* Parution septembre 2020
Le Sot-l'y-laisse
dînette socratique
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* Parution mars 2017
FREDON
(centième titre des éditions COLLODION)
Thématique défunte et traces d’une écriture rejouée qui n’en finit plus d’imploser à la marge étymologique de son réapprentissage de l’art de se taire. Solange Clouvel et Joël Frémiot épient une nymphe cancanière qui les mène, par rumeurs et médisances, détours lexicaux et chassés-croisés chromatiques, jusqu'à son expiation. Comme le passage de la voix vers le mutisme. Comme la traversée de la couleur vers le blanc de la page. En dévidant l’écheveau d’une fable méconnue, auteur et peintre entraînent le lecteur au cœur d’un temps qui semble rebrousser chemin et qui se déploie dans le repliement de la langue et dans le dépliement du livre.
https://drive.google.com/file/d/1ENhxflGQLwCwTJgtjWhlVHr1B8uDVONi/view?usp=sharing
Lire également :
Jean-Paul Gavard-Perret : Solange Clouvel : effacements
De l'art helvétique contemporain
rubrique des arts plastiques et de la littérature en Suisse
Dialogue du silence de Jean-Paul Gavard-Perret http://www.carnetdart.com/fredon
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* Parution juillet 2015
Solange Clouvel
varloper les coudées franches
Avec un frontispice de Joël Frémiot
Soixante exemplaires sur papier Olin Regular blanc mat 120 g
Impression numérique
80 pages
Éditions Collodion
Outre ces soixante exemplaires, sont également édités douze exemplairesde tête
comprenant chacun une peinture sur papier de Joël Frémiot,
numérotée et signée par l’artiste.
Éditions Collodion
Claire & François Poulain
9, place Saint-Martin 36230 Mers-sur-Indre
Téléphone : 02 54 31 13 23
Contact : francois.poulain@ouvaton.org / claire.poulain@ouvaton.org
nésnusfard (in off)
« JADIS AIME ENCORE PLANTER PASSIONNÉMENT SES CROCS DANS LA CHAIR VIVANTE DE L’ACTUEL. » Pascal Quignard, Critique du jugement, 2015
Ma participation aux dix-huitièmes Rencontres des Arts de Mers-sur-Indre a consisté en l’écriture d’un texte, varloper les coudées franches, qui donne lieu à une publication et dont des extraits ont dialogué, trois jours durant, avec les peintures de Joël Frémiot, auxquelles cet écrit est dédié. Ce texte est conçu selon trois axes allant de soi : la PEINTURE ; et les deux termes de la thématique choisie pour cette manifestation de 2015 : FARINE ET NU, inspirés, notamment, de l’opéra poétique Ahmad al Arabi (1984) du poète palestinien Mahmoud Darwich.
Dans varloper les coudées franches, il est question, par le truchement du MYTHE DE PROCUSTE, de troncation, dislocation, amputation, retranchement.
D’une part, parce que ces dix-huitièmes Rencontres des Arts étaient placées sous le parrainage de Mahmoud Darwich et qu’il suffit de se pencher sur un planisphère pour constater les fluctuations frontalières et les démembrements successifs de la Palestine. Terre charnière ayant connu onze dominations depuis la période cananéenne, onze guerres ou insurrections depuis le milieu du XXème siècle. Subdivisée et fragmentée, annexée et partagée, recomposée et redessinée. Plus généralement, ne serait-ce pas malheureusement là le mode de fonctionnement des rapports humains, nationaux et internationaux, sociaux, relationnels ou individuels : s’approprier, empocher, et, par voie de conséquence, dépouiller, spolier ?
D’autre part, parce que la peinture de Joël Frémiot, tant dans son traitement du subjectile que dans son recouvrement, s’élabore au rythme d’éliminations, de rognages, de traçage de séparations et d’érection de signes barbelés où s’incarcèrent de maigres formes, où s’accrochent des lambeaux échevelés en fuite, où cherchent à se dissoudre des traces errantes, exilées, à se gommer de ténues lignes colorées. Toute pratique artistique ou poétique tendrait-elle à effacer, prélever, ôter ? « IL FAUT SAVOIR ENLEVER DE SON ŒUVRE CE QUI SOUVENT NOUS PLAÎT LE PLUS », conseillait Flaubert. Mais recouvrir, rajouter, camoufler reviendraient peut-être au même. Certes, comme pour tout mythe, il convient de lire entre les lignes - et ici les thèmes s’entremêlent comme s’embrouille l’imbroglio moyen-oriental - sans s’attendre à un appesantissement didactique ou moralisateur, sans compter sur une dénonciation virulente et polémique.
Il en va des deux autres thèmes, ceux de la farine et du nu, comme du mythe de Procuste.
La farine d’abord, inévitablement associée à son manque. Aux disettes et aux émeutes. « AU COMMENCEMENT ÉTAIT LA FAIM », écrit Emmanuel Levinas dans Les Carnets de captivité. Embargos, blocus, boycotts, spéculations, cherté comme autant d’affameurs de populations. Farine, symbole démarcatif entre nantis de la même farine et défavorisés roulés dans la farine. Y ont recours des contes et des légendes à décrypter, à l’instar des mythes, sans bec enfariné. Tel le Tristan et Iseut de Béroul. Tel le thème de l’eau, autre ligne de séparation entre assoiffeurs et assoiffés. Mer Morte et Jourdain. Rives et rivalités.
Le nu ensuite, inévitablement associé, lui, au fil des siècles, aux académies, avec son feston d’allégories : vénusté, vérité, virginité, mais aussi humiliation, supplice et indigence. Dénudation et dénuement.
En sourdine est tenue une ligne mélodique par les sonorités des patronymes de compositeurs, en écho aux propos : Farinelli, Palestrina, Charlemagne Palestine… Résurgentes, sourdent au gré des pages des références antiques, leitmotive rappelant que le présent répète le passé.
En ont rendu compte, trois jours d'affilée en juillet, un buste de statue antique bâillonnée et cinq panneaux envolés, cinq bannières bannies, cinq feuillets arrachés par le vent d'une Histoire insensible aux souffrances des peuples, et agrandis du format du livre (17.5 cm x 17.5 cm) à celui de 80 cm x 200 cm, tel un signe d'espoir pour tous les territoires amputés.
SOLANGE CLOUVEL, avril - août 2015
"Mouchoirs de pain", un des cinq poèmes visuels (80 cm x 200 cm chacun), quadri sur toile textile, juillet 2015.
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* Parution avril 2014 :
sève
(édition courante)
Ce livre est tiré à cent exemplaires sur papier Olin 170 grammes en impression numérique
photographie de Gérald Castéras
Après avoir lu « sève » de Solange Clouvel
Un peu d’argile entre les lettres et à l’écart le déracinement de tout ce qui grouille, pullule et enguirlande la phrase dans son jardin déboutonné. Nul besoin de l’érudition du mythographe pour s’y retrouver parmi ces bacchanales verbales. Le lecteur se fera jardinier, binera çà et là, piochera et le récit déploiera sa tapisserie aux couleurs de floralies friponnes, de musardises canailles, de règlements de comptes musclés. Tout de même, il faut le signaler d’entrée de jeu, certaines précautions seront de mise : lors de ce désherbage, de ce remuement de marne, la bêche trop tranchante, trop hâtive pourrait écorner un petit dieu de marbre, écorcher quelque frêle déesse, estropier mille nymphes farouches. Lire sous la ligne, en travers du paragraphe ; lire en grattant la rature, en soulevant délicatement la strophe, en prélevant l’alexandrin embusqué dans un coin de page, en soupesant la poussière qui s’engouffre dans la marge ; lire ce texte dont le terrain sédimentaire est miné. Frasques anciennes, fredaines séculaires, incartades antiques et le tambourinage de sa Majesté Carnaval qui passe et repasse et ça dépasse des mots, et les censeurs aboient et ça s’emballe, s’empétale. Brûler Carnaval et livre au bûcher, et ça finira en peinture de genre parce que le passé c’est demain, parce qu’on légifère pour rien.
sève est chiendent, broussaille, brouillage de pistes, brouhaha, chienlit. sève est cep, est cippe, litière satyrique. D’ivresses lexicales en représailles syntaxiques, Solange Clouvel œuvre à même la raucité d’une langue funambulesque. Hachures, volutes ensemencent son phrasé. Roses trémières, confettis, serpentins, cotices blasonnent ses pages. Fables, légendes squattent ses chapitres. Déambulations de rubriques chausse-trapes en chroniques piégées. Impossible de sortir indemne de ce guêpier où le mythe n’est que subterfuge pour mieux dépecer notre aujourd’hui sens dessus dessous.
Joël Frémiot