Recueil de
Nouvelles
D’Alexandre
HEDAN
SOMMAIRE :
Les amants de la mort P.3 à 8
L’amour aveugle P.9 à 12
La fleur P.13 à 14
L'homme qui ne pouvait pas aller à Bordeaux P.15 à 16
Bambino P.17 à 18
Ce que Nietzsche pensait de Sonia P.19
Un amant, un couteau P.19
La rue et le penseur P.20 à 21
L'ange déchu P.22
Le bien heureux P.22
Perdre un combat P.23
Une vie d’amour perdu P.24 à 26
Mon anecdote P.27
Les amants de la mort
Sandra était montée en haut du building, elle s’approcha du bord, prête à sauter.
- Attends, attends, la mort n’est pas là, la mort n’est pas là où tu crois. La mort te prend à la fin de ta vie, seuls les surdoués qui ont rempli leur mission très tôt sur terre ont le droit de mourir. Mourir est une récompense que tu ne mérites pas. On mérite de mourir quand on a rempli sa mission. Cette mission peut être remplie en un temps que ton étoile décide. Et ton étoile m’a envoyé pour te le dire.
- Et bien vas donc lui dire que sa mission, je m’en fous!
- Ne veux-tu pas savoir en quoi elle consiste ?
- Je t’écoute.
- (...)
- Alors ?
- J’ai bien peur que tu ne me prennes pas au sérieux...
- Tu avoueras que tu n’as pas l’air très lucide!
- C’est à cause du décalage horaire, je ne suis pas d’ici; ton étoile brille au dessus de Paris. Je m'appelle Alex...
- Qui es tu ?
- Je te l’ai dit je suis envoyé par ton étoile comme tu pourrais l’être pour sauver quelqu’un à ton tour comme mission.
- Qui pourrais-je sauver?
- Quelqu’un que tu ne connais pas encore et qui se tuerait pour toi.
- Je ne crois pas à ton histoire. Qu’est-ce que tu fais ici ?
- Je suis venu te sauver et te donner tout ce dont tu as besoin pour accomplir ta mission.
- Je n’ai pas besoin de toi.
- Si tu savais...
- Quoi ?
- Le destin te réserve une existence de reine...
- Moi, reine ?
- Oui.
- Qui ferait de moi une reine ?
- La personne que tu sauveras et qui t’aimera.
- Qui pourrait m’aimer ?
- Pourquoi ne vois tu pas les choses comme elles le sont. Tu as trop d’imagination. Ne laisse pas passer ta chance.
- Tout ça me parait bien compliqué et je ne suis bonne à rien.
- C’est parce que tu ne sais pas comment t’y prendre.
D’après toi, pourquoi vit-on ?
- C’est bien parce qu’on ne le sait pas qu’on est si superficiel.
- Et bien la vie sur terre sert à la sauver. Il y a des animaux, des plantes, de l’air et de l’eau pour que l’homme vive, survive et prenne le contrôle de l’univers. Mais pour cela la terre a besoin de tout le monde, y compris de toi.
- Et bien je refuse de servir la terre comme les autres.
- Tu as le droit de mépriser ta vie mais pas celle des autres.
- Je ne remplirai pas ma mission.
- Tu le feras malgré toi comme tout le monde.
- Je ne ferai rien parce que dans cinq minutes, je serai au paradis. Plus de tracas, plus de soucis, pas de mission, la paix.
- Tu es bien naïve. Ce que les hommes appellent paradis c’est ce qu’il y a après la mort. C’est réservé aux élus. Mais en fait ce paradis n’a rien d’un magnifique pâturage où tout le monde est gentil. C’est un autre état où tout est différent mais où rien n’est acquis et ta métamorphose t’empêche d’y trouver de quoi t’y reposer. Il faut y vivre comme on a vécu jusqu’ici. Si tu ne te plais pas sur terre tu ne te plairas nul part ailleurs. Le problème est en toi, il n’est pas naturel. La nature est faite pour nous et nous sommes faits pour elle. On se complète. Si tu crois pouvoir la déjouer tu te trompes. Personne n’y est parvenu. Même la pollution n’ira pas à bout de la nature...
- Mais alors qu’est ce que je vais devenir ?
- Je te l’ai dit, reine !
- Et que faut-il que je fasse ?
- Rien.
- C’est dément.
- Oui et c’est ça qui est merveilleux. Laisse moi te montrer toutes les merveilles du monde que tu n’as pas vu.
- J’ai tout vu.
- Tu n’as vu que ce qui se présentait à toi. Mais tu n’as pas vu tout le reste.
Tu sembles vivre un calvaire où tout ce qui s’offre à toi te rend triste.
Mais pourtant la vie sur terre n’est que partie de plaisir; c’est un gigantesque jeu de société dans lequel tu as joué sans connaître les règles. Tu viens de subir ta première défaite mais ce qui est formidable avec les jeux c’est que tu peux y jouer autant que tu veux. Tu peux recommencer une nouvelle partie. Ça ne dépend que de toi.
- Mais je n’aime pas les règles.
- Et bien en fait personne n’aime les règles et on peut très bien jouer sans les règles. Certains sont très forts pour ça. Hitler par exemple, il y en a d’autres. Il y en a qui luttent, qui trichent, qui font la course, mais au bout du compte tout le monde remplit sa mission.
- Autrement dit quoi qu’on fasse, on a raison de le faire car sinon, il se passerait autre chose de plus grave à la place. Donc je peux mourir.
- Mourir, c’est la chose la plus grave qu’il puisse t’arriver. Quoi que tu fasses se sera moins grave que si tu meurs.
- Mais si je ne mourrais pas...
- Tu mourras.
- Oui mais si je laissais la vieillesse s’emparer de moi, je devrais vivre avec mes soucis, je devrais régler des problèmes qui laisseront place à d’autres problèmes.
- Tes problèmes sont des solutions et ces solutions sont les années, les jours, les heures de ton existence. Ils sont parcourus de bonheur et de rencontres.
- Et bien je n’en vois pas la couleur.
- C’est parce que le bonheur n’a pas de couleur justement, il ne faut pas l’attendre, il faut aller à sa rencontre.
- Et bien je ne l’ai pas trouvé.
- Tu n’as rien cherché.
- J’ai vécu.
- Pas assez.
- Combien de temps faut-il attendre avant d’être heureux ?
- Et bien malheureusement il y a des gens qui ne sont heureux que le jour de leur mort.
C’est à cause de leur mission qui était inintéressante, les étoiles aussi se trompent.
- Peut-être que la mienne s’est trompée.
- C’est possible mais ce serait étonnant, tu as tout pour réussir.
- Tu dis ça pour me faire plaisir.
- Ah, si je pouvais te faire plaisir...
Ils se taisent un moment.
- C’est quand même injuste...
- Qu’est-ce qui est injuste ?
- Et bien je veux mourir et je n’en ai pas le droit.
- Tu en auras le droit quand tu auras rempli ta mission. Et puis de toute façon tu ne connaîtrais jamais le bonheur sinon.
- Promets moi que je serai heureuse.
- Je te le promets.
- Bon, je veux bien te croire au point où j’en suis.
- Tu ne le regretteras pas, tu as tout à gagner. Et surtout n’oublie pas qu’il y a des gens qui t’aiment.
- Est-ce que tu m’aimerais ?
- Pourquoi pas.
- Pour l’instant je préfère rester seule. Me comprends-tu ?
- Bien sûr, mais pourra-t-on se revoir ?
- Tu as bien réussi à me trouver une fois, je m'appelle Sandra ... Merci.
Et elle s’enfonça dans l’ombre.
Alex avait triomphé.
Il respira à fond et redescendit. Il fallait qu'il la retrouve. Il l'aimait. Il savait que le destin les avait réunis ce soir là pour qu'ils s'aiment.
Et il était seul. Héros oublié, héros solitaire, il traîna.
Sur le port une fillette tomba à l'eau. Sa jeune mère hurlait à l'aide.
Alex se précipita. Il sauta la tête la première mais se pris un pied dans une corde d'amarrage et fût projeté violemment contre le rempart.
Il était accroché par le pied au dessus de l'eau, le crâne légèrement ouvert.
Heureusement, quelqu'un de plus adroit récupéra la petite fille et alla libérer Alex.
Notre héros était déconcerté. Il continua sa route.
Plus loin, il trouva un homme, une corde au pied, reliée à une grosse pierre.
- Que faites-vous ?
- Et bien tu vois je vais mettre fin à cette pénible existence.
- La mort n'est pas la seule solution pour tous vos problèmes. Ce serait trop facile.
- Ah, mais je n'ai aucun problème. Et c'est bien ça mon problème. Ma vie est monotone. Je ne sers à rien. Un jour, j'ai sauvé une femme ici. J'en suis tombé amoureux mais elle est partie. Et depuis je ne sers plus à rien.
- Mais si vous servez.
- Ah, je suis inutile, crois mois. Tu ne peux rien pour moi.
- Vous sauverez quelqu'un d'autre.
- As-tu déjà sauvé quelqu'un ?
- Oui à l'instant. Une femme qui voulait se jeter du haut d'un building, et je veux la retrouver.
- Et as-tu été récompensé pour ce geste ?
- Non.
- As-tu servi à quelque chose depuis que tu l'as sauvée ?
- Non.
- Alors vois la vérité en face. Laisse moi car un jour tu voudras qu'on te laisse aussi.
Et l'homme plongea.
Alex le rejoignit. Il plongeait, remontait pour prendre sa respiration et replongeait.
Quand il parvint à sortir l'homme du canal il était trop tard. Il l'allongea sur le ventre et alla appeler une ambulance et partit.
Qu'est-ce qui le maudissait ?
Depuis cet exploit en haut du building il ne parvenait à rien.
D'abord la mystérieuse princesse qui s'en va, ensuite cette gamine sauvée de justesse, et maintenant cet homme trop vieux et trop déterminé.
Qu'est-ce qui l'attendait ?
Il eut une illumination. Il avait tout simplement rempli sa mission. Il comprit qu'il avait désormais le droit à la mort.
Il remonta déterminé en haut du même building et s'approcha du bord.
- Adieu, monde ingrat (...)
- Attends, attends. Je t'aime. Fais moi découvrir les merveilles du monde. Fais de moi une reine.
Il se retourna. Elle était là. La même. Toujours aussi mystérieuse.
- Alors tu es revenue ?
- Oui je savais. Tu m'en as trop dit.
Elle tendit le bras et continua :
- Regarde comme ton étoile est belle !
Alex était ému. Il dit simplement :
- Je t'aime, Sandra.
Ils s'embrassèrent longtemps et Sandra reprit :
- Alors nous avons tous les deux rempli nos missions et nous sommes inutiles maintenant.
- J'ai bien peur que oui. Mourrons !
- Oui ensemble...
- Nous serons les rois du paradis.
- Et nous nous aimerons jusqu'en enfer !
- Plus rien ne nous séparera.
"Sautons!"
Et ils sautèrent en se tenant par la main.
Mais depuis ce jour il paraît que les étoiles ne confient plus aucune mission.
L'amour aveugle
Cette fille était assise près de l'eau ; elle semblait la regarder et pourtant elle ne la voyait pas puisqu'elle était aveugle. C'est son attitude désintéressée de tout qui m'interpella.
Aveugle, c'est la première chose que l'on remarque chez les non-voyants pourtant, en second c'est sa beauté que je contemplais ; et vite je la trouvais fragile, naïve ou plutôt complice avec tout ce qui pouvait l'approcher.
Et c'est ce qui me donna l'envie d'être son plus proche complice. Qu'est ce que l'eau pour une si belle infirme ?
Quelque chose qui chatouille l'oreille, froid sur la peau et si décontenancé...
Ses cheveux bruns s'emmêlaient dans le vent. Elle était calme comme dans l'attente d'une conversation et de celle d'une première avec moi.
_ Bonjour mademoiselle, puis-je m'asseoir un instant près de vous ?
Elle me répondit d'un sourire. Celui d'une jeune femme charmée. Mais ses yeux ne fixaient jamais mon regard comme je l'aurais aimé. Ils continuaient de faire semblant d'admirer l'eau. Sa petite main caressait l'accoudoir du transat. Sa peau paraissait douce, elle était blanche presque saillante. Son petit nez faisait le juge de ce qu'elle sentait passer devant et j'en suis sûr pouvait arbitrer ses jolies paroles peut-être exagérées.
Car elle parlait cette belle, c'est ce qu'elle savait. Ou devrais-je dire cette sirène. Car sa langue chantait des histoires que l'on ne peut trouver que dans les fonds marins, plus sombres et plus étranges que n'importe lequel de nos sinistres handicaps dans le noir connu des sirènes mais moins obscurs que le flou des surfaces de la réalité.
_ Et sais-tu ce qui arriva au gros poissons ? Entendis-je …
Cela faisait je ne sais combien de temps que j'étais là et cette phrase captée au hasard par mes oreilles me faisaient penser que je n'écoutais plus et que j'allais me retrouver piégé par sa question.
Alors je dis :
_ Je préfère te l'entendre dire.
_ Il comprit qu'il n'y voyait rien !
Et là je me sentis visé. Cette phrase était pour moi. Elle me faisait passer un message. Alors c'était moi qui étais aveugle, c'était moi qui ne comprenais rien. Mais elle me sauva :
_ Et tu sais pourquoi? Parce qu'il ne voyait que les couleurs. Celles des jolies filles assises près de l'eau seules mais ne voyait pas qu'elles étaient le corps descendu dans les abîmes de leur âge, pleinement ressenti et capable de voir beaucoup plus loin que le bête horizon des voyants qui ne connaissent pas les lignes de l'esprit des êtres et de leur vécu. Les couleurs sont infiniment plus étincelantes dans les esprits et les choses que les autres voient, se redessinent selon leur véritable ampleur et avec leur véritables pièges dans le cerveau des non-voyants."
Interloqué est un mot faible pour ce que je ressentis. C'était frissonnant et moi qui aurait voulu la protéger au départ, j'en eu un élan d'impuissance quand dévasté par ses mots, elle posa sa main sur la mienne comme s'excusant et pour me rassurer.
Elle me dit :
_ Tu vois le soleil qui brille tout jaune au dessus de nous ?
Là je commençais à vouloir moi aussi m'exprimer alors je me permis :
_ En fait il est plutôt orange !
Elle répondit :
_ Oui comme le fruit !
Là elle se moquait et nous rîmes pendant quelques minutes sans rancune.
Puis je repris :
_ Tu sais quand je t'ai vu, tu m'as parue fragile et j'ai ressenti le besoin de venir te parler car je croyais avoir une emprise sur toi mais je me rends compte que c'est l'inverse!
_ J'aime t'es paroles. Tu es honnête et explicatif ce qui est rare. Tu aimes que les choses soient claires ...
...Pourtant tu ne comprends rien aux choses ; tu vois une fille aveugle et tu comprends qu'elle a besoin de toi. Tu sais ce que moi je comprends ? Que tu as besoin d'aider quelqu'un !
_ Je comprends que tu n'aies pas besoin de moi. Alors veux-tu t'occuper de moi ?
_ Viens demain et nous nous reverrons.
Le lendemain.
Elle était allongée à la même place. J'aurais juré qu'elle n'avait pas bougé depuis la veille si ses nouveaux vêtements ne la mettaient pas plus en valeur...
«Bonjour c'est moi ! »
_ Je sais. Comment t'appelles-tu ?
_ Alexandre et toi ?
_ Moi je m'appelle Heather. Ici on m'appelle Elsa.
_ Pourquoi "Ici" ?
_ Parce que je suis écossaise.
Et un instant durant je voyais les "Highlands" tout de vert revêtus, les montagnes et la bruyère perdus dans la brume. Je me rappelais mes vacances là haut, les gens, les jeux écossais où des colosses balancent des troncs d'arbre, jouent de la cornemuse ...
_ Tu rêves ? A quoi penses-tu ?
_ Je connais l'Écosse...
_ C'est mon pays...Il est vert...
_ Et rose...
_ Oui mais quand on respire c'est mouillé et lourd...
_ (...)
_ ...Il y a des "midches" ; c'est des petits moustiques très embêtants par millions... Je vais y retourner.
_ J'irais bien avec toi.
_ Pour moi ou pour l'Écosse ?
_ Pour toi en Écosse ! Tu es sûrement la reine dans ton pays ?
Elle rit.
Et cette fois c'est moi qui lui pris la main pour commencer à l'aimer.
Sa voix vibrait en moi constamment. Je gouttais ses paroles et les convoitais sans toujours comprendre ou comprenant de fausses allusions qui réglaient ma conduite en mesure.
Il me fallut trois jours pour faire d'Elsa mon ange, bien qu'elle fût mon amie dès le premier jour, je savais qu'elle le serait bien plus tout le reste de nos vies.
L'embrasser était une chose éprouvante pour mon pauvre cœur qui ne pouvait suivre mes émotions. Il menaçait de me perforer la cache thoracique chaque fois que je posais mes lèvres sur les siennes, que je touchais sa peau, que je sentais son parfum léger de femme ; Tout cela me semblait être un privilège sortit de l'interdit, de l'impossible...
Il faut vous dire ces mots quand accompagnant une caresse, ils vous promettent, jurent, vous baptisent presque sans mérite, sans raison si ce n'est celle de l'amour, sincère. C'est comme une chanson, un refrain que l'on réécoute sans cesse mais qui change de sens selon les circonstances. C'est un fil, une corde, une poutre qui vous tient et vous retient mais que l'on aime, masochiste tant il veut de vous et vous garde précieusement.
Et c'est moi qui étais sien, c'est elle qui était mienne et quand le défit de l'interdit du contact charnel me triturait je n'avais qu'à attendre et c'est elle qui me couvrait, me recouvrait de tendresse, de questions, de confidences et de chances.
Ce jour là elle était en maillot de bain et je vis pour la première fois son corps dans toute sa nudité ou presque. Je crois que c'est son plus gros défaut que je préfère ; c'est son teint écossais plus que blanc.
Au début je fais celui qui n'est pas attentif à sa tenue et j'oblige mes yeux à se jeter à droite et à gauche du paysage mais elle se tourne sur le coté et si le pouvait me regarderait. Alors je la regarde, j'en ai le droit, puisque nous nous aimons et puis qu'en sait-elle ?
Je me régale de son corps ; de jolis bras bien proportionnés, légèrement velus devant, des épaules rondes mais pas trop, de très beaux seins bien ronds eux aussi puis un ventre non pas creux mais légèrement dodu et pourvu d'un nombril très bien fait. Ses jambes blanches et douces étendues comme brillantes et précieuses.
Ce fruit défendu retrouva la parole et d'un son percuta :
_ Est-ce que tu me regardes ?
_ Oui excuses-moi (…)
Et d'un bon elle sauta dans l'eau sans hésiter, sans palper le terrain, comme si elle était instinctivement attirée par elle. Je n'avais jamais vu quelqu'un nager si bien. Elle commença en ligne droite sous l'eau et très vite, la notion des distances, des bords au fond ne lui était que trop connue. Elle ressortit luisante, marcha vers moi et s'allongea.
_ Embrasse-moi !
Ces jours étaient les plus beaux de mon existence. Nous partîmes en Écosse et je la menais sur les plus petites routes perdues, lui décrivais les montagnes dont on se disputait les couleurs. Heather s'arrangeait dans sa langue que sa langue ne prononçait que mieux. Et ce bonheur aurait pu durer l'éternité sans cette annonce précipitée :
_ Demain on ne se verra pas, j'ai des examens à cause de l'opération...
_ L'opération ?
_ Oui je vais me faire opérer et j'y verrai, je te verrai. Ma mère économise depuis que je suis petite pour cette opération (…)
Cette nouvelle aurait du provoquer en moi la joie, l'impatience, je dis bien aurait du car c'est le désespoir que cela causa en moi. Je ne voulais pas qu'elle me voit, je ne voulais pas qu'elle y voit pour qu'elle ait besoin de moi. Ce serait comme si l'enfant d'une mère devenait adulte du jour au lendemain.
Je la serrais très fort dans mes bras et me mis à pleurer du plus fort que j'en avais envie et elle crut que c'était d'émotion et me réconfortait de plus belle.
Les jours qui précédèrent l'opération étaient tendus. Le jour J je m'apprêtais à retrouver Elsa les tripes au ventre. Comment me trouverait-elle ?
Le docteur insista pour que je m'installe près d'elle et que je lui prenne la main avant qu'on ne lui retire son bandeau. Il nous fallait être dans la peine ombre.
Son premier regard fut pour moi. Quand ses yeux furent en face des miens, elle frissonna et colla sa tête contre ma poitrine en refermant les yeux. Puis elle se tourna vers sa mère. Ce fut un moment éprouvant pour elle et jamais elle ne donna son impression sur nous bien que je reste persuadé qu'elle fut déçue par tout.
« La vie a des limites donc. » Disait-elle.
Elle voyait que les choses étaient définies. C'est ce qu'elle n'admettait que difficilement. Les couleurs la décevaient aussi. A part le noir et le blanc qui "étaient les plus belles".
Elle ne comprenait pas que je puisse m'installer devant un mur pour travailler alors qu'il y avait tant de merveilles par la fenêtre. Elle devint vite instable, son calme s'estompa et elle ne pouvait plus se concentrer sur rien. Pas même sur notre relation. Ma surprise et ma stupeur furent son désir d'aider les autres et surtout les aveugles. Cette nouvelle vie n'avait rien de ce qui allait avant. Elsa ne s'intéressait plus à moi. Je sombrais peu à peu dans le désespoir et dans l'indifférence. La sirène avait gardé sa jolie voix mais perdu son sens grave de la discussion. C'était une girouette affolée.
Je pris la décision de la quitter. J'avais joué mon rôle avec elle et ne recevais plus rien en échange. Cette attitude ingrate me conduisit vers une vie de célibataire aigris et dépressif. Je voulais bien sûr vivre avec elle mais qu'elle s'intéresse à moi.
Sur le coup Elsa ne comprit pas très bien que c'était de sa faute. Et sa nouvelle vision la compensait de son chagrin.
Mais un jour qu' Heather ressentit qu'elle avait fait le tour des choses elle repensa à moi et se rendit à la piscine où nous nous étions rencontré. Elle voulait se réinstaller sur son transat qu'elle aurait retrouvé les yeux fermés mais à sa déception au loin elle aperçut qu'il était occupé par un homme. Elle s'approcha le plus près possible pour la nostalgie et bientôt elle ressentit ce qu'elle n'avait pas ressentit depuis le premier jour de notre rencontre. C'était ma présence qu'elle sentait sans me voir. C'était moi qui étais sur le transat. Quand elle l'eut contourné et me fit face, moi je la reconnu à sa voix ou plutôt à son hurlement quand elle vit mes yeux... Mes yeux crevés par moi-même pour être elle, pour être ce qu'elle n'était plus.
_ Mais qu'est-ce que tu as ? Hurlait-elle.
_ Et bien tu vois si le gros poisson n'y voyait rien, la jeune fille non plus car elle croyait voir quelqu'un qui cherche à aider alors qu'il ne demandait qu'un peu de considération. Mais maintenant il voit le contour des choses et leurs véritables pièges..."
Elsa passa le reste de son existence, le reste de nos existences à s'occuper de moi et à économiser pour une de ces foutues opérations.
LA FLEUR
PREMIERE PARTIE: PROLOGUE
Épanouies, elles sont épanouies et belles ; en plus elles sentent si bon! Leur douceur! Leur fragilité! Je les veux toutes se disait-elle. Et le jardin en était plein...
Elle pouvait les approcher, les caresser, les sentir et... et... Mais pouvait-elle les avoir encore plus près, vraiment à elle ? Dans sa chambre par exemple, elle pourrait la sentir même la nuit. En avait-elle le droit ? Elle n'avait jamais posé la question et ne faisait pas le rapprochement avec les bouquets que l'on offrait régulièrement à sa jolie mère. Elle ne se demandait pas non plus ce que devenaient ces bouquets quand ils disparaissaient au bout de trois jours...
Mais quelles étaient belles et quelles étaient attirantes toutes! Le temps était agréablement long dans ce paradis où elle se promenait l'après-midi entier. Il fallait souvent sautiller pour épargner les plus petites. Quelle chance avait cet escargot pour qui le parc est si géant! Et ces merveilles poussaient comme par enchantement en une nuit! Et se volatilisaient par désenchantement, comme disent les oiseaux, dans le même temps.
Que pouvait-elle faire ? Elle aurait voulu en sauver rien qu'une. Une qui lui retournerait son attention par son parfum et sa splendeur. Elle la cueillerait soigneusement, assez bas. Puis elle remplirait un grand verre au trois quart pour l'y mettre afin qu'elle puisse boire, la pauvre. Et puis il faudra qu'elle voit le soleil comme avant. Ce sera un vrai bonheur.
Elle n'avait plus à penser et encore moins à s'autoriser, elle était déjà décidée...
C'est comme pour le choix de sa conquête ; elle fit le tour évidement par loyauté envers les autres mais celle qu'elle voulait était dans sa tête depuis le début.
DEUXIÈME PARTIE
Son cœur était si chaud à ce moment. Elle allait faire quelque chose d'important, quelque chose qui modifierait considérablement son capital. Car cette chose lui apporterait de la joie, c'était déjà le cas. Cela n'est rien pour vous et moi, mais pour elle c'est tout. C'est tout pour jusqu'où ? Peu importe à son égard c'est accessible tout de suite.
Alors elle monta sur le petit banc du grand père pour atteindre le placard, puis le déplaçant, atteindre le robinet et activer l'entreprise d'une initiative peut être risquée.
Dans la cours son pas n'était plus le même, ses jambes tremblaient, son corps frémissait. Elle n'avait pas l'allure habituelle naïve, perdue et complice mais elle avait celle d’un traître, d'un bourreau en chasse. Elle n'osait même pas les voir vraiment!
Mais après tout, elle ne faisait que l'ôter de son univers pour l'aimer et la garder précieusement.
Et cela ne pouvait être qu'elle. La seule. Sa culpabilité. Et avec la fenêtre fermée la nuit, aucune chance qu'elle se volatilise...
Si elle ne serait pas son amie, elle sera sa prisonnière.
Elle s'accroupit, la respire doucement et lui dit : "Est-ce que tu veux que je te prenne ?"
Ses pétales rouges flamboyaient sous les rayons du soleil, ils étaient dessinés en cœur et solidement attachés en profondeur en un cercle renfermant un velours bleu et noir. Ce fruit à la saveur odorante était présenté dans une main aux doigts de feuilles vertes et précisément découpées. Enfin une délicieuse tige supportait ce trophée, tige qui ne tarda pas à craquer à son pied dans un grondement d'ondes florales sous les petits doigts de l’agresseur.
Et comme prévu, la captive fût soigneusement déposée dans son verre d'eau fraîche un petit peu en retrait sur la commode.
TROISIÈME PARTIE: ÉPILOGUE
Cette nuit elle ne pu fermer l’œil évidement. Pourtant elle ne la sentait pas, ne la regardait même pas. Mais elle était là, avec elle et surtout à elle. Le matin en se préparant pour l'école, elle était devenue responsable, elle n'allait pas travailler seulement pour elle mais pour enrichir son couple, sa sœur, sa famille. Au fond d'elle elle n'était plus seule et l'image de son amie en sécurité chez elle, dans son nid la rassurait. Elle était plus forte.
Et vite quand le cours devenait ennuyeux, la maîtresse rabat-joie ; elle n'avait qu'à se refermer derrière le regard vide que l'on adopte mécaniquement pour rêver éveiller, sans que cela ne dérange quiconque. Et dans ce flou intérieur elle se télé portait dans son jardin, avec l'escargot et son amie.
Et en fin de journée, quand l'heure de libération approchait, sa joie se réanimait, elle était radieuse, son cœur empli d'impatience.
Et en rentrant, quel bonheur était-ce de faire ses devoirs près d'elle. Le soir tout de même elle trouva que l'absence de soleil à ces heures lui faisait perdre un petit peu de son éclat...
Au réveil ce fut le drame : la pauvre était toute sèche. Bien sûr elle était belle mais tellement moins ! Le soleil dans quelques heures lui rendra toute sa vitalité se dit-elle.
Ce jour passa moins égayé et au fil du temps le suspens la hantait.
Quand elle ouvrit la porte elle vit son paradis s'effondrer. Ce fut l'horreur. Son amie n'avait plus que quelques pétales de cœur et en quel état ! Les autres à terre étaient comme brûlés et le centre était sec. La jolie main aux doigts de feuille était devenue vieille et jaune. Son amie était fanée, son amie était morte.
Les yeux de notre héroïne brûlèrent par les larmes bouillantes et salées qui se constituaient en perles trop grosses et trop lourdes avant d'éclater et de se répandre si abondamment le long d'un petit nez chargé à bloc de chagrin et si chaud qu'il en fait pleurer de plus belle en piquant.
Elle ne parla jamais de cette aventure à personne. Et trois cent soixante quatre jours passèrent quand sous les yeux de notre amie resplendit la sœur jumelle, que dis-je, elle en personne peut-être. « Qu'est ce que tu préfères, dit la petite, veux-tu mourir ou disparaître? »
L'homme qui ne pouvait pas aller à Bordeaux
Il était deux fois, coupable et innocent ; d'être né et de vivre, selon sa façon de voir les choses ...
"J'étais venu à bordeaux pour voir comment était créé mon sang!"
Cela dit, il n'était pas tout à fait en ville, mais bien entouré de vignes... dans une maison de repos.
Sa première semaine ne fut d'aucun repos, contrairement à ce qui était nécessaire à sa maladie car en effet, c'était les fêtes de fin d'année.
"J'ai pu voir que l'on sablait le pied des vignes, pour ne pas qu'elles gèlent et qu'elles étaient minutieusement taillées toutes les deux allées, les branchages jetés au milieux, probablement comme signe de repère."
Les vignes l'entouraient de partout sa résidence ; Et les voir, forcément, le rendait fou ; Lui qui se disait tout comme un fils de Dieu, il y a bien longtemps, avoir le vin dans les veines.
Au bout de sa première semaine bruyante pour une maison de convalescence, il eut le droit de sortir mais pas jusqu'à Bordeaux (qui était à vingt-cinq kilomètres) mais dans le petit village de Saint-Caprais, non loin de Cambes.
Dès sa première sortie au village, il voulut directement aller au bar...pour se rassasier!
Heureusement quelqu'un du personnel de la maison l'eut vu et l'en empêcha.
Le lendemain il décida d'aller à Cambes, c'était plus loin mais aussi plus fluide. La route descendait, descendait, il était emporté par le poids de son corps en avant et claquait des pieds, la bave aux lèvres.
La remonté dura deux heures, soit une heure et demie de plus qu'à l'aller. Il titubait, se perdait dans les petits sentiers, la joie artificielle en lui. Il eut pris soin d'acheter du chewing-gum pour ne pas sentir et tous les jours de sa seconde semaine cela marcha et devenait routine.
"A bien bu" il disait en titubant et remontant cette pénible côte. Le matin, il ne pensait qu'à son escapade d'après déjeuner et le soir se rappelait son pénible fardeau et rêvait d'un système plus pratique.
Il eut tôt fait le bon raisonnement quoi que déraisonnable, de conclure un pacte avec le barman consistant à acheter carrément les bouteilles et les ramener sous le manteau jusqu'à sa chambre.
"Tu es bien malin toi " disait Roger, le patron du bistro.
"Tu y es gagnant" répondait notre homme.
Et toutes ses rentes y passaient.
Le soir, il observait le couché de soleil devant sa fenêtre et pleurait comme un Russe.
Son état se découvrit vite et on l'interdit de sortie.
Seulement voilà, il fut miraculeusement désintoxiqué bien que toujours dépressif et on eut réussi à lui faire passer le goût de sortir à la façon coriace de la psychiatrie. Il commença à s’intéresser aux choses simples et non toxiques, comme la cuisine, les arts et la convivialité.
En dehors de ses activités psychiatriques, quand il était seul, il était victime d'angoisses et d'idées noires. Pendant plusieurs semaines il n'eut pas le droit de sortir des murs de la clinique et on lui supprima tout objet dangereux pour lui.
"Je pleure bien, je pleure bien", il guinchait.
Puis, avec le temps on lui permit de ressortir...
Le premier jours, il alla à Saint-Caprais avec quelques autres patients (être seul lui était interdit) et il passait devant le bar le cœur gros. Ses compagnons étaient loin d'être aussi atteints que lui. Petit à petit, il y en avait de moins en moins et un jour enfin, il eut le droit d'aller seul au village, et sur le chemin, alors qu'il marchait d'un pas énergique, heureux et confiant, à mi-route un chien l'attaqua.
Notre homme pris peur, fit peur au chien et se fit croquer fortement un bout de mollet. Dans sa trouille, il continua vers le village et eut peur de revenir vers la clinique sachant le chien plus fort que lui. Il n'avait ni beaucoup de sous sur lui et plus de forces et décida à cause du mauvais temps de s'abriter sous le porche de l'église...
La nuit passa, et au petit jour une infirmière de nuit qui partait le vit et le ramena à la clinique; meurtri.
Il était incapable de vraiment s'expliquer. On l'accusa alors d'avoir voulu s'échapper :
"Il devait surement courir pour s'échapper, pour se faire attaquer de la sorte" Disait un infirmier.
Et le soir même, blessé, frustré, humilié, notre homme à qui on avait de nouveau et pour très longtemps défendu de ressortir, décida de vraiment s’échapper; ce qui n'était pas trop dur même malgré son âge avancé, car sa fenêtre qui donnait sur les vignes n'était qu'à environ un mètre cinquante du sol extérieur.
Il parti donc en début de nuit, clopin-clopant, prenant son temps en direction de Bordeaux où il pourrait reprendre contact avec sa mère et tout lui raconter.
Mais dans un virage serré, la voiture fonçant d'un alcoolique le renversa. Le choc fut si violent, que notre héros éclata, sa chair rependue partout.
Depuis on dit que la terre s'en est nourrie.
BAMBINO
« Des cloches! J'leur offrirai des cloches... Des cloches pour des cloches!... J'leur offrirai des cloches... »
Voici ce qu'entonnait Bambino, en tirant une grosse cloche du bout d'une ficèle par dessus son épaule. C'était le chaudronnier qui lui donnait les modèles ratés, qui sonnaient faux... Et lui était fermement décidé à les offrir à ses petites camarades.
C'était un jeune garçon très mignon. Toutes étaient d'accord pour dire que c'était de loin le plus adorable des garçons. Il était innocent et pur, doux, gentil, joli... Des grands yeux marron, de longs cils, les cheveux châtains, les traits fins ; c'était BAMBINO!
Il savait se faire mignon, pour avoir des câlins... Combien d'entre elles se fâchaient d'ailleurs, parce qu'il se laissait si facilement détourner, mais si innocemment qu'elles lui pardonnaient toutes ; Tant il était parfait.
Il cultivait son éternelle voix de bébé que les autres se pressaient d'abandonner qui lui allait si bien... Il posait sans cesse des questions innocentes, tendrement.
Toutes les petites filles, toutes les filles, toutes les adolescentes, toutes les jeunes femmes, et même les femmes craquaient pour lui! Laquelle ne voulait pas une tendresse de BAMBINO? Aucune. Personne, pour rien au monde, ne lui aurait voulu le moindre mal. Pas même les autres garçons, car il ne les dérangeait jamais.
Et bientôt, chaque fille avait une cloche, offerte par Bambino, c'était comme une médaille, un honneur...
Mais pour lui, c'était un symbole, comme il le chantait : « des cloches pour des cloches! »
Bien sûr, aucune ne se doutait de ce détail...
En fait, Bambino n'était pas celui que l'on croyait. C'était en fait un vieux sorcier maudit qui s'était transformé en enfant... Mais pire encore, le passé, l'histoire de ce sorcier était bien sombre ; il avait été arrêté et condamné plusieurs fois pour des affaires de mœurs ; il avait abusé de plusieurs femmes, c'était un obsédé, un fou!
Mais toutes, ignorant cela, l'adoraient, le mystifiaient... Seulement un jour qu'il croyait être seul, il reprit son apparence dans un coin mais il était observé, tant il avait de fans! Et quelques unes des filles de son entourage, découvrirent la véritable face de Bambino ; Quelle stupeur! Quelle honte! Cet être infâme n'était autre qu'un vulgaire sorcier... Vite l'affaire se répandit, et seulement trois d'entre elles (qui étaient Lætitia, Marie et Angélique), ses plus fidèles admiratrices ne purent accepter ce constat et décidèrent de comprendre pourquoi ce si mignon petit bonhomme avait une double identité.
Elles le suivirent partout. Lætitia ne concevait pas que sa beauté puisse cohabiter avec de la perfidie... Angélique ne supportait pas d'avoir été trompée et Marie l'aimait et l'aimerait coûte que coûte...
Angélique lui tendit un piège ; elle se procura de l'eau bénite et le coinça dans un coin pour lui demander : « pourquoi m'as-tu trompée? » en l'aspergeant d'eau bénite. Celui-ci n'avait d'autre choix que de répondre en hurlant : « Je te retourne la question, dit-il, pourquoi toute ma vie les filles me sont apparues belles et douces et pourquoi ne m'ont-elles jamais donné de leur beauté et de leurs caresses, les filles m'ont fuit toute ma vie parce que j'étais laid, inintéressant » ; Et Angélique s'en alla...
A Lætitia, il expliqua que sous son apparence, il était pourtant le même qu'avant et que c'était donc les filles qui se trompaient... Elle partit méditer sur cette réponse...
Marie, qui avait entendu les questions d'Angélique et de Lætitia et apprécié les réponses du sorcier, lui dit : « Alors re transformes-toi en BAMBINO ou bien transformes-moi en vieille sorcière parce que moi c'est ton attitude que j'aime et je te veux comme tu es... »
Alors Bambino se re transforma en garçonnet et il pu désormais abandonner ses cloches et sa voix de bébé, son cœur était guéri et il était prêt à vivre la vie nouvelle qu'il méritait...
Ce que Nietzsche pensait de Sonia
Je me souviens ce que disait Nietzsche à propos de Sonia. Il y avait au retour de la vie sa rudesse et son cœur ; si compliquée et fraîche en même temps qu'elle déplut à tant mais...
Il y en avait un qui savait déjà beaucoup. Il croyait avoir déjà été chacun des autres et avoir accomplît leurs prouesses. Comme passé même par ceux qui ensemble massacrent un homme alors qu'il est celui qui sans peur ni regret se défend seul et sait mener. Et las sans être sûr aussi, il regardait désormais des êtres moins violents et plus libres.
Il ne sut même jamais ce que devînt Sonia, qui de son côté accepta qu'il s'éloigne sans l'aimer, elle, s'occupa d'enfants des sauvages et conta son vécu aux autres femmes...
Elles chantèrent et mirent bientôt beaucoup de confort dans cette vie barbare.
Quand quatre millions d'années plus tard, sur une plate-forme annexe réservée à l'étude de l'inversion moléculaire interstellaire finale, permettant de rendre solide et oxygènante la totalité de l'univers (ou presque) ; L'imminent spécialiste philosophe cantique, Alexandre, en charge de comprendre et de mise en œuvre scientifico-politique, l'établissement universel de l'activité humaine, faisant un rapport bouleversant aux différentes personnes concernées disait ceci :
« Étant moi-même le dernier mâle sexué humain ; sachant qu'il n'existe plus de possibilité naturelle de me reproduire, je me proclame Dieu... »
Et à l'instant même alors qu'une foule d'androgynes parfaits et silencieux s'écartant ; une femme apparut au moment où l'espace se durcissait en un magnifique et gigantesque Tout coloré et dit :
« Moi, je suis Sonia, ta déesse! ».
Un amant, un couteau. (Exercice de rédaction en 10 lignes pour évaluation d'école de correcteur...)
Une jeune femme un jour reçoit un appel de son mari lui expliquant qu'il lui envoie un étranger qu'elle devrait pouvoir aider... L'étranger arrive une heure plus tard à son domicile. Elle le reçoit dans sa plus belle tenue. Ils discutent de son voyage, de lui, d'un logement pour lui; puis d'elle, de son mari et de leurs problèmes de couple...
Le mari rentre armé car il est convoyeur de fonds. L'étranger les invite au restaurant. Une dispute éclate dans le couple que l'étranger tempère. Il lui font visiter la ville et lui trouve un logement. Mais au bout de trois jours, il leur annonce qu'il s'en va. Seule la femme est en mesure de parler avec lui. Il l'a recontacte bientôt en lui déclarant sa flamme. Elle lui annonce qu'elle vit seule à présent et l'invite à revenir partager son logement. A son retour, il lui offre un coupe-papier en pierre, imitant un poignard, en lui disant : « C'est au cas où tu voudrais me tuer ».
La rue et le penseur
«...Il y a des milliers de gens dans cette rue qui travaillent... Ou de ceux qui s'activent et marchent, des gens qui vont et viennent, arrivent et partent, pensent et oublient, une seule chose en ce mardi, qu'ils desservent avant tout, le travail...
...Bien sûr, l'incessant et primordial amour hante chacun d'entre eux; ils admettent même que c'est la chose la plus importante, parfois... je crois qu'aucun n'y pense à ce distributeur de billets, par exemple... même si de temps en temps c'est à l'achat de roses aux chrysanthèmes chez ce fleuriste du coin qu'il sert...
...Il y a le boucher qui n'en rate pas une ; en surveillant sa rôtissoire que personne ne critique jamais, ou de derrière son comptoir perpendiculaire à la rue... ce genre de bonhomme qui vit plus pour l'amour que pour le fric... d'ailleurs n'a t-il pas dit un jour à une de ces ménagères :
_ Les hommes cherchent de l'argent pour trouver une femme, et les femmes c'est le contraire (...)
...Mais que les cadres se croisent devant les «watchinger people» assis à la terrasse de l'Étrier; ils semblent toujours plus cons que le poissonnier, ou l'cordonnier qui dans des gestes peu pressés voient les coups de foudre mourir en jets...
...Toutes ces bruyantes voitures et leurs fumées achèvent de presser le quartier; à leurs commandes des égoïstes polluants pour cinq prétendent et vocifèrent, en fait à leur par-brise, qu'ils sont légitimes de foncer... les pires, ceux qui s'arrêtent, ont des rendez-vous dans des boîtes, toutes pleines de téléphones, de climatiseurs, d'ordinateurs et d'halogènes...
...La bouche de métro, elle-même emploie des êtres qui je l'espère rêvent encore...
...Parfois il m'arrive de compter trois, quatre visages exprimant qu'aujourd'hui ils font ce qu'ils voulaient... et puis les chauffeurs de bus, de Taxis, ou les livreurs en tout genre, convoyeurs, policiers ; ils livrent et délivrent les produits...
...La poste, la banque admettent des queues de cerveaux au dixième agité...
...La presse, la supérette et les kiosques on l'air de bien s'entendre... pas comme les boulangères et les tabacs, qui à quatre et deux boutiques, n'arrivent pas à assurer le sept jours sur sept pour se rassasier...
...Et tout ce monde passe devant moi au moins une fois!
...Le cinéma, lui c'est le soir qu'il brille par son divertissement; alors la rue est plus clémente... les gens y sont par dévotion. Ils laissent une plus grande place à leurs sens... l'amour dans toute sa puissance manque soudain de repère alors que l'occasion est belle... mais le cordonnier, le poissonnier ne le voient plus...
...Et c'est à tous les bars, à ce night-club, à ce piano-bar, que revient le travail en force...
même le genre de types qui passent leurs jours à la salle de gym ou sur les terrains de sport, ils bossent devant ces endroits le soir... et attention, c'est eux qui décident si tu entres ou si tu sors... des fois ils cognent des mecs, des gamins, qu'ont pas l'âge de rentrer... tu parles... si ils sont dans la rue, pourquoi pas dans les bars... ou aux putes... ça les calmerait...
...Bien sûr même quand tout ça ferme il y a encore du mouvement, même du travail...
tiens, pour les mecs comme moi... et bien on vient nous voir... c'est des types... y sont volontaires... ou bénévoles qu'ils appellent ça... les flics aussi, ils tournent toute la nuit...
...Parfois il se passe quelque chose... souvent c'est pour des délires à cause de l'alcool... donc y a des pompiers qui interviennent ou des ambulances...
...L'autre jour j'ai même vu les gars d' E.D.F., là G.D.F., qui venaient en pleine nuit pour une fuite de gaz...
... Y a des voyous... pis tiens, des mendiants, ils travaillent pas eux, les mendiants?
_ Vous croyez pas qu'un penseur, il travaille? » Hiver 2006
L'ange déchu
Elle approcha de la forêt. La pleine lune et quelques étoiles éclairaient les champs. On entendait déjà des hulottes ou des chouettes. Un chat sortit des bois. Il miaula une fois très fort en venant droit vers elle. Elle aimait les chats mais soudain elle pensait aux pires horreurs ; qu'il pouvait lui sauter à la gorge, la mordre à la trachée de ses crocs, la lacérer sans relâche de ses griffes mais elle alla pourtant vers lui en faisant le son que l'on aime faire aux chats quand on veut les caresser, en pinçant les lèvres et en aspirant un petit peu sèchement puis vraiment plus charmeur, en faisant comme des bisous écrasés de grand-mère. Le chat arrivait dans un petit trot élégant, les yeux lumineux et aux moment où il allait se frotter dans ses jambes ou se donner à des caresses gratuitement comme elle s'y attendait ; il fît un écart franc pour l'éviter et continua sa route vers le village comme si elle n'était qu'un vulgaire obstacle, sans chaleur, sans douceur...
C'était embêtant parce que si le chat eut partagé un petit peu de réconfort dans cette rencontre nocturne sèche ; cela aurait suffi à ce qu'ils repartent ensemble, câlinés et dociles vers la communauté. Mais là c'était trop! Même un chat ne la comprenait pas...
LE BIEN HEUREUX
La fenêtre de cet homme était ronde. Comme un hublot ! Sa glace était les autres. Comme le voyaient les croiseurs. Leur regard lui indiquait tout. Sa pensée était simple, elle suivait la mode.
Pourtant sa maison n’avait rien des pavillons que l’on fait dans le Nord. Il l’avait dessinée; je dis bien dessinée, car il n’avait rien de l’architecte…
C’était une coque de douze pieds dans les terres habitées. La rouille et la taule façonnaient le décor dans un jardin sans porte ou celle de la liberté. Il n’avait pas de boîte aux lettres; A quoi lui aurait-elle servi?
Il voulait être honnête mais avec ses ennuis… Il escroquait l’Etat d’une parcelle humide. Un handicape mental depuis une bagarre lui empêchait l’insertion de l’entente sociale. Car on ne le sait que trop peu, la mentalité est égoïste et ne laisse pénétrer un quelconque touriste. Le nôtre n’en était point mais égoïste aussi, son pays l’ayant trahi.
Sa pauvreté était une seconde barrière, la mode une aide, comme le disco et les Peugeots. Il se parfumait à toutes les sauces de Monoprix, E.D., Leclerc et Uniprix.
Jusqu’à ce lointain voisin qui, plein d’argent et le bras long, le dénonça pour sa marginalité. Comme par chance, les gendarmes le trouvèrent intéressant… On lui laissa cette parcelle contre un emploi dans la gendarmerie maritime.
Il fut troufion, sergent, lieutenant, major et une fois rentré à sa coque, il devint capitaine de chez lui.
On dit depuis qu’un marginal c’est un homme grand et de moral quoique traître de son idéal. 18/01/01
Perdre un combat
Certains pensent que ce qui brûle dans le cœur des amoureux est plus chaud et plus puissant que n'importe quel soleil... Pourtant dans ces mêmes cœurs gèlent une haine plus froide et plus mortelle que n'importe quel trou noir de l'univers.
Une amitié par exemple, toute capable de choir comme de petites piques aux aléas de nos caprices. C'est souvent comme ça que débute l'amour ou la haine ou les deux.
Partager de la vie, des joies, des peines et des cadeaux. L'amitié est gratuite, elle est bonne comme une étoile qui brille loin mais qui exauce toute sorte de vœux. Parfois une petite déception causée peut entrainer de petites piques de plus en plus violentes. Et quand elle demeurent sans jamais êtres soignées par des caresses d'excuses ; la haine s'installe et fait l'irréparable...
Alors les ennemis s'éloignent. Le combat trop violent, il s'attise de messages déformés, grossis par des colporteurs au spectacle.
Quand le combat par moment s'harmonise de pauses, elles sont forcément vouées à l'amour pour un allier... Un amour plus ou moins bien entretenu puisque échangé par des guerriers.
Mais entrons dans les détails...
Imaginons deux jeunes amis qui partagent une même joie. Peut-être une drogue douce qui les lie très implicitement. Pourtant cette drogue un jour l'est font se disputer jusqu'à en obliger un à dénoncer l'autre à la police...
La mauvaise conscience du premier le perturbe pendant que le second commence le combat. L'éloignement des deux amis leur permet l'amour d'alliés telle qu'une vieille louve rousse qui déteste le second pour le premier.
Celui qui a commis l'irréparable, celui qui a lâchement dénoncé son ami. Quelle est sa sanction? Celle de moins bien dormir? D'avoir mauvaise conscience? En plus de la honte qui le poursuit ... Pourtant cette jolie rousse est avec lui. Ils sont biens malgré son caractère de vieille louve endurcie! Avec ce qu'il a fait le premier guerrier a des angoisses. Il vit tout de même mal. Quand analysant ses points faibles, il s'aperçoit que c'est sa copine son plus gros...
Il suffirait par exemple qu'elle se mette à boire et son comportement serait auto-destructeur. Elle lui en avait parlé. Alors un soir qu'il avait ses angoisses, il se mit à lui écrire dans son journal intime, à elle. Il disait :
« j'ai peur qu'un soir, si nous nous disputons, tu partes avec des mauvais types, qu'ils te fassent boire et que le pire s'ensuive... »
Écrire cela paraît stupide mais sur le coup cela le soulagea.
Et un jour ils se disputèrent très fort. Il l'a quitta et elle partie avec toute une bande d'amis qu'ils avaient en commun dont un ennemi : le second.
A ce moment le premier ne pensait plus une seconde à ses angoisses et il pleurait plutôt sur son sort.
Elle à ce moment ressentait les piques de haine et n'avait pas oublié les angoisses de son ami.
Sur la route ils achetèrent beaucoup d'alcool...
La haine, l'amour, quelle différence ? Quand le cœur vous en dit il sait les cultiver jusqu'au bout.
Une vie d'amour perdu
Dans le brouhaha de la cohue, à la Défense, Paris, fin de journée. C'est la sortie des bureaux. Les gens sont rendus à leur état robotique animal du « je fonce » pour vite être chez soi; souvent ils y retrouvent quelqu'un...
Et puis il y a ce vieillard... Tout aussi affairé, sans doute par habitude, machinalement...
Les gens se heurtent, parfois injurient, se bousculent, courent.. Se pressent à l'écoute du signal de la fermeture des portes du R.E.R.
La ligne F s'arrête plus tôt : c'est le dernier train qui part...
Et dans ce tumulte, à vingt mètres à peine de l'accès au train ; notre homme s'arrête brusquement, comme interloqué, soudain ahuri, il reste immobile dans l'espace, et le temps semble se figer.
Les passants le doublent, sans le toucher, tout le monde autour continue sa course ; mais lui demeure stoïque... droit, ou légèrement vouté, le regard fixe, il s'est arrêté.
Le quai tout entier continue son va-et-vient et bientôt s'éclaircit et se vide des usagés qui ont gagné leur transport, tous, sauf un....
Il est maintenant seul; l'air métamorphosé, debout, dans le silence s'installant. Il tourne la tête, sûr de tomber ainsi nez-à-nez avec cette multitude de sièges colorés, plus ou moins dégoutants ou gras.
Il s'approche maintenant doucement d'un fauteuil ; il a raté son dernier train exprès mais pourquoi?
Il s'en fout complètement, pour la première fois.
Son regard est si profond, ses yeux lourds d'humidité, un frisson lui glace le dos... Il s'assoit, comme s'il ne s'était pas assis depuis quatre-vingt-dix ans... Ses mains calleuses et ridées reposant légèrement sur ses genoux et dépourvues de la moindre alliance... Il a enfin le temps...
Et un flou conquière son esprit et l'emmène, l'emmène, quatre-vingt-trois ans en arrière, sous le pré-haut de la cours de récréation de sa dixième classe.
Stéphanie accourt à lui pendant que Farid attend en retrait ; « Alexandre, fais le guet s'il te plait! »
Puis elle court vers Farid, tandis que, lui, déjà épie à la ronde si aucun maître ne circule dans les parages.
Mais vite son attention est détournée vers les deux autres qui se sont enlacés, s'étreignent et s'embrassent dans un baiser riche et maladroit, tellement pathétique!
Et Alexandre ressent alors ce qu'il n'est pas prêt de l'abandonner... Il ne sait pas comment cela s'appelle, peut-être que ça n'a pas de nom, parce qu'il est sûrement le premier et le seul à sentir cela ; personne ne lui a jamais parlé de ça.
Mais les jours qui suivirent, il ne voyait plus les filles de la même manière ; il était beaucoup plus curieux, tout simplement très attiré...
Il découvrit évidement les premiers jeux érotiques solitaires, plein d'imagination, hanté par toutes sortes d'images charnelles de petites camarades!
Son fidèle ami Tony, plus âgé et plus expérimenté, l'accompagne et partage ses premiers ébats ou plutôt leurs premières déceptions sentimentales!
Tony conquiert le cœur de Coralie. Alex reste éperdument amoureux de la meilleure amie de cette dernière, Karen, une charmante rousse, à la bouille d'ange, il est vrai, mais Coralie, plus chaude et attirée, envoute bientôt le Tony complètement, alors que Karen ne semble pas s'intéresser à notre ami...
Les années passent et notre héros reste solitaire alors que Coralie a définitivement ravagé le cœur de Tony, qui devient fou, avec une éducation fragile, il échoue dans l'alcool, la drogue et le gangstérisme, s'éloignant d'Alexandre.
Alexandre, qui, très tôt réfugié dans la drogue douce, va d'amour caché, en fantasmes refoulés, poursuit péniblement ses études et voyage seul...
Il trafique un petit peu du cannabis, sans plus entendre parler ni de Tony, ni de Coralie ou de Karen. Il se créé un groupe de joyeux amis fêtards, sans jamais parvenir à sortir avec la moindre fille...
Tony, depuis, est sorti avec les plus belles de la région.
Mais, croulant sous les erreurs accumulées et surtout les erreurs de parcours, Tony est envoyé chez son père, qui a une maison au Portugal.
Pendant ce temps, Alexandre, s'accroche à ses études et à sa vie solitaire... Il aura l'éloge d'une jeune peintre, Sonia, qu'il rejettera trop rapidement, et s'en trouvera puni de rejets de la part de toutes les autres...
Il aimera de loin et de poèmes une quantité importante de filles, sans jamais pourtant leur avouer, ou, le cas dépassé, se heurtant à un mur froid et dur.
Il apprend ensuite par un gars qu'il déteste, que Tony est revenu du Portugal, mais complètement dangereux et pour cause, il a sauté sur une fille avec un couteau et l'a violée. Bientôt les gendarmes auditionnent Alexandre pour dresser un schéma psychologique d'enfance de Tony. Cette affaire affecte la sensibilité de notre homme et le perturbe, d'autant plus que les sacrés gendarmes en profitent pour le provoquer au sujet de consommation et de revente de haschich!
Les temps passent, Tony est en prison pour au moins huit années et Alexandre, enfin se décide à sortir avec sa meilleure amie ; Marie-Astrid, une fille complètement folle, rousse, qui a fait tout ce que les autres filles évitent de faire... Elle le détruira après lui avoir donné d'un coup ce qu'il attendait depuis douze ans, l'amour... sous toutes ses formes, tendre et chaotique, épris et ingrat... sauvage et barbare!
Il tombe en dépression nerveuse, fréquente des cliniques psychiatriques et maisons de repos ; se relance dans ses études.
Un jour, se promenant dans sa campagne, le long d'une rivière avec Rodolphe, ils aperçoivent deux jeunes demoiselles qui se baignent dans des cris de joies...
Ils arrêtent leurs vélos, les appuient contre des frênes et attendent, le cœur un peu culotté et échaudé, la sortie de bain des gamines.
Ces dernières sont très réceptives à leur approche et acceptent de les revoir le soir. L'une d'elles à des origines espagnoles, donc la peau un peu mâte, elle est fine, des yeux de biche, délicieuse...
Alexandre s'impose en chef face aux trois larrons qui étaient pour l'évènement présents chez lui le soir même et il s'approprie grâce à ses déboires passés, la priorité pour draguer Marcia.
Celle-ci, qui ne connaissait pas beaucoup le monde s'accommoda de l'offre comme elle se serait contenter de n'importe quel mignon...
Leur idylle dura six mois, plus ou moins réciproque, et agréable, somme toute si Rodolphe ne s'était pas gargarisé à nommer la belle de petite sœur et de douceurs... Ce qui incommodait fortement Alex, qui n'avait plus besoin depuis longtemps d'admirateur ou même d'un ami, souvenez-vous...
Bref, Alex connu une seconde dépression nerveuse, suivie d'hospitalisations ; tandis que Tony, lui, enfin libéré, sauta, deux semaines plus tard sur une autre fille, qui fut sauvée de justesse par un voisin attentif à ses alertes. Tony fut condamné pour tentative de récidive et Alexandre à nouveau interrogé sur le passé de Tony, d'ailleurs, chaque fois qu'il le pouvait, il disait le plus grand bien de son ami d'enfance, notamment qu'il lui avait tout appris, qu'il était le plus généreux, le plus courageux et le plus doux...
Les gendarmes, en profitaient chaque fois eux, pour orienter le débat vers la consommation de marijuana, lâchement.
Il abandonna définitivement ou presque ses études à l'université, correspondant un tout petit peu avec Tony, emprisonné. Il rencontre Cécilia, sur internet, entre deux voyages, une jeune étudiante parisienne, d'origine taïwanaise, qui parle cinq langues et leur amour dure six mois comme avec Marie-Astrid et Marcia!
Pendant qu'Alexandre est en vacances aux États-Unis, Cécilia est elle à Taïwan, pour améliorer ses dialectes, et elle a un coup de foudre pour un taïwanais, elle qui croyait préférer les français! Ce qui outre rappelant une fameuse chanson à Alexandre, l'atteint profondément...
Le voilà blindé cette fois pourtant, et suivi par un thérapeute, il ne rechutera pas.
Il fréquente des femmes de rue, partout où il passe, ce qu'a d'ailleurs évoqué le capitaine de gendarmerie au sujet de Tony, sur ce qu'il aurait du faire...
Il gardera un contact soudé d'amitié avec Marie-Astrid, maintenant maman, et avec Cécilia mais pas avec Marcia, qui l'a remplacé rapidement!
Et Alexandre, dans sa frustration s'était inventé un océan imaginaire dans lequel il voyait tomber comme une grosse goutte dans un éclaboussement, les femmes qu'il aimait et qui le rejetaient ; à force même, des rivières et des fleuves, jonchés d'autres femmes, n'étaient autres que les peines d'une seconde, d'un coup de foudre passager et sans suite, de rue, qui alimentaient aussi cette mer.
Nous, nous avons ce vieillard, assis et absorbé dans sa mémoire, sur ce quai désert et où des néons clignotent, un courant d'air fait glisser un papier de chocolat de distributeur par terre... On entend le son d'un métro qui passe dans un couloir voisin et des pas au loin.
Dans ce crâne, basculé en avant, permettant au regard vide de se fondre dans le noir du bitume à ses pieds ; bientôt, l'océan des peines est passé en revue, dans un ordre à peu près anecdotique et entrecoupé de certains souvenirs d'échanges éphémères affluents. Quelle malchance! C'est impossible! C'est tout simplement impossible! Son regard s'illumine un instant, un sourire satirique apparaît sur sa bouche. Non, vous pourriez raconter cette vie à n'importe qui, il ne vous croirait pas! Autant de malchance, c'est impossible, IMPOSSIBLE!
Il faut se souvenir de cette copine, qui l'appelait, comme l'autre, et l'autre et l'autre, pour lui annoncer finalement qu'il était juste un bon copain, voilà tout... Et puis ces fois où il a perdu de vue une jeune femme qui lui avait sourit ; et puis toutes ces fois ou une fille a eu le choix entre lui et un autre, et, c'était l'autre, ou celles qui voulaient bien mais complètement intoxiquées et infidèles! Il se demande même si certaines ne seraient pas devenues lesbiennes pour être sûres de ne pas avoir affaire à lui!
Jamais, il n'avait connu l'échange, spontané et réciproque, l'idylle et le romantisme bien connu de tout le monde. Il avait revu Tony presque vingt ans plus tard en lui rendant visite en centrale; et c'est ce vieux prisonnier banni de la cité qui le réhabilita: Tony malgré les camisoles et les toxicomanies induites et les lynchages organisés dans un décor et une ambiance d’abattoir ou d'élevage de tueurs a eu l'instinct de camaraderie et de fraternité d'indiquer à Alexandre que celui qui avait non seulement baissé son froc mais en plus déformé la réalité, enfonçant celui qu'il n'avait pas réussi à séduire, l'ayant en quelque sorte mis dans cette spirale avec les conseils avisés de la bourgeoisie de Louviers... n'était autre que le gros porc qui avait aussi abusé de Marie-Astrid avec deux de ses amis!
Pourtant derrière ce masque de perdant, de cœur esseulé, comme tout célibataire endurci, il accumula toute sa vie les aventures d'un soir... En fait, il avait du avoir deux fois plus au carré de son âge de conquêtes qu'un homme marié!
S'il y avait un homme dans ces sous-terrains ce soir, qui connaissait les femmes, c'était Alexandre et il le savait très bien malgré ce semblant de peine... Il n'a pas d'alliance au doigt parce qu'il est marié au coups de foudre, incessants, inépuisables... Il n'a pas de femme parce qu'il les a toutes eues finalement, le malin! Il exulte intérieurement, fier de lui, de son vécu, de sa ténacité.
Bécon-les-Bruyères, le 19 octobre 2005
Un jour les jeunes russes me demandent: "raconte-nous une anecdote!".
Très acculé parce que je venais de me présenter comme un écrivain et les avais déjà mis en déroute en leur signifiant que je n'écrivais que sur moi quand ils m'avaient questionné sur ce que je comptais raconter au sujet de leur vaste territoire lors de l'écriture de mon livre!
Timidement et plein d'espoir avec un souvenir qui me revenait au sujet de notre conversation tout juste détournée par cette "mise à l'épreuve" très orthodoxe, je commence:
_ Un jour, me rendant à une heure de location d'aéronef en voiture de sport (celle avec laquelle je suis arrivé jusqu'à vous...); un groupuscule de jeunes vêtus de rouge m'assaillent à l'approche d'un carrefour... J'avais entre les doigts un long conne en fumigène embaumant la marijuana/... leur chef m'avertit: Ils font en collaboration avec la gendarmerie nationale de la prévention routière sur les dangers de la drogue! Et ce, cet adorateur de la jurisprudence m'engage à ce que nous discutions, sans doute pour me remettre sur son chemin illuminé de pragmatisme!... Mais je déçois aussi sec mon interlocuteur en lui rétorquant que je dois être à l'aéroport dans les dix minutes qui suivent... Alors ce dernier défait s'autorise à me disculper courtoisement sous bonne garde que si j'ai un avion à prendre... et moi de le toiser une dernière fois en lui balançant que oui puisque je le pilote! Tout en démarrant en trombe!
Seulement ma fierté à leur conter ce souvenir fut temporairement bafouée au jugement du plus charismatique d'entre eux: "Ceci n'est pas une anecdote!"
La morale de cette anecdote est qu'on peut être plus orthodoxe que la jeunesse poutinienne!
Alexandre Hédan le 11/juin/2010 à 15H18 (Quatre ans après l'anecdote, six ans après le souvenir!)