" Le marché des actions est nécessaire à l'investissement en entreprise "

Toute critique du système actionnarial se heurte immédiatement à ce contre argument : "il faut bien investir pour faire fonctionner une entreprise". Cette affirmation elle-même mérite au moins d'être analysée scrupuleusement. Mais elle réalise surtout un saut sémantique qu'il convient, cette fois, de contredire sévèrement. Car même si un investisseur est nécessaire à la bonne marche d'une entreprise, le fait que le marché des actions constitue un cadre efficace pour cet investissement est plus que discutable.

En fait, comme le rappelle utilement Frédéric Lordon, l'investissement-action ne correspond à l'investissement productif (celui qui va à l'entreprise) que lorsqu'il s'agit d'actions souscrites à l'émission. Mais le marché des actions est constitué dans son écrasante majorité par le marché secondaire, c'est à dire par un système dans lequel l'argent des acquéreurs ne va pas à l'entreprise concernée mais sert à acheter l'action à un autre investisseur, lui-même ayant acquis l'action à un autre, puis un autre, et ainsi de suite. Les flux de liquidités, dans ce cas, ne se font plus qu'entre spéculateurs, et l'entreprise n'en voit pas la couleur.

Or, on l'a dit, ces deux marchés existent parallèlement dans des proportions sans commune mesure : en 2015, la capitalisation du seul CAC40 s'élevait à 1430 Milliards d'€, alors que la même année les investissement réels dans les entreprises étaient de seulement... 10 Milliards d'€.

On s'aperçoit donc que les actionnaires qui décident de l'essentiel de la vie économique de nos sociétés, avec les conséquences que l'on connait, ont en fait une efficacité de 0.7 %. De quoi relativiser la légitimité de leur poids dans le débat public, et des largesses dont ils font preuve dans les programmes de certains politiques.

Ces candidats à la présidentielle proposent-ils de diminuer les impôts sur les actions pour favoriser l'investissement ?

* Nota Bene : certains des candidats ont des positions manquant de clarté, changeantes, ou en inadéquation avec d'autres de leurs prises de positions, qui peuvent nous empêcher d'affirmer avec certitude en quoi leur programme correspond aux sujets développés ici. Certains n'ont également pas publié de programme. Ces situations évoluant rapidement, nous pouvons également ne pas avoir mis à jour cet encart avec les dernières nouveautés. N'hésitez pas à utiliser la page de contact si vous relevez des imprécisions ou des erreurs.