Ce que dit le psychanalyste (c'est quoi interpréter?)


C'est quoi parler ? Pourquoi parle-t-on? Du moins comment parle-t-on sur le divan? On se rend compte assez vite que cela n'est pas une parole comme les autres, puisque très vite on se rend compte que ce n'est pas une discussion comme les autres, et même, ce n'est peut-être pas une discussion du tout. Au début l'analyste parle un peu, pose des questions étranges ou étrangement à ras de terre, et ensuite il s'agit plus d'un discours fleuve du patient. Mais Parler ça n'est pas dire et ça n'est pas écrire non plus et pas non plus se taire ni bavarder . Parler ca n'est pas simplement émettre des mots, communiquer, prononcer des choses les unes à la suite des autres... La parole change de statut, prend une autre nature avec ce dispositif et c'est précisément expérimenter les effets de cette autre nature de la parole qui est recherché dans l'analyse, parce que cette modification produit un certain nombre de changements. Si se figurer cela est difficile, mettez l'eau à la place de la parole: les aquariophiles le savent, pour guérir les poissons il ne faut pas manipuler les poissons eux-mêmes mais il faut opérer sur la composition de l'eau. Si le psychanalyste arrive à faire sentir quelle est la nature de la langue avec laquelle parle le patient, celle dans laquelle il baigne, si on y parvient (en parlant, c'est un paradoxe) cela aura des retentissements sa vie, certains en témoignent.


Que peut-on espérer obtenir d'une psychanalyse?


"guérir, c'est moins souffrir et c'est se décider pour ceci ou pour cela" disait Freud, la psychanalyse n'empêche pas cela, mais la psychanalyse ce n'est pas cela. On peut s'adresser à un psychanalyse pour guérir, mais l'analyse ne commence qu'une fois que la crêpe est retournée, une fois que guérir ou non est une question réglée. Faire un travail d'analyse c'est d'abord avoir une interrogation sur ce qui cloche. La guérison comme objectif n'est pas un problème en soi, cela devient problématique quand dans cette discipline, guérir devient le seul objectif. C'est un problème qui ne se pose pas dans un bien d'autres champs. Nul besoin de retourner chez le chirurgien une fois que l'opération a eu lieu; le psychanalyste c'est différent en ceci que son acte nécessite qu'on fasse le tour en parlant, plusieurs fois, du problème. Et ceci prend l'allure d'une marche, d'une mise en marche, celle de la parole du patient, dont il est possible d'établir à l'avance le rythme mais non le lieu ni l'heure d'arrivée, cela serait trompeur. Une psychanalyse est souvent longue et couteuse, et ceux qui viennent pour ceci font un usage de la psychanalyse qui leur est propre qui relève de ce qu'ils y déploient, ceux qui s'y mettent, peuvent espérer non sans effort obtenir un effet sur le rapport qu'ils ont à la vie, à leur être et à leur symptôme. Au contraire, s'il n'y a pas d'interrogation, l'analyse tournera court. L'analyse ne peut se soutenir que d'une liberté de circulation, une liberté de circulation dans la parole de l'autre, des autres, et de la sienne propre.