer plus fortement qu’il y a trente ans : 4 millions de personnes en France vivent au dessous du niveau de pauvreté, tandis que 2,8 milliards d’humains n’ont pas même deux € par jour pour vivre.

Aveugles en effet nous le sommes par notre manière de vivre, notre bien être et notre train de vie souvent. Aveugles nous le sommes par la façon dont nous participons d’une société qui abîme la terre, qui gaspille l’énergie, qui ne partage pratiquement rien de son superflu. Notre pays ne verse, comme aide publique au développement, que 0.34% de son budget, même pas la moitié de ce que nous avons promis, et 30 fois moins que la dîme de la Bible ! Et lorsque nous donnons 5,3 milliards d’€ pour le développement, nous vendons des armes à hauteur de 6,5 milliards d’€ !

Aveuglés, nous le sommes encore, lorsque nous accusons les pauvres d’être à l’origine de leurs malheurs, nous les disons aveugles, et rejetons sur eux la cause de leur pauvreté, les accusant soit eux-mêmes soit leurs parents du péché de leur misère.

Je repense à cette phrase terrible de M. Cartier : "les peuples du tiers-monde ont voulu l’indépendance, qu’ils se débrouillent". Nous ne le disons sans doute pas, mais dans les faits, qu’avons nous fait pour ne pas les laisser se débrouiller ?

Frères et soeurs, je n’ai pris qu’un exemple.

C’est celui que le saint Père nous rappelle dans son message pour le carême. Il nous dit : «Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement». Quand je pense que dimanche prochain, par votre collecte de carême, nous allons sans doute donner, comme l’an dernier, 10 millions d’€, je vous l’avoue, j’ai presque honte ! Car le téléthon, tout seul, en ramasse 70 millions. Et je n’ai pas encore entendu dire, qu’à cause du téléthon, des donateurs s’étaient privés de vacances !

Alors, avec vous, je fais monter cette prière à Dieu notre Père : "Fais, Seigneur Jésus, que je vois. Je ne sais pas comment faire, mais avec ta grâce, aidé par mes frères et soeurs en Eglise, je te le demande. Fais-moi reconnaître que tout ce que j’ai, je l’ai reçu de toi, non pas pour moi tout seul, mais afin que personne ne manque du nécessaire. Permets qu’à l’exemple des premiers chrétiens, de François d’Assise et de Charles de Foucauld, je ne considère plus jamais que ce que je possède m’appartient. Fais-moi un coeur qui ne partage pas du bout des lèvres, mais en vérité et à la hauteur du besoin de mes frères et de mes soeurs. Alors, avec Marie, Ta douce mère, je pourrai chanter à jamais les merveilles de ce Père qui vient et renverse les puissants de leur trône, qui renvoie les riches les mains vides, qui élève les humbles et comble de bien les affamés.»

*Source

------------------------------------------------------------------

3-Quatrième dimanche de carême A-26 mars 2017

Jean 9, 1-41

Au tiercé des candidats au trône, le petit roux aux yeux bleus n’avait aucune chance. Le dernier-né de Jessé, le huitième, n’était d’ailleurs qu’un jeune adolescent. Samuel, le prophète, ne songeait pas à lui... Mais c’est le benjamin qui fut choisi : David ! Un bien mauvais choix aurait dit les spécialistes ou les frères évincés. Une imprudence et une folie ! Mais Dieu ne juge pas selon les apparences humaines. Le Seigneur regarde le coeur. « L’Esprit du Seigneur s’empara de David à partir de ce jour-là » (1ère lecture), au point qu’il devint une lumière pour son peuple.

Etrange lumière d’ailleurs : elle ne jaillit pas des ressources de la connaissance ni de l’habileté du pouvoir, mais bien de cette intelligence du coeur qui se nourrit de l’intimité avec Dieu. Nous voici donc invités à nous laisser éclairer par la lumière véritable pour devenir à notre tour petite lampe qui produit dans l’obscurité du monde « bonté, justice et vérité » (2ème lecture).

Le mendiant des souks de Jérusalem était né aveugle. Il ne pouvait voir la lumière. Jésus, pourtant, refait pour lui le geste du créateur. Car cet homme né dans les ténèbres est le vivant symbole de l’humanité plongée dans la nuit de l’incroyance. Jésus pétrit de la boue pour en faire un homme nouveau. Il va le faire naître de l’obscurité à la lumière. Il va le faire passer de l’ignorance à la confiance.

L’homme accepte de se laisser envoyer à la piscine de Siloé. Il est recréé voyant par l’eau qui régénère.

Il devient alors le témoin de Celui qui l’a fait voir en racontant ce qui lui est arrivé. Et de proche en proche, la parole de l’aveugle guéri s’affermit. Après les doutes des voisins, ce sont les refus réitérés des pharisiens, qui jugent Jésus sur l’observance du sabbat telle qu’ils la comprennent. La défiance s’installe, alors que grandit la foi de l’ancien aveugle. Il est frappant de constater que Jésus que Jésus n’est présent, dans cette scène d’évangile, qu’au début et à la fin. Au cours du véritable procès qu’on lui intente, il est absent. Et c’est l’aveugle qui devient son représentant dans le monde incroyant.

Les parents à leur tour se dérobent. Quand leur fils est exclu de la communauté, Jésus l’accueille. Et c’est de cette rencontre personnelle que peut vraiment s’épanouir la véritable joie de croire. On croirait déjà entendre, dans ce dialogue, la liturgie baptismale de la nuit de Pâques :

- « Crois-tu au Fils de l’homme ? »

- Et qui est-il, Seigneur, pour que je croie en lui ? »

- « Tu le vois, et c’est lui qui te parles. » - « Je crois, Seigneur » et il se prosterna devant lui. »

Nous avons toujours à poursuivre notre initiation baptismale. Nous avons à nous laisser abreuver de l’eau vive de sa parole, comme la Samaritaine de dimanche dernier, pour célébrer avec lui le culte en esprit et vérité. Nous sommes invités, particulièrement en Carême, à renaître d’eau et d’Esprit Saint, pour, le regard purifié, accéder à la claire vision de Jésus. Ainsi, nous serons les témoins de la transfiguration qu’il opère en nous.

*Source

----------------------------------------------------------------

4-Réflexion pour le 4e dimanche du Carême A

«Aveuglé dans le monde»

La longue traversée du désert a été pour le peuple d’Israël un temps de tentations et de murmures. Elle a été une épreuve pour sa foi en Dieu. L’épreuve dont parle Exode dans la 1re lecture a été celle de la soif et du doute. Comme à chaque nouvelle difficulté, le peuple s’assemble autour de Moïse pour rouspéter. En dépit de la manne fournie comme signe de l’amour de Dieu, le peuple regrette le passé. Moïse et Aaron se tournent vers Dieu et s’en remettent totalement à lui. Dans l’eau qui coule du rocher au désert, dans cet autre signe, la tradition juive verra la source de vie. En 2e lecture, Saint-Paul évoque l’amour de Dieu répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint quand nous vivons dans la foi. L’espérance chrétienne est basée sur la certitude que Jésus est ressuscité et que Dieu nous aime. Dieu s'offre à nous comme la source d'eau vive. Lui seul peut satisfaire notre soif profonde. Lui seul peut répondre au désir le plus profond de nos cœurs, au désir de vivre de chacun de nous.

Les premiers chrétiens attachaient de l'importance à la rencontre en territoire samaritain racontée par saint Jean. En effet, Jésus avait dit aux apôtres après sa résurrection : vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'aux extrémités de la terre (Act 1,8). Pour aller de la Galilée, au nord, jusqu’en Judée, au sud, le plus court chemin passait par la Samarie. Dès le début de cette province, ses habitants étaient composés de Juifs d'autres ethnies. La plupart des Juifs de Judée et de Galilée refusaient de se mêler aux Samaritains parce qu'ils les considéraient comme hérétiques et impurs, car ils pratiquaient leur culte ailleurs et différemment d’eux. Les Judéens assimilaient les Samaritains aux peuples païens. Cette répugnance avait dégénéré en antipathie. Jésus agit autrement. C'est à tous sans exception que Jésus veut annoncer l'Évangile. C'est midi. Jésus a marché sous l'écrasant soleil des montagnes. Il s'est assis sur la margelle d’un puits. Jésus aborde une femme considérée comme hérétique. Il ne l’aborde pas en détenteur de la vérité ni en homme de pouvoir, mais par une demande mettant à nu sa vulnérabilité. La soif à laquelle pense la Samaritaine n'est pas la soif dont parle Jésus, celle qui donne un sens à notre vie, celle qui procure le bonheur. Jésus va la conduire plus loin jusqu’à ce qu’elle renonce à ses conditionnements. Elle laisse sa cruche et tout ce qu’elle symbolise. La femme Samaritaine, blessée de la vie, est transformée par sa rencontre de Jésus. Elle peut maintenant réintégrer son peuple. Elle partage sa découverte avec les gens de sa ville. À leur tour, ils y croient. La foi guérit toutes les blessures et redonne la dignité humaine.

La rencontre avec Dieu n’est pas réservée à une élite ou à des gens vertueux. Cette rencontre n’est possible que pour ceux et celles qui ont soif : soif de justice, soif de dignité, soif de pardon, soif de paix, soif d’amour, soif de Dieu. Ceux-là sont souvent blessés par la vie ; les autres n’ont souvent soif de rien. Ils croient s’abreuver à leur propre source, et pourtant, ils sont sur le point de mourir de soif. Pour la Samaritaine, la rencontre avec Jésus est bouleversante. Elle a posé la question de la religion et du temple ; la question qui est posée est la suivante : quelle est la vraie religion ? Celle des Juifs ou celle des Samaritains ? Celle des catholiques ou celle des protestants ou des autres confessions. Les religions n’expriment pas la foi. La foi se situe à un autre niveau et les religions mal vécues peuvent même empêcher la foi de s’exprimer et devenir des causes de divisions et d’exclusions. Ce n’est pas la religion qui importe, c’est-à-dire telle ou telle pratique rituelle. Prier, venir à la messe, lire la bible, avoir des images pieuses au mur, jeûner pendant le carême, faire le ramadan, tout cela n’est rien si nous ne sommes pas ouverts et accueillants à l’essentiel. L’essentiel qui est l’autre et nous dit : donne-moi à boire. De quoi, de qui avons-nous soif ? À quel Dieu nous abreuvons-nous ? Avec quel Dieu faisons-nous alliance ? Les sources que nous mettons en pratique sont-elles nourrissantes ? Combien de fois sommes-nous déçus par ce que nous croyons être des sources qui combleront entièrement notre vie. Nous sommes invités à nous situer par rapport au personnage de la Samaritaine. Il n'y a que Jésus que la Samaritaine a rencontré qui peut nous désaltérer, il est l'eau vive. La parole de Dieu n'est plus seulement une parole écrite sur la pierre ou sur le papyrus. La parole s'est inscrite dans un cœur humain. Elle est animée par un esprit d'amour.

Venez voir, venez croire, venez et croyez, nous dit la Samaritaine. Alors, allons-y et voyons par nous-mêmes ce que tout cela peut bien vouloir dire pour notre vie. L'eau vive que Jésus ressuscité nous donne à boire fait de nous des êtres vivants de Dieu. Cette eau vive répandue dans nos cœurs à donner à notre tour. C’est là que tout se joue, dans le rapport à l’autre. C’est là que nous buvons à la source de la vie éternelle. L'eau vive, c'est l'Esprit Saint, le souffle, la vie de Dieu qui est une vie d'amour. Le voilà le don de Dieu reçu à notre baptême, mais que souvent nous avons laissé dans son emballage. Pendant ce temps du carême, nous avons l'occasion de redécouvrir ce cadeau de Dieu. Cela peut nous emmener loin, plus loin que la curiosité. L'Évangile nous éveille à la vie, nous redonne confiance, cœur et courage, malgré les difficultés, les pesanteurs et les jugements hâtifs. Il nous révèle qui nous sommes. Il nous appelle à vivre, il nous engage à marcher sur des chemins nouveaux, en laissant là nos vieilles cruches.

Même dans le désert de notre vie, l'eau vive peut jaillir. Dieu est là, toujours présent.

Serge Lefebvre

D'après diverses sources

**Source

-----------------------------------------------------------------

5- LIGHT FOR THE BLIND EYES (John 9,1-41)

by William Barclay

*Open here

*N.B: William Barclay est théologien protestant