Jean-Jacques Gaffiot

Originaire d’Epinal où j’étais voisin d’Etienne Perrin de la même rubrique (il y avait là sans doute une pépinière de génies !), je me suis implanté en location à Maupotel en 1985 car c’était à mi-chemin entre Epinal et Relanges où vivait ma future épouse. Cet écrin de nature à deux pas de la forêt correspondait très bien à ma nature calme, aventureuse et curieuse. En effet, le plaisir et la curiosité ont toujours été les deux moteurs essentiels de ma vie : j’essaie de ne faire que ce qui me plaît surtout de manière bénévole et je mets alors un point d’honneur à le faire au mieux, difficilement parfois car je fais plus partie des besogneux mono-tâches successives que des êtres d’exception doués et touchés par la grâce. Je n’ai guère d’autres ambitions mais c’est déjà un sacré challenge qui permet d’échapper au mieux aux compromissions et sacrifices divers de l’ascenseur social et de dire à peu près ce que je pense en toutes circonstances ; tout cela agrémenté d’une pratique compulsive d’un humour très basique ou à multiples degrés qui peut être plus ou moins bien compris et apprécié.

C’est en 1987 que je croise par hasard dans le vallon Saint Martin, Pierre Fetet, un copain d’enfance et de scolarité, qui se passionne comme moi pour ce site si particulier qui cumule un nombre invraisemblable de vestiges de toutes époques. Puis vient se greffer à ce duo Olivier Bertin, copain de pratique musicale, avec lequel nous animions les bals folk du Grand Est au sein de « Garlamb’Hic », un improbable groupe de musique celtique vosgien ! Ce sont donc l’amour des vieilles pierres et, je l’avoue honteusement, l’aura mystérieuse du site de saint Martin qui nous ont réunis alors (Que celui qui n’a jamais lu un livre à couverture rouge de Robert Charroux me jette la première pierre !). Nos débuts furent modestes passant des jours à débroussailler, démousser des rochers, relever le seul visible et se rendre compte de l’ineptie des nombreuses théories de nos prédécesseurs qui, au fil des temps, avaient pris valeur de certitude.

En ces temps obscurs et merveilleux, la seule trouvaille d’une tuile romaine nous excitait comme des poux pendant plusieurs semaines et noircissait trois pages des rapports annuels dont nous n’avons cessé d’abreuver la mairie et les autorités archéologiques depuis maintenant plus de trente ans.

C’est en 1996 que la famille Gaffiot qui s’est agrandie s’installe à Escles dans la rue de l’église juste en face de la mairie. La ruelle de l’église devient un havre de quiétude bio pour la faune et la flore où la « propreté » chimique et macadamisée si chère au monde cruel qui nous cerne est proscrite. Nous essayerons d’être une fenêtre pour montrer que l’on peut penser, agencer, jardiner, procéder autrement tout en remplissant sa cave et son congélateur, et que le beau peut être synonyme de simplicité.

Nous initions avec quelques autres habitants le Foyer rural des trois hameaux qui après quelques années de vie intense s’étiolera avec le temps et l’érosion des bonnes volontés. Il renaît actuellement entre de nouvelles mains.

N’oublions pas cette lutte commune et épique initiée avec quelques activistes du secteur au sein du CRAD contre l’implantation d’une décharge géante à Pierraumont : une véritable saga de cinq années qui vit plus de 400 personnes défiler à Epinal et l’instauration par notre action de la pesée embarquée qui, désormais, est devenue chose banale. Cette victoire est la preuve que quand on veut, on peut ; que le mot « politique » n’est pas un gros mot et qu’il ne faut pas tout accepter sans réagir.

En 1991, l’association « Escles-Archéologie » est créée par le trio afin de pouvoir financer nos actions qui se « professionnalisent » progressivement. Nous nous formons en autodidactes et au gré des rencontres car on n’apprend jamais aussi bien que sur le terrain et au contact des autres. Nous quittons enfin le vallon saint Martin devenu trop petit, que nous avons fouillé et mis en valeur de fond en comble, pour étendre nos actions à toute la Vôge et au-delà. Je continue de parcourir inlassablement les forêts à la recherche du moindre indice d’occupations passées.

En 1999, je fais la découverte de ma vie : en suivant une voie romaine, je tombe par hasard sur les ruines d’un sanctuaire antique en forêt de la Pille à Vioménil. Celui-ci sera fouillé pendant sept années dans une ambiance conviviale, cosmopolite et joyeuse en accueillant des locaux. Il livrera le plus bel ensemble de sculptures antiques du département !

Nos fouilles s’enchaînent au gré de la reconnaissance acquise aux forceps de nos autorités de tutelle. Elles se déroulent souvent en des lieux domaniaux, reculés et forestiers car hélas, trois fois hélas, l’agriculteur ou le propriétaire villageois n’aiment pas l’archéologue : il est pour lui un croquemitaine qui va entraver ses travaux qui ne peuvent souffrir la moindre journée de retard ! Il me faut donc au moindre cliquetis de chenilles dans le village endosser l’habit et les bottes du personnage le moins enviable que l’on me force à jouer à Escles : celui de l’emmerdeur qui apparaît dès que cela sent la terre fraîche, à la recherche de ses « cailloux » sans intérêt. Comme tout pourrait être si agréable si l’archéologie ne créait plus cette peur atavique de spoliation et d’interdiction qu’elle traîne à ses basques ! Que d’occasions perdues, de vestiges cachés ou détruits sitôt découverts… Trente années de cohabitation, de travail au corps, d’articles de presse, de conférences, d’expositions n’auront que peu fait progresser notre cause désintéressée pour une meilleure connaissance de la vie de nos ancêtres qui, avec le peu d’os qu’il leur reste, doivent se retourner dans leurs tombes. Je continuerai donc à jouer le Colombo des chantiers en sauvant ce qui peut l’être mais c’est un rôle dont je me passerais avec grand plaisir !

Voilà ce que j’ai pu modestement apporter à la vie de la commune avec mes collègues. Ajoutons en vrac d’autres passions :

La spéléologie avec de multiples réalisations et travaux de recherche dans les Vosges notamment à Sans-Vallois, Trampot, …

La photographie des lambeaux de nature ayant échappé aux multiples attaques qu’elle subit.

L’astronomie qui me voit hanter nuitamment tous les lieux élevés et relativement préservés de la pollution lumineuse du secteur.

La musique avec une pratique aussi multi instrumentale que laborieuse.

Avec ses trente années d’existence l’association Escles-Archéologie est enfin reconnue par ses pairs et peut désormais avoir accès à des opérations d’envergure, scientifiquement intéressantes. Elle ne demande qu’à intervenir plus encore dans la commune qui fut son berceau et qui l’accueille par ailleurs généreusement. La balle est dans le camp des Escloniens !

Jean-Jacques GAFFIOT

Le trio d'Escles-archéologie

Encore les pieds dans la m....

Céramique romaine aux serpents et tête de méduse






Le rêve réalisé de l'archéologue

Archéologie surréaliste

Fouille à Escles (vue d'avion)

Voie romaine du Madon (2007)

Fouille pédagogique avec l'école d'Escles

Il sait sourire !

Prospection officielle sur voie romaine

Nettoyage de statue... Vive le Kärcher !

Activisme anti-décharge

On veut voir le Préfet.

Non à la décharge avec le  CRAD

You know what I'm not happy!

Un fainéant se cache sur la photo. Sauras-tu le découvrir ?

Il n'a pas changé !

Melting pot musical.

Actualité du 3 novembre 2017: L'Association Escles Archéologie fait la Une de Vosges Matin après leur soirée Conférence-débat-exposition du 21 octobre à l'occasion des 30 années de prospections et de fouilles réalisées sur le secteur. 

Vous trouverez ces articles en cliquant ICI  (page 1) et ICI (pages 2&3)

Actualité du 16 juin 2023 : Une double page dans Vosges Matin montre la dernière découverte de l'Association Escles Archéologie : une bifurcation de voies romaines. Pour en savoir plus, voir des photos et lire cet article, cliquez ICI.