Traduction de l'espagnol au français
1) Représentations alternatives de la subjectivité féminine Puri Mayobre. Conférence traduite de l'espagnol par Michèle Bolli 2002. Sites : revue web, ‘Multitudes’, 2005.. Voir aussi le site de la Professeure Puri Mayobre.
2) "Le tango argentin comme langage spirituel transculturel : rêve d’une vie meilleure en situations de migration et d’ambiguïtés de genre". Heike WALZ , Théologienne (Argentine). Traduction Michèle Bolli, théologienne (CH), 2013.
1.
Représentations alternatives de la subjectivité féminine
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Purificación Mayobre Rodriguez, Univ. de Vigo (ES).
Texte publié par la Revista ANDAINA, 32, été 2002, p. 30-34.
Traduction par Michèle Bolli, Lausanne, (CH).
Actuellement, une des tâches les plus importantes qu’a entreprises la théorie féministe, consiste à repenser et redéfinir l’identité féminine. Ce travail prétend être plus que de la déconstruction, car il ne se contente pas d’une simple analyse critique, mais présente aussi de nouvelles conceptualisations et de nouvelles représentations de la féminité, ainsi que le dit la féministe italo australienne Rosi Braidotti : « La théorie féministe n’est pas seulement un mouvement d’opposition critique au faux universalisme, mais elle exprime aussi le désir des femmes de manifester, et de valider, des formes différentes de subjectivité. Ce projet implique aussi bien de critiquer les définitions et les représentations existantes des femmes que de créer de nouvelles images de la subjectivité féminine »1.
Il est certain que le travail de reconstruction est encore naissant et rien n’est moins certain que ce résultat très problématique puisse donner une réponse à la question : qu’est-ce qu’être femme ?
Parce que, comme l’affirme J. Butler : « au lieu d’une signification stable qui exige l’approbation de celles qu’elle prétend décrire et représenter, les femmes
(incluant le pluriel), elle se transforme en un terme problématique, en un lieu de contestation, en un motif d’inquiétude »2. Cela veut indiquer qu’il est difficile de donner une définition normative de la femme et de la féminité. Dans la pratique, les femmes accueillent certains aspects de la définition et en refusent d’autres ; en idéalisant certains et en liant d’autres au sordide, parce qu’il n’a pas en définitive, une unique conception, qui ne varierait pas – elle dépend de chaque femme, de la classe, de l’ethnie, de l’âge, de la tendance sexuelle, etc. – en un dialogue généralement conflictuel.
D’un autre côté, il importe aujourd’hui, de prendre en compte, dans la redéfinition de l’identité féminine, le fait que les concepts de masculinité et de féminité sont mutuellement dépendants, que ce qui atteste de la féminité est le fruit d’une hétérodésignation ; de même l’homme configure son identité masculine négativement 3 – être homme, c’est ne pas être femme – parce que – comme l’affirme Foucault dans L’Archéologie du Savoir – il y a aussi une dépendance sémantique de l’un (masculin) vers l’autre (féminin). Il est certain que cette relation dialectique fut toujours asymétrique, hiérarchique, et que cette asymétrie a toujours favorisé les hommes, comme l’exprime bien Virginia Woolf dans Une chambre à soi : « Durant tous ces siècles, les femmes furent les miroirs dotés du pouvoir délicieux et magique de refléter une silhouette d’homme pareille au naturel… Pourtant, si elles essayaient de dire la vérité, l’image du miroir s’évanouissait »4 et dire, que la redéfinition de l’identité féminine implique un ajustement des comptes et une révision de l’identité masculine en cette interrelation dialectique qui s’est établie entre les sexes, le masculin et le féminin.
Nouvelles images de la subjectivité féminine
Ces derniers temps, nous passons d’une définition classique de la femme en perte de vitesse comme modèle culturellement dominant et normatif pour la subjectivité féminine, à un temps qui donne de l’importance à l’investigation, à la redéfinition et à la représentation du féminin médiatisé par une série de métaphores ou de lieux comme la différence sexuelle (Luce Irigaray), le nomadisme (Rosi Braidotti ) ou la parodie (Judith Butler).
En général, ces penseures croient que la possibilité de réfléchir à de nouvelles formes de subjectivité féminine implique de transformer les structures et les images de notre système de pensée et non seulement de modifier ou de corriger une partie des déterminants de la pensée. Comme dit L. Irigaray : « Il ne suffit pas de changer telle ou telle chose dans l’horizon qui définit la culture humaine, mais bien de changer l’horizon lui-même »5.
De même, tendre à penser que la différence sexuelle est une différence fondamentale, basique, qu’elles prennent comme point de départ pour ériger leur interprétation symbolique de la réalité. En utilisant les paroles de R. Braidotti : « J’aimerais valoriser la différence sexuelle comme projet…’ pour que cette énergie, inscrite dans la différence qu’incarnent les femmes, fournisse des bases positives, fondatrices pour redéfinir la subjectivité féminine dans toute sa complexité » 6.
Ces présupposés proviennent d’auteurs de philosophies, comme la philosophie de la différence française (Deleuze, Guattari, Derrida), la psychanalyse freudienne ou lacanienne et le poststructuralisme postfoucaldien, c’est-à-dire à des philosophies qui défendent un sujet décentré et soumis aux conditions sociohistoriques et inconscientes.
La différence sexuelle
La différence sexuelle est un des topos identifiables de la subjectivité féminine que défend Luce Irigaray, une des membres de l’école française ‘Féminisme et psychanalyse‘, parce que ‘la différence sexuelle est un don immédiat, naturel, et une composante réelle et irréductible de l’universel. Le genre humain en sa totalité est composé de femmes et d’hommes’7.
La reconstruction de l’identité féminine – selon l’auteure – devrait commencer par la récupération d’une généalogie féminine, par la création d’une langue sexuée et d’un ordre symbolique maternel.
Le point de départ de cet ordre symbolique est le corps féminin, caractérisé par le fait qu’il soit parfaitement apte, par la morphologie du vagin et par la capacité maternelle, à vivre l’expérience de ‘non-je-en-moi’, ce qui est interprété comme un défi à la logique de l’identité, à la logique sociale, à la logique économique. C’est un défi à la logique identitaire de notre système de pensée parce qu’il déplace les paramètres fondamentaux de l’organigramme patriarcal, le corps masculin et, plus concrètement encore, le phallus – ce phallus qui s’érige en solitaire, négateur ou excluant les autres – alors que le corps féminin, est corps qui donne accueille l’autre, qui lui permet de croître et de s’épanouir, et qui procure un appui à une logique de caractère relationnel. Suivant Luce Irigaray :
‘ Le corps féminin présente la particularité de tolérer la croissance de l’autre à l’intérieur de soi, sans enfermement, rejet ou mort pour un des deux organismes vivants. Malheureusement, la culture… ne fut pas capable d’interpréter le modèle de tolérance que manifeste cette relation d’un être distinct à l’intérieur d’une même… La culture de l’entre - hommes agit de manière inverse. Elle s’organise en excluant de sa socialité l’apport de l’autre sexe. Alors que, où le corps féminin engendre dans le respect de la différence, le corps social patriarcal s’édifie hiérarchiquement en excluant la différence9 ».
Suivant l’auteure, le caractère dominant qu’occupe le sens du tact chez les femmes, questionne, lui aussi, la logique dualiste patriarcale, puisque ‘dans le toucher se remémorent, et parfois s’estompent les limites entre ceux qui se touchent… Se crée une fluidité en laquelle se confondent les bords de l’un / une et de l’autre / autre, entre l’un / une et l’autre / autre 10, favorisant une logique de la multiplicité et de la contradiction, alors que chez les hommes prédomine le sens de la vue, mais ‘l’œil, plus que les autres sens, objectivise et domine. La distance est maintien de la distance et, par conséquent, favorise le dualisme et l’exclusion.
La création de cet ordre symbolique serait à compléter par la création d’un langage sexué, la reconnaissance d’un droit sexué et la récupération d’une généalogie féminine, généalogie qui fut close par un matricide originaire, comme il est raconté dans l’Orestie.
Le sujet nomade
Rosi Braidotti se propose une redéfinition de la subjectivité féminine à partir de la philosophie de Deleuze, de laquelle elle adapte et réadapte des concepts tels que nomade, devenir, déterritorialisationou rizome. L’affinité avec les déterminants présupposés deleuziens ne signifient pas qu’il n’y a pas de différences très importantes entre les deux, comme celle que Deleuze postule, d’une multiplicité de subjectivités sexuées, alors que Braidotti s’oppose à une neutralisation de la dichotomie de genre parce que « l’élimination de la différence sexuelle, seule peut constituer un chemin, non seulement (?) la figure de l’appropriation, de l’élimination ou de l’homologation du féminin en/des femmes »12. Pour que cette homologation ne se produise pas, il est nécessaire que les femmes donnent une interprétation symbolique de la différence sexuelle, « les femmes doivent énoncer le féminin, doivent le penser, l’écrire et le représenter en leurs propres termes »13.
La subjectivité féminine qu’elle propose est celle du sujet nomade. Le sujet nomade est une représentation théorétique qui fait référence à un style de pensée qui évoque des issues alternatives à la vision phallocentrique du sujet et à la logique dualiste dominante. Le sujet nomade doit s’entendre non en un style cartésien comme conscience transparente, autonome, coupée du corps et théologiquement dirigée, mais plutôt comme une identité fluide, changeante, sans frontières, ouverte à de nouvelles possibilités et avec un grand potentiel pour re-désigner et re-définir les choses. C’est de là que l’auteure utilise la métaphore de rizome pour le caractériser. Il est ainsi possible - comme une rizome est une racine qui ne pousse pas en une forme rectiligne mais de plusieurs côtés - de comprendre de même l’identité nomade comme une forme de résistance politique aux visions hégémoniques et excluantes de la subjectivité »14 .
Le projet nomade – conclut l’auteure – est une alliance très importante pour le féminisme parce qu’il permet de rompre avec la grille filtrante de l’identification masculine qu’imposait la théorie dominante, de se sortir de ses structurations excluantes et de reconcevoir l’unité du sujet sans oppositions dualistes, en reliant corps et mental par une série de transitions, de liens et de relations.
La parodie
Judith Butler définit l’identité féminine à partir du poststructuralisme de Foucault, de Derrida et des perspectives gays, lesbiennes et queer. Dans son ouvrage, Genres en dispute, elle part du présupposé que le terme ‘femme’ n’est pas univoque, qu’il n’a pas une signification unique, mais diverses acceptions, et arrive à cette conclusion, après s’être interrogée sur la corrélation existante entre sexe et genre et en avoir inféré que – contrairement à ce qu’affirme la position naturaliste – le sexe est une construction culturelle autant que le genre.
Partant de la conception foucaldienne, selon laquelle le pouvoir n’est pas seulement répressif mais qu’il est aussi constructif, créateur de subjectivités, elle pense que le genre est une construction, que le genre est performatif, et dit, qu’il n’est pas une manifestation naturelle du sujet mais que le genre comme performance construit le sujet, construit son identité sexuelle par la médiation d’une série de pratiques discursives et de normes régulatives qui l’inscrivent dans le sexuel binaire dominant.
Mais cette construction a, du début à la fin, une forme continue, par le moyen de la répétition d’une conjonction d’actions qui fait paraître ce sujet comme une entité apparemment stable.
C’est alors, en ces répétitions que Butler voit une possibilité de créer un projet de résistance, de re/signification et de création de nouvelles identités, nouveaux genres, nouvelles représentations ou nouvelles pratiques sociales à la pointe des identités, des genres, représentations, pratiques discursives ou sociales qui créeront un sujet, parce que même si le sujet est construit et est soumis aux dispositifs de pouvoir ( l’idéologie, une forme particulière de domination, etc.) il est aussi certain que nous sommes sujets avec la capacité d’agir, de subvertir les règles du jeu15. Butler affirme que le caractère performatif de l'identité sexuelle est encore plus clair dans le phénomène de la drag 16 dans lequel s'opère une dénaturalisation entre sexe masculin/genre masculin ou sexe féminin/genre féminin, résultant évidemment du fait que l'identité sexuelle n'est rien d'autre qu'une mascarade.
Pour elle, la drag est subversive parce que par sa conduite peut être exprimé le fait que l’hétérosexualité aussi bien que la division des genres n’a rien à voir avec une supposée essence ou nature, et dire un être qui préexiste à nos conduites et à leurs déterminations a priori. Elle est aussi subversive parce qu’elle nous ouvre la possibilité de construire de nouvelles identités non préfigurées, non stabilisées, non polarisées, mais multiples et diverses.
Conclusion
Pour terminer, nous pouvons conclure que ces auteures divergent entre elles, mais ont également bien des points communs. Elles s’accordent pour rejeter le caractère binaire et hiérarchisé du genre ou la conception victimiste de la femme. Elles convergent encore dans la reconnaissance d’une diversité ou d’une hétérogénéité existante entre les femmes, et dans cette diversité existante en chacune d’elles aussi, comme sujets non unifiés, mais multiples et fragmentés.
Et, surtout, elles se rejoignent pour dire la nécessité de redéfinir l’identité et la subjectivité féminine jusqu’au point que nous pouvons affirmer, parodiant Fina Birulés, qu’il y a en elles, une ‘aspiration à la subjectivité’, qu’il est un temps de la subjectivité dans lequel « la tâche créative consiste à apprendre à vivre avec la contingence et l’ambiguïté irréductibles, sans les ignorer ni s’y soumettre docilement »17.
1. Braidotti, R,’’La diferencia sexual como proyecto político nómade’’, R. Braidotti, Sujetos Nómades, Paidós, Barcelona, 2000, p.185.
2. Butler, J., El Género en disputa. El feminismo y la subversión de la identidad. Paidós, Barcelona, 2001, p. 35.
3. Segarra, M., ‘’Construyendo nuevas masculinidades : Una introducción’’, Segarra, M., Carabí., A., (eds), Nuevas masculinidades, Icaria, Barcelona, 2000, p.15-27.
4. Wolf, V., Una habitación propria. Seix Barral, Barcelona, 2001, p. 50-51.
5. Irigaray, L., Amo a ti. Bosquejo de una felicidad en la historia, Icaria, Barcelona, 1994, p.36.
6. Braidotti, R.,’’La diferencia sexual como proyecto político nómade’’, en op.cit., p.170.
7. Irigaray, L., Amo a ti, op.cit., p.73.
8. O Corpo feminino é tan importante en Luce Irigaray que foi tachada de bioloxicista e esencialista, acusacións que ela rexeita, pois non concibe o corpo segundo a oposición espíritu/corpo, senón que agora o corpo non só se reproduce, non só sinte, senón que pensa e escribe.
9. Irigaray, L., Yo, tú, nosotras. Cátedra, Madrid, 1992, p.43.
10. Irigaray, L., El cuerpo a cuerpo con la madre. El otro género de la naturaleza. Otro modo de sentir. La Sal. Barcelona, p. 42.
11. Ibid.
12. Braidotti, R.,’’órganos sin cuerpos’’, Sujetos nómades, op. cit., p.104.
13. Braidotti, R.,’’Devenires discontínuos. Deleuze y el devenir mujer’’, Sujetos nómades, op.cit., p.141.
14. Braidotti, R., ‘Introducción : Por la senda del nomadismo’, Sujetos nómades, op.cit., p.59.
15. Butler, J., Mecanismos psiquicos del poder. Teorias sobre la sujéción. Cátedra, Madrid, 2001.
16. Mirizio, A., « Del carnaval al drag : la extraña relación entre masculinidad y travestismo » Segarra, M., e Carabí, A.,(eds), Nuevas Masculinidades, op.cit. p.133-150.Ver tamén Azpeitia,M.,’’Viejas y nuevas metáforas : Feminismo y filosofía a vueltas con el cuerpo’’ Azpeitia,M. e outras (eds), Piel que habla.Viaje a través de los cuerpos femeninos. Icaria, Barcelona, 2000, p. 133-150.
17. Birulés, F., « Del sujeto a la subjectividad », en Cruz,M. (comp.), Tiempo de subjetividad. Paidós, Barcelona, 1996, p. 228.
2.
Le tango argentin comme langage spirituel transculturel :
rêve d’une vie meilleure en situations de migration et d’ambiguïtés de genre
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Heike WALZ , Théologienne (Argentine).
Traduction Michèle Bolli, théologienne (CH).
« Qué buena fe… !»
Que Dios me ha dao.
« Y para qué ?...
Me han estafao.
Estoy más sola que un buzón en la esquina,
Más aplastada que una sardina…
« Decíme, ché !... « De qué sirvió ?...
La buena fe que Dios me dio. »
Eladia Blázquez (1931-2005) [1]
La danse et la théologie – une paire exceptionnelle ? [2] Nous connaissions la danse de la prophétesse Miryam et celle du roi David devant Dieu, mais la « danse autour du veau » s’inscrit dans la mémoire judéo-chrétienne comme symbole de l’idolâtrie [3]. Des connotations positives et négatives se rencontrent au sujet de la danse dans les textes bibliques, c’est pourquoi la danse a toujours des dimensions théologiques.
Dans l’histoire des religions, danse et religion sont étroitement en relation, spécialement dans les rites de passage [4] Nos ancêtres (hommes et femmes) n’aimaient pas enlever aux parties du corps leur dimension religieuse [5]. Dans l’histoire de l’Eglise d’Occident la danse fut déplacée vers les marges [6] Fréquemment on a dit dans les églises: « Les chrétiens ne dansent pas ! ». Serait-ce que la danse apporte désordre et mobilisation à travers le corps, le contacte, l’extase, l’érotisme et le rythme ? Serait-ce que de nos jours la danse est plutôt considéré comme activité culturelle ou sportive ?
Cependant les théologies féministes ont été expérimenté comme formes de « danse liturgique », « danse sacrée » et mouvements du corps dans les liturgies féministes dès le commencement. La danse fut un élément en point de mire dans la liturgie corporelle des théologies féministes, et de cette manière une contribution au body turn, (vuelta al cuerpo) et au perforative turn (giro performativo) dans les études liturgiques en général [7]. Depuis de nombreuses années des réflexions sur la relation entre danse et théologie existent [8].
Ma réflexion sur la contribution de la danse aux nouveaux langages théologiques arrive dans ce contexte. De plus, c’est un thème biographique lié à mon travail théologique interculturel. Je ne suis pas une danseuse professionnelle, mais danser, pour moi, signifie joie, sortir de moments difficiles et s’ouvrir à la vie par de nouveaux chemins. Ce fut aussi un remède et une forme de résistance à la souffrance. Quand j’avais vingt-cinq ans je dansais de la « danse moderne ». Il arriva que je souffris d’arthrose au pied gauche. Au milieu de traitements inutiles et d’une opération vaine, une femme en Suisse me recommanda de danser « le tango argentin ». Cela m’aida à trouver un meilleur équilibre, tant dans la réalité sensible que dans le sentir métaphorique. Dans le tango, la danseuse doit se maintenir en son axe. Durant les années où je vivais à Buenos Aires, j’ai exploré le monde et l’esprit du tango en Argentine, et aussi le monde de la poésie qui habite les textes du tango.
Lorsque je vivais en Allemagne, la vie me conduisit à Wuppertal, le siège principal du théâtre dansé de Pina Bausch (1940-2009), une grande chorégraphe de renommée internationale., Elle, et sa compagnie, m’impressionnèrent avec sa « danse à partir de l’expérience » [9]. En 2011, le film de Wim Wenders en mémoire de Pina Bausch: « Pina. Danse, danse, sinon nous serons perdus » sortit sur les écrans[10]. Dans cette ambiance de danse-théâtre de Pina Bausch j’ai connu la méthode de la « danse thérapeutique » [11] par une thérapeute. Cela me fascina d’expérimenter à quel point la danse a un effet libérateur pour exprimer des sentiments et des conflits en un bal improvisé. Le corps parle avec le mouvement et l’improvisation exprime tout ce qu’on ne peut dire avec les mots. Je compris la danse thérapie comme moyen pour exprimer l’indicible, dans ma situation: les expériences interculturelles [12]. En mon expérience, mouvoir le corps dans la danse fut aussi un langage spirituel pour présenter les doutes, les turbulences et les ambiguïtés face à Dieu, bien que cela ne fut-ce pas une danse sacrée dans une église.
De là vinrent mes questions au sujet des « nouveaux langages théologiques »: la danse du tango argentin pourrait-elle être comprise comme langage spirituel et interculturel ? Le tango argentin est connu comme « danse machiste », pourquoi des théologiennes féministes rencontrent-elles une magie profonde dans cette danse ? Comment peut-on interpréter les expériences avec cette danse dans la perspective de la théologie de genre ? De quelle manière pourrait-on dire que les expériences corporelles du tango argentin sont transcendantes ? De quelle manière la danse, et particulièrement le tango argentin, contribue-t-elle à une langage théologique dans la ligne de la théologie de la libération féministe qui joint la voix prophétique et la voix esthétique ?
L’esprit du tango argentin est l’improvisation. Bien que l’on puisse dire qu’à la base la danse consiste en une promenade de huit pas, chaque danse est différente. Danser le tango, dans le fond, ne signifie pas répéter des canevas préfabriqués, mais plutôt en créer quelques nouveaux inédits. Mes réflexions sont préliminaires et incomplètes, elles entendant aussi ouvrir le débat. J’invite à une « promenade réflexive » en cinq pas, ce qui reflète aussi que mon objectif prioritaire est le tango comme danse, bien que la musique et les mots sont aussi importants.
Un premier pas sera une réflexion au sujet du tango argentin comme « langage transculturel » du déracinement et de la migration (1). Un second pas sera de configurer l’hypothèse selon laquelle le tango argentin est un langage carnavalesque des ambiguïtés de genre (2). Le troisième pas sera d’explorer le tango argentin comme « langage spirituel » dans la liturgie (3). Dans le quatrième pas nous proposons d’interpréter la danse du tango argentin comme exemple de contact avec la transcendance (4) afin de clore la réflexion sur la contribution de la danse à la recherche d’un « langage théologique esthétique et de résistance » (5).
Le tango argentin comme « langage transcultural » du déracinement et de la migration – « résistance » face aux circonstances et aux normes.
Ya no sé si me quisieron, pero cuando quise mucho
me pasaron el serrucho… ‘Qué maldad !’
Cuando más necisitaba esa luz de ternura,
me dejaron bien a oscuras masticando soledad.
Yo lo mismo no escarmiento, si me engaňan ni miento,
pero a mí me hacen el cuento del amor y la amistad.
Por eso de cariňo, tengo secos los bolsillos…
y una marca en el orillo de gilita nacional. [13]
Le tango argentin naquit au XIXe s. comme une voix de la migration dans le port de Buenos Aires. Plus tard au XXe s., le tango dépassa les frontières sociales, culturelles et nationales. Il se transforma en une danse de salon et de globalisation ; se popularisa au Japon, en Finlande, Espagne, Allemagne, etc. Pour cette raison je propose l’idée que le tango est un « langage transculturel » [14] du déracinement et du brassage des cultures qui exprime la résistance face aux circonstances et se rit des normes.
La ligne des études du tango de Gabriele Klein interprète le tango argentin comme une translation transculturelle [15]. La naissance du tango fut une translation transculturelle: «Le tango est une musique bâtarde qui naquit de la rencontre insensée dans un port de gens d’origine et de culture différentes qui se mélangèrent et produisirent ce qui dans le futur se nommerait tango » [16]. Beaucoup de personnes d’Italie, d’Espagne et de Pologne arrivèrent dans le port de Buenos Aires durant la décade 1880. Il y avait peu de femmes parmi elles, car ce fut principalement une immigration d’hommes cherchant du travail. Ils se heurtèrent à une réalité très différente que celle qu’ils avaient espéré. Au lieu de recevoir de la terre comme on leur avait promis, ils durent rester dans les quartiers pauvres de la banlieue de Buenos Aires. Par contre l’oligarchie avait ses résidences au centre de la ville. Les quartiers des immigrants étaient considérés comme des lieux de marginaux et de délinquants ; en bref « un enfer ». Pour l’oligarchie le tango fut un symbole de la prostitution et de la décadence de la morale bourgeoise, comprise depuis la perspective du blanc européen [17].
Comment fut la situation sociale des femmes immigrantes ? Nombre d’entre elles se retrouvèrent dans une situation difficile, car elles ne pouvaient vivre des revenus de leur travail. Très souvent la prostitution fut la seule manière de survivre. En plus de tout, s’établit la traite internationale des femmes dans les années 1920. Il existe une vaste documentation à ce sujet comme le suggèrent les réseaux de proxénètes qui attirèrent les femmes de France et de Pologne à Buenos Aires. De nos jours, lisant les informations sur la traite, l’exploitation et l’esclavage des femmes, on repère de nombreux parallèles avec la traite internationale de femmes [18].
Ces conflits sociaux furent mêlés aux conflits entre les différentes cultures, ce qui explique le caractère hybride [19] du tango argentin: en lui se rencontrent la tradition créole (le mélange entre la population indigène et espagnole), la tradition noire, et les traditions européennes. Le tango naquit comme une fusion d’au moins quatre styles de musique et de rythmes: premièrement la musique locale du candombe, un rythme et une danse africaine qui se reconnaît jusqu’à aujourd’hui en Uruguay et en Argentine ; deuxièmement la milonga (la version urbaine de la danse rurale payada) de la région de Rio del Plata ; troisièmement la habanera, une danse afro-cubaine ; quatrièmement le tango andalou d’Espagne et des éléments de l’Italie [20]20.
L’étymologie du terme « tango » n’est pas claire, il existe de nombreuses théories à ce sujet. Les danses de la communauté noire furent désignées du terme « tango ». Au minimum, il paraît vérifié que le mot « tango » a des racines africaines et que les danses de la communauté noire furent ainsi désignées. Mais aussi que furent nommés « tangos » les lieux d’où les personnes d’origine africaine mettaient en commun leur argent pour racheter les femmes et hommes esclaves à Buenos Aires et Montevideo au début du XIXe s. A la même époque il existait une danse qui se nommait tangoandalouz, tanguillo ou tango dans le sud de l’Espagne [21].
Le tango de Rio del Plata est un reflet de la lutte pour l‘identité culturelle. Jusqu’à aujourd’hui les discussions se poursuivent pour savoir si le tango naquit en Argentine ou en Uruguay. De plus, le tango représente plutôt le centre métropolitain de Buenos Aires que la culture et la musique de l’intérieur de l’Argentine [22]. En tous cas, le tango apparut dans la région de Rio de la Plata comme une subculture de la classe défavorisée et comme un mélange interculturel. Dans la perspective des études interculturelles de la migration on peut dire, comme le suggère l’anthropologue Marianne Nürnberger qu’en situations de migration, la danse peut servir de maillon intermédiaire et de dialogue entre la culture d’origine et la nouvelle culture [23]. De cette manière, le tango argentin peut être interprété comme une stratégie artistique des groupes d’immigrants pour travailler les conflits interculturels.
Regardant cette histoire des origines du tango, on comprend mieux pour quoi Enrique Santos Discépolo (1901-1951) – un des plus grands poètes tangeros de référence - disait du tango « Une pensée triste qui danse ». Aujourd’hui, c’est une phrase connue dans le monde entier [24]
« Le tango représente une voix mélancolique, mais aussi une rébellion contre les circonstances. Bien que les mots du tango sachent très bien conter des histoires individuelles d’amour et de désamour, le tango se déploie encore comme « une subversion des normes et des valeurs » [25]. Depuis la première époque [26], il existe des paroles de tango qui dénoncent les injustices sociales. Par exemple: « A bas l’usure, et à bas les abus, vive le droit et vive le droit des pauvres aussi » [27].
Assurément on peut se questionner pour savoir si le tango argentin a maintenu jusqu’à aujourd’hui son caractère original de résistance face aux circonstances et aux normes. A partir des années 20 du siècle passé, le tango argentin expérimente une translation transculturelle. Lorsqu’il eut du succès à Paris il se transforma en « tango de salon » de la classe aisée à Buenos Aires [28]. Au XXe s. le tango argentin fait l’expérience d’une autre « translation culturelle » car il migra en d’autres lieux comme le Japon, la Finlande, l’Espagne, la France et l’Allemagne [29]. Pour cela on parle du « tango porteňo » à Buenos Aires et du « tango nómade » lorsqu’il s’établit dans les métropoles, au niveau global [30]. Le tango rioplatense se transforme aussi en une sorte de danse de la globalisation dans le monde. Selon mon observation, actuellement, le tango est plutôt un phénomène cosmopolite de la classe moyenne. En 2009 le tango rioplatense fut inscrit sur la « Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité » [31].
Comme d’autres types d’art et de musique, le tango argentin souffrit de moments d’instrumentalisations [32]. Néanmoins le tango rioplatense a maintenu dans ses paroles son caractère de « résistance » contre les circonstances et les normes hégémoniques. Dans la perspective théologique, il existe des travaux qui observent des ressemblances entre les paroles du tango et les psaumes de lamentation [33]. Ce n’est pas fortuit qu’il existe de nombreuses versions des « plaintes » de bandonéon, l’instrument caractéristique de la musique du tango. Pour en donner un exemple: Enrique Santos Discépolo, connu comme voix critique par le tango, dit dans la parole du tango: « Désenchanté » : la vie est la tombe des songes, avec des croisements qui ouvrent, questionnent… Pour quoi ? » [34].
Le tango « Tormenta » se lit comme un psaume, un cri de désespoir adressé à Dieu
Aullando entre relámpagos,
perdido en la tormenta
de mi noche interminable, Dios !
Busco tu nombre…
No quiero que tu rayo me enceguezca entre el horror,
porque preciso luz
para seguir…
‘Lo que aprendí de tu mano
no sirve para vivir ?
Yo siento que mi fe se tambalea,
Que la gente mala vive’Dios !
Mejor que yo…
Si la vida es el infierno
Y el honrado vive entre lágrimas,
‘cuál es el bien…
del que lucha en nombre tuyo,
limpio, puro ?...’para qué ?
Si hoy la infamia da el sendero
Y el amor mata en tu nombre,
‘Dios ! Lo que has besado…
el seguirte es dar ventaja
y el amarte es sucumbir al mal. [35]
Il existe de nombreux exemples de paroles de tango apparentées aux psaumes de lamentation de la Bible. Pour cette raison, j’interprète le tango argentin comme langage esthétique et spirituel qui servit à supporter les conflits interculturels du déracinement et de la migration. En plus de tout, le tango rioplatense est une voix critique face aux crises sociales et aux normes hégémoniques. Reste la question de savoir comment les voix de femmes s’articulent au tango.
Le tango argentin comme « langage carnavalesque » des ambiguïtés dans les relations de genre
Por supuesto el tango es machista,
Como baile y como lettra.
(…) él es tan machista como el resto de la sociedad
Cristina Banegas (nacida 1946) [36]
Si le tango est machiste, comment se fait-il que tant de femmes de classe moyenne – supposées être des femmes « modernes » et « émancipées » – soient attirées par le tango argentin aujourd’hui, y inclus quelques théologiennes féministes ? [37]. Cela a-t-il à voir avec le contact corporel, l’embrassement et l’érotisme ? Ou est-ce une contradiction totale ?
Les milongas et présentations de tango montrent à de nombreuses reprises une performance [38] dans la mise en oeuvre de stéréotypes féminins et masculins renforcés généralement sur- activés. C’est comme si le tango se moquait d’elles. Il apparaît aussi comme un jeu avec les stéréotypes de genre quand se réalise le undoing gender [39], dans le cas où les femmes guident leurs partenaires de tango (qui peut être femme ou homme) et quand les hommes se laissent emmener par leur partenaire (homme ou femme).
Il ne faut pas sous-estimer le fait que la « combinaison entre passion et jeu est aussi magique », comme le disait la sociologue allemande Paula-Irene Villa. Il se pourrait que le tango argentin séduise par son caractère de jeu passionnel et par sa réputation érotique et exotique [40]. De plus, pour le tango qui est le plus caractéristique de « l’homme portuaire » de Buenos Aires [41]41, cet exotisme est discutable. De la perspective postcoloniale, la construction de « l’argentin » comme passionné, exotique et érotique, est mise en question, comme suggère Marta Savigliano [42] Nous sommes en danger de reproduire les constructions néocoloniales dans le monde globalisé du Nord. Les aspects commerciaux du tango s’y ajoutent aussi. Actuellement, il y a de nombreuses femmes européennes blanches qui ont assez de pouvoir économique pour s’acheter un « tangero argentin » sans emploi stable. Il existe de nombreuses ambiguïtés de genre.
Je propose ici de réfléchir à l’idée que le tango argentin est magique pour les femmes et les théologiennes féministes parce qu’il est un langage carnavalesque se jouant des ambiguïtés dans les relations de genre. Mon argumentation utilise le « triple regard» de la philosophe et psychothérapeute Magali Saikin de Buenos Aires sur les dimensions de tango et genre : premièrement « l’histoire officielle » des femmes et des hommes ; deuxièmement, « l’histoire non officielle » des relations lesbiennes et gays, et finalement, sur « le tango dans le carnaval » [43]. Saikin montre que les relations de genre dans le tango argentin sont plus complètes que ce que j’avais pensé jusque-là [44].
Selon l’histoire officielle l’antagonisme entre homme et femme imprègne toutes les dimensions du tango. Cet antagonisme est caractérisé par une relation hiérarchique: l’homme a la position privilégiée et dominante. Je me concentre ici sur le tango comme danse [45]. La position dominante de l’homme se justifie par une « différence ontologique » entre femme et homme. Dans les études de genre nous connaissons très bien cet « essentialisme »: l’homme est naturalisé comme « créateur actif et transcendant » du tango, pendant que la femme se comporte comme une « materia passiva ». L’homme « engendre (el tango) sur le corps de la femme » [46].
Saikin distingue deux étapes. Au début, le tango des immigrants marginalisés dans le port montre explicitement la domination de l’homme, pour justifier la violence physique et sexuelle contre les femmes [47]. A partir du « tango de salon » dans les années 1920, le pouvoir des hommes sur les femmes exprima très bien la crainte de l’émancipation et du féminisme émergent. Il en résulta qu’il se produisit une juxtaposition de « la femme passive et sans sexe », respectivement la mère, contre « la femme active et sexuée », respectivement la prostituée. Il est clair que cette opposition binaire n’existe pas dans la vie réelle des femmes. Même les poètes du tango, critiques de la société, comme Enrique S. Discépolo, n’ont pas pris en compte le fait qu’ils furent complices de ce mépris des femmes. Sans doute les femmes étaient réduites à être « les Autres » des hommes, leurs voix et leurs perceptions étaient silencieuses [48]. Néanmoins, tardivement, à partir de la seconde vague féministe les perspectives changent [49].
En suivant l’histoire non officielle on peut récupérer l’histoire homosexuelle niée et silencieuse. Il est intéressant que la lecture des mythes du tango montre une ambiguïté sexuelle reflétée aussi dans le langage du lunfardo, un langage marginal et sous-jacent de Buenos Aires. Ces dimensions ne sont pas suffisamment étudiées. Cependant, on peut observer comment le langage machiste et distant des hommes gays fait face aux femmes, les servant pour dissimuler leur désir inexistant pour elles. Les femmes lesbiennes peuvent s’habiller en homme et assumer les comportements masculins. De cette manière, la « mascarade sexuelle » dans le tango sert de protection aux minorités sexuelles.
Résultat logique le carnaval dure comme la fête du tango par excellence. Le carnaval invite à ignorer les normes et à retourner les hiérarchies [50]. S’en servir aussi pour inverser les conduites de genre (doing gender) tant dans la poésie du tango que dans la danse [51]51. Dans le carnaval, le déguisement permet d’être « une autre personne », et aussi de « changer de genre ». Il y a eu, dans les années 20, des chanteuses professionnelles qui présentèrent des tangos avec des vêtements d’hommes (cross dressing). Par exemple Azucena Maizani. Et aussi, des chanteurs qui interprétèrent des tangos avec des paroles se référant à une perspective féminine [52]. Le caractère carnavalesque du tango se reflète dans les mots de ce tango:
<…> Y siempre es carnaval…
Van cayendo serpentinas
Unas gruesas. Otras finas
Que nos hacen tambalear.
Y cuando en tu disfraz
La careta queda ausente
En tu cara de inocente
‘ todo el aňo es carnaval !<…> [53]
Autre aspect du caractère carnavalesque du tango, celui du « tango queer » [54]. Durant ces dernières années, plusieurs sites de tango queer ont surgi ; c’est une invitation à expérimenter le changement de rôles et de genre. Des femmes dansent avec des femmes et des hommes avec des hommes. Les paires de tango peuvent changer les rôles de guide et de suivante à bien plaire, même au milieu de la danse [55]. Ils congédient la règle selon laquelle l’homme doit guider et la femme suivre. Chaque personne peut choisir un rôle ou danser les deux. Dans le tango queer les femmes apprennent le langage corporel de guider son / sa partenaire et de mettre en oeuvre la chorégraphie improvisée du tango. Les hommes, en échange, apprennent à se laisser porter et à intensifier la perception des mouvements de leur partenaire ; ou encore apprennent des mouvements plus délicats [56]. De cette manière, aussi bien les femmes que les hommes amplifient leurs compétences en ce qui concerne la danse.
Si le tango rioplatense naquit réellement historiquement dans un cadre où des hommes dansaient avec des hommes, on ne le sait pas exactement. De toutes manières, le tango queer fait allusion à ce récit. Toutes les personnes qui dansent avec une partenaire du même sexe ne vivent pas nécessairement des relations homosexuelles. Certaines femmes profitent d’intensifier leur sensibilité pour les deus attitudes – guider et se laisser guider – en dansant le tango. D’autres refusent de se laisser frustrer davantage par la faute des hommes dans la milonga et apprennent le rôle de guide [57]. En 2003, une étude de psychologie fut faite sur l’effet du tango sur le genre chez les femmes et les hommes en Allemagne. Le résultat est surprenant: il semble que les femmes qui dansent le tango développent davantage leur aspect « masculin » soit parce qu’elles apprennent le rôle de guide ou pour ne plus se limiter au rôle très passif de se laisser conduire [58].
Finalement, les recherches ont souligné que la performance de la masculinité dans le monde du tango est simplement une performance irritante. Au moins, dans la perspective bourgeoise, les tangueros paraissent être comme « machos non viriles » parce que danser et la masculinité sont opposés. De plus, en jouant avec humour, les tangueros peuvent mettre en scène un « machisme comme une astuce » [59].
Cette étude de la performance de genre dans le tango n’est pas exhaustive, mais mon hypothèse est que le caractère carnavalesque du tango rioplatense est un élément de son attraction pour les femmes aujourd’hui. De ce point de vue, il y a moins de contradictions à voir tant de femmes émancipées être fascinées, actuellement, par le tango. Le tango argentin paraît être une posture de la mise en scène des stéréotypes féminins et masculins, et à sa manière aussi une moquerie des rôles de genre. De cette manière la scène du tango reflète toutes les ambiguïtés de genre.
Dans cette perspective, le tango comporte des facettes machistes, mais il sera aussi un camouflage, une parodie du machisme. De toutes manières, le tango comporte des aspects humoristiques, et conduit à des expériences corporelles plus qu’à celles des stéréotypes de genre ; il est un langage esthétique à caractère très ironique, humoristique, et parfois aussi de résistance. Maintenant nous allons explorer le tango argentin comme langage spirituel dans la liturgie.
Le tango argentin comme « langage spirituel » dans le culte : rêve d’une vie meilleure
Y me dan por la cabeza…y al momento ni me acuerdo
Sigo mansa sigo lerda, siempre igual.
Convencida y obstinada en el bien y la nobleza.
‘Y me dan por la cabeza, y me vuelven a dar !
Y no sé si esto es sublime, yo no sé si soy una tonta,
Siempre lista, siempre pronta a entregarme a los demás…
A confiar en los amigos, a creer en los amores,
Y en los peces de colores ‘ y en la Paz Universal ! [60]
A travers trois exemples en Allemagne, en Argentine et en Uruguay, je veux illustrer comment le tango argentin a été expérimenté comme « danse liturgique » dans les cultes, bien que originellement le tango – en termes propres – ne soit pas une « danse religieuse » [61]. Partant de l’idée de base que danser tango argentin peut être une expérience spirituelle quand la personne le perçoit ainsi et l’interprète de cette manière [62]62.
Premier exemple: Colonia (Allemagne).
J’ai participé pour la première fois en 2007 à un « culte milonga », ainsi nommé. Il se réalisait un culte milonga dans une congrégation à Colonia [63]63. J’étais arrivée de Buenos Aires en Allemagne et restai surprise, en ce lieu, par la manière dont se priait, se chantait et se dansait le tango argentin, en cette église. En quel sens le tango argentin comme « danse séculière » pouvait-il être un langage spirituel ?
Les femmes et les hommes de l’équipe organisatrice écrivirent sur la page internet: « Dans le tango se trouvent réuni tout ce qui constitue la vie. Désir, solitude, passion, érotisme, colère. C’est une danse entre domination et soumission, désir et refus. Le tango est par dessus tout le rêve dansé d’une vie meilleure » [64]. Le tango est toujours actuel quand surgissent des situations de crises économiques ou sociales ; il est un miroir de l’incertitude et de la fragilité d’un monde qui change rapidement. Le tango dramatise les attentes frustrantes et le désir d’un lieu où on se sente à la maison » [65].. Jusqu’à maintenant les cultes milonga à Cologne expriment les crises sociales à travers le tango argentin: entre autres, la situation des immigrants d’Afrique, la pauvreté des familles et enfants en Allemagne, les relations de genre, la lutte des personnes sans papier et l’asile dans l’église. De cette manière, le tango peut être compris comme « langage spirituel » du désir d’une vie meilleure, parce que le lieu du tango argentin est simplement la crise. Le message théologique transmis dans les cultes milonga de Cologne m’impressionna: chaque personne est digne pour l’amour de Dieu. Dans la danse et la musique du tango se transmettait ce rêve d’une vie digne.
Second exemple : Dortmund (Allemagne).
Deux pasteures à Dortmund [66] ouvrirent les portes au tango argentin. Dans leur prédication lors du premier culte milonga en 2007 la pasteure Barbara von Bremen souligna que le tango signifie « marcher, se promener ». Elle fit le rapprochement entre le tango et le motif des marcheurs migrants de la tradition biblique: Sara et Abraham furent appelés à sortir de leur lieu et à marcher. Dans l’histoire du christianisme les chemins spirituels jouèrent un rôle important, tant par les processions que les pèlerinages, par exemple le Chemin de Saint Jacques de Compostelle. Les pèlerins, femmes et hommes, ont orienté leur objectif sur le chemin commun et non sur l’arrivée. Alors, Barbara von Bremen rencontra des parallèles entre la marche des pèlerins et le tango: elle proposa de se concentrer sur chaque pas, de s’arrêter, de sentir l’autre, homme ou femme, seul/e. Il n’y avait pas de passage équivoque, chaque pas prenait sa valeur et ne pouvait être répété car le chemin est à suivre spontanément, en improvisant, sans connaître la destination [67]. Ainsi le tango peut être entendu comme métaphore des chemins de pèlerins et de migrants.
Troisième exemple: Argentine et Uruguay
Dans ses lieux d’origine, en Argentine et Uruguay, à ma connaissance, c’est principalement l’Eglise Méthodiste qui inscrivit la musique du tango dans ses liturgies. Il y a quelques années, se chantaient des tangos composés spécifiquement pour des célébrations liturgiques. Le CD « Tenemos esperanza: Tangos para apostar la vida » des musiciens Pablo Sosa et Homèro Perera, a gagné le Grammy latino comme le meilleur album chrétien en espagnol [68]. Les tangos sont chantés par la cantatrice Noelia. El Obispo Federico Pagura, un militant des droits humains et poète, dit au sujet de ce disque: « Je suis certain qu’il sera porteur de vie et d’espérance pour une génération en de nombreux sens désorientée, mais aussi avec des secteurs significatifs se mettant debout et disposés à se compromettre pour cet autre monde possible pour celui que réclame avec insistance toute l’Amérique latine et les Caraïbes » [69].
De cette manière, le langage spirituel du tango est interprété d’une autre manière comme désir d’une vie meilleure. « Un autre monde est possible », selon la devise du Forum Social Mondial et des théologiennes et théologiens œcuméniques de la libération en Amérique Latine [70].
Cette interprétation du tango argentin comme rêve d’une vie digne et porteuse de vie et d’espérance dans les crises sociales et les chemins de migration, correspond certainement à ses origines. De cette manière le tango peut être une source pour la théologie, en particulier pour la théologie latine queer, comme le suggère Marcella Althaus-Reid [71]. Cependant, comment peut-on penser le corporel et le transcendant dans la danse du tango ?
El tango argentin comme « langage corporel » : et contact de la transcendance
El tango es la revolución del abrazo.
Milena Plebs, tanguera argentina [72]
Au fond le tango pourrait être entendu comme « une accolade dansée ». Ce n’est pas une surprise. Comme nous l’avons vu, la danse de tango naquit dans une situation de solitude et de désir de chaleur humaine. Du reste, l’accolade est une forme de communication affectueuse et quotidienne en Argentine [73]. Par l’accolade les danseuses et les danseurs communiquent et ressentent la présence corporelle de l’autre personne, se touchent mutuellement, cœur à cœur, et parfois joue contre joue. La personne qui conduit le fait avec son langage corporel du corps entier. La personne qui se laisse emmener reçoit les impulsions corporelles de l’autre. Les deux personnes peuvent sentir le langage corporel de l’autre corps. Il n’est pas besoin de paroles pour parler, les corps ont la parole. Une perception fine respectueuse et affectueuse de l’autre corps, est requise. Parfois, la communication « corps à corps » ne fonctionne pas. La paire ne s’entend pas, et le tango laisse une sensation bizarre – comme dans la vie réelle quand une communication interpersonnelle rate. Il peut arriver aussi que la communication entre les corps emmène vers une sensation d’être dans un autre monde. C’est une sensation extatique, comme en flow, tout est fluide et conduit vers une autre dimension de la vie. Ces expériences peuvent-elles s’interpréter comme transcendantes dans une perspective théologique ?
Ma réflexion théologique s’appuie sur les idées de la théologienne portoricaine Mayra Rivera sur « El toque de la transcendencia » [74]. Plutôt que de comprendre la transcendance comme Dieu dans les hauteurs, séparé des êtres humains, comme être indépendant, immatériel et supérieur, Rivera déploie la vision d’une « transcendance relationnelle »[75]. Cependant, Rivera garde l’idée que Dieu est Autre, masculin et féminin, mais au-delà de l’accessibilité et de l’appropriation par l’humain, mais non hors de contact. Alors, Rivera parle d’ « une transcendance dans la chair des autres que nous contactons (touchons), mais que jamais nous de pourrons saisir » [76].
Rivera reprend la pensée féministe de Luce Irigaray selon laquelle Dieu est tout à fait un/une Autre personne, en même temps les êtres humains le sont aussi. L’autre personne demeure « irréductiblement différente » [77]. Rivera comprend la rencontre interpersonnelle non seulement comme « rencontre face à face », mais comme « rencontre corps à corps » (body-to-body encounter). » Au commencement fut le contact » [78] comme la vie débutant dans le ventre de la mère.
Je parle de la « transcendance dans la chair » incluant le fait que la rencontre avec la transcendance puisse être corporelle, érotique et sexuelle. Rivera propose une vision de la transcendance qui pourrait être présente dans le contact corporel de l’Autre, masculin ou féminin, dans la danse du tango, inclus dans le contact érotique et sexuelle. Parfois le « contact corps à corps » de la danse pourra être l’expérience du « contact avec la transcendance », mais sans chercher à s’approprier le / la partenaire de danse, ou la transcendance. De cette façon, le tango est un exemple de spiritualité avec le corps. La transcendance divine pourra s’expérimenter dans la rencontre corps à corps de la danse de tango.
Ce qui est intéressant, c’est que l’argument théologique de Rivera ne se résiste pas ici. Il ne montre pas suffisamment comment il relie la transcendance divine à la transcendance interpersonnelle. Elle a pris aussi en compte l’éthico-politique: les corps individuels sont
« corps sociaux » [79]. La transcendance en la chair de l’Autre, homme ou femme, implique des aspects éthiques. Rivera rejette la séparation entre théologie et éthique, mais articule la théologie de la libération et la théologie féministe à la critique du capitalisme dans le monde globalisé et les théories postcoloniales. La vision d’une transcendance sans corps forme une part de la pensée occidentale qui cherche à obtenir pouvoir et contrôle sur les êtres humains, leur force de travail et leur terre.
La mention de cette relation entre le contact avec la transcendance et l’éthico-politique, me conduit à la dernière question: comment la danse peut-elle aider à développer un nouveau langage corporel- esthétique et de résistance ?
Vers un langage théologique corporel-esthétique et de résistance
Je considère que la danse de tango pourrait être un exemple de « langage esthétique » qui sera en outre un « langage de résistance ». Quant à la théologie et à l’esthétique, je me réfère à deux théologiennes féministes de la libération, La théologienne allemande Dorothée Sölle explique que la relation entre théologie et art consiste en un proceso dinámico. L’art montre que « le monde » espère son salut. L’art relie à une réalité que le langage religieux a promise [80]80. On peut en voir quelque trace dans le tango argentin: le désir d’un monde meilleur.
Selon la théologienne cubaine Michelle Gonzalez, la forme adéquate de la théologie est le
« langage esthétique » [81]. Ici Gonzalez se réfère à l’écrivaine et théologienne mexicaine Sor Juana Inès de la Cruz del siglo XVIIe (1651-1695) [82]. De plus, Gonzalez relie l’esthétique et l’éthique. Gonzalez observe comment se mêle la beauté et la justice dans les œuvres théâtrales de Sor Juana Inès de la Cruz. Sor Juana se dédie à l’art sans se poser les questions de la justice sociale et les problèmes interculturels entre les blancs espagnols, les créoles et les indigènes. Je rejoins Michelle Gonzalez pour qui ce brassage entre esthétique et compromis éthique pourrait être une source pour les nouveaux langages de la théologie de la libération dans la perspective du genre, aujourd’hui [83].
Je considère que l’on peut rencontrer deux dimensions – corporelle-esthétique et de résistance – dans le tango. Pour cela des moments existent dans lesquels la danse de tango apporte des expériences esthétiques [84] pour des situations de crise. Ce sont des moments dans lesquels l’être utile ou fonctionnant sur le marché, ou servant d’autres intérêts, est interrompu [85]. Danser le tango donne la sensation que l’on a pas à se poser de questions pour suivre ce qui se fait mais que c’est plutôt la magie du dialogue corporel avec l’autre (masculin ou féminin) qui a sa sensibilité en elle-même. C’est un moment précieux et valorisant pour se réjouir. C’est un moment dans lequel les hiérarchies de genre et les ambiguïtés semblent relativisées.
Cette expérience esthétique implique un « moment d’interruption ». S’interrompent le fonctionnel, le quotidien, la souffrance, la solitude, le déracinement, la lutte contre les ambiguïtés de genre. Ici, il y a le moment libérateur, la respiration, le soulagement. Tout à coup s’expérimente un moment de plénitude. C’est un moment de grâce non cherché et quelque chose qui n’est de toute évidence pas à ma disposition, on ne peut le « créer ».
Depuis la perspective protestante, on peut dire que se rencontre un « moment de grâce », une « expérience de liberté ». Je reste libre de mes intentions, mes objectifs, mes caprices, mes limites et mes héritages. En échange je suis fascinée par ce que je vais recevoir en ce moment. Là pourra se cacher une dimension transcendante. Le tango comme embrassement dansé sert cette expérience de grâce par le corps, par l’embrassement de l’autre (masculin ou féminin). Si Dieu est l’origine de cette grâce, de cette plénitude, on pourra ressentir un « contact » avec Dieu dans cet embrassement, le contactcorporel et sensuel du tango transmet le goût anticipé de la tendre ruaj, de l’esprit de Dieu, un goût de la dignité en laquelle Dieu crée (croit) toutes les femmes et les hommes [86].
Fréquemment, cette expérience corporelle-spirituelle nage contre le courant de la vie moderne, individualisée, autonome, et souvent deshumanisante. Mais elle peut exprimer cette autre réalité du contact corporel, de l’accolade, de la caresse, et de la dignité transmise tant par d’autres êtres humains que par la ruaj de Dieu. Je considère que depuis ses origines le tango rioplatense reflète de diverses manières cette voix à contre-courant. Comme nous l’avons vu c’est un langage subalterne au milieu des crises sociales, une voix de résistance au milieu d’un brassage de cultures.
Pour cela, il me semble si important de ne pas réduire le tango rioplatense au corporel-esthétique ou à l’érotique, mais de prendre en compte aussi le contexte d’hommes et de femmes de classe défavorisée en situation de migration. Le tango argentin peut servir de moyen esthétique pour dénoncer les problèmes sociaux et de genre, actuels, comme cela se passe dans les cultes milalonga à Cologne. Le tango demeure comme une métaphore pour exprimer « la dignité divine et humaine des femmes et des hommes marginaux ». La plainte du bandonéon dans la musique du tango se transforme en une lamentation contre les injustices, devant Dieu et devant la société. Dans la danse du tango argentin, il peut y avoir des signes incarnés de « la danse eschatologique » dont parlent quelques textes bibliques. Un exemple de cette « danse eschatologique » se trouve en Jérémie 31,4.5.13: « De nouveau, je te bâtirai, et tu seras rebâtie, vierge Israël ; de nouveau parée, de tes tambourins, tu mèneras la danse des gens en fête » (31,4). « De nouveau, tu planteras des vignes sur les monts de Samarie ; ceux qui auront planté feront la récolte » (31,5) ». « Alors la vierge prendra joie à la danse ainsi que les jeunes gens et les vieillards ensemble et je changerai leur deuil en allégresse, je les consolerai et je les réjouirai après leur peine » (31,13) (cité d’après Reina Valera 1960) [87].
Selon la bibliste allemande, Michaela Geiger, « joie » et « violence » sont très proches dans les récits sur les femmes qui dansent dans l’Ancien Testament [88]. Elle se réfère à la danse de la prophétesse Myriam, à la danse de la fille de Jephté, et à la danse des filles de Silo et aux femmes dansantes pour David [89]. Michaela Geiger lit les quatre textes d’après la perspective canonique, alors la danse eschatologique en Jérémie 31 deviendra comme une « synthèse » et une manière de « transcender » les autres récits.
Dans la danse de « la vierge d’Israël » en Jérémie 31, Geiger trouve des éléments de toutes les autres danses: elle se souvient de Miryam, elle fait allusion à une restitution de la fille de Jefté, les vignes font penser aux vignes des femmes de Silo. Finalement la danse eschatologique est une promesse du Dieu d’Israël d’en finir avec la violence de la guerre. La violence entre les peuples et les cultures, et la violence entre hommes et femmes. Les générations se rejoignent. Les gens rencontrent un lieu pour vivre et planter. La migration prend fin. La plainte se transforme en joie. La danse est une image du shalom de Dieu.
Il est hautement significatif que la vision eschatologique d’un futur meilleur en Jérémie soit représentée par l’image de la danse. La danse est un moyen de Dieu pour annoncer une vie meilleure et un autre monde possible. Parfois la danse pourra être aussi une réponse humaine à cette promesse de Dieu, comme le dit John Gordon Davies: « La danse peut être un moyen de libération et comme telle une réponse adéquate à Dieu qui nous libère » [90].
Dans la danse eschatologique de Jérémie 31 se dépassent les histoires de violence venant pour une part des hommes et des guerres: la fille de Jephté fut sacrifiée par son père, les femmes de Silo furent séquestrées, la danse de gloire des femmes pour David causa la rivalité et l’envie de Saül. La danse eschatologique en Jérémie 31 forme une part du « livre de la consolation » que configurent les chapitres 30 et 31 du livre de Jérémie. Là une réalité différente et meilleure s’annonce [91].
Ce caractère transcendant de la danse me motive pour penser que le tango argentin pourrait être un « langage spirituel, transculturel, carnavalesque » des ambiguïtés dans les liens de genre et un « langage corporel ».
Je vois ainsi se dessiner mon chemin, dans la recherche d’une théologie de libération dans la perspective de genre par un langage esthétique et de résistance [92]. Si seulement d’autres types de danses pouvaient accomplir la même fonction dans d’autres contextes et cultures.
2013
Choix de traduction
Otro u Otra = l’Autre (masculin ou féminin).
El toque : le contact, le toucher,
Je n’ai pas remis le terme « no » indiquant le numéro d’une revue, seulement le chiffre.
El pareja : plutôt la paire que le couple au sens hétéro.
Notes
1. Refrain de tango : « Qué buena fe », musique et paroles d’Eladia Blázquez, chanteuse et compositrice de tango, en http://www.todotango. com/Spanish/las_obras/Tema.aspx?id=ZerSjnGzXB8= (2 juillet 2012).
[2] Remerciement à mon compagnon Samuel Almada pour la relecture du texte en castillan et pour ses suggestions très précieuses pour le contenu. Egalement, je tiens à exprimer ma joie et ma gratitude aux participantes de la conférence de ESWT qui a eu lieu à Salamanca, qui ont partagé leur enthousiasme et leurs idées concernant le thème du tango. Maike de Haardt mérite un remerciement particulier parce qu’elle m’a défiée d’approfondir le thème du toucher (toque) dans le tango. Finalement je remercie beaucoup à mon amie Marisa Strizzi pour la lecture de l’article et pour encouragement depuis l’Argentine.
[3] Jürgen Ebach, « Der Tanz im Alten Testament », in: Marion Keuchen, Matthias Lenz et Martin Leutzsch (Hg.), Tanz und Religion. Theologische Perspektiven (Lembeck : Frankfurt a. M. 2008), 29-48 ; Theodor Seidl, « Tänzerinnen, Weberinnen, Klagefrauen. Spuren von Frauenrollen in den Kulten des Alten Israel », in : Elmar Klinger, Stéphanie Böhm, et Thomas Franz (Hg.), Geschlechterdifferenz, Ritual, Religion(Echter : Würzburg 2003), 105-25.
[4] « Bailar es relevante en cuanto a situaciones de límites » en : Paul Spencer, Society and the Dance. The Social Anthropology of Process and Performance (Cambridge Univ. P. : Cambridge 1985), 38, cit. en Peter Gerlitz, « Art. Tanz I. Religionsgeschichtlich » in: Theologische Realenzyklopädie (De Gruyter: Berlin 2001) 32, 642-47, 642.
[5] Helga Barbara Gundlach Sonnemann, Religiöser Tanz. Formen-Funktionen-aktuelle Beispiele (Religionswissenschaftliche Reihe Bd.13) (Diagonal: Marburg 2000) ; Theo Sundermeier, « Es ist ein Tanz im Himmel. Christus der Tänzer Meister ist. Eine interkulturelle Meditation » in: Jürgen Moltmann et Theo Sundermeier (Hg.), Totentänze. Tanz des Lebens (Frankfurt a. M.: Lembeck 2008), 43-82, 45.
[6] Teresa Berger, Liturgie und Tanz. Anthropologische Aspeckte, historische Daten, theologische Perspektiven (EOS Verlag : Erzabtei St.Ottilien 1985) 15-36.
[7] Brigitte Enzner-Probst, Frauenliturgien als Performance. Die Bedeutung der Corporealität in der liturgischen Praxis von Frauen(Neukirchener: Neukirchen-Vluyn 2008), 336-63.
[8] Keuchen, Tanz und religion.
[9] Pina Bausch disait « No me interesa cómo los seres humanos se mueven sino lo que les conmueve », en: Leonetta Bentivoglio et Franscesco Carbone, Pina Bausch oder die Kunst über Nelken zu tanzen (Suhrkamp: Frankfurt a. M. 2007), texte sur la couverture ; Norbert Servos, Pina Bausch. Tanztheater (Kieser: München 22008).
[10] « Pina. Tanzt, tantz, sonst sind wir verloren », voir http.//www.pina-film.de/(30 octobre 2011).
[11] Voir Elke Willke, Tanztherapie. Theoretische Kontexte und Grundlagen der Intervention (Hans Huber: Bern 2010).
[12] Il semble que ce ne soit pas un hasard que j’écrive ces réflexions en espagnol et non en allemand, ma langue maternelle.
[13] Tango « Qué buena fe », voir note 1.
[14] Le terme « transculturation » fut introduit par le pionnier des études afrocubaines Fernando Ortiz dans les années 1940 (http://www.afrocubaweb.com/ortiz.htm, 30 octobre 2011). Voir dans Klaus Hock, « Religion als transkulturelles Phänomen. Implikationen eines kulturwissenschaftlichen Paradigmas für die Religionsforschung », en: BThZ vol.19, n.1 (2002), 64-82, 71. Le philosophe Wolfgang Welsch définit « transculturalité » comme: « The old homogenizing and separatist idea of cultures has furthermore been surpassed through cultures external Networking. Cultures today are extremely interconnected and entangled with each other. Lifestyles no longer end at the borders of national cultures, but go beyond these, are found in the same way in other cultures », voir Wolfgang Welsch, « Transculturality – the Puzzling Form of Cultures Today », in: Mike Featherstone and Scott Lash (eds). Spaces for Culture: City, Nation, World (Sage: London 1999), 194-213. (ici à la page 3: http ://www2.uni-jena.de/welsch/Papers/transcultSociety.html,2.7.2012).
[15] Voir Gabriele Klein, Tango in Translation Tanz zwischen Medien, Kulturen, Kunst und Politik (Transcript: Bielefeld 2009).
[16] Ces mots, dit Gustavo Beytelmann pianiste et compositeur argentin, d’un militant politique durant la dictature, Ricardo Saltón, « Entrevista a Gustavo Beytelmann: tocar y componer como forma de vida » en: ed. por el Gobierno de la Ciudad Autonoma de Buenos Aires, Pugliese. Una publicación de Música de la Ciudad, seconde époque, no.5,septembre2006,7.(http://www.buenosaires.gov.ar/areas/cultura/musica/fotosPugliese/septiembre, 06.pdf,2.7.2012). L’écrivain argentin Javier Argüello ajouta qu’il « es imposible entender el tango sin entender, aunque sea de esta manera tan somera, el lugar en el que nació », Javier Argüello, El dia que me querias. Antología de tangos (Lumen: Madrid, 2004) 9.
[17] Ingo Malcher, Tango Argentino. Porträt eines Landes (C.H. Beck: München 2008), 139-43.
[18] Thomas Fischer, « Frauenhandel und Prostitution – das Beispiel Buenos Aires in den 1920 Jahren » in: Petra Bendel und Thomas Fischer (Hg.), Menschen- und Bürgerrechte. Ideengeschichte und internationale Beziehungen (Erlangen: 2004) 229-58.
[19] Ernesto Sabato, « Einleitung. Tango, Lied aus Buenos Aires », in: Horacio Salas (Hg.), Der Tango (Abrazos books: Stuttgart 2002)11-20.
[20] Salas, der Tango, 21-32, 370, 372,373
[21] Salas, der Tango, 33-38, esp.36-38. Il est possible que tango à quelque chose à voir avec tambó un instrument de percussion du candombe. Ou encore, il y a des tentatives de retrouver de possibles racines latines, par exemple tangir pour jouer d’un instrument ou jouer de quelque chose.
[22] L’antagonisme et la lutte de pouvoir entre le centre (Buenos Aires) et la périphérie des provinces de l’Intérieur forme une partie de l’histoire de l’Argentine. Certains soulignent le fait qu’il existe de nombreux styles de musique er de danse à l’intérieur du pays. Cependant, au niveau international, le tango est associé à la culture nationale de l’Argentine.
[23] Voir Marianne Nürnberger, « Shiva tantz in London. Tanz in multiethnischer Gesellschaft », in: Marianne Nürnberger et Stephanie Schmiederer (Hg.).Tanzkunst, Ritual und Bühne. Begegnungen zwischen Kulturen (Frankfurt a. M.: IKO Verlag für interkulturelle Kommunikation, 1996), 215-50.
[24] Argüello, El dia que me quieras. Antología de tangos 11 ; Malcher, Tango Argentino. Porträt eines Landes, 148. « El tango no es una música alegre, no simula suerte donde hay suerte, y nunca tiene un final feliz como exige el imperatico cultural-industrial de muchas formas de la música moderna », Malcher, Tango Argentino. Porträt eines Landes, 144 (traduction du castillan).
[25] Malcher, Tango Argentino. Porträt eines Landes, 144
[26] Nommée ici la « Guardia Vieja », voir Salas, Der Tango, 95-116.
[27] Tango teatro de Nemesio Trejo: « Los inquilinos » (1907), en Malcher, Tango Argentino. Porträt eines Landes, 144.
[28] A partir des années 1950, il y eu une modernisation du tango par des éléments de jazz, tant par Osvaldo Pugliese que par Astor Piazzolla. Aujourd’hui, il existe une nouvelle génération de jeunes musiciens, incluant de nombreuses femmes, qui jouent, chantent et dansent le tango en Argentine. Maintenant les orchestres classiques de tango se composent d’un piano, d’un violon, d’un bandonéon et d’une basse. Le parolier du tango se transforme en poète professionnel. Les paroles du tango décrivent la vie quotidienne dans les quartiers, avec beaucoup de nostalgie, mais aussi comme critique de la société, voir Sandra Carreras et Barbara Potthast, Eine kleine Geschichte Argentiniens (Suhrkamp: Berlin, 2010), 170-1.
[29] Avant la première guerre mondiale, le tango arrive à Berlin. Des compositions de tangos allemands surgirent également, mais certains musiciens transformèrent le rythme subtil du tango en une « marche » allemande. Les Nazis s’approprièrent le tango, mais dans les camps de concentration les musiciens juifs composèrent aussi des tangos avec des paroles yiddish. Cela souligne l’ambiguïté de la transmission interculturelle du tango qui fut trahie par les nazis. Néanmoins « el pensamiento triste que se baila » aida à articuler la voix de la souffrance et de la protestation. Voir Torsten Esser, « Jesuiten, Todestango, Tote Hosen. Musikalische Begegnungen zwischen Argentinien und Deutschland » in: Peter Birle (Hg.), Die Beziehungen zwischen Deutschland und Argentinien (Vervuert :Frankfurt a. M. 2010), 247-82, 254-60.
[30] Jochen Dreher et Silvana K. Figueroa-Dreber, « Soňando todos el mismo sueňo. Zur rituellen Uberschreitung Kultureller Grenzen im Tango », in: Gabriele Klein (Hg.) Tango in Translation. Tanz zwischen Medien, Kulturen, Kunst und Politik ( Transcript: Bielefeld 2009), 39-56,43.
[31] http://www.unesco.org/culture/ich/index.php?RL=00258,2 de Julio 2012.
[32] Voir par exemple la relation entre le péronisme et le tango: Franco Barrionuevo Ansaldi, « Der Peronistische Nationaldiskurs in der Tangoschreibung der 1960er Jahre » in: Gabriele Klein (Hg.), Tango in Translation. Tanz zwischen Medien, Kulturen, Kunst und Politik(Transcript : Bielefeld 2009),209-41.
[33] Barbara von Bremen, « Jeder Schritt ein Erlebnis. Tango-Gottesdienst in Dortmund », in: Schlangenbrut. Zeischrift für feministisch und religiöse interessierte Frauen, vol.25, no 97 (2007), 34-36, 34 ; el pastor Hans Mörtter de Colonia voit lui aussi des similitudes entre des paroles de tango et celles de Salomon, par exemple Salomon 85 ( http://www.lutherkirche-koeln.de/HartzlGottesdienst.aspx.,30 octobre 2011).
[34] Salas, Der Tango, 232
[35] Salas, Der Tango, 232-33
[36] Cristina Banegas est une chanteuse de tango, voir Malcher, Tango Argentino. Porträt eines Landes, 154 (traduction personnelle).
[37] Pour la majorité des gens qui dansent le tango en Allemagne – femmes et hommes –la danse leur est utile pour faire face à la vie quotidienne, c’est comme un point de référence important qui peut aller jusqu’au sens de leur vie, voir Malina Sedo, Geschlechterrollen im argentinischen Tango (Diplomarbeit, Saarbrücken, 2003), 101 (http://www.tangosdesalon.de/documents/Melinas%20 Diplom.pdf. 2 juillet 2012).
[38] Judith Butler, Gender trouble. Feminism and the subversion of Identity (New York: Routledge, 1990).
[39] Judith Butler, Undoing gender (Routledge: New York, London, 2004).
[40] Paula-Irene Villa, « Mit dem Ernst des Körpers spielen. Körper, Diskurse und Emotionen im Argentinischen Tango », in: Thomas Alkemeyer, Bernard Boschert, Robert Schmidt et al. (Hg.). Aufs Spiel gesetze Körper. Aufführungen des Sozialen in Sport und populärer Kultur (Konstanz: UVK, 2003) 131-54 (ici à la page 1 : http://www.elbajo-tango.de/download/tangospiel_villa.pdf, 2 juillet 2012).
[41] Eduardo P. Archetti, Masculinidades. Futbol, Tango y Polo en Argentina (Antropofagia: Buenos Aires, 2003).
[42] Marta E. Savigliano, Tango and the Political Economy of Passion (Westview P.: Boulder San Franscisco, Oxford, 1995) 21-30.
[43] Magali Saikin, Tango und Gender. Identitäten und Geschlechterrollen im Argentinischen Tango (Abrazos books: Stuttgart, 2004).
[44] Cristina Hanzich Cáceres, Mujeres, varones y ese tango (UNR: Rosario 2004) ; Paula-Irene Villa, « Der Tanz der Konstruktionen:Tango und Geschlecht », in: Paula-Irene Villa, Sexy Bodies. Eine soziologische Reise durch den Geschleschtskörper (VS Verlag für Sozialwissenschaften: Wiesbaden 32006), 271-300.
[45] Le niveau de la musique est simple. A partir des années 20, lorsque est né le tango comme chanson, pour la première fois les femmes arrivèrent sur scène comme chanteuses. Néanmoins, la majorité des textes étaient écrits par des hommes, pour des hommes et relataient des histoires d’hommes qui avaient perdu leur travail, qui avaient la nostalgique de la femme qui s’en est allée, et s’enivraient. Ils n’étaient pas dépeints comme de durs machos, de nombreuses fois ils pleuraient. En revanche, souvent les femmes représentaient des figures fortes, rationnelles, et même dominantes. Pourtant, au moment où l’orchestre de tango prit de l’importance les chanteuses furent marginalisées, voir Malcher, Tango Argentino. Porträt eines Landes, 145-6.
[46] Saikin, Tango und Gender, 35-46, 232.
[47] Saikin, Tango und Gender, 51-60.
[48] Saikin, Tango und Gender, 61-103.
[49] Malheureusement l’analyse de Saikin n’arrive pas jusqu’aux années 60.
[50] Voir Michail Bachtin, Literatur und Karneval. Zur Romantheorie und Lachkultur (Hanser: München, 1969).
[51] La culture du carnaval est très vive en de nombreux pays d’Amérique Latine, en Argentine aussi jusqu’à aujourd’hui. A cause des brassages et des conflits entre les cultures indigènes, noires et européennes, le carnaval signifie (sigue siendo) un espace de rébellion et d’affirmation de la liberté, voir Saikin, Tango und Gender, 200-6.
[52] Saikin, Tango und Gender, 198-231
[53] Emilio Fresedo, « C’est toujours le carnaval » (1937), (http://www.todotango.com, octobre 2011, 2 juillet 2012).
[54] http://www.tangoqueer.com; pour l’Argentine : http://buenosairestangoqueer.blogspot.com/2009/04/que-es-tango-queer.html; pour l’Allemagne : http://www.queer-tango. de (2 juillet 2012).
[55] Voir la paire (pareja) de « Los Hermanos Macana » en http://www.youtube.com/watch?-v=S-mkR-KoPts&feature=related ( 2 juillet 2012).
[56] http:// de.wikipedia.org/wiki/Queer_Tango (2 juillet 2012).
[57] Veronika Fischer, « Leading Ladies und folgsame Männer » Salon Magazin (2010), 1-3 (http://www.salonmagazin.de/lebenswerk/kultur/141-veronika-fischer.html, 2 juillet 2012).
[58] Sedo, Geschlechterrollen im agentinischen Tango, 101.
[59] Jeffrey Tobin, « Models of Machismo. The Troublesome Masculinity of Argentine Male Tango-Dancers », in: Gabriele Klein (Hg.) Tango in Translation. Tanz zwischen Medien, Kulturen, Kunst und Politik (Transcript: Bikefeld 2009)139-69, 141 et 148.
[60] Tango « Qué buena fe » http://www.todotango.com/Spanish/las_obras/Tema.aspx)id=ZcrSjnGzXB8=(e juillet 2012).
[61] L’insertion de danses dans la liturgie se situe dans le contexte des réformes liturgiques actuelles en de nombreuses traditions ecclésiales. Les études des religions se demandent si la division entre « danse religieuse » et « danse non religieuse » est réellement si claire qu’il n’y paraît à première vue, voir Grundlach Sonnenmann, Religiöser Tanz. Formen – Funktionen – aktuelle Beispiele (Religionszwissenschaftliche Reihe Bd.13), 20 ; sur la danse liturgique dans le christianisme, 84-97.
[62] Voir Frieder Mann, « Das Leben tanzen – Spiritualität und Tanz », in: Chorea – Zeitschrift für Tanz. Bewegung und Leiblichkeit in Liturgie und Spiritualität, 4 (1997), 2-6, 2.
[63] Cela eu lieu dans le contexte de la grande Fête de l’Eglise Evangélique (Deutscher Evangelischer Kirchentag). La congrégation se nommait: « Ev. Gemeinde Köln – Lutherkirche ».
[64] « Im Tango vereint sich alles, was das Leben ausmacht. Sehnsucht, Eisamkeit, Leidenschaft, Erotik und Wut. Es ist ein Tanz, der sich zwischen Beherrschung und Unterwerfung abspielt, zwischen Begehren und Zurückweisung. Tango ist aber vor allem der getantze Traum von einem besseren Leben », en: http://www.lutherkirche-koeln.de/Tangogottesdienst.aspx, 2 juillet 2012) (traduction du castillan).
[65] « Tango wird immer dann aktuell, wenn sich wirtschaftliche und gesellschaftliche Krisen auftun. Er ist ein Spiegel der Unsicherheit und Zerbrechlichkeit einer Welt, die sich in rasender Geschwindigkeit verändert. Der Tango symbolisiert enttäuschte Erwartungen, die Sehnsucht nach Heimat und Zuhausesein », en : http://www.lutherkirche-koeln.de/angogottesdienst.aspx, 2 juillet 2012) (traduction du castillan).
[66] « Tango wird immer dann aktuell, wenn sich wirtschaftliche und gesellschaftliche Krisen auftun. Er ist ein Spiegel der Unsicherheit und Zerbrechlichkeit einer Welt, die sich in rasender Geschwindigkeit verändert. Der Tango symbolisiert enttäuschte Erwartungen, die Sehnsucht nach Heimat und Zuhausesein », en : http://www.lutherkirche-koeln.de/angogottesdienst.aspx, 2 juillet 2012) (traduction du castillan).
[67] Bremen, « Jeder Schritt ein Erlebnis », 34-36
[68] http://www.valdensedelsur.com/grammy-latino-premia-al-tango
[69] http://www.valdensedelsur.com/grammy-latino-premia-al-tango, 2 juillet 2012
[70] Fernando F. Cautère décrit comme « el tango, finalmente, entró a la Iglesia » catholique à partir de 1959 lorsque quelques enseignants de musique commencèrent à divulguer le tango dans la jeunesse. Ils composèrent des tangos pour les chœurs et orchestres dans différentes collèges salésiens de Buenos Aires, ce qui déclancha un « movimiento tanguero-estudiantil con espectáculos públicos. Otro ejemplo es la « Misa-Tango » compuesta por el músico argentino Juan Barbará en 1990, voir Fernando F. Cautère, En el nombre del tango. Un enfoque sobre la temática religiosa en la poesía del tango (Santa Maria: Buenos Aires, 2008), 139-148.
[71] Marcella Althaus-Reid, The Queer God (Routledge: London 2003), 19-22, 20.
[72] http://www.revista-noticias.com.ar/comun/nota.php?art=2119&ed=1697,2juillet 2012
[73] On a le sentiment que les personnes s’embrassent et se touchent beaucoup plus qu’en Allemagne, bien que ici aujourd’hui ce soit devenu la coutume de s’embrasser et de se donner l’accolade entre les jeunes.
[74] On a le sentiment que les personnes s’embrassent et se touchent beaucoup plus qu’en Allemagne, bien que ici aujourd’hui ce soit devenu la coutume de s’embrasser et de se donner l’accolade entre les jeunes.
[75] Rivera, The Touch of Transcendence, x.
[76] « God is irreducibly Other, always beyond our grasp. But not beyond our touch <…> a transcendance in the flesh of others whom we touch, but may never fully grasp », in : Rivera, The Touch of Transcendence, 2.
[77] « Transcendance designates a relation with a reality irreductible different from my own reality, without this différence destroying this relation and without the relation destroying this différence », in Rivera, The Touch of Transcendance, 82.
[78] « In the beginning was touch », in: Rivera, The Touch of Transcendence, 89.
[79] « Individual bodies appear as part of social bodies », voir Rivera, The Touch of Transcendence, 100. Los « Otros ya no vivos » (no-longer-living-Others) en Amérique – les corps torturés, les corps des grand-mères aservies – furent présents comme les « autres Autres » , femmes ou hommes, dans les rencontres corps à corps d’aujourd’hui, voir le chapitre 6, Rivera, The Touch of Transcendence, 99-126.
[80] Dorothée Sölle, Realisation. Studien zum Verhältnis von Theologie und Dichtung nach der Aufklärung (Lutherhand: Darmstadt/Neuwied 1973).
[81] Michelle A. González, Beauty and Justice in the Americas (Orbis Books: Maryknoll 2003), 57-91 et 137-8.
[82] Alfonso Méndez Plancarte, Alberto Salcede (eds.), Sor Juana Inés de la Cruz, Obras complétas de Sor Juana Inés de la Cruz, 4 vols (Méxiko: Instituto Mexiquense de Cultura: Fondo de Cultura Económica, 1995).
[83] González, Beauty and Justice in the Americas, Xii, Voir aussi Heike Walz, « Interkulturelle Theologie und Geschlecht. Herausforderungen für Europa am Beispiel Lateinamerikanischer Theologinnen », BThZ, vol.27, 1(2010), 107-32.
[84] J’ai pris comme base ici la notion du théologien allemand Albrecht Grözinger à propos de l’interdit des images dans le décalogue qui est le centre positif de l’esthétique théologique: la révélation de Dieu dans le buisson (Ex.3,14-15) et dans l’histoire de Jésus sur le chemin d’Emmaüs (Lc.24, 23-25) sont des événements esthétiques ; Le Dieu d’Israël se présente et s’esquive : « La teología estética esboza el camino de la revelación de Dios y accompaňa así la praxis de la vida cristiana » voir Albrecht Grözinger, Praktische Theologie und Aesthetik. Ein Beitrag zur Grundlegung der Praktischen Theologie (Kaiser: München 21991),89-104, 104. (Traduction du castillan). Il existe une tension productive entre la théologie et l’esthétique « autónoma ». La révélation judéo-chrétienne provoque des expériences esthétiques, mais les expériences esthétiques ne sont pas une révélation en soi-même, voir Grözinger, Praktische Theologie und Aesthetik, 132-34
[85] Quant à la théologie de la grâce et aux expériences esthétiques, je me réfère ici à Andrea Bieler et Hans-Martin Gutmann, Rechtfertigung der « Uberflüssigen ». Die Aufgabe der Predigt heute (Gütersloher Verlahaus : Güttersloh 2008) 88-92.
[86] On peut aussi penser au « Cristo danzante », en: Theo Sundermeier et Jürgen Moltmann, Totentänze-Tanz des lebens (Lembeck 2006, especialmente 42-82.
[87] Tradition selon la Bible de Jérusalem 1999 : Entonces se alegrará la doncella en el baile, los mozos y los viejos juntos, y cambiaré su duelo en regocijo. Los consolaré y alviaré su tristeza.
[88] Michaela Geiger, « Mirjams Tanz am schilfmeer als literarischer Schlüssel für das Frauen-Tanz-Motiv. Eine kanonische Lektüre », in: Michaela Geiger und Rainer Kessler (Hg.) Musik, Tanz und Gott. Tonspuren durch das Alte Testament, Stuttgarter Bibelstudien 207 (Katholisches Bibelwerk: Stuttgart 2007), 55-73, spécialement, 72.
[89] Exode 15,20-21 ; Juges 11,34 ; Juges 21,19-23 ; 1 Samuel 18,6.7.
[90] John Gordon Davies, « Towards a Theology of Dance » in : John Gordon Davies (ed.) Worship and Dance (Birmingham: Univ. Of Birmingham, 1975), 43-63. 50. Il existe certainement de nombreuses dimensions théologiques de la danse, voir Gotthard Fermor, « Tanz II. Praktisch-theologisch », en: Theologische Realenzyklopädie (De Gruyter: Berlin 2001), 32, 647-55.
[91] Helga Kuhlmann souligna que la danse et la joie se retrouvent dans certains bibliques, mais il existe aussi la tradition de la danse comme défi à la mort dans certaines cultures. Voir Ecclesiaste 3,4 qui dit : « tiempo de llorar, y tiempo de reir ; tiempo de endechar, y tiempo de bailar » ; Matthieu 11,17 : « Os tocamos flauta, y no bailasteis ; os endechamos y no lamentasteis », voir Helga Kuhlmann, « Wir haben euch aufgespielt, und ihr habt nicht getantz », Mt.11,17, en: Marion Keuchen, Matthias Lenz et Martin Leutzsch (Hg.), Tanz und Religion. Theologische Perspektiven (Lembeck: Frankfurt a.M.2008), 215-34, 224-25.
[92] Pour finir certaines théologiennes féministes proposèrent quelques perspectives théologiques sur le tango argentin. Hedwig Meyer-Wilmes exposa l’idée que le tango argentin offre un espace pour la mémoire, comme « forma estética de la memoria » au milieu du déracinement ; de plus, il est possible de relier la « mémoire de souffrance » du tango avec le fameux concept de la « mémoire dangereuse » des théologies de la Libération, voir Hedwig Meyer-Wilmes « Tango con passión. Erinerung als Zentrales Element einer Hermeneutik des Raumes », en: Hedwig Meyer-Wilmes (ed.) Tango, Theologie und Kontext. Schritte zu einer Theologie des Alltags (LIT: Münster 2002), 85-106. Autre exemple intéressant: Ulrike Vollmer, « I will not let you go unless you teach me the tango. Sally Potter’s The Tango Lesson, en: Biblical interpretation. A Journal of Contemporary Approaches, vol.11, 1 (2003), 98-112.