Vous trouverez ci-dessous, par ordre chronologique, les synthèses des échanges recueillis lors des permanences organisées par France Insomnie. Celles-ci ont lieu chaque troisième jeudi du mois de 18 h à 19 h 30 en visioconférence dans l’attente d’une reprise en présentiel. Elles sont ouvertes prioritairement à tous les adhérents de l’association, mais toutes les personnes souffrant de troubles du sommeil peuvent y participer en s’inscrivant par mail à :

contact@franceinsomnie.fr

France Insomnie tient à remercier toutes les personnes qui participent à ces permanences. Vos nombreux témoignages contribuent à avoir une vision plus précise et complète de cette véritable pathologie qu’est l’insomnie.

L’association remercie également Élisa Wrembel, Doctorante en Sciences de l’Information et de la Communication, qui participe à ces permanences et rédige les synthèses.

Plus d'informations : son interview

Mai 2024

Un médicament d'un nouveau genre pour vaincre l’insomnie


Et si avec ce nouveau médicament, nos nuits blanches devenaient de l’histoire ancienne.

Tous les insomniaques habitués à prendre des somnifères en rêvaient depuis longtemps : une petite pilule qui n’aurait pas les inconvénients de nous anesthésier en début de nuit relèverait presque du miracle pour toutes celles et ceux qui ont perdu le sommeil depuis des années.

Il se pourrait bien que le traitement de l’insomnie entre dans une ère nouvelle.


L’insomnie, celle qui nous gâche la vie au quotidien, a peut-être trouvé son vainqueur avec l’arrivée d’un nouveau médicament commercialisé en France depuis mars 2024 sous le nom de Quviviq.

Contrairement aux somnifères traditionnels, il agit sur le réveil plutôt que sur l’endormissement. Sa substance active, le daridorexant, bloque l’action de l’orexine, une substance cérébrale qui favorise l’éveil. Ainsi, ce médicament d’un nouveau genre aide les patients à s’endormir plus rapidement et à rester endormis plus longtemps, améliorant significativement leur qualité de vie.

Alors, peut-on parler de révolution dans la prise en charge des troubles du sommeil ?

Si l’on se réfère aux premiers témoignages reçus d’adhérents France Insomnie l’ayant testé, les résultats sont plutôt prometteurs.


Une thématique qui attire de nouveaux participants

La thématique du jour a attiré plusieurs nouveaux participants qui n’avaient pas encore entendu parler de ce nouveau médicament.

Ils se sont présentés à tour de rôle en partageant leur parcours d’insomniaque qu’ils qualifient souvent de véritable « parcours du combattant » : trouver le bon praticien au bon moment relève souvent du miracle. Unanimement, ils en concluent que la complexité du chemin à gravir, liée à la dimension psychologique de la pathologie, entraîne un sentiment de solitude et de résignation. Alors, l’arrivée d’une nouvelle molécule sur le marché les intéresse au plus haut point.

Les TCC à l’Ère numérique

Avant d’aborder la thématique, Françoise Rousseau, vice-présidente de l’association, a rappelé que les TCC (thérapies comportementales et cognitives) sont généralement prescrites en première intention.

France Insomnie a été sollicitée par une entreprise allemande, spécialisée dans le développement de thérapies digitales pour la santé. Cette société aspire à introduire sur le marché français sa thérapie numérique dédiée à l’insomnie chronique. Françoise Rousseau, ayant intégré le comité scientifique de cette société en qualité de « patiente experte », participe aux différentes phases de ce projet avec pour finalité une prise en charge de ces TCC en ligne.

Nous aurons sans doute l’occasion d’y consacrer prochainement une permanence entière.

Si certaines personnes souhaitent participer à cette nouvelle forme de thérapie numérique, n’hésitez pas à vous faire connaître auprès de France Insomnie.

Insomnie et évolution pharmaceutique au fil des années

Jean-Marc Loison, le président de l’association, a ensuite fait une présentation générale du sommeil et de ses différentes phases en rappelant quelques chiffres significatifs sur l’insomnie.

Il a retracé l’évolution des traitements au cours des dernières décennies par types de médicaments en soulignant les avantages et inconvénients pour chacun.

Vous trouverez une synthèse de cette présentation ici.

Plusieurs participants ont déjà réussi à se faire prescrire ce nouveau médicament. Certains sont en attente de terminer leur ancien traitement, d’autres ont déjà commencé et ont un recul de quelques semaines. Les retours sont dans l’ensemble positifs : « Mes réveils nocturnes ont pratiquement disparu… je n’ai plus cette sensation d’avoir été anesthésiée lors de l’endormissement… j’ai l’impression que je recommence à rêver, du moins, je me réveille en forme avec le souvenir de mes rêves… pas de maux de tête et suis en forme la journée… j’ai le sentiment de revivre… »

Des témoignages enthousiastes que nous espérons être identiques lors des prochaines permanences. N’hésitez pas à nous en faire part en laissant un petit commentaire par mail à contact@franceinsomnie.fr

Octobre 2022

L'insomnie, force ou faiblesse ?


Dans le cadre de la thématique de la permanence « l'insomnie, force ou faiblesse », plusieurs personnes ont témoigné de leur processus de guérison.

 

Le sommeil ne se cherche pas, c'est lui qui nous trouve !

 

L'une des adhérentes a partagé son expérience de l'insomnie et la façon dont elle a réussi à en faire une force. Après des dizaines d'années d'insomnie, elle dort mieux, n'a plus de nausées, plus de malaises. Son cerveau fonctionne plus vite, elle n'a plus de problèmes de mémoire, et explique « revivre ». Selon elle, sa guérison est due à une combinaison de facteurs, et un long cheminement. Celui-ci a commencé par le fait d'accepter l'insomnie comme pathologie, en faisant « le deuil » d'un sommeil idéal. Elle explique avoir compris que « le sommeil ne se cherche pas, c'est lui qui nous trouve ». Elle a donc abandonné le fait de dormir à tout prix, et décidé d'appréhender l'insomnie autrement en acceptant sa condition et se demandant comment en faire une force. Elle a effectué un travail important sur ses valeurs et ses priorités dans la vie. Elle a alors réalisé que le problème ne venait pas du fait qu'elle réfléchissait trop, mais qu'elle ne se focalisait pas sur l'essentiel.

 

L’importance des Thérapies Cognitives et Comportementales

 

Les problèmes de sommeil peuvent en effet être liés à des déséquilibres entre le mode de vie et les valeurs de la personne, des périodes de mal-être plus ou moins durables. Le principe de la Thérapie Cognitive et Comportementale (TCC) est d'apprendre à mieux se connaître et à réfléchir à ce que l'on souhaite vraiment faire de sa vie. Ce cheminement doit permettre une plus grande cohérence entre ses actions et ses valeurs, que celles-ci soient directement liées au sommeil ou non. Les mécanismes travaillés dans le cadre des TCC peuvent ainsi être appliqués à d'autres domaines de la vie. 

 

Une autre adhérente a souligné le cercle vicieux de l'insomnie qui conduit à avoir peur de dormir. Après de longues années d'insomnie, elle a expliqué avoir réussi à comprendre son propre mode de fonctionnement et décidé d'adopter de plus en plus de réflexes tournés vers son bien-être personnel et sa détente. Aujourd'hui, elle dort bien.

 

Dans certains cas, l’insomnie peut s'avérer être une force

 

Le président de l'association, lui aussi, a réussi à faire de l'insomnie une force. Alors que son faible besoin de sommeil ne lui posait pas de problème étant jeune, son entourage s'inquiétait des conséquences de ce rythme sur sa santé. En prenant de l'âge, il a commencé à s'en inquiéter, voire à culpabiliser de cette situation. Avec la crise sanitaire et les restrictions qui ont suivi, il a décidé de profiter de la liberté d'organiser ses journées comme il le souhaitait pour mettre en place une routine dédiée au sommeil, notamment en appliquant les 10 conseils de France Insomnie pour mieux dormir. Cela lui a permis d'améliorer nettement son sommeil et d'avoir une réflexion plus globale sur l'insomnie, de manière à relativiser le fait de peu dormir et à faire de ces temps-là des moments plus sereins, voire des temps de créativité.

 

Les responsables de l'association rappellent qu'il faut se méfier des solutions présentées comme miraculeuses, car même les produits naturels peuvent avoir des effets néfastes (accentuer l'effet d'autres produits par exemple).


Septembre 2022

Stress de rentrée et sommeil : comment garder le bénéfice de ses vacances 


L’automne est généralement une période peu favorable au sommeil. En cette rentrée, les participants à la permanence ont partagé le constat d'une atmosphère assez anxiogène au sein de la société. Alors que nous sortons de la période aiguë de la pandémie, l'actualité liée au changement climatique ainsi qu'à la guerre en Ukraine entraîne un sentiment d'incertitude et les états anxio-dépressifs. Plusieurs adhérents racontent qu'ils identifient de plus en plus de plaintes liées au sommeil autour d'eux, dans la sphère professionnelle comme privée, y compris chez des personnes qui n'avaient jamais été concernées par les troubles du sommeil auparavant.

En dehors de cette actualité, la période de l'année est propice aux rechutes : elle est souvent associée à des changements professionnels ou personnels et se caractérise par différents impératifs potentiellement générateurs d'anxiété (impôts, fin de l'été, etc.). De plus, le soleil se couche plus tôt, ce qui laisse moins de temps en journée pour s'exposer à la lumière naturelle et influe négativement sur le moral et le sommeil. De manière générale, les changements de saison sont fréquemment synonymes de rechutes pour les personnes insomniaques. Selon le responsable de l'association, les psychologues considèrent même le stress de rentrée comme un phénomène normal.

Qui dit hygiène de sommeil dit hygiène de vie

Face à ce contexte peu favorable, il est important de maintenir, voire renforcer ses efforts en matière d'hygiène de sommeil : la régularité des horaires (surtout du lever, y compris le week-end) et l'activité physique en journée font partie des premiers bons réflexes à adopter. Le responsable de France Insomnie conseille de ne pas être trop dur avec soi-même et d'accepter que ce nouveau rythme nécessite un temps d'adaptation. Il recommande de ne pas changer trop brutalement de rythme et de reprendre progressivement une certaine rigueur dans l'organisation de ses journées, afin de favoriser la qualité du sommeil. Il rappelle les 10 conseils de l'association pour bien dormir.

Témoignages croisés

Une adhérente a rappelé son long parcours contre l'insomnie : pendant 20 ans, elle a cherché à améliorer son sommeil, passant par des périodes de vie très difficiles. Sa volonté de s'en sortir l'a poussée à expérimenter des solutions autres que celles proposées par le système de soin, car elle était devenue dépendante à toutes sortes de médicaments. À force d'explorer, elle a appris à mieux connaître son fonctionnement et trouvé des leviers pour gérer son sommeil, dont celui de l’alimentation, et même réussi à bien dormir. Aujourd'hui, elle souhaite partager cette expérience avec d'autres personnes touchées par l'insomnie, notamment par le biais de l'association.

Accepter sa pathologie

La permanence a également été l'occasion d'accueillir plusieurs nouveaux participants. Parmi eux, une jeune enseignante a exprimé sa difficulté à gérer ses insomnies en cette période de rentrée. Étant d’un tempérament anxieux, elle a raconté être actuellement dans un cercle vicieux où son manque de sommeil la nuit impacte son comportement dans la journée en face des élèves. Consciencieuse, elle regrette cette situation. Les responsables ont alors rappelé que le chemin vers le mieux-être passait par deux étapes cruciales : l'acceptation du problème et l'engagement dans la recherche de solutions personnelles. Ce conseil a par ailleurs été donné à un ancien de l’association qui, face à l'incapacité de ses médecins à lui proposer un nouveau traitement, s’est résigné au renouvellement perpétuel des mêmes médicaments. Les responsables ont alors rappelé que face à une situation de blocage, il pouvait être pertinent de changer de thérapeute afin de tenter de nouvelles possibilités. Bien qu'il ne soit pas facile de trouver un médecin et de créer une relation de confiance avec ce dernier, consulter un nouveau thérapeute peut permettre d'ouvrir de nouvelles perspectives sur les traitements. La vice-présidente de l'association explique que bien qu'elle ait consulté différents spécialistes, c'est un médecin généraliste qui lui a prescrit le traitement au long cours (mais pas un somnifère) qui a été le plus efficace pour elle.

La vision de l’insomnie au travail

Ces témoignages ont ouvert une discussion sur les représentations de l'insomnie dans le milieu professionnel : en général, les troubles du sommeil ne sont pas considérés avec le même sérieux que d'autres problèmes de santé. Le fait d'exprimer son état de fatigue peut même donner lieu à des jugements de la part de la hiérarchie ou de l'entourage. Cette situation contribue à faire culpabiliser les insomniaques et à les isoler. Cela montre à quel point il est nécessaire de faire changer le regard de la société sur l'insomnie.

L’insomnie au-delà des frontières

Enfin, un participant connecté du Québec a constaté des similitudes entre la situation française et celle dans son pays. Il a même expliqué qu'au Québec, les délais d'attente pour passer une polysomnographie étaient encore bien plus longs qu'en France – des années – rappelant ainsi que les problèmes d'accompagnement des troubles du sommeil s'étendent bien au-delà de l'hexagone.


Juin 2022

Grand succès pour les permanences mensuelles « France Insomnie à votre écoute »

Le 16 juin 2022 a eu lieu la dernière permanence avant la pause estivale et la reprise en septembre. À cette occasion, Élisa Wrembel, qui participe aux permanences depuis bientôt deux ans dans le cadre de sa thèse de doctorat, a proposé un bilan de ces derniers mois d'échanges. Les informations rapportées dans ce bilan sont donc issues des discours des membres de France Insomnie et traduisent leurs points de vue sur le sujet de l'insomnie.

Genèse

 « En 2016, nous avons créé l’association France Insomnie pour rompre l’isolement des insomniaques et œuvrer afin que l’insomnie soit reconnue comme une réelle pathologie aux conséquences graves sur la vie privée et professionnelle, rappelle Françoise Rousseau, vice-présidente de l’association. L’idée d’organiser des permanences “France Insomnie à votre écoute” s’est vite imposée afin d’accroître l’espace de partage et d’entraide.

Les premières permanences ont eu lieu à Lyon, en janvier 2019, le 3e jeudi de chaque mois dans les locaux de la mairie du 6e arrondissement. Face au succès rencontré, nous avons mis en place ces permanences sur Paris à la MVAC (Maison de la Vie Associative et Citoyenne) du 8e arrondissement en septembre 2019, le 2e jeudi du mois.

En mars 2020, avec la pandémie de covid 19, nous avons transformé ces permanences physiques en visioconférences : elles ont lieu chaque 3e jeudi de 18 heures à 19 heures 30. Accessibles à tous les insomniaques, ces permanences numériques nous ont ainsi permis de toucher un plus grand nombre de participants répartis sur tout le territoire.

C’est pourquoi nous avons éprouvé le besoin de faire un bilan des permanences. Les adhérents qui y ont assisté ont apporté de nombreuses informations précieuses à l’association dans le cadre de ses missions et objectifs. »

Cette permanence, un peu différente des précédentes, a débuté avec un tour de table des participants. Chacun s’est donc présenté, décrivant par la même occasion son parcours d'insomniaque. Ces témoignages successifs ont rappelé à quel point les profils des insomniaques peuvent être divers et leurs parcours différents. Ils se rejoignent cependant souvent sur le sujet du stress ou d'événements difficiles. Tous les insomniaques présents ont confirmé avoir passé de longues années à essayer de gérer leur sommeil, oscillant entre périodes d'accalmies et de rechutes. Enfin, l'ensemble des participants s'est accordé sur ce qu'ils ont trouvé et apprécié dans les permanences France Insomnie :

-          le soutien et l'écoute qu'ils ont cherchés, parfois en vain, auprès de leurs proches ;

-          la possibilité d'échanger avec des « patients comme eux » qui souffrent de la même pathologie  ;

-          l’opportunité de relativiser au regard de l'expérience des autres.

Élisa Wrembel, Doctorante en Sciences de l’Information et de la Communication, a présenté un bilan des permanences réalisées depuis janvier 2021, en s'appuyant sur les synthèses qu’elle rédige chaque mois et mis en ligne sur le site de France Insomnie. Elle a tout d'abord rappelé le concept de ces événements, qui sont dédiés à l'entraide, au témoignage d'expériences et au partage d'informations. Ils sont organisés en ligne chaque troisième jeudi du mois. À chaque fois, une nouvelle thématique liée au sommeil et à l'insomnie est proposée. Enfin, chaque permanence donne lieu à la diffusion d'une synthèse telle que celle-ci permettant aux adhérents qui n'auraient pas pu être présents de se tenir informés des discussions qui ont eu lieu.

De nombreux thèmes abordés

Pour introduire ce bilan, la doctorante a présenté un panorama des différents thèmes abordés depuis le mois de janvier 2021. Parmi les sujets traités certains étaient en rapport avec l'actualité, comme « le sommeil en temps de pandémie », « sommeil et fortes chaleurs » ou encore « l'évolution du sommeil tout au long de la vie », qui faisait écho à la Journée du sommeil organisée par l'INSV (Institut National du Sommeil et de La Vigilance). D'autres concernaient les méthodes naturelles pour améliorer le sommeil, les moyens de s'occuper pendant un éveil nocturne ou plus généralement de lutter contre l'insomnie ou encore les liens entre l'insomnie et les difficultés professionnelles. Au cours de cette année et demie de permanences, les troubles du sommeil ont été abordés sous des angles très divers qui rappellent à quel point les facteurs liés à l'insomnie sont nombreux, tout comme ses conséquences. Enfin, au-delà des thématiques affichées, les permanences ont surtout été l'occasion pour les participants de témoigner et de partager leurs expériences.

Des parcours complexes

Le premier grand constat retiré des échanges réalisés pendant les permanences concerne les parcours des insomniaques souvent caractérisés par leur complexité. Il est marquant de retrouver dans la quasi-totalité des témoignages un dénominateur commun : celui d'avoir consulté une quantité impressionnante de professionnels de santé ou de praticiens pratiquant des médecines alternatives. À chaque fois, les participants ont témoigné de parcours alambiqués entre une multitude de professionnels et de disciplines ne parvenant pas à trouver de solution pour améliorer leur sommeil. Ils ont souvent exprimé le sentiment d'avoir « tout essayé », de s'être sentis « baladés à droite à gauche entre différents professionnels » et d'avoir vécu un véritable « parcours du combattant » dans leur quête d'une solution pour mieux dormir. De nombreux témoignages ont également traduit un sentiment d'incompréhension dans la relation aux professionnels, justifié selon certains patients par un décalage entre leur volonté d'exprimer des sentiments intimes et subjectifs sur leur sommeil et la réponse des professionnels, considérée comme « trop pragmatique » et « éloignée de la réalité ». Parce que les parcours des insomniaques sont tous différents, ceux-ci souhaiteraient pouvoir bénéficier d'un accompagnement plus individualisé, sans être « mis dans une case » au regard d'un protocole dans lequel ils ne se reconnaissent pas. Cette problématique vient aussi des difficultés du système de santé à apporter des réponses au problème de l'insomnie. Bien que des perspectives positives soient annoncées quant aux traitements à venir, la prise en charge de l'insomnie reste complexe pour différentes raisons. Beaucoup de patients décrivent une « impasse thérapeutique ». Ces premiers constats, relatifs au parcours des insomniaques, mettent en avant l'intérêt de proposer des consultations plus longues et dédiées au sujet du sommeil pour permettre au médecin d'avoir une vue d'ensemble sur la problématique et au patient de se sentir écouté. L'amélioration de la formation des professionnels, à travers un meilleur accès à l'information sur la gestion des troubles du sommeil, pourrait également leur permettre d'orienter plus efficacement les patients.

Faire face à l'insomnie

Le second bloc d'informations issu des permanences concerne la gestion de l'insomnie ou comment « faire face à l'insomnie ». Tout d'abord, les permanences ont rappelé qu'il existe souvent des décalages dans les ressentis de l'insomnie. Nous savons déjà qu'il existe différents profils de dormeurs avec des besoins différents et qui peuvent évoluer au cours de la vie. Le sommeil renvoie avant tout à un ressenti subjectif, c'est pourquoi deux personnes qui dorment le même nombre d'heures pourront témoigner de ressentis tout à fait différents. Finalement, les discours des patients ont parfois donné l'impression qu'il existe « autant de types d'insomnies que d'individus ». De la même façon, tous les troubles ne se ressemblent pas. Certains sont ponctuels, liés à des périodes spécifiques et peuvent disparaître grâce à des mesures d'hygiène de sommeil simples. D'autres sont chroniques et s'inscrivent sur le long terme avec des phénomènes de rechutes fréquents. Pour trouver des solutions, la recherche d'informations en ligne est très pratiquée par les membres. Sur Internet, une quantité impressionnante d'informations est mise à disposition du public. Parmi tous ces éléments, il est nécessaire d'organiser un tri et d'adopter un regard critique pour éviter les nombreuses arnaques qui ont tendance à s'appuyer sur la détresse des insomniaques pour leur proposer des traitements dits « miraculeux ». Malheureusement, aujourd'hui ce type de traitement miracle n'existe pas et le chemin vers une amélioration du sommeil nécessite un certain engagement du patient. Pour autant, il faut rester vigilant pour que cet engagement dans la recherche de solution ne se transforme pas en obsession.

Écouter son corps

De la même façon, certains insomniaques ont témoigné d'une focalisation sur les causes profondes de leurs insomnies. Sans juger cette quête parfois utile et personnelle, l'expérience des permanences a démontré qu'elle pouvait parfois devenir nocive. Plusieurs insomniaques ont par ailleurs affirmé avoir trouvé la cause de leurs insomnies sans que cela ait eu d'impact sur leur sommeil. Pour plusieurs adhérents, « il s'agit de chercher à écouter son corps plutôt que de s'obstiner à vouloir trouver la raison pour laquelle on ne dort pas ». Dans les récits, la gestion de l'insomnie semble passer par l'écoute de soi, dans un processus très subjectif. Dans ce cadre, beaucoup d'adhérents ont partagé des points de vue très différents sur une même thérapie. Selon l'un d'entre eux : « Quelque chose peut marcher pour tout le monde sauf pour vous, mais cela marche aussi dans l’autre sens, il s’agit de trouver ce qui fonctionne pour vous ». Cela nécessite aussi d'accepter que l'efficacité des outils puisse être temporaire et qu'il soit nécessaire d'en changer régulièrement. En effet, plusieurs membres ont témoigné d'une forme d'accoutumance à certaines thérapies au bout d'un temps plus ou moins long et de la nécessité de varier les expériences pour conserver un effet sur le sommeil. Le cœur du propos réside donc dans la connaissance de soi, dans l'idée que le fait d'aller mieux s'inscrit dans « un chemin qu'on doit se chercher et chacun a le sien ». Ces différents éléments poussent les insomniaques à demander un meilleur accès à l'information grand public sur le sommeil pour éviter les fausses croyances qui engagent parfois des pertes de temps dommageables pour les patients. Le partage d'informations et de conseils, comme il existe via l'association France Insomnie, permet également d'éviter les pièges et d'être bien informé pour agir plus efficacement sur son problème.

Les traitements médicamenteux

Le sujet des médicaments est revenu lors de la quasi-totalité des permanences organisées par l'association. Il est souvent au cœur des questionnements des insomniaques qui ont témoigné de rapports difficiles avec la consommation de somnifères ou d'autres médicaments. Au cours des permanences, tous ont constaté un réel manque d'alternatives à ces prescriptions qui sont très souvent vécues par les patients comme un réflexe « automatique » de la part des médecins. Il existe en effet un paradoxe entre le fait que ces substances soient remboursées alors que les Thérapies Cognitives et Comportementales (TCC), pourtant indiquées en première intention, ne le sont pas (sauf exception). Bien qu'il soit important de ne pas tomber dans une diabolisation des médicaments, qui ont aidé un grand nombre de personnes à s'en sortir, il semble nécessaire de mieux encadrer leur prescription et le suivi des patients qui ont parfois témoigné de stratégies de sevrage autonomes et potentiellement risquées pour leur santé.

Insomnie et santé mentale

Les liens entre l'insomnie et la santé mentale sont très intimes. Pour les membres qui ont témoigné, il était souvent difficile d'identifier les liens de cause à effet entre la dépression et l'insomnie, de savoir si c'était « la poule ou l'œuf ». Pour autant, plusieurs adhérents ont affirmé s'être senti catalogués par des professionnels de santé qui auraient directement considéré leurs problèmes de sommeil comme une conséquence de leur dépression, alors même qu'ils avaient le sentiment que la dépression découlait des insomnies : « Ce n’est pas parce que je suis dépressif que je ne dors pas, c’est parce que je ne dors pas que je suis devenu dépressif ». Si les deux sont très souvent liés, c'est notamment parce que l'insomnie génère de la culpabilité chez ceux qui la vivent. Au cours des permanences, plusieurs membres ont témoigné d'un sentiment d'échec lié à l'incapacité à réaliser leurs objectifs et au fait de se sentir « endormi dans leurs capacités ». Cette logique de dévalorisation de soi s'est retrouvée chez de nombreux participants qui ont parfois décrit des situations personnelles ou professionnelles très tendues à cause de leurs problèmes de sommeil. Ce sentiment constant de « surchauffe physique et psychologique » les a parfois conduits à avoir l'impression de « survivre plutôt que de vivre ». Dans ce cadre, l'association France Insomnie défend l'importance de mieux accompagner les patients sur le plan psychologique.

Le lâcher-prise et les méthodes naturelles

Pendant les permanences, la question des méthodes naturelles est très régulièrement revenue dans les échanges. Au-delà de calmer les tensions, la pratique d'activités relaxantes permet de focaliser son attention ailleurs que sur les problèmes de sommeil : « la clé n'est pas de chercher à s'endormir, mais de chercher à se détendre ». Les responsables de l'association ont rappelé très souvent l'importance de l'hygiène de sommeil pour gérer les insomnies. Bien que de nombreux insomniaques aient expliqué être lassés de ces mesures répétées pendant plusieurs années, « les choses les plus élémentaires peuvent aider » et beaucoup d'entre eux ont réussi à aller mieux grâce à des changements simples. Enfin, certains sont parvenus à cheminer jusqu'à changer complètement de regard sur leurs insomnies et à les considérer comme une force. Quelques personnes rencontrées dans le cadre des permanences ont notamment expliqué qu'elles avaient décidé de mobiliser leur temps passé à ne pas dormir pour exploiter leur créativité. Ce changement de perspective semble également passer par une forme de lâcher-prise et d'acceptation et constituer l'aboutissement d'un long processus.

Les objets connectés et applications de suivi

Pendant les permanences, le sujet des objets connectés et applications de suivi a parfois été abordé. Avec la multiplication de ces outils sur le marché ces dernières années, les adhérents ont souvent eu besoin du regard critique de l'association. En effet, parmi les services proposés, tous ne sont pas validés scientifiquement. Pour autant, les témoignages ont montré que les applications de suivi du sommeil pouvaient être utiles dans certains cas, notamment pour se « recadrer » de façon ponctuelle, en phase de rechute notamment. Pour certains, elles ont permis de « se prendre en main et d'avoir une prise de conscience ». Toutefois, l'utilisation d'objets connectés pour mesurer le sommeil n'a pas toujours été une expérience positive pour les adhérents. Selon les dispositifs, certains objets ne transmettent pas toujours des données très fiables (ne captent pas la différence entre une position statique dans le lit et le sommeil, etc.) et peuvent même amener le patient à trop se focaliser sur la mesure de son sommeil.

Modes de vie, travail et sommeil

Enfin, les permanences ont été l'occasion d'aborder les liens entre le mode de vie, le travail et le sommeil. Très souvent, la situation professionnelle influe sur la qualité du sommeil et vice-versa. Dans certains cas, le rythme imposé par l'activité professionnelle ne convient simplement pas au rythme biologique de la personne et engendre des situations très compliquées. De nombreux participants ont vécu des arrêts de travail à répétition. Pour plusieurs des personnes qui ont témoigné, le rapport au travail a été encore compliqué par la réaction de leurs supérieurs et/ou collègues qui ont souvent tendance à minimiser le problème. Le manque de prise au sérieux de l'insomnie par la sphère professionnelle (et parfois personnelle) a souvent déclenché un sentiment d'humiliation et beaucoup d'isolement chez les insomniaques. Beaucoup ont témoigné de phrases répétées et qui ont renforcé ce sentiment négatif : « tu as trop fait la fête ! », « la nuit, c'est fait pour dormir » ou encore « si tu es fatigué, tu n'as qu'à dormir ». Dans ce contexte, la sensibilisation de la sphère professionnelle à la réalité de l'insomnie paraît être un enjeu très important. Plus largement, la reconnaissance du problème au niveau public permettrait d'agir sur les représentations partagées de ce sujet souvent sous-considéré.

Les thérapies ou traitements testés et commentés

Pour finir ce bilan, une liste non exhaustive des thérapies ou traitements testés a été

présentée. Elle permet de dresser le portrait des sujets abordés pendant les permanences : les témoignages, avis et commentaires sont à retrouver dans les synthèses :

- Le CBD (cannabidiol)

- La TCC (Thérapie Cognitive et Comportementale)

- Le biofeedback

- La kinésiologie

- La cryothérapie

- La cure thermale

- La sophrologie

- La mélatonine

- La cohérence cardiaque

- L'hypnose et l'auto-hypnose

- Le yoga

Et bien d'autres à venir...

Un grand merci à Élisa sans qui les synthèses et le bilan de ces permanences n’auraient pu avoir lieu.

Mai 2022

Comment profiter des vacances quand on a des problèmes de sommeil ?

 

La permanence du mois de mai a marqué l’arrivée de la période estivale et des premières fortes chaleurs. Les participants ont pu échanger des conseils pratiques sur leurs façons de gérer ce moment de l’année souvent contraignant pour le sommeil. Les responsables de l’association ont également informé les adhérents de l’actualité relative au médicament Quviviq dont le processus de mise sur le marché est suivi depuis plusieurs années par l’association et ses membres. Celui-ci devrait être rendu accessible sur prescription dès 2023.

 

Un espoir pour lutter contre l’insomnie sévère

 

Depuis plusieurs années déjà, l’association France Insomnie se charge d’informer ses adhérents de l’actualité de ce traitement ayant déjà fait ses preuves aux États-Unis et au Japon. Ce médicament est basé sur une nouvelle substance active, le daridorexant qui agit sur la durée du sommeil. Il a été développé par Idorsia, un laboratoire suisse qui vient tout juste d’ouvrir une agence à Paris. Les différentes études déjà réalisées sont particulièrement prometteuses quant à son efficacité pour lutter contre l’insomnie sévère. L’association France Insomnie, qui suit le processus de commercialisation du médicament depuis plusieurs années, avait déjà publié un article en janvier 2021 intitulé : 

« Une nouvelle molécule qui pourrait bientôt révolutionner le traitement de l’insomnie » (Lire l’article ici) autour des enjeux associés à ce traitement. Sa commercialisation en France, très attendue, a été validée par l’Agence européenne des médicaments (EMA) le 29 avril 2022. Il ne reste plus qu’à attendre l’autorisation de mise sur le marché (AMM) délivrée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). C’est l’acteur public qui permet, au nom de l’État, l’accès aux produits de santé en France et qui assure leur sécurité tout au long de leur cycle de vie

Pour les différents spécialistes du sommeil interrogés par France Insomnie, ce nouveau traitement représente une avancée attendue depuis plusieurs années dans le domaine du sommeil et pourrait bouleverser la prise en charge des insomnies sévères. En contact régulier avec le laboratoire, l’association tiendra informés ses adhérents des détails associés à la prescription de ce médicament qui devrait être rendu disponible dès 2023 (uniquement sur prescription médicale). Dans ce cadre, une permanence « France Insomnie à votre écoute », dédiée au sujet des médicaments, pourrait être organisée prochainement.

 

Somnifères : accoutumance et sevrage.

 

Pour les insomniaques, la consommation de médicaments reste un sujet de préoccupation majeure. Plusieurs participants ont ainsi témoigné de leur expérience de l’accoutumance et du sevrage. L’association rappelle que le sevrage médicamenteux doit impérativement être accompagné par un professionnel de santé. Il représente un processus progressif parfois long et complexe, qui doit être adapté au ressenti de chacun. Au-delà des médicaments prescrits, les substances accessibles en libre-service peuvent également entraîner des effets secondaires parfois importants. Il convient de faire attention aux réactions qui peuvent être engendrées par l’introduction de tout nouveau traitement dans le quotidien. L’une des participantes indique par exemple avoir très mal réagi à la consommation de mélatonine et certains retours d’expérience démontrent que la consommation de CBD (cannabidiol) à hautes doses peut avoir des effets négatifs sur la santé.

 

Des conseils pour concilier vacances et sommeil

 

La période estivale et le début des fortes chaleurs sont toujours source de changements et parfois d’inquiétudes pour les insomniaques. Un sommeil fragile est souvent bouleversé par des températures élevées et/ou des décalages de rythmes associés à un départ en vacances. Ce qui devrait être une période de repos et de détente peut parfois se transformer en phase d’anxiété lorsque le sommeil est impacté négativement. Pour certains participants, l’arrivée prochaine des vacances cause donc de fortes inquiétudes. Les responsables de l’association conseillent de distinguer deux cas de figure pour prévenir ce type de situation. Dans le cas où la période de vacances est inférieure à une semaine, il est préférable d’éviter de trop décaler les horaires de sommeil, car le corps a besoin d’une dizaine de jours pour s’adapter à un nouveau rythme. Par ailleurs, pour des vacances plus longues, il est possible d’adapter le rythme de sommeil et même conseillé de profiter de ce type de période pour apprendre à mieux connaître ses besoins en la matière. Ainsi, si le contexte le permet, le fait d’écouter son rythme biologique permet de repérer la durée du sommeil nécessaire pour être en forme et les profils plutôt du matin ou du soir. Ce processus peut être facilité par la tenue d’un agenda de sommeil.

 

Quand le jetlag perturbe le sommeil

 

La question spécifique du jetlag  est également à considérer dans le cas d’un départ pour une destination lointaine. La vice-présidente, habituée à ce type de situations, conseille vivement de préparer le corps en adoptant les horaires du pays de destination dès la veille du départ. L’une des participantes conseille également la lithothérapie, notamment la pierre de Cornaline, qui l’a elle-même beaucoup aidée à supporter le jetlag lors d’un voyage en Martinique. Différents facteurs influent sur le vécu de ce décalage de rythme, comme les horaires de sport ou les repas. Il est donc nécessaire de bien se préparer pour envisager le voyage sereinement.

 

Quand la canicule s’invite dans nos chambres

 

La chaleur peut également impacter le sommeil de façon importante. Depuis quelques jours, les responsables de l’association recueillent des témoignages d’individus parfois non insomniaques, se plaignant de problèmes de sommeil en lien avec les fortes températures. Selon les conditions, plusieurs astuces peuvent être mises en place pour favoriser le sommeil. L’utilisation d’un ventilateur associé à un linge mouillé peut par exemple permettre de refroidir sensiblement la pièce.

 

Anticiper

 

Dans tous les cas, la problématique du sommeil doit être prise en compte et anticipée lors de l’organisation des vacances. Respecter des temps de pause réguliers lors de longs trajets, réserver un logement peu bruyant, ou veiller à s’accorder des moments de détente sont des éléments très importants pour favoriser le sommeil et faire des vacances un moment positif. Si l’anticipation des vacances représente trop de stress, il peut être préférable de prévoir un jour ou deux avant le départ afin d’effectuer certaines tâches et de pouvoir partir serein. De la même façon, au retour, il peut être utile de prendre un certain temps avant de reprendre le travail, afin de réaliser la transition de façon progressive.

 

Un problème de santé publique

 

La reprise du travail peut en effet être source d’anxiété. Plusieurs participants témoignent du manque de reconnaissance de la problématique de l’insomnie par le monde du travail. Souvent lors des permanences, sont décrites des situations dans lesquelles l’insomnie n’est pas considérée comme crédible par la hiérarchie et/ou les collègues de travail. Certaines personnes n’osent pas parler de leurs problèmes de sommeil au bureau, et subissent les remarques parfois désobligeantes de leur entourage professionnel ou personnel, peu sensibilisé au sujet. La sous-considération de l’importance du sommeil a des conséquences sur le vécu des insomniaques, qui se sentent isolés et incompris. La peur d’être jugé, mal vu, et parfois de mettre en péril sa carrière dégrade le quotidien des personnes qui luttent déjà contre les problèmes de sommeil. Il paraît ainsi indispensable de faire reconnaître l’insomnie comme une problématique de santé publique majeure afin de construire une culture commune du sujet, y compris dans le milieu professionnel. C'est l'une des missions majeures de France Insomnie.

 

Pour finir, les responsables de l’association rappellent qu’un répertoire de plus d’une centaine d’ouvrages sur le sommeil est accessible aux adhérents et régulièrement mis à jour sur le site Internet de France Insomnie (accéder à la bibliothèque).

Avril 2022

Insomnie et difficultés professionnelles ou dans les études


 

La permanence du mois d'avril a été l’occasion d’accueillir deux nouvelles personnes, l’une souffrant d’apnées du sommeil sévères et l’autre d’insomnies. Ces deux retours d’expérience ont permis d’échanger sur les parcours parfois complexes et les solutions à mettre en place pour vivre au mieux avec ces pathologies.


Vivre avec l’apnée du sommeil

Tout comme l’insomnie, les apnées du sommeil font partie du groupe des « troubles du sommeil ». En France, trois millions de personnes sont concernées par ces apnées, bien que 7 sur 10 n’en soient pas conscientes (www.allianceapnees.org). L’une des participantes a pu témoigner de son expérience de la pathologie, qu’elle tente encore d’apprivoiser. Alors que depuis 6 ans, des apnées du sommeil légères avaient été détectées à la polysomnographie, un nouvel examen réalisé récemment a démontré une accentuation du problème. La patiente a commencé à utiliser un masque facial qui la gênait trop et est donc passée à un dispositif moins invasif, le masque nasal, qu’elle expérimente en ce moment. Le président de l’association rappelle que l’adaptation au port du masque la nuit est souvent longue et difficile pour les patients, mais qu’une fois habitués, ceux-ci décrivent ne plus pouvoir s’en passer. Les apnées du sommeil sont en effet difficiles à vivre sans prise en charge, notamment lorsqu’elles sont sévères, car elles ne permettent pas d’obtenir un sommeil récupérateur. La participante de la permanence décrit ainsi « un ressenti de nuit blanche à chaque éveil ». Différents traitements sont possibles selon le patient et l’importance des apnées. Des informations sur le fonctionnement de la pathologie et des conseils sur les moyens de mieux la vivre sont disponibles sur le site de l’association www.allianceapnees.org

L’insomnie : un parcours complexe

L’une des participantes a connu l’insomnie dès l’adolescence, alors qu’elle était étudiante. Elle est parvenue à aller mieux seule, grâce à quelques mesures d’hygiène de sommeil. Plus tard, des épisodes de stress liés à sa vie personnelle sont venus dégrader à nouveau son sommeil. Dans le temps, elle a constaté une certaine dépendance aux médicaments prescrits, dont certains ne faisaient plus effet. Comme de nombreux adhérents de l’association, elle témoigne d’un parcours long et tumultueux entre différents praticiens médicaux et paramédicaux, avec l’impression d’être « baladée à droite et à gauche entre ces professionnels ». Ces problèmes de sommeil lui ont porté préjudice sur le plan professionnel et ont précipité sa sortie de la vie active. Un autre participant témoigne également de difficultés professionnelles liées à la mauvaise qualité de son sommeil. Pour tous les deux, la situation est à l’origine d’une importante nervosité et d’un sentiment de désespoir. Souvent pendant les permanences, le cercle vicieux insomnie-anxiété a été abordé. Plusieurs adhérents pensent que les problèmes de sommeil sont à l’origine de l’anxiété, quand d’autres considèrent que l’anxiété pourrait être la cause de l’insomnie. Aujourd’hui, il est difficile de déterminer lequel est la cause ou la conséquence de l’autre. Cependant, il est avéré que les deux sont liés. Souvent, les patients se retrouvent dans une situation de détresse et se sentent démunis face à cet « obstacle du quotidien », parfois considéré comme un réel « handicap ».

Modifier ses habitudes quotidiennes

Dans cette situation, le premier réflexe à adopter consiste à modifier ses habitudes quotidiennes en suivant rigoureusement les conseils d’hygiène de sommeil (voir les 10 conseils pour mieux dormir de France Insomnie). Le président de l’association rappelle que si les personnes habituées à l’insomnie ont tendance à adopter ces bons réflexes, elles les abandonnent fréquemment lorsqu’elles constatent une amélioration du sommeil. Face à des problèmes chroniques, il est important de conserver une certaine « rigueur », comme celle de maintenir des horaires de sommeil réguliers. L’agenda du sommeil peut représenter un outil utile dans cette situation : la vice-présidente affirme l’avoir utilisé pour l’encadrer pendant le changement de saison, qu’elle sait être une période difficile pour son sommeil. Bien qu’elles ne représentent pas une solution en soi, les pratiques de relaxation peuvent également être très utiles pour réduire le stress et/ou l’anxiété et permettre, si ce n’est d’améliorer le sommeil, au moins de mieux vivre avec l’insomnie. Les représentants de l’association rappellent ainsi que, comme dans toute pathologie, le premier pas vers une amélioration consiste en l’acceptation du problème.

Les thérapies cognitives et comportementales

Au-delà de ces démarches du quotidien, faciles à entreprendre, les thérapies cognitives et comportementales (TCC) sont le traitement indiqué en première intention pour gérer l’insomnie chronique. L’un des participants, qui souffre aussi d’insomnie depuis une dizaine d’années, décrit des troubles du rythme circadien qui lui empêchent de passer des nuits complètes et reposantes. Les TCC peuvent permettre d’agir sur ce type de problématique à travers un travail sur les apprentissages dysfonctionnels. Le président de l’association précise que ces thérapies sont utiles pour connaître le fonctionnement du sommeil et ses propres besoins en la matière. De nombreux patients ont déjà témoigné d’effets très positifs sur leur sommeil, bien que ces thérapies puissent représenter un vrai effort, notamment à travers la restriction de sommeil. Les personnes basées en Ile-de-France peuvent profiter de l’accompagnement du Réseau Morphée, seul réseau de santé consacré à la prise en charge des troubles chroniques du sommeil. Les professionnels du réseau évaluent, orientent sur un thérapeute approprié ou accompagnent les patients gratuitement. Un test en ligne est disponible ici pour être orienté. Ce type de dispositif, indispensable aux personnes en demande d’accompagnement face à une situation de souffrance, n’existe malheureusement pas dans les autres régions. L’une des participantes précise que cette inégalité d’accès gratuit aux psychologues représente un réel obstacle à l’accompagnement des patients, qui ne peuvent pas toujours assumer les frais liés à une psychothérapie. Très récemment, un dispositif d’accès gratuit à un thérapeute a été mis en place par l’État : www.monpsy.sante.gouv.fr


Mars 2022

Le Sommeil, une histoire de famille

 

Tel était le thème de cette permanence « France Insomnie à votre écoute » en concordance avec celui de la 22e Journée du Sommeil, organisée par l’INSV[1]. En effet, l’institut avait choisi de s’intéresser cette année au sommeil des enfants de 6 mois à 10 ans et de leurs parents. À cette occasion, une très intéressante enquête a été publiée dont vous trouverez les résultats en suivant ce lien. Plusieurs éléments de cette enquête ont animé les échanges entre les participants.

 

Le sommeil, une affaire de famille ?

Si la vice-présidente de France Insomnie voit un lien direct entre ses insomnies et celles de sa fille, l’une des membres propose un contre-exemple avec le cas de son propre enfant désormais adulte, qui n’a jamais souffert de troubles du sommeil. Plusieurs participants donnent des exemples de membres de leur famille atteints de troubles plus ou moins graves. Tous s’accordent sur la difficulté à tirer des conclusions générales à partir de situations diverses et variées. L’enquête réalisée par l’INSV, dans le cadre de la Journée du Sommeil 2022, démontre qu’il existe bel et bien un lien entre les troubles du sommeil des parents et ceux des enfants. En effet, lorsque les enfants souffrent de troubles du sommeil, les parents ont tendance à vivre la même chose. La vice-présidente affirme qu’il est parfois « difficile de distinguer si c’est la poule ou l'œuf » dans cette situation qu’elle envisage comme un « entretien mutuel des troubles » entre un parent et un enfant qui dorment mal. L’enquête souligne également les effets néfastes des écrans sur le sommeil des enfants (notamment sur le temps d’endormissement). Pourtant, près de la moitié des parents interrogés pensent que les écrans n’ont pas d’impact sur le sommeil des enfants. Pour les participants à la permanence, les parents devraient montrer l’exemple, car « les mauvaises habitudes peuvent s’apprendre en famille ».

Éduquer au sommeil dès le plus jeune âge

Le débat autour de la transmission des réflexes liés au sommeil dans la famille est très lié au principe général d’éducation au sommeil. La méconnaissance des risques liés aux écrans démontre par exemple un besoin très important d’information. Pour l’un des participants, « ce genre d’information devrait être vulgarisé avant le 20 h à la télévision ». Il affirme que si les personnes insomniaques sont généralement déjà informées sur l’importance du sommeil, la population ne l’est pas forcément : « les gens ne connaissent pas, ne se rendent pas compte [...] il y a une éducation fondamentale à mettre en place, mais on ne le fait pas ». Pour sensibiliser le plus grand nombre, les membres proposent alors « des campagnes pédagogiques simples pour la majorité des gens ». Cela permettrait, selon eux, d’éviter d’attendre l’apparition des troubles pour se soucier du sommeil. Pour certains, cette éducation doit se faire à la fois en famille et en société, comme à l’école. Pour le président de l’association, « à l’école, cela devrait être une obligation ». Il défend la nécessité d’intégrer au programme de sciences naturelles, par exemple, un chapitre sur « ce qu’est le sommeil et en quoi il est vital ». Il lui paraît fondamental de transmettre ces connaissances aux enfants qui pourront directement leur donner une traduction concrète dans la vie de tous les jours. Avant même l’école élémentaire, il serait utile d’intégrer une sensibilisation au sommeil au moment de la sieste : « si c’est ancré dès le plus jeune âge, on a plus de chance que ça reste en mémoire ». Tous savent que certains professeurs s’impliquent déjà sur le sujet, mais défendent son intégration dans le programme scolaire afin de s’assurer que cette éducation spécifique ne relève pas de l’initiative individuelle des enseignants. Ainsi, entre l’école et le foyer familial, il pourrait s’installer un mouvement réflexif bénéfique autour des bonnes habitudes à intégrer pour mieux dormir.

Pour le président de l’association, le manque d’actions de prévention actuel va avoir des conséquences graves à l’avenir. Il affirme qu’il est indispensable d’intervenir avant que les troubles ne deviennent chroniques et la période anxiogène que nous traversons actuellement devrait servir de levier pour rappeler l’importance du sommeil.

Gérer les rechutes

L’insomnie fonctionne par phases plus ou moins aiguës de mauvais sommeil. Pour y faire face, il est nécessaire de bien gérer ces rechutes ponctuelles et parfois inexplicables. Selon certains participants, les changements de saison peuvent par exemple influer sur la qualité du sommeil « l’un des plus gros ennemis du sommeil, ce sont les changements dans le quotidien ». Pour les individus confrontés à ces rechutes, il peut être utile de remettre en place une forme de rigueur en lien avec l’hygiène du sommeil : horaires réguliers, activité sportive, etc. (voir les 10 conseils pour mieux dormir préconisés par France Insomnie). Les responsables de l’association rappellent que chacun est différent face au sommeil, et qu’il est nécessaire d’adapter ses comportements à son propre fonctionnement, et donc de bien identifier celui-ci. Dans ce cas, la tenue d’un agenda du sommeil peut aider, bien que cela puisse être contraignant. Tous insistent sur le fait que « quand on dort mieux, on ne se pose plus de questions ». Ainsi, l’idéal serait de prévenir les rechutes, afin de ne pas avoir à les gérer, en maintenant une rigueur dans son hygiène de vie. Dans tous les cas, la vice-présidente rappelle l’importance de dédramatiser et d’être tolérant vis-à-vis de soi-même. Le sentiment d’avoir bien dormi est très lié à la subjectivité de chacun et il est très important d’encourager les dynamiques positives.

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[1] Institut National du Sommeil et de la Vigilance.


Février 2022

Que faire la nuit quand on ne dort pas ?

 

 

On parlera beaucoup de sommeil en mars. Plusieurs évènements, auxquels s’associe France Insomnie, auront lieu.

La 22e Journée du Sommeil, organisée par l’INSV (Institut National du Sommeil et de la Vigilance), aura lieu le vendredi 18 mars 2022 sur le thème « Le sommeil des enfants et de leurs parents en 2022 ». Différents événements (en ligne ou en présentiel) sont prévus : portes ouvertes, conférences, animations, ateliers, podcasts…

À cette occasion, le Réseau Morphée, en partenariat avec la Cité de la Santé, animera une conférence ayant pour thème « Le rêve, passage entre deux mondes » le jeudi 17 mars de 14 h 30 à 17 h 30 à la Cité des Sciences et de l’Industrie à Paris.

Le mois de mars sera également consacré au déploiement de la campagne d’information « A chacun son sommeil », dont France Insomnie est partenaire.

Que faire lors d’un éveil nocturne ?

La thématique de la permanence « France Insomnie à votre écoute » du mois de février a donné lieu à plusieurs échanges entre les adhérents présents. Tous connaissent les conseils à appliquer : ne pas regarder l’heure ; ne pas rester allongé trop longtemps dans le lit ; se lever pour faire une activité calme le temps que les signaux de fatigue reviennent. Ils reconnaissent cependant qu’il peut être particulièrement difficile de se lever la nuit lorsque, malgré l’état d’éveil, le corps est épuisé. L’une des participantes souligne le fait que la consommation de somnifères rend encore plus difficile le lever la nuit.

Des somnifères aux produits naturels : l’importance d’une transition progressive et encadrée

Plusieurs membres de l’association souhaitent ou ont déjà réussi à passer des somnifères à des produits plus naturels. L’association rappelle que ce changement doit se faire progressivement. Ainsi, l’arrêt brutal des médicaments pour les remplacer par un produit naturel est inefficace et déconseillé. Les différentes substances, même naturelles, ont des effets spécifiques sur le corps et réagissent de manière différente lorsqu’elles sont couplées à des médicaments. Il est donc indispensable de se renseigner de façon approfondie avant d’introduire une substance dans sa consommation quotidienne. L’expérience de l’une des adhérentes a montré par exemple que les produits à base de coquelicot ne s’accordaient pas avec les somnifères dans son cas. Bien que la transition des médicaments vers des produits naturels puisse être une bonne chose, elle nécessite un accompagnement médical pour être efficace et éviter les effets indésirables liés à de mauvais mélanges.

Prise en charge médicale : la nécessité d’une meilleure répartition des centres sur le territoire et d’actions publiques, notamment sur le plan de la santé mentale

L’une des participantes témoigne d’une expérience très positive dans un centre du sommeil à Brest. Elle y a été particulièrement bien accueillie et s’est sentie écoutée et prise au sérieux. Elle souligne l’importance de l’écoute des médecins, qui, lorsqu’elle n’est pas suffisante, peut déclencher du stress et renforcer les problèmes pour dormir lors d’un enregistrement. Le président de l’association rappelle que les enregistrements par polysomnographie ne doivent pas uniquement servir à détecter des pathologies du sommeil (telle que l’apnée du sommeil), mais aussi à analyser le temps de sommeil et son organisation tout au long de la nuit (les différents cycles et leur répartition). Une fois les résultats obtenus, si les patients parviennent à dormir, un accompagnement adapté doit être mis en place. Souvent, les Thérapies Cognitives et Comportementales sont conseillées aux patients souffrant d’insomnie.

 

Les adhérents constatent le fait qu’il n’existe pas assez de centres du sommeil en France, et que la prise en charge est beaucoup plus simple en région parisienne qu’ailleurs dans l’hexagone. Ainsi, le suivi psychologique, qui représente une dimension essentielle de l’accompagnement des patients insomniaques, n’est pas remboursé (à noter toutefois qu’il y a des possibilités de prise en charge en région parisienne via le Réseau Morphée). Dans la situation actuelle, certaines personnes dans le besoin et en demande de ce soutien psychologique ne peuvent pas en bénéficier et se trouvent dans des situations de réelle détresse. Certains centres de France seraient prêts à se constituer en réseaux, mais ne trouvent pas l’appui nécessaire pour le faire.

L’association soutient l’idée qu’un accompagnement psychologique régulier et remboursé devrait être mis en place dans le domaine de l’insomnie.

 

Avec la pandémie, l’importance du sommeil a été largement rappelée. Une étude a par ailleurs identifié un phénomène dénommé « coronasomnie[1] » en démontrant des liens entre la pandémie et la qualité du sommeil. Selon cette étude, près de 40 % des personnes se plaignent d’une moins bonne qualité de sommeil depuis l’arrivée du coronavirus. L’association rappelle la nécessité d’une action au niveau politique face à ce phénomène de dégradation du sommeil qui risque d’entraîner des risques d’autant plus importants dans les années à venir (maladies organiques et psychiques, accidents domestiques et de la route, etc.)

Nouvelles substances et traitements miracles : bien s’informer pour se protéger des arnaques

La permanence de février a également été l’occasion d’échanger sur les nouveaux traitements qui seront bientôt proposés sur le marché. Plusieurs membres ont déjà témoigné d’individus proposant des traitements dits miraculeux, permettant de retrouver un sommeil de qualité (quelle qu’en soit la nature : des appareils électroniques ou des gélules à base de différents produits). L’association rappelle que ce type d’offre doit être appréhendé avec la plus grande prudence. Il est ainsi vivement conseillé de se renseigner de façon détaillée (notamment en croisant plusieurs sources d’information) avant d’acheter de tels produits. Une quantité extrêmement importante d’information est diffusée sur Internet, et celle-ci n’est pas toujours vérifiée et fiable. Dans le domaine du sommeil caractérisé par un grand nombre de personnes en souffrance et en quête d’un remède, beaucoup de sociétés se sont développées autour de produits très coûteux et non validés scientifiquement. France Insomnie se tient à disposition des adhérents pour effectuer ce travail d’analyse de l’information, et invite également les membres à faire part de leurs retours d’expériences (arnaques ou produits efficaces) pour en faire profiter la communauté de l’association et constituer une « mémoire collective » sur cette base.



[1] https://www.nouvelobs.com/sante/20210319.OBS41590/souffrez-vous-de-coronasomnie.html


Janvier 2022

Les produits naturels pourraient-ils être substitués aux médicaments ?


À l’occasion de cette permanence centrée sur les alternatives aux médicaments, les différents membres de l’association ont pu échanger sur leur façon de gérer leur traitement. Bien que la majorité d’entre eux souhaite se tourner vers les méthodes naturelles, les hypnotiques peuvent constituer une béquille utile si leur consommation est encadrée.

Gérer son traitement médicamenteux

La discussion entre les adhérents a cependant confirmé la tendance de certains médecins généralistes à prescrire de manière trop automatique des hypnotiques face à une plainte liée au sommeil. Cette critique est toutefois à remettre en perspective aujourd’hui, alors que les risques associés aux hypnotiques sont de plus en plus connus, et que les TCC[1] sont mieux reconnues. Bien que les traitements médicamenteux puissent être un passage nécessaire selon les situations, les effets secondaires sont nombreux, et il reste indispensable d’être suivi par un professionnel pendant toute la durée du traitement. Certains adhérents s'appuient sur des forums en ligne pour partager leur expérience et trouver un soutien moral. La question du sevrage a notamment été abordée par différents adhérents, qui ont souhaité rappeler l’importance de réaliser des paliers progressifs. Sur cette question aussi, l’accompagnement d’un professionnel est indispensable. Un sevrage autonome peut être dangereux et dégrader encore le rapport au sommeil. Les échanges entre les adhérents rappellent également le besoin d’écoute des personnes insomniaques vis-à-vis des professionnels de santé. Plusieurs membres témoignent de mauvaises expériences en centre du sommeil, où ils ont eu la sensation d’être « mis dans une case » et se sont vus appliquer un protocole dans lequel ils ne se reconnaissaient pas. Ils s’accordent tous sur le besoin d’être écoutés et surtout entendus par les professionnels. Enfin, ils affirment qu’il serait intéressant de réfléchir au rapport entre la dépression et l’insomnie : plusieurs des participants indiquent avoir vécu un état dépressif en conséquence de l’insomnie « ce n’est pas parce que je suis dépressif que je ne dors pas, c’est parce que je ne dors pas que je suis dépressif. »

Quelles solutions naturelles ?

La permanence a permis aux participants d’échanger sur les méthodes naturelles testées par chacun et chacune. La vice-présidente de l’association a par exemple utilisé la valériane associée à l’eschscholtzia (ou pavot de Californie) pendant deux ans. Les vertus de la valériane pour lutter contre l’insomnie et l’anxiété sont reconnues depuis la Grèce antique. Chez elle, cette association a très bien fonctionné durant cette période et lui a permis même de stopper sa consommation d’anxiolytiques (Bromazepam ou Lexomil). Elle insiste sur l’importance de la substitution : lors d’un sevrage, il est possible de « tromper le cerveau » en remplaçant progressivement son traitement par un produit naturel.

Les traitements, quelle que soit leur nature, peuvent être combinés à des techniques de relaxation (cohérence cardiaque, sophrologie…). Ces techniques peuvent aussi aider à diminuer la consommation de somnifères, puisqu’elles aident à l’endormissement. La mise en place d’un rituel au coucher est par exemple conseillée pour améliorer son sommeil (voir les 10 conseils pour mieux dormir de France Insomnie). La vice-présidente rapporte également avoir pratiqué la luminothérapie pendant deux ans, notamment pour lutter contre la dépression saisonnière. Dans ce sens, l’exposition à la lumière naturelle, de préférence en matinée, est aussi un moyen de favoriser le sommeil. Une autre adhérente est actuellement en train de tester le coquelicot en gélules. Après en avoir consommé depuis une semaine environ, elle est parvenue à réaliser une nuit de sept heures, chose très rare chez elle. Elle tient à rappeler qu’il ne s’agit pas de chercher une solution miracle, mais de trouver la bonne combinaison selon son cas. Cette combinaison passe avant tout par l’écoute de soi afin de trouver les solutions qui fonctionnent chez soi. Elles sont différentes selon les personnes. Une bonne hygiène de vie reste indispensable à cet équilibre.

Enfin, tous les participants se sont accordés sur la nécessité de développer la recherche sur les troubles du sommeil et les traitements à venir. De nombreux espoirs restent possibles et les études se développent en France et à l’étranger autour de certaines molécules. Il est toutefois conseillé de se montrer prudent vis-à-vis des informations non vérifiées et de certaines personnalités publiques proposant des solutions dites miraculeuses. L’association France Insomnie est présente pour informer les adhérents sur l’actualité du sujet.

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[1] TCC : thérapies comportementales et cognitives 

Décembre 2021

Le « starter-pack » de l’insomnie


La dernière permanence de l’année a accueilli un nouveau membre venu partager son expérience et obtenir des conseils pour mieux dormir. Cela a été l’occasion de rappeler les bons réflexes à adopter en cas d’insomnie.

Si l’expression est légère, l’enjeu, lui, l’est beaucoup moins. La permanence de décembre a été l’occasion d’accueillir un nouveau membre, et de rappeler les premiers réflexes à adopter lorsque les insomnies viennent ou reviennent. Une sorte de pack de démarrage à connaître et mettre en place pour s’armer contre les troubles du sommeil. Avant toute autre démarche, le premier réflexe à avoir est relatif à l’hygiène de vie, et plus particulièrement l’hygiène de sommeil. Quelle que soit la cause du problème, une meilleure hygiène de sommeil ne pourra qu’améliorer l’expérience vécue. Chez certaines personnes qui souffrent d’insomnies ponctuelles, quelques changements d’habitudes peuvent même suffire à aller mieux.

Pour se souvenir des bons réflexes à adopter, l’association France Insomnie a fait la synthèse des 10 conseils pour mieux dormir. Cette synthèse est basée sur ces conseils et enrichie des témoignages des membres.

1)      Connaître ses besoins

Le président de l’association le rappelle, il est très important de connaître ses besoins de sommeil pour mieux réagir. De combien de temps de sommeil ai-je besoin pour me sentir en forme ? Pour le savoir, il faut tenter d’identifier les horaires de sommeil qui conviennent le mieux. Tenir un agenda de sommeil peut-être très utile dans ce cas. Cette première information permet de lever les représentations que nous pouvons avoir inconsciemment sur notre sommeil, selon le président de l’association « souvent, on est surpris ». Il arrive de culpabiliser de ne pas assez dormir au regard d’autres personnes ou d’un idéal que nous avons intégré. Or, il existe des courts et des longs dormeurs, et dormir peu n’est pas forcément une mauvaise chose si la forme la journée est bonne. Dans un second temps, et par les mêmes moyens, il s’agit d’identifier le rythme qui convient : du matin ou du soir. Certaines personnes préfèrent se coucher tôt et se lever tôt, d'autres se coucher tard et se lever tard. Cette donnée est importante pour comprendre d’où vient le problème et tenter de le gérer au mieux.

2)      Avoir des horaires de sommeil réguliers

Même le week-end, il est très important de se lever toujours à la même heure.

3)      Écouter son ressenti

Aller se coucher uniquement aux premiers signes de sommeil, éviter les logiques automatiques et écouter son corps : « il y a autant de types d’insomnies que d’individus ».

4)      Réserver la chambre au sommeil

Elle ne doit pas être le lieu d’autres activités, et dans la mesure du possible, elle doit être aménagée de sorte à encourager le calme et l’apaisement. La chambre doit aussi conserver une température d’environ 18 °C pour permettre au corps de refroidir et encourager le sommeil.

5)      Préparer son sommeil

Éviter les activités qui réchauffent le corps le soir, pas de sport après 17 h par exemple.

6)      « La nuit commence le jour »

Nos comportements diurnes ont des conséquences sur notre sommeil, il faut par exemple éviter les siestes de plus de 20 minutes.

7)      Ne pas culpabiliser

L’insomnie peut vite se transformer en cercle vicieux. La culpabilisation à l’idée de ne pas dormir peut devenir obsessionnelle et dégrader encore le rapport au sommeil. Il s’agit d’essayer de relativiser et de lâcher prise dans l’idée qu’il ne faut pas essayer de dormir, mais essayer de se détendre. Nous n’avons pas le contrôle sur tout et il arrive que le corps ait des réactions qui paraissent incompréhensibles. Il y a parfois un décalage entre le ressenti et l’inconscient. Il arrive que le corps enregistre des événements de vie sans que nous le réalisions. Il peut être utile de chercher la cause de ses insomnies, mais cela ne doit pas devenir une obsession. Cette année, de nombreux adhérents ont témoigné en expliquant que cette information ne leur avait pas forcément permis de mieux dormir. Il s’agit avant tout d’être indulgent avec soi-même et d’écouter son ressenti.

8)      Se lever si l’insomnie est trop longue

Pendant cette permanence, le sujet est revenu plusieurs fois. Deux personnes souffrant d’insomnie ont décrit leur difficulté à appliquer ce conseil. Lors d’un éveil nocturne, au bout d’une vingtaine de minutes, il faut sortir du lit et faire une activité calme jusqu’au retour des signes de sommeil. Ce réflexe s’avère particulièrement complexe à mettre en place au vu de l’état d’épuisement qui caractérise ce moment de la nuit, mais peut aider à envisager autrement l’insomnie et à éviter la rumination au lit. Pour la vice-présidente de l’association, « il ne faut pas hésiter à sortir de ses habitudes ». Un cercle vicieux peut s’instituer lors des éveils nocturnes : la peur de ne pas se rendormir déclenche une anxiété d’anticipation et empêche de se rendormir. Il vaut mieux se lever, accepter l’éveil nocturne et faire autre chose jusqu’au retour des signes de sommeil. Le président de l’association conseille même de tromper son cerveau : « dites-vous que votre objectif est de ne pas dormir, à un moment donné le corps lâche ». Pour l’une des adhérentes présentes, ce processus est semblable à la situation où, le soir, l’on tente de ne pas dormir en regardant un film ou en lisant un livre captivant. Parfois, le fait d’essayer de ne pas dormir encourage le sommeil. Dans tous les cas, ce conseil n’est pas forcément efficace pour tous, mais peut aider certaines personnes à envisager l’insomnie autrement.

9)      Essayer les méthodes douces

L’insomnie étant très liée au stress et à l’anxiété, les méthodes douces, qui favorisent la relaxation, peuvent s’avérer très utiles pour certaines personnes. Comme il a été répété tout au long de l’année, il existe une multitude de solutions possibles, qui ne conviennent pas à tout le monde, et dont l’efficacité est souvent ponctuelle. Pour le président de l’association « c’est un peu comme dans un couple, il faut savoir se renouveler dans les périodes où ce qui était jusqu’alors mis en place n’est plus satisfaisant ». Il faut s’informer sur les possibilités et trouver celle qui convient, ce qui passe souvent par une meilleure compréhension de soi. L’un des adhérents du jour a par exemple essayé la sophrologie et l’hypnose, un autre a expérimenté la luminothérapie. Les responsables de l’association précisent que certaines méthodes relèvent du charlatanisme et qu’il est important d’enquêter en amont pour vérifier leur validité. Si certains membres de l’association le souhaitent, ils peuvent envoyer des informations sur des méthodes qui les intéressent pour que l’association effectue un travail de vérification.

10)  Les somnifères en dernier ressort

La solution médicamenteuse ne doit pas être automatique, car elle n’est pas toujours nécessaire et comporte certains risques si elle est mal accompagnée. Il existe d’autres façons de gérer les troubles du sommeil sans médicaments (comme les thérapies cognitivo-comportementales). Dans tous les cas, les somnifères ne doivent pas être consommés plus de trois semaines pour éviter l’accoutumance. Leur consommation doit faire l’objet d’un accompagnement rapproché par le médecin. Lors de la permanence, plusieurs adhérents ont témoigné de leur mauvaise expérience avec les anxiolytiques et les somnifères. Parfois laissés à eux-mêmes, et dans un état de détresse face à l’insomnie, ils ont eu des difficultés à gérer la consommation de médicaments et sont tombés dans un cercle vicieux. Au bout d’un certain temps, le médicament ne fait plus effet à cause de l’accoutumance ; il est alors consommé pour éviter les effets négatifs dus à l’arrêt brutal du traitement, et non plus pour soigner le sommeil. Le sevrage constitue un processus spécifique et doit être accompagné par un professionnel de santé.

Novembre 2021

Quelques réflexions autour des troubles du sommeil

La permanence du mois de novembre s’est déroulée en comité plus restreint. Cette configuration a permis une plus grande flexibilité dans la structure de l’échange. La synthèse de novembre prend donc la forme d’une liste de réflexions développées autour des troubles du sommeil pendant l’événement. Les différents sujets évoqués semblent par ailleurs balayer de façon assez large les problématiques auxquelles sont confrontées les personnes insomniaques.

Le rôle clé du médecin généraliste

Les participants rappellent le rôle clé du médecin généraliste dont le soutien est particulièrement important au vu de sa position de proximité. La prise en charge au CHU n’est pas automatique et n’apporte pas toujours la réponse attendue par les patients. C’est parfois le médecin généraliste qui prend des décisions majeures dans le parcours des personnes insomniaques. Il paraît très important de communiquer avec lui sur la souffrance liée au sommeil pour mettre en place des solutions adaptées.

L’importance de l’accompagnement psychologique

Si la démarche privilégiée est souvent médicamenteuse, les personnes insomniaques revendiquent le besoin d’être accompagnés humainement, notamment sur le plan psychologique. Les troubles du sommeil ont des conséquences très négatives sur la santé mentale avec laquelle ils forment un cercle vicieux. L’accompagnement par des psychothérapeutes a aidé de nombreux insomniaques, mais ces séances ne sont pas remboursées (sauf à Paris via le Réseau Morphée). Le temps long d’une consultation dédiée au sommeil et explorant les facteurs psychologiques liés au problème semble très important pour améliorer le parcours des insomniaques.

Les bénéfices des approches non médicamenteuses

De nombreux adhérents témoignent chaque mois de leur expérience avec les médecines alternatives : sophrologie, kinésiologie, hypnothérapie… Si les approches sont différentes et conviennent plus ou moins selon les personnes, elles ont en commun de proposer un cheminement vers la relaxation et le lâcher-prise. Plusieurs membres ont adopté des techniques comme la cohérence cardiaque ou l’auto-hypnose pour trouver l’apaisement. Ces méthodes sont particulièrement utiles pour éviter les pensées parasites.

Un rapport au sommeil fluctuant

Le rapport au sommeil n’est pas stable dans le temps, notamment, car l’insomnie est une maladie cyclique. Parfois, la dégradation du sommeil est en lien direct avec des événements négatifs vécus par la personne. Dans d’autres cas, le sommeil s’améliore ou se détériore sans rapport perçu avec le quotidien. L’idée retenue est d’accepter ces variations en trouvant des méthodes et un accompagnement pour gérer les périodes plus aiguës, et de profiter des phases plus stables sans nécessairement chercher à les analyser.


Les conséquences de l’insomnie sur le foyer

Les insomniaques sont les premières victimes de l’insomnie. Mais l’entourage est souvent directement touché par les conséquences des troubles du sommeil. De nombreux couples font par exemple chambre à part à cause des nuisances sonores liées aux mouvements des personnes qui cherchent le sommeil. Il n’est pas toujours facile d’adapter ses habitudes et cela peut devenir sujet de conflit au sein d’un foyer. Dans ce sens, il paraît très important de sensibiliser les membres de la famille au fonctionnement de l’insomnie.

Le manque de reconnaissance du problème

Au fil des permanences, de nombreux adhérents expriment l’idée que l’insomnie n’est pas considérée comme une problématique de santé aussi importante que d’autres. Auprès des proches comme du milieu professionnel, les problèmes de sommeil sont parfois minimisés, banalisés, discrédités. Cela a pour conséquence de renforcer l’isolement des insomniaques qui manquent de soutien dans leur souffrance quotidienne. France Insomnie et les permanences d’écoute représentent un moyen de trouver ce soutien. À côté, il est indispensable de travailler à la reconnaissance des troubles du sommeil comme un enjeu majeur de santé pour améliorer l’accompagnement des personnes qui en souffrent.


Octobre 2021

J’ai réussi à sortir de l’insomnie

La permanence du mois d’octobre a été marquée par la participation de plusieurs nouveaux adhérents venus témoigner. La thématique du rendez-vous était « j’ai réussi à sortir de l’insomnie ». Dans cette logique, les différents participants ont pu partager leurs expériences avec le groupe et montrer qu’il est possible de sortir de la spirale négative associée à l’insomnie.

Si une dynamique encourageante a été portée par plusieurs participants, il paraît important de rappeler que l’amélioration du sommeil repose davantage sur la compréhension de soi que sur un remède miracle et instantané souvent recherché par les insomniaques. L’une des membres du bureau le rappelle, c’est un cheminement progressif qui demande parfois plusieurs années et engage un changement de regard sur le problème. Ce parcours est personnel et dépend de la sensibilité de chacun, c’est pourquoi les retours sur les thérapies sont parfois divergents. La quête du remède miracle peut se révéler chronophage et anxiogène. Elle peut aussi alimenter une logique de désespoir et de rumination lorsque les thérapies ne produisent pas les effets attendus. Les permanences peuvent aider à prendre du recul sur sa situation en échangeant avec des personnes confrontées à des difficultés similaires.

Objets connectés : comment s’y retrouver ?

Aujourd’hui, toutes sortes d’appareils vantant des effets positifs sur le sommeil sont disponibles sur le marché. L’association tient à sensibiliser les personnes insomniaques sur l’attention à porter à la validité scientifique de ces dispositifs. Face au développement croissant de ces différents outils, il est indispensable de construire un regard critique et éclairé sur leur fonctionnement afin d’éviter les mauvaises surprises. Lors de la permanence, l’une des participantes a décrit son expérience avec un boîtier connecté dont l’objectif est d’encourager la relaxation. Un autre participant a souhaité s’informer sur un système de bandeau connecté. Les débats au sein du groupe ont montré qu’il est parfois difficile de trouver une information fiable sur les différents dispositifs existants, et que beaucoup d’impostures sont proposées sur le marché. Les permanences sont l’occasion d’échanger sur les pratiques existantes et de solliciter l’association pour obtenir des informations sur différents outils. France Insomnie effectue un travail de veille critique très utile pour les adhérents qui souhaitent s’informer sur les avancées dans le domaine du sommeil. Le manque de recherche sur le sujet maintient un flou sur l’efficacité de certaines technologies, parfois liée à un effet placebo. Dans cette logique, le partage d’expérience entre les adhérents permet de construire une culture commune de ces appareils et de faire avancer la réflexion sur le sujet. Les informations issues de l’expérience des membres peuvent être très utiles pour permettre au groupe de développer un avis, mais doivent être nuancées par le principe explicité plus haut : il n’existe pas de solution miracle et l’efficacité des outils dépend de la sensibilité de l’utilisateur.

Sortir de l’insomnie : témoignages croisés de deux nouvelles adhérentes

Les deux membres se sont montrées très enthousiastes à l’idée de partager leur témoignage avec le groupe. Plusieurs participants se sont accordés à dire qu’au-delà du soutien moral autour de la difficulté associée à la vie d’insomniaque, il est nécessaire d’encourager l’expression d’expériences positives au sein de la communauté. L’un d’entre eux indique qu’il aurait eu besoin d’entendre des témoignages positifs lorsqu’il traversait des périodes difficiles avec l’insomnie et qu’il était « au fond du trou ». Ces retours d’expérience permettent au groupe de mettre leur situation en perspective avec d’autres, de se sentir moins seuls et d’être soutenus. Dans les témoignages du jour, les problèmes de sommeil des deux adhérentes étaient directement associés à leur situation professionnelle. Une problématique très récurrente dans le domaine de l’insomnie. Pour l’une, les difficultés étaient liées au rythme (déplacements professionnels quotidiens, horaires décalés) et pour l’autre, au stress associé aux hautes responsabilités. Les troubles du sommeil se sont traduits différemment chez les deux femmes : l’une a rencontré des difficultés à l’endormissement, et l’autre a subi de longs éveils nocturnes. Dans les deux cas, les troubles se sont installés progressivement et se sont aggravés avec le temps, jusqu’à devenir invivables. La vice-présidente rappelle l’importance de la prévention en amont, « très importante pour éviter de devenir un insomniaque sévère ». Pour les deux personnes qui ont témoigné, le cercle vicieux s’est renforcé entre les problèmes de sommeil et le manque d’efficacité au travail. La gestion du quotidien et des « choses simples de la vie » sont devenues impossibles. Le moment de se coucher a été associé au stress et à la rumination autour des contrariétés du jour. Différentes conséquences négatives en ont découlé : troubles de l’attention, peur au volant, douleurs chroniques... Les deux femmes se sont alors engagées dans la recherche d’une solution qu’elles n’ont pas trouvée dans la voie médicamenteuse. Elles ont testé différentes thérapies et solutions naturelles : sophrologie, CBD[1]… Pour toutes les deux, l’amélioration est avant tout passée par un travail sur l’hygiène de sommeil. Être à l’écoute de son corps (signaux d’endormissement), adopter un rythme régulier, aménager son intérieur pour s’y sentir bien… Ces nombreux conseils ont eu un impact positif sur leur rapport au sommeil. Toutes deux ont réalisé que la source du problème venait de leur difficulté à lâcher prise, alors même que la relaxation est indispensable au sommeil. Comme l’a rappelé la vice-présidente, « il ne s’agit pas d’essayer de dormir, mais d’essayer de se relaxer ». Différentes solutions existent pour y arriver et chacun doit trouver celle à laquelle il est réceptif. L’une des adhérentes a ainsi trouvé un objet connecté facilitant sa détente. L’autre personne qui a témoigné est parvenue à améliorer son sommeil grâce à sa prise en charge en centre spécialisé à Lyon, où elle a bénéficié d’un accompagnement rapproché et de conseils pratiques. Leur mise en application a eu des retombées très positives pour elle et a constitué un premier pas vers la construction d’une dynamique positive autour du sommeil.

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[1] CBD : abréviation de cannabidiol, une molécule extraite du chanvre aux propriétés apaisantes pouvant favoriser l’endormissement.


Septembre 2021

La rentrée des permanences d’écoute France Insomnie

Les permanences d’écoute en ligne ont repris ce jeudi 16 septembre, sur une plage horaire décalée entre 18 h et 20 h. Le principe reste inchangé : il suffit d’envoyer un e-mail à l’association pour obtenir le lien de connexion. Chacun peut aller et venir librement sur la plage horaire indiquée.

Le « long cheminement » d’une adhérente pour sortir de l’insomnie

En cette permanence de rentrée, le témoignage d’une adhérente de longue date, membre du bureau, donne de l’espoir pour l’avenir. Insomniaque depuis l’enfance, elle ne se souvient pas avoir déjà bien dormi. Le problème survient toujours à l’endormissement. Pendant des dizaines d’années, elle a cherché des solutions, consulté des professionnels, consommé des médicaments. Un parcours difficile qu’ont en commun de nombreux insomniaques. Beaucoup témoignent d’un fort lien entre les problèmes personnels et la difficulté à dormir. La personne qui témoigne apporte la preuve qu’après des dizaines d’années de combat, il est encore possible de trouver une issue. Elle décrit le « long cheminement » qu’elle a parcouru pour en arriver là. Selon elle, « c’est un chemin qu’on doit se chercher, et chacun a le sien ». Progressivement, et à l’aide d’un psychiatre, elle a appris à lâcher prise. Cette démarche est notamment passée par l’aménagement de son environnement quotidien qu’elle a rendu plus confortable, mais également par le fait de prendre soin d’elle-même en s’offrant des moments de détente. Aujourd’hui elle a arrêté les médicaments et se contente d’une tisane à base de plantes avant de dormir. Même si elle craint de rechuter, elle se félicite d’enfin réussir à dormir naturellement. Pour elle, « il y a un déclic » qui permet de parvenir à relativiser et à faire en sorte de ne plus se laisser envahir par les pensées négatives et anxiogènes au moment de dormir. Elle encourage les autres membres à se faire plaisir et à profiter de moments de détente autant que possible.

Le bon équilibre entre rigueur et lâcher prise

La permanence est également l’occasion d’échanger autour des mesures d’hygiène de sommeil et de leur mise en application. L’un des participants se montre critique à ce sujet : selon lui, le fait de se forcer peut avoir un effet négatif sur le sommeil. Le président de l’association rappelle que ces mesures n’ont pas vocation à représenter des contraintes. Elles sont proposées pour encourager les personnes à adopter un mode de vie plus propice au sommeil, mais ne représentent pas des remèdes miracles contre l’insomnie. Dans tous les cas, il faut éviter de se focaliser sur le sujet du sommeil. Beaucoup de personnes insomniaques partagent l’envie et la motivation à trouver la raison pour laquelle ils dorment mal. De la même manière, ils cherchent aussi des solutions à leur problème. Si la recherche constructive de solution peut être le moteur d’une dynamique positive, il faut veiller à ne pas tomber dans la déception et la frustration si les solutions ne fonctionnent pas. Si l’on connaît les mesures à mettre en place pour favoriser le sommeil (cf. les 10 conseils pour bien dormir de France Insomnie), il faut essayer d’accepter de ne pas toujours avoir le contrôle, et relativiser si le rythme est irrégulier sur une période. Plusieurs participants constatent que le cerveau et le corps mémorisent des comportements : il faut faire attention à ne pas tomber dans un conditionnement négatif. L’idée est d’aller vers ce qui fait du bien et permet de lâcher prise. Le contact avec d’autres personnes de l’association permet à certains adhérents de relativiser sur leur situation et de prendre conscience que de nombreuses personnes partagent les mêmes défis.

Mieux prendre en charge de l’insomnie : pour une approche sensible de la problématique du sommeil

Plusieurs adhérents se montrent très critiques à l’égard du corps médical. Ils partagent une sensation de solitude, le sentiment de ne pas être écouté par les médecins. L’un des membres constate un décalage entre le témoignage du patient insomniaque, caractérisé par un ressenti subjectif et des sentiments intimes, et la réponse du médecin, considérée trop pragmatique. Tous défendent le développement de la recherche clinique pour trouver de nouvelles solutions contre l’insomnie. Aujourd’hui, plusieurs patients ne se sentent pas bien pris en charge, même en centre du sommeil. Ils considèrent que la polysomnographie ne répond pas à leurs attentes : même si les résultats montrent un sommeil de mauvaise qualité, aucune réponse satisfaisante n’est donnée. Ils souhaiteraient un accompagnement plus humain et plus long, avec une approche plus sensible du problème. Les participants proposent des idées pour mieux prendre en charge : la reconnaissance des thérapies cognitivo comportementales aujourd’hui non remboursées, ou l’instauration de « consultations sommeil » pourraient constituer des débuts de solution.

Juin 2021

Lutter contre l’insomnie est un long combat

Prévenir les troubles du sommeil par la sensibilisation

La permanence du mois de juin a été marquée par la présentation d’une recherche doctorale sur la prévention de l’insomnie. C’était aussi le dernier rendez-vous avant la pause estivale et l’occasion de faire le point sur le dispositif.

La permanence se réinvente avec la crise sanitaire

Les retours sur les permanences à distance sont très positifs. Bien qu’il ait été imposé par la crise sanitaire, ce format apparaît tout à fait pertinent et comporte même des avantages en termes d’organisation. Les responsables de l’association constatent que ce dispositif a donné une dimension collective aux réflexions qui étaient plus individualisées en présentiel. Il permet également de rendre plus accessibles les permanences qui étaient restreintes aux habitants des grandes villes. Le déplacement nécessaire pour se rendre aux permanences et l’appréhension de se trouver dans un lieu physique pour parler de sa maladie pouvaient constituer des freins à la participation. Si le format est renouvelé, l’association communiquera davantage sur les rendez-vous et invite les membres à diffuser l’information. Les propositions sont ouvertes concernant l’évolution possible de ces permanences en ligne (thématisation, intervenants ponctuels, etc.).

Un long combat contre l’insomnie

L’une des participantes partage son long combat contre les troubles du sommeil : 15 ans à chercher un moyen de s’en sortir. Souffrant d’insomnie sévère, elle s’est tout d’abord tournée vers la médecine traditionnelle, puis vers les thérapies complémentaires. Les examens médicaux qu’elle a passés n’ont donné aucun signal négatif concernant sa santé. Pourtant ses insomnies l’ont largement impactée « au bout d’un moment, il n’y a que vous qui avez une vision globale et précise de votre problème ». Elle indique entre autres que son métabolisme s’est déréglé à cause des troubles du sommeil. Elle a développé différentes intolérances, notamment au gluten, et se limite aujourd’hui à un régime strict. Elle a cessé de consommer toute une liste d’aliments à partir de 15 h. La mise en place de ces habitudes résulte d’un long processus d’écoute et de compréhension du fonctionnement de son propre corps. Si certains conseils sont plutôt généraux, il est nécessaire de se les approprier en fonction de son ressenti personnel. Le fait de faire des repas légers le soir ne convient pas forcément à des personnes sujettes à l’hypoglycémie par exemple. Une autre membre de l’association partage des symptômes liés aux intolérances alimentaires. Au-delà de la nourriture, l’insomnie a eu des effets sur la régulation de la température corporelle, la mémoire (à court et long terme), la concentration ou encore l’équilibre. Plusieurs participants partagent la volonté de comprendre les mécanismes du problème. Ils s’accordent sur le sentiment d’isolement et de solitude causé par la situation « les autres vous disent que la nuit, c’est fait pour dormir ».

Pour s’en sortir, le chemin peut être long et sinueux, il est comparé au processus de deuil « on fait le deuil de son sommeil ». C’est seulement après être parvenu à accepter la maladie qu’il devient possible de la percevoir différemment. Pour la personne qui témoigne, il a fallu « désenclencher des processus négatifs associés à la nuit ». Elle a réalisé deux thérapies cognitives sur deux années pour parvenir à prendre du recul sur le fonctionnement de ses insomnies « c’est comme un entraînement, on s’améliore petit à petit, un peu plus chaque jour ». Aujourd’hui, si elle prend toujours un traitement de fond et s’impose un cadre strict, elle parvient à dormir « comme un bébé ». Bien qu’il lui arrive encore de mal dormir ponctuellement, elle a réussi à appréhender l’insomnie autrement, notamment en exploitant sa créativité. La vice-présidente rappelle que si les nuits peuvent être un espace créatif opportun, il reste difficile de tenir physiquement avec le manque de sommeil. Plusieurs membres s’accordent sur l’idée que s’il est possible de trouver des solutions pour améliorer son sommeil, il arrive de « rechuter » ponctuellement. La vice-présidente appelle « insomnies aléatoires » ces périodes où le sommeil est mauvais sans raison apparente.

Une application de sensibilisation aux troubles du sommeil

Plusieurs étudiantes sont présentes à cette permanence pour échanger autour d’une recherche doctorale sur la prévention des troubles du sommeil. Elles font la démonstration de l’application de sensibilisation aux troubles du sommeil qu’elles sont en train de concevoir. L’objectif de cette présentation est d’inviter les participants à réagir pour faire évoluer l’outil et garantir son ancrage dans la réalité. L’application numérique a pour objectif d’apporter de l’information sur le sommeil afin de mieux appréhender son propre fonctionnement. Elle comporte notamment un agenda de sommeil revisité qui permet de mettre en lien l’hygiène de vie avec le déroulement des nuits. Les responsables de l’association indiquent que ce type d’outil serait utile pour les personnes qui ont des insomnies occasionnelles (comme pendant la pandémie). Elle pourrait aussi être utilisée par les médecins généralistes qui se tournent souvent vers les solutions médicamenteuses plutôt que de donner des conseils d’hygiène. L’application propose différentes informations centrées sur le fonctionnement du sommeil, l’hygiène de sommeil et les thérapies complémentaires. Ils rappellent cependant que l’agenda de sommeil est rébarbatif et qu’il paraît important de le rendre agréable à utiliser. Dans cette logique, il serait pertinent de le conseiller sur une période courte, avec éventuellement la possibilité de le faire remplir plusieurs fois pour augmenter la possibilité d’identifier son rythme idéal. Pour simplifier l’agenda, l’équipe-projet propose de le remplir une fois par jour, le matin au réveil. Les participants soulèvent le risque de ne pas se souvenir du déroulé de sa journée de la veille, et l’idée de pouvoir enregistrer son heure de coucher directement sur le téléphone. La vice-présidente rappelle l’importance de pouvoir renseigner des éléments sur son ressenti de la journée (problèmes de mémoire, concentration, etc.). Pour elle, ce type d’outil pourrait permettre de repérer un retard de phase et de se rééduquer.

Le groupe échange autour du développement des objets connectés dans le champ du sommeil. Le risque de ce processus d’auto-mesure consiste en une focalisation et une mauvaise interprétation des données. Le phénomène a par ailleurs été théorisé sous le concept d’« orthosomnia » ou « la quête obsessionnelle du sommeil parfait » causée par l’utilisation d’objets connectés. Pour autant « tout n’est pas à jeter » dans ces appareils. Pendant la pandémie, ils ont par exemple permis d’identifier les variations de rythme au sein de la population. Ils pourraient aussi représenter un fort potentiel dans la prise en charge en centre du sommeil. C’est leur utilisation en autonomie totale qui peut être risquée. Le président précise que pour l’application présentée, le fait de ne pas utiliser d’objet connecté permet à l’utilisateur d’être face à sa propre représentation de son sommeil. « Ça peut aider à se prendre en main, à avoir une prise de conscience ». Tous s’accordent à dire qu’une réflexion est à mener sur les liens entre les modes de vie et les pathologies.

Mai 2021


Que faites-vous la nuit quand vous ne dormez pas ?

Il est proposé dans cette permanence d’aborder la perception des insomnies et les solutions pour les appréhender de façon constructive. Les différents membres présents partagent leurs expériences, dans l’idée, au-delà de la recherche de solutions, de pouvoir échanger et se sentir compris sur ce sujet sensible. La permanence invite à poser un autre regard sur ces moments souvent synonymes de solitude et d’angoisse.

Comment gérer un éveil nocturne ?

L’une des membres affirme qu’elle se réveille la nuit malgré sa consommation de médicaments. Parfois ses périodes d’éveil durent plusieurs heures. Pour s’occuper, elle écoute des podcasts, fait des travaux ménagers ou de la lecture. Elle tente de réaliser des activités calmes pour se détendre jusqu’au retour du sommeil. Tous les participants s’accordent sur la difficulté à se lever pour s’occuper lors des éveils nocturnes. L’un d’entre eux décrit « l’envie de rien » et affirme se sentir « endormi dans ses capacités » pendant ses insomnies. Cette perte totale de motivation, due à un état d’épuisement, transforme l’idée de se lever pour s’occuper en un réel défi. Cette situation est particulièrement problématique pour les insomniaques qui ont fortement envie de dormir, mais n’y parviennent pas. Ils doivent ne pas essayer de dormir, mais n’ont envie de rien d’autre. Ils se trouvent parfois dans une situation « de surchauffe physique et psychique ». Pour ceux qui parviennent à se lever, un autre obstacle se dresse : choisir une activité qui ne soit pas trop stimulante pour ne pas encourager l’état d’éveil. Toute tâche « utile » (par exemple le travail) ne peut pas être effectuée au risque d’être inefficace et de maintenir éveillé. De plus, les contrariétés sont à éviter dans ces moments particuliers. La nuit, avec la fatigue et l’angoisse, les jugements sont altérés. Bien souvent, l'état de vulnérabilité causé par l’insomnie fait prendre une ampleur démesurée aux soucis quotidiens.

Mais comment trouver une activité qui ne nécessite pas de concentration ? Chacun (e) a sa solution pour se détendre, trouvée après de multiples essais. L’un des membres témoigne de son expérience : selon les nuits, ses éveils sont plus ou moins teintés d’angoisse. Lorsqu’ils le sont beaucoup, il prend une tisane et pratique la relaxation grâce à des vidéos qu’il a trouvées sur Internet. Il utilise uniquement le son et ne regarde pas l’écran. Ainsi il ne risque pas de se maintenir en éveil à cause de la lumière bleue. Plusieurs membres s’accordent sur les bénéfices de l’audio en comparaison avec le visuel. Lorsque son état est moins anxieux, ce participant fait des respirations et prend des postures de yoga pour se détendre. Il s’intéresse également à la méditation qu’il pratique régulièrement. Pour lui, cette régularité est essentielle pour que le corps mémorise les sensations. Se forcer à bâiller l’aide parfois à encourager l’endormissement. Un autre membre se lève pour marcher dans sa maison jusqu’au retour de la fatigue.

Au-delà des exercices de relaxation, les membres évoquent l’importance du rythme de sommeil dans l’appréhension et la gestion des éveils nocturnes. Plusieurs d’entre eux affirment connaître « par cœur » leurs cycles de sommeil. Ce rapport au sommeil s’est construit à force de vivre avec l’insomnie chronique. Selon l’heure à laquelle ils se réveillent la nuit, ils peuvent ainsi prévoir s’ils vont réussir à se rendormir. Le président de l’association utilise parfois les principes des thérapies cognitivo comportementales en décalant son horaire de coucher pour éviter les éveils nocturnes, et augmenter l’efficacité de son sommeil. Il rappelle qu’il est primordial d’attendre de ressentir des signaux d’endormissement avant d’aller se coucher.

Les échanges abordent également la question de la perception de l’insomnie, qui influe sur la façon de la vivre. Avec le temps, certains sont parvenus à relativiser le problème jusqu’à voir en lui une opportunité. Plusieurs se reconnaissent dans cette forme de « sagesse qui vient avec l’âge ». Ils rappellent qu’il est important de faire un travail sur soi-même au quotidien pour relativiser les événements négatifs et tenter de les prendre moins à cœur. Certains exercices existent pour tenter de gérer l’anxiété, par exemple « se dire que l’on met toutes ses contrariétés dans une valise avant de se coucher ». Comme le reste des conseils, l’efficacité dépend de la sensibilité de la personne et du moment. C’est pourquoi tous reviennent sur la nécessité d’apprendre à se connaître et se comprendre.

Nouvelles mœurs, nouvelles nuits ?

Les permanences peuvent également être le moment de revenir sur les causes profondes de l’insomnie. L’un des membres aborde le sujet à travers la question du rapport à la mort. Il pourrait exister un lien inconscient entre l’insomnie et la peur de la mort. La vice-présidente rappelle que l’état d’hyper-vigilance qui complique le sommeil peut remonter à une peur ancrée liée à la maternité et au risque de perte d’un enfant. Le président ajoute que ce phénomène d’hyper-vigilance est hérité de la préhistoire, alors que les Hommes devaient rester éveillés pour surveiller les prédateurs.

Aujourd’hui, les modes de vie ont fortement évolué. Les jeunes générations sont peu sensibilisées aux risques associés aux décalages des rythmes et au manque de sommeil. Les participants s’accordent sur l’importance de cette sensibilisation : les risques liés à l’insomnie n’ont pas besoin d’être systématiquement répétés aux insomniaques chroniques, qui les connaissent. Ce discours est très anxiogène pour eux. A contrario, il aurait besoin d’être diffusé auprès de certains publics moins sensibilisés. Entre le rythme, l’alimentation et les écrans, les jeunes sont particulièrement concernés. L’évolution des mœurs pose la question de l’adaptation du corps au mode de vie. S’habituera-t-on naturellement à la réduction du temps de sommeil ? Il est également possible d’envisager de nouveaux types de rythme. Certains existent déjà. Par exemple, les « siestes flash » sont habituelles chez les personnes qui ont un emploi à haute responsabilité et qui ne peuvent pas dormir une nuit entière. Les siestes sont très utiles, car elles permettent de réduire la fréquence cardiaque et la pression artérielle. Une initiative qui pourrait avoir sa place dans les nouvelles formes de travail qui émergent avec la crise sanitaire. Le travail à distance implique une connexion constante et peut être facteur de stress chez les personnes au tempérament anxieux. Tous les membres s’accordent à dire qu’avec le temps, ils ont constaté des évolutions dans l’organisation du travail. La polyvalence est de plus en plus indispensable.


Avril 2021

La permanence « France Insomnie à votre écoute » se fait connaître

La permanence du mois d'avril était la cinquième organisée en visioconférence par France Insomnie. Depuis la mise en place de ce rendez-vous, de plus en plus d’adhérents tentent l’expérience et se connectent. Plus le groupe est important, plus les expériences sont variées. Les retours des participants sont toujours très positifs.

L’insomnie, une souffrance chronique

Aussi personnels et différents soient-ils, tous les témoignages des insomniaques font écho à une souffrance quotidienne. La vie avec la maladie est qualifiée de « survie » par une participante qui est présente pour être soutenue et chercher des solutions à sa situation. Les troubles du sommeil ont un impact direct sur la qualité de vie et peuvent dégrader la santé. Plusieurs adhérents témoignent de périodes de dépression liées à la maladie. D’autres sont en arrêt de travail depuis plusieurs années. La souffrance liée à la maladie peut générer de l’isolement et les permanences contribuent à l’éviter. Ces conséquences sont craintes par les insomniaques qui ressentent une forte anxiété à l’idée d’être plus sujet à certaines maladies. L’anxiété et le sommeil forment un cercle vicieux dont il est complexe de s’extraire. Tous souhaitent parvenir à améliorer leur sommeil et leur quotidien. Cette amélioration peut passer par la recherche du déclencheur de la maladie, source de motivation pour certains. Une mise en garde est effectuée sur cette quête : elle peut réveiller des traumatismes et se montrer inefficace, l’élément déclencheur ne permettant pas automatiquement de régler un problème ancré depuis plusieurs dizaines d’années. La recherche de solution doit rester sereine et positive. L’une des clés avancées est de parvenir à lâcher prise. Le besoin de contrôle caractérise les insomniaques qui montrent souvent un sentiment d’insécurité et une forte anxiété. Les échanges permettent de retracer le parcours de quelques-uns qui ont réussi à passer ce palier important de l’acceptation. Une adhérente rappelle que c’est « un travail de longue haleine ». Nous ne sommes pas tous égaux face au sommeil et certains devront subir des nuits courtes toute leur vie. Face à ce constat, l’enjeu est de parvenir à vivre le mieux possible au quotidien, en transformant ce qui peut être considéré comme une faiblesse en force. L’un des participants témoigne : la maladie lui a permis de développer une sensibilité et un instinct extrêmement précis. Les échanges permettent de se soutenir dans ce changement de regard sur l’insomnie.

Des obstacles structurels et cognitifs

Ce changement de perception est loin d’être une évidence. Il est rendu complexe par différents facteurs abordés par les membres. Au niveau organisationnel tout d’abord, tous font le constat d’un problème dans la prise en charge de l’insomnie. Cela se traduit dans les témoignages : tous ont vécu des parcours de soin aussi longs que complexes. Ils ont rencontré des dizaines de praticiens, certains se déclarant spécialistes du sommeil, pour n’en extraire que quelques conseils dont l’efficacité s’est souvent révélée partielle et ponctuelle. Une adhérente parle « d’impasse thérapeutique » pour qualifier la situation de certains insomniaques. Dans les échanges, nous constatons par exemple que les Thérapies Cognitivo Comportementales (TCC) ne sont pas toujours remboursées. Pour l’une des participantes, la prise en charge des troubles du sommeil « évolue dans le sens négatif ». De par la dimension psychologique de la maladie, tous revendiquent le besoin d’être écoutés par leur médecin. Ils déplorent le manque de considération dont font parfois preuve les spécialistes qui ne prennent pas systématiquement en compte leur souffrance. La majorité s’accorde à dire que les médecins des Unités de Sommeil sont souvent éloignés de la réalité des patients et détiennent une vision trop pragmatique du sujet. Ils valorisent les initiatives qui se veulent proches du patient et ses caractéristiques personnelles.

Au-delà de ces freins plutôt structurels qui doivent être combattus, nous constatons que l'obstacle au changement peut également être d’une autre nature. Certains insomniaques, à force de déception, adoptent une attitude de mise en échec face à la recherche de solution. Ils montrent parfois beaucoup de ressentiment à l’égard du système de prise en charge et des médecins. Ces sentiments découlent d’une forme de lassitude et d’épuisement dus à leur situation. Ils ont parfois arrêté de s’imposer une rigueur au quotidien, et repris des comportements défavorables à leur sommeil. Le président rappelle que « les choses les plus élémentaires peuvent aider ». Il a lui-même réussi à améliorer son sommeil grâce à une meilleure hygiène de vie. Son expérience montre les bienfaits de l’activité sportive pour créer une bonne fatigue et éviter de trop penser au coucher. Il décrit le processus de culpabilisation dont il a réussi à sortir : les insomniaques peuvent ressentir une pression de la part de leurs proches et de la société, et culpabiliser de ne pas parvenir à dormir et être aussi efficaces qu’ils le souhaiteraient. Il paraît indispensable d’avoir une réflexion sur ce système pour en sortir et aller vers l’acceptation et le lâcher-prise.

L’engagement dans la recherche de solutions

Quels que soient leurs parcours et leurs points de vue, tous les participants s’encouragent dans la recherche de solutions. Certains témoignages redonnent espoir aux participants qui constatent qu’il est possible de trouver un outil efficace après plusieurs dizaines d’années à le chercher. L’une des adhérentes a réussi à améliorer son sommeil après des années de difficulté grâce à une mélatonine dédiée aux enfants (Slenyto). Cependant, celle-ci n’est pas remboursée pour les adultes. Parmi les nouveaux traitements abordés, la TCC reste au cœur des discussions. L’une des participantes, qui avait déjà témoigné lors d’une précédente permanence, rappelle le bénéfice que la thérapie lui a apporté bien qu’elle ait été difficile à suivre hors programme. TheraSomnia[1] lui permet de maintenir une rigueur qu’elle s’impose tous les jours. Une adhérente indique qu’il est complexe de suivre ce type de programme lorsque l’on a un profil très anxieux : l’idée même de devoir programmer sa journée en fonction du sommeil a généré une anticipation négative du sommeil et donc des problèmes d’endormissement. D’autres s’intéressent à la cryothérapie et aux cures thermales qu’ils souhaiteraient tenter. Enfin, la question du CBD[2] est à nouveau abordée. Comme les autres solutions, l’efficacité du CBD dépend de la dose et du profil de celui qui le consomme, et ne constitue pas une solution miracle. Il peut cependant aider à réduire l’anxiété. Le président met en garde contre les "arnaques" et indique qu’il est indispensable de faire de la prévention sur les nouveaux traitements dont le succès pourrait mener à des dérives.

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[1] TheraSomnia est un programme intelligent de thérapie en ligne permettant de rompre les cercles vicieux de l'insomnie.

[2] CBD : abréviation de cannabidiol, une molécule extraite du chanvre aux propriétés apaisantes pouvant favoriser l’endormissement.


Mars 2021

Une permanence dédiée à la 21e journée du sommeil et à la méditation

La permanence du mois de mars était spécialement dédiée à la 21e Journée du sommeil. Elle a eu lieu la veille de l’événement. À cette occasion, Françoise Rousseau, vice-présidente, a présenté l’association et ses missions. Jean-Marc Loison, président, a détaillé l’enquête INSV/MGEN 2021[1] réalisée pendant le second confinement et Benjamin Blasco, cofondateur de l’application mobile Petit Bambou[2], était présent pour parler de méditation.

Présentation de l’enquête INSV/MGEN 2021

L’enquête réalisée montre que pendant le second confinement, le temps de sommeil des Français a augmenté, mais sa qualité s’est dégradée. 45 % des Français déclarent avoir souffert d’au moins un trouble du sommeil pendant cette période (dont 24 % d’insomnie et 20 % de troubles du rythme du sommeil), contre 41 % en temps normal. Le témoignage d’un des adhérents va dans ce sens. Il constate qu’avec la pandémie « même ses amis qui n’étaient pas insomniaques le sont devenus ». Ce phénomène peut s’expliquer par l’état psychologique de la population : un tiers des Français déclarent une dégradation de leur santé psychologique, dont 34 % des troubles anxieux et 33 % des troubles dépressifs. L’étude révèle également une augmentation du temps passé sur les écrans. La vice-présidente rappelle que si l’insomnie chronique est une maladie à part entière, elle est aussi un symptôme anxieux et dépressif à ne pas négliger. Pour le président, la prise en considération de la santé mentale due à la pandémie devrait être l’occasion de prendre conscience des enjeux liés au sommeil. La sensibilisation à l’importance du sommeil devrait commencer dès le plus jeune âge, en enseignant aux enfants les cycles du sommeil, tout comme cela est déjà mis en place sur d’autres questions de santé publique comme l’alimentation ou l’activité sportive. Selon France Insomnie, les conséquences des troubles du sommeil coûtent plus de 2 milliards d’euros par an.

En parallèle, l’enquête montre que 23 % des Français ont cherché à améliorer leur sommeil pendant le deuxième confinement (alimentation 31 %, sport 27 %, exposition aux écrans 27 %, horaires de sommeil réguliers 30 %), avec une efficacité dans 7 cas sur 10. Le témoignage du président de France Insomnie va dans ce sens. Pour lui, le passage d’un rythme irrégulier avec de nombreux déplacements à la situation de confinement que nous avons connue a été l’occasion d’améliorer son sommeil. Il a profité du contexte pour adopter une meilleure hygiène de vie (alimentation, activité physique, rythme régulier) et a pu constater les résultats positifs de ces changements.

Rappeler l’importance de l’hygiène du sommeil

L’expérience du président montre que malgré le temps passé avec la maladie, certains insomniaques de longue date ont cessé d’appliquer les mesures d’hygiène de base. Il a constaté qu’ils sont peu réceptifs à ces conseils alors même qu’ils peuvent encore leur être utiles pour améliorer leur sommeil. La vice-présidente rappelle donc les 10 conseils pour mieux dormir[3] présentés sur le site de l’association :

1. Connaître ses besoins ;

2. Avoir des horaires de sommeil réguliers ;

3. Dormir quand il y a les signaux d’endormissement ;

4. Associer la chambre au sommeil et à l’intimité uniquement ;

5. Instaurer un rituel du coucher ;

6. Se souvenir que « la nuit commence le jour », avoir des activités physiques et ne pas faire de sieste longue ;

7. Ne pas culpabiliser de ne pas dormir ;

8. Se lever lors d’un réveil nocturne trop long ;

9. Essayer les remèdes naturels ;

10. Voir un médecin si le retentissement sur la journée est trop fort.

Pour l’un des adhérents, l’hygiène de sommeil devrait être qualifiée de « discipline de sommeil » pour les insomniaques de longue date qui doivent s’imposer certaines contraintes. Il s’agit pour eux de comprendre comment ils fonctionnent en identifiant au quotidien les éléments qui influent positivement ou négativement sur leur sommeil et en adaptant leurs comportements.

L’application Petit Bambou et les troubles du sommeil

Benjamin Blasco, cofondateur de l’application, était présent dans le cadre de la 21e Journée du sommeil. Il réalise une présentation de l’outil : depuis sa création en janvier 2015, 7,5 millions de personnes ont créé un compte pour l’utiliser. L’objectif est d’aider à se reconnecter à soi via la méditation, et l’enjeu de l’application mobile est « d’éviter la perte de motivation, de conserver l’habitude grâce à une appli qui tient dans la poche ». Il indique que selon lui, il serait contre-intuitif de se dire que l’application peut régler tous les problèmes de la personne qui l’utilise, y compris l’insomnie : « ce n’est pas une pilule magique ». L’outil est fait pour s’apaiser, donner des pistes et des outils pour mieux contrôler ses pensées. Si à la base, la méditation n’est pas prévue pour être réalisée le soir, mais plutôt en journée, les fondateurs constatent un « pic d’usage » à 23 heures, traduisant une utilisation de l’application pour favoriser le sommeil. Deux des adhérentes confirment qu’elles utilisent l’application pour s’endormir et pendant les réveils nocturnes.

Écouter son corps et s’investir dans la recherche de solutions

Les personnes qui vivent avec l’insomnie depuis des dizaines d’années indiquent souvent avoir « tout essayé ». Cette recherche constante de solutions peut devenir épuisante moralement, c’est pourquoi certains adhérents conseillent de changer de regard sur le processus d’amélioration du sommeil. L’un des adhérents, insomniaque depuis l’enfance, témoigne : « il faut chercher à écouter son corps plutôt que de s’obstiner à vouloir trouver la raison pour laquelle on ne dort pas ». Il a lui-même expérimenté différentes disciplines médicales et paramédicales afin de trouver la cause de ses insomnies qui, une fois identifiée, n’a pas constitué la clé attendue pour mieux dormir. Dans le message qu’il passe aux adhérents, il indique que certaines solutions peuvent être trouvées par le patient lui-même, qui se connaît mieux que personne. La recherche de solutions doit constituer une motivation positive pour améliorer son sommeil, en tenant compte du fait que l’efficacité d’un outil dépend de la personne et de la période de sa vie. Chacun est réceptif à des techniques différentes. La vice-présidente précise qu’il est indispensable de dédramatiser les problèmes de sommeil, de ne pas se sentir coupable de ne pas dormir, en se répétant : « il n’y a aucune raison que je ne dorme pas ». La rumination et la dévalorisation de soi font partie du cercle vicieux de l’insomnie et contribuent à dégrader le sommeil.

Conclusion

L’échange avec les adhérents montre que la permanence a des retombées positives. L’événement se présente comme un rendez-vous, un espace-temps permettant de s’exprimer librement et d’obtenir une écoute bienveillante et des informations utiles. Le format à distance permet aux membres de se sentir plus en confiance. Les responsables de l'association invitent les adhérents à faire des propositions autour de l’évolution du format des permanences en proposant par exemple de les thématiser par l’intermédiaire d’invités spéciaux.

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[1] https://institut-sommeil-vigilance.org/bien-dormir-pour-mieux-faire-face-enquete-insv-mgen-2021

[2] Petit Bambou est une application de méditation qui a reçu le premier prix Top Santé 2021 dans la catégorie Service et High.

[3] https://franceinsomnie.fr/10-conseils-pour-mieux-dormir


Janvier - Février 2021

Cette synthèse est structurée en fonction des thématiques abordées par les participants.

En introduction, il paraît important d’indiquer les bénéfices de tels échanges pour les participants. Tout d’abord, et cela semble être la fonction première des permanences, ces rendez-vous sont l’occasion d’échanger, d’écouter et d’être entendus pour les insomniaques. Les permanences répondent au besoin d’accompagnement (et au sentiment de solitude face à cette pathologie qu’est l’insomnie) relevé à différentes reprises par les participants lors de ces deux permanences. L’espace créé permet aux membres d’obtenir du soutien, de se sentir compris, et de s’identifier aux parcours d’autres individus souffrant d’un trouble semblable. Le besoin d’identification ressort comme un élément central dans les discussions, et fait écho à la problématique de la reconnaissance de la maladie. Les échanges mettent en avant l’importance de la dimension psychologique et sociale de la pathologie. Au-delà du soutien apporté, on constate l’effet des recommandations inter-membres sur les comportements des participants. Entre chaque permanence mensuelle, certains ont appliqué les recommandations effectuées par d’autres membres. Les personnes qui le souhaitent peuvent donner un retour sur leurs différents essais et participer à construire une connaissance commune autour de la pathologie. L’espace est ouvert à tous et chacun peut entrer et sortir librement dans les deux heures de la permanence.

Des parcours complexes

Les permanences sont l’occasion pour les participants de témoigner de leur parcours. S’ils souffrent de troubles différents (qui peuvent évoluer en fonction des périodes de la vie) et ont traversé des épreuves de vie distinctes, tous ont été confrontés au « parcours du combattant » qui caractérise la prise en charge de l’insomnie aujourd’hui en France. La multiplicité des disciplines impliquées dans la gestion des troubles du sommeil et le manque de structuration précise de leur prise en charge entraînent souvent un sentiment de solitude et de résignation chez les insomniaques. Au-delà des failles organisationnelles soulevées au niveau de l’organisation de la prise en charge médicale, la complexité du parcours des insomniaques s’explique par la forte dimension psychologique associée à la maladie.

L’expression revient plusieurs fois lors des permanences : « il s’agit de trouver le bon praticien au bon moment ». Cette expression sous-tend différentes conditions à réunir pour que l’accompagnement soit efficace. Tout d’abord, il faut avoir conscience et accepter qu’il n’existe pas de « solution miracle » capable de guérir l’insomnie du jour au lendemain, sur le long terme. S’il existe des solutions, elles sont partielles et ponctuelles, et leur efficacité dépend en partie du rapport qu’entretient le patient avec le praticien. En plus de ces éléments, la question de l’importance de « l’effet placebo » revient régulièrement dans les échanges. Selon les membres, l’efficacité d’une thérapie (lorsqu’elle n’est pas chimique) dépend en grande partie de leur perception de l’efficacité de celle-ci. Autrement dit, moins l’individu croit en la capacité de la thérapie à améliorer son sommeil, plus il y a de chances que celle-ci soit inefficace. Ce phénomène montre en quoi la création d’espaces d’écoute et d’échange entre les insomniaques est importante. La recommandation par un tiers qui souffre d’un problème semblable peut potentiellement augmenter la perception d’efficacité associée à cette solution et engager une spirale positive de recherche de solutions. L’un des membres résume l’idée comme suit : « quelque chose peut marcher pour tout le monde sauf pour vous, mais cela marche aussi dans l’autre sens, il s’agit de trouver ce qui fonctionne pour vous ».

L’importance de la relaxation

Ces solutions ne se trouvent pas systématiquement dans le champ du sommeil. Les échanges entre les participants font ressortir l’importance de la détente dans le processus d’amélioration du sommeil. Selon l’une des participantes : « la clé n’est pas de chercher à s’endormir, mais de chercher à se détendre ». Les comportements à mettre en place pour se relaxer dépendent également du tempérament de chacun. La méditation peut aider certaines personnes à lâcher prise et générer du stress chez d’autres. Il s’agit alors d’apprendre à se connaître pour trouver la bonne technique, en sachant que celle-ci deviendra certainement moins efficace avec le temps. L’une des membres indique qu’elle change régulièrement d’exercice de relaxation pour éviter de s’habituer et donc de réduire l’efficacité de la technique. Ceci étant, le bénéfice de certains rituels apparaît comme un élément partagé par la majorité des membres. La régularité des heures de lever et de coucher (qui fait partie des mesures d’hygiène du sommeil principales) et l’ajout de certains éléments relaxants peuvent favoriser la détente et l’endormissement. Les huiles essentielles, brumes d’oreiller, vêtements agréables et autres modifications positives sont autant de conseils que partagent les insomniaques pour s’entraider à améliorer leur environnement de sommeil. L’une des participantes affirme que depuis qu’elle a mis en place ces nouvelles habitudes, sa chambre est « devenue son amie » et son sommeil s’est amélioré.

Retours d’expérience : la TCC et le Biofeedback

Au-delà des stratégies de relaxation que l’on pourrait qualifier d’autonomes, les membres partagent leurs expériences de thérapies non médicamenteuses plus structurées. La TCC ou Thérapie Cognitivo Comportementale en fait partie. Sur les deux permanences, les membres ont beaucoup échangé autour de cette technique dont l’efficacité est reconnue dans le champ du sommeil. Sur les deux témoignages, on constate une fois encore que l’expérience a eu des effets différents en fonction de la personne. L’une des participantes appuie sur la distinction entre la TCC en présentiel et celle à distance (Thérasomnia). Si elle a rencontré de grandes difficultés à maintenir les comportements préconisés par le programme en présentiel une fois celui-ci terminé, elle est parvenue à appliquer les recommandations du programme à distance après l’avoir effectué. Au-delà du prix bien moins élevé de la thérapie à distance (25 euros par mois contre environ 600 euros), elle indique que les outils numériques lui paraissent plus simples à utiliser et que le programme permet un suivi quotidien essentiel au maintien de l’engagement du patient. Le témoignage de la seconde personne appuie l’idée qu’il est difficile de « s’approprier » les outils proposés en TCC en présentiel, mais que la possibilité d’échanger avec d’autres insomniaques lui a été d’un précieux soutien.

L’une des participantes a essayé une autre technique pour améliorer son sommeil : le biofeedback. Guidée par le Réseau Morphée (Réseau de santé consacré à la prise en charge des troubles chroniques du sommeil), elle a pu réaliser une polysomnographie et se faire diagnostiquer un état d’hyper vigilance responsable de la mauvaise qualité de son sommeil. Le biofeedback consiste en l’enregistrement de ses constantes (comme la fréquence cardiaque) dans l’objectif d’identifier celles qui correspondent à un état détendu. Une fois cette « fréquence idéale » repérée, il s’agit de la retrouver lors d’exercices réguliers permettant de faire baisser l’anxiété et d’encourager la détente. Cette technique lui a permis d’améliorer nettement la qualité de son sommeil.

Les effets de la crise sanitaire

La crise sanitaire et les mesures de confinement reviennent également dans les échanges entre les insomniaques. Les rythmes de vie ont été modifiés par le contexte sanitaire et ce bouleversement a eu et a toujours un impact conséquent sur le sommeil. Certains participants témoignent d’une amélioration de leur sommeil grâce à la plus grande flexibilité permise par le confinement. L’une des insomniaques appuie sur l’inadaptation du fonctionnement de la société aux rythmes biologiques qui impacte largement le sommeil. Elle souligne le cercle vicieux dans lequel le travail peut faire entrer : un mauvais sommeil dégrade le vécu du travail et le mauvais vécu du travail dégrade le sommeil.

Le rapport au travail a été modifié par les confinements. Certains membres ont constaté une « baisse de la pression » qui leur a permis d’améliorer la qualité de leur sommeil, d’autant plus que les confinements ont encouragé la mise en place d’une routine et donc des rituels évoqués plus haut. Dans certains cas, la situation a été bénéfique au point d’anticiper négativement un « retour à la normale » qui viendrait dérégler les habitudes qui se sont installées. Dans d’autres cas, le confinement a aggravé le rapport au sommeil. Le télétravail a par exemple été évoqué comme un obstacle au cloisonnement de la vie professionnelle et privée, et donc un facteur d’anxiété.

Des pistes d’amélioration

Pour terminer la synthèse des deux premières permanences de l’année, il semble aussi important de mettre en avant les pistes d’amélioration soulignées par les membres dans leurs échanges. La première concerne la nécessité de mettre en place des actions de sensibilisation à plusieurs niveaux : au niveau de la reconnaissance de la maladie, afin de contrer la banalisation de celle-ci qui conduit les personnes à ne pas consulter pour ce motif et à constater une chronicisation de leurs troubles ; au niveau du danger des médicaments, qui sont parfois prescrits de manière automatique et engendrent des risques très importants pour les patients. Les actions de sensibilisation sont envisagées dès le plus jeune âge, à l’école, de sorte à ancrer l'importance du sommeil dans les représentations et les comportements, tout comme cela est fait pour d’autres problématiques sanitaires comme l’alimentation ou l’activité physique par exemple. Sur la question des médicaments, au-delà de la nécessité d’éviter la prescription automatique, il s’agit de proposer des alternatives accessibles. Aujourd’hui les TCC ne sont pas remboursées malgré la preuve de leur efficacité (et contrairement aux traitements médicamenteux). Enfin, il apparaît nécessaire de former davantage les professionnels à la prise en charge spécifique des troubles du sommeil, en créant des consultations dédiées et adaptées (plus longues et axées sur le parcours personnel du patient).