2016

TOURCOING VUE PAR L'ESA

Circuit de quatre expositions, 40 artistes au cœur de la ville

17 > 23 septembre 2016

Le pôle du développement artistique et culturel de la Ville de Tourcoing et l’École Supérieure d’Art du Nord-Pas-de-Calais Dunkerque-Tourcoing (ESÄ) invitent, dans le cadre des Journées du Patrimoine 2016, à un parcours artistique dans la cité, constitué de quatre expositions dans quatre lieux emblématiques de la commune. Cet événement fournit une occasion de découvrir les œuvres de plus de quarante étudiants / artistes de l’ESÄ qui interrogent la notion de «patrimoine de proximité», valorisé ici par la création contemporaine.

Texte d'Éric Harasym

DUCAL PALACE

Œuvres photographiques de François Morel, Paul Ralu, Manon Thirriot, Thomas Pluym, Charlotte Vanbleus, Jonathan Paquet, Ecouman Kablan

Gravures de Roger Bougamont


Maison Folie de l'Hospice d’Havré, Tourcoing

Du samedi 17 septembre au dimanche 2 octobre 2016


Si l’ancien hospice de Tourcoing porte aujourd’hui le nom de trois générations d’aristocrates et militaires du XVIIIe siècle, tous « Ducs d’Havré » et « Seigneurs » de cette commune sous l’ancien régime, il s’agit pour l’histoire de cette superbe bâtisse, d’une « fiction historique », puisque ce lieu ne fut jamais destiné à être un « palais ducal des ducs d’Havré », ni un lieu directement rattaché à leur patronyme (belge au demeurant), mais un couvent de sœurs franciscaines fondé en 1260 par la Comtesse Mahaut de Guisnes, transformé au XVIIe siècle en hospice général, et en activité jusqu’en 1998, pour soigner et recevoir des personnes âgées de condition modeste.


C’est à partir de cette constatation historique, que les étudiants de l’Ecole Supérieure d’Art de Tourcoing nous invitent à découvrir l’exposition « Ducal Palace» au sein même de la Maison Folie, clin d’œil non seulement à cette génération de ducs tourquennois « sans palais », mais surtout en résonnance au lustre d’antan des cinémas populaires aujourd’hui disparus, lieux de fictions et de rêve par excellence, qui jalonnaient les quartiers de la ville tels que : l’Idéal Park, l’Olympia, le Rex, le Central, le Rialto, le Familia, le Concordia, ou le Fresnoy aujourd’hui réhabilité. 


« Ducal Palace » est donc une exposition qui questionne la dimension imaginaire rattachée à l’architecture et au territoire local.

En effet, comment transformer l’architecture de la ville de Tourcoing en fiction ? 


Les jeunes artistes, tous étudiants à l’ESA, réunis au cœur de l’Hospice d’Havré, interrogent à travers leurs travaux plastiques, aussi diversifiés que la photographie, la gravure, les mécanismes de l’imagination qui structurent notre perception de l’architecture. 

Il s’agit ici de rendre compte de démarches artistiques qui croisent et superposent les plans de la captation par l’image, de la fiction et de l’émotion face au patrimoine tourquennois. 


La seconde question que pose cette exposition est : comment transfigurer « l’espace politique de la cité », tel que l’énonçaient déjà les grecs de l’antiquité, en « espace poétique et fictionnel » par une appropriation du patrimoine construit ?


Par leurs propositions plastiques, les étudiants de l’ESA nous invitent à découvrir des processus, des procédures de fictions singulières, qui peuvent émaner de l’architecture qui nous entoure, à travers les ressorts de l’imaginaire.   


Ces travaux nous démontrent que le patrimoine architectural, mis en lumière par des artistes, peut être de nouveau « reconstruit par la pensée », réinterprété par la fabrication même de l’image, reconfigurant ainsi, une réalité que certes, nous côtoyons tous les jours, mais que curieusement nous ne percevons plus, à force d’habitudes.


Nous sommes donc conviés à redécouvrir la ville de Tourcoing sous un autre angle, original et nouveau, à travers une expérience esthétique et sensorielle du territoire local. 

Texte d'Éric Harasym

CARNAVAL DES ANIMAUX

Sélection de gravures des étudiants d’Alexis Trousset artiste enseignant, autour des collections patrimoniales de la médiathèque sur le thème des animaux. 

Sculptures d’Elsa Califano à la Galerie Nadar (face aux bestiaires exposés dans le cadre des journées du patrimoine), et Noémie Bonnel (salle polyvalente). 

Gravures de Yann Legrand.

Salle polyvalente de la Médiathèque André Malraux

Samedi 17 septembre au vendredi 23 septembre 2016


L’exposition « le carnaval des animaux », présentée à la Médiathèque André Malraux, dans le cadre des journées du patrimoine, nous invite à découvrir les travaux de gravure, de sérigraphie et de sculpture des étudiants de l’ESA Tourcoing.


Ces travaux d’étudiants entrent en résonance avec le bestiaire que la Médiathèque de Tourcoing présente dans une exposition conjointe à la Galerie Nadar, intitulée : “Des animaux à la Médiathèque”.


Ces œuvres graphiques, clin d’œil au compositeur Camille Saint-Saëns et sa « grande fantaisie zoologique » ou suite descriptive animalière, s’inscrivent dans une longue tradition remontant au Moyen Age, où l’animal est décrit de manière symbolique à travers le carnaval et l’art héraldique, la tradition orale des contes et légendes, que l’on retrouve également sur tous les continents, permettant toutes les interprétations artistiques les plus délirantes, où apparaissent : monstres et chimères, gargouilles les plus fantasques, dragons exotiques, êtres hybrides mi homme mi animal, bêtes difformes extraordinaires sorties de révélations prophétiques, apocalyptiques, de grimoires ou de textes anciens, des récits de voyage des grands explorateurs aux confins du monde, ou des abysses océaniques, jusqu’aux fantasmes scientifiques de savants fous mis en lumière par le cinéma, et concrétisés aujourd’hui par les expériences de clonage en laboratoire. 


La figure animale n’est ici qu’un prétexte esthétique pour des dérives formelles, permettant d’interroger non seulement sa présence iconographique à travers le temps et les civilisations, mais également sa condition, tout d’abord comme figure traquée et dessinée par les premiers hommes de l’humanité, redoutée à travers les symboles du pouvoir royal, en passant par sa domestication ou sa consommation de masse par l’élevage et l’abattage industriel, sa disparition progressive par la perte de son territoire naturel ou par les pratiques illégales du braconnage.  


Cette exposition permet donc de valoriser, par le prisme des pratiques artistiques des ateliers de l’ESA, cette faune sauvage ou domestique, ce patrimoine naturel universel qui accompagne l’homme depuis la nuit des temps, et qui d’un point de vue philosophique, interroge et reflète bien souvent notre propre condition d’être vivant.     

Texte d'Éric Harasym

PAR-DELÀ LE CIEL

Rachel Duel, Christine Berchadsky, Antoine Watel, Deng Pan, Marie Charpentier, Françoise Lermytte, Catherine Lavocat, Lucie Logier, Julie Gaubert, Marine Lafeuille, Lisa Richard, Nicolas Dubois, Mélanie Lecocq, Marie Rosier, Yannick Bauwens, Loïs Ladent

Église Saint Louis quartier de l’Épidème (Station de métro Sébastopol)

Du samedi 17 au vendredi 23 septembre 2016


Dans le cadre de l’exposition « Par-delà le ciel », organisée pour les journées du patrimoine édition de 2016, vous êtes invités à découvrir un ensemble de travaux plastiques d’étudiants de l’Ecole supérieure d’art du Nord à Tourcoing, 


Cette immersion au sein de l'Église Saint Louis permet d’interroger la notion de « sacralité », par le prisme des œuvres présentées, sous la forme d’un parcours initiatique et de découverte d’un lieu qui a perdu toute vocation à caractère religieux, tout en conservant une dimension spirituelle indéniable, par les éléments liturgiques présents. 


En effet, cette église, à l’origine désaffectée, a été désacralisée avant de devenir un espace à dimension hautement culturelle et sociale, au cœur du quartier de l’Epidème à Tourcoing. 


La question fondamentale que pose cet ensemble d’œuvres est : comment redonner du sens par « l’art et la création » à un lieu qui a évolué dans son identité ? 

Comment retrouver autrement, par l’art,  le « sens du sacré », à une époque où, l’on ne peut que constater le retour de « la dimension religieuse » à travers le monde ? 

Comment, et pourquoi montrer de l’art contemporain, dans un lieu chargé de plus d’un siècle d’histoire, et déjà fortement marqué par des éléments esthétiques et stylistiques omniprésents ou redondants ? 


Nous sommes donc là, face à un paradoxe, dont les travaux des étudiants de l’ESA tentent de répondre par leur propre regard, leur propre interprétation de ce lieu patrimonial, habité par l’histoire, où l’on croise la figure de Saint Louis, à la fois « personnage canonisé » et « Roi de France », figure majeure de ce Moyen Age un peu oublié, partagé entre « monde terrestre et monde spirituel », et symbolisant, par cette dualité, l’esprit de cette exposition . 


Ce magistral patrimoine que constitue l’Eglise Saint Louis de Tourcoing,  restauré et réhabilité par Silvany Hoarau son propriétaire, et son équipe de charpentier et couvreurs, pour la plupart « Compagnons du devoir », dont les origines remontent aux bâtisseurs des cathédrales, est de nouveau valorisé ici, par le biais de la création contemporaine, et réinterprété, revisité par les étudiants de l’ESA, grâce à des médiums aussi diversifiés que : la peinture contemporaine  de retable, la sculpture, la gravure, la vidéo, la photographie numérique, l’installation d’œuvres éphémères in situ, la projection de lumière, des œuvres sonores, des sculptures /maquettes ou de la performance filmée…


Un beau programme en perspective au cœur de cette nef du XIXe siècle , qui nous permettra curieusement de remonter dans le temps, tout en s’inscrivant au cœur de notre époque, à travers une tentative « d’adaptation artistique » à l’esprit du lieu.

Texte d'Éric Harasym

Reportage :  "La reconversion de l'église Saint-Louis à Tourcoing"

par Christine Defurne et Jean-Marie Barféty - Nord Pas-de-Calais Matin 

Préparation de l'exposition "Tourcoing vue par l'ESA" avec les étudiant.e.s de l'ESA  site de Tourcoing

Vue de l'exposition Par delà-le-ciel, Église Saint-Louis, Tourcoing

© Silvany Hoarau 

MERCUROPOLIS

Œuvres de Wilfried Dsainbayonne, Paul Ralu, Manon Aillerie, Deng Pan, Léo Sudre, Margot Bricout, Karen Laporte, Roger Bougamont, Juliette Ducloy 

Hall de la Tour Mercure à Tourcoing

Du 17 au 23 septembre 2016


A l’instar des astrologues sumériens qui tentaient de lire le futur dans le scintillement des  étoiles, ne sachant pas qu’ils ne percevaient que la lueur lointaine d’étoiles disparues, renvoyant une image du passé, l’exposition Mercuropolis, clin d’œil au film Métropolis de Fritz Lang, tente de mettre l’accent sur une situation paradoxale quant au style de cette architecture fascinante qu’est la Tour Mercure à Tourcoing, et sa résonance symbolique sur notre territoire local, à travers le temps.  


En effet son architecte, Jean Willerval a conçu cet édifice moderne en 1974, dans l’esprit des tours du quartier de la Défense à Paris, pensant être dans un style résolument avant-gardiste, en tentant de s’inscrire dans un futur, nourri par des utopies issues de la science fiction, de la conquête spatiale, de la cybernétique et des premiers ordinateurs, où tout le monde ferait des voyages intergalactiques, à l’instar des cosmonautes du film de Stanley Kubrick  2001 l’odyssée de l’espace , tout en écoutant les premiers synthétiseurs de Jean-Michel Jarre. 


Du reste, le reflet des verres miroirs couvrant la totalité de cette tour, tentative audacieuse de dématérialiser cet édifice, constitué à 80 % de béton, ne rappelle t-il pas la quatrième dimension infinie des espaces intersidéraux, dans lesquels nous propulsait l’émission télévisée des frères Bogdanov intitulée Temps X ?


Cette tour portant le nom d’une planète de notre système solaire, plantée au beau milieu d’un axe routier important au cœur de la métropole, à la frontière entre Roubaix et Tourcoing, incarne toujours un futur qui se conjugue étrangement au passé, tel un vaisseau soviétique Soyouz qui n’aurait jamais décollé.      


Au même titre que le premier « Minitel » conçu à la même époque, devait être l’outil de pointe qui annonçait l’avenir mondialisé de la télécommunication, ou le Concorde comme avion le plus rapide au monde, la Tour Mercure est devenue un symbole de « Dystopie » de notre société qui, voulant accélérer le temps en projetant de manière prophétique, utopique et révolutionnaire, notre condition future, se retrouvera très vite dépassée par l’histoire, au point de tomber dans une sorte de « désuétude esthétique » pour être classée, 40 ans plus tard, au registre d’un patrimoine dit « vintage » ou « rétro », à l’accent nostalgique.  


Quel médium plus adapté que la photographie, ne pouvait interroger les effets du temps sur la réalité architecturale d’un lieu, qui devait être à la pointe de l’avant-garde, mais se retrouve aujourd’hui, comme figé dans l’espace, vestige d’une époque glorieuse où tout était encore possible ? 


Les étudiants de l’ESA ont choisi ce lieu à l’image d’un grand laboratoire ponctué de sas, pour mieux expérimenter les notions d’espace, de lumière, de volume, à l’instar d’une immense machine à remonter le temps, ou en tout cas à l’interroger pour mieux s’y projeter. 

En s’emparant de ce monument de la modernité, et son hall d’entrée, symbole d’une certaine époque de progrès et de prospérité, ces derniers tenteront de questionner, à travers leurs travaux plastiques, la notion de patrimoine contemporain à transmettre aux générations futures.     

Texte d'Éric Harasym