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Canal de Castilla (Espagne)

Tragédie à l'écluse de Naveros le 11/08/2012


Margarita Alonso Porta



Trois femmes et trois enfants sont morts

au pont maudit du Canal de Castille

Quatorze personnes ont perdu leur vie

au même endroit, en trois accidents depuis 1973

(Entête de la nouvelle du journal "El País Digital" le 12/08/2012)

La nouvelle à "El País digital"

La nouvelle à "El Diario de Burgos"

La nouvelle à "ElNorte de Castilla"

La nouvelle surd'autres sources


Pourquoi ma fille Margarita Alonso est-elle morte -...noyée ! au Canal de Castille en compagnie de 5 personnes ?


Les vacances

Comme tous les ans, ils étaient allés à Zarzosa passer une partie de leurs vacances en famille.

Ils faisaient cela depuis leur enfance : Zarzosa est le village où leur parents et leurs grand-parents sont nés. Mais eux et elles s'y considéraient aussi comme chez eux.

Le long tronçon droit entre S. Llorente et Naveros


Le soir du 10 août ils se sont rendus à San Llorente de la Vega (à 12 Km.) pour s'amuser un peu aux fêtes de S. Lorenzo, comme d'autres années auparavant....

Après le tronçon droit il y a un virage très serré à gauche qui donne accès au pont qui franchit le Canal de Castille, dissimulé par la verdure, qui est encore plus épaisse actuellement. (La photo date de 2009)

La tragédie

Pour des causes inconnues, la voiture est sortie de la voie et s'est précipitée dans les eaux du Canal, où elle s'est enfoncée, les portières bloquées.

Les six voyageurs, 3 jeunes femmes et 3 enfants, sont restés coincés à l'intérieur et se sont tous noyés.

Sur la rive du Canal de Castille il y avait une barrière... de protection ? qui n'a pas servi à empêcher les véhicules de tomber. La barrière s'est pliée en deux, et s'est tordue vers la droite comme une porte entrebaillée.

Pourquoi ?

Après l'accident...

Sur la photo on peut apprécier la "surprenante" réaction de la barrière : elle s'est pliée en deux et la base de son extrémité gauche est restée, comme on le voit sur la photo, suspendue sur les eaux par le poids du béton qui y était accroché et aurait dû la retenir fixée au sol, mais ne l'a fait nullement.

Pourquoi ?

Sur la photo, la barrière, tordue et détachée du terrain, ne montre aucune déformation visible due au choc de la voiture.

De plus, aucun des "airbags" de la voiture s'est ouvert, quand, cependant, tous eux fonctionnaient correctement.

Ces deux faits nous font penser que l'impact de la voiture contre la barrière ne fut pas violent et que la moitié de la barrière qui s'est tordue a cédé si facilement parce qu'elle n'était pas bien plantée sur le sol, et qu'elle s'est détachée sans aucune difficulté. Donc, au lieu d'être freinée, la voiture s'est précipitée directement au fond du canal

Clairement, si la signalisation, plus spécialement la signalisation horizontale, avait été adéquate et s'il y avait eu des bandes-son, il est probable que la "sortie de voie" ne serait jamais arrivée.

C’est la chute dans le canal qui a transformé une simple "sortie de voie" (un tiers des accidents sont des sorties de voie) en une vraie tuerie, et ceci ne serait jamais arrivé si la barrière de protection avait été correctement conçue et fermement plantée sur le sol.

Mais elle ne l'était pas, malgré la multitude de morts des accidents préalables, qui appelait la justice divine pour un nouveau tracé de la voie ou, du moins, l'implantation correcte du système de protection.

La Asociación Española de Fabricantes de Sistemas Metálicos de Protección Vial [Association Espagnole de Fabricants de systèmes de protection routière] publie un journal, disponible à Internet, dont le numéro 3 analyse l'accident de Naveros.

Ci-dessous sont recueillis quelques fragments du texte et les photos provenant de ce journal, avec l'autorisation des éditeurs. (C'est moi qui souligne en rouge)

"Tous les efforts et l'investissement réalisés par les fabricants (de systèmes de protection routière) dans le but de développer de nouveaux produits s'avèrent inutiles lorsque ces systèmes ne sont pas installés d'une façon adéquate sur les routes ou quand les travaux d'entretien ne sont pas effectués régulièrement.

Un exemple en est l'accident mortel qui s'est produit à Naveros de Pisuerga le 11 août dernier (2012) et qui a causé la mort de six personnes lorsque leur voiture est tombée à l'écluse 13 du canal de Castille, et qui montre d'une part, l'importance de l'existence des barrières métalliques de sécurité comme dispositif de sécurité passive, et d'autre part, leur correcte installation, de façon à ce qu'elles puissent accomplir adéquatement leur fonction de minimiser au maximum les dommages aux véhicules qui sortent fortuitement de la voie, en impactant contre celles-ci.

Malheureusement, un total de quatorze personnes sont décédées durant les 39 dernières années au même endroit, par raison de trois accidents de la circulation routière, lesquels auraient probablement pu être évités en présence de la protection adéquate. De plus, même si cela semble incroyable, il y a d'autres ponts semblables dans les environs qui ne sont dotés de barrière de sécurité d'aucune sorte.

Le Canal de Castille a été l'un des travaux de génie civil les plus importants du 18e. siècle : il traverse les provinces de Palencia, Burgos et Valladolid et, tout en étant important de conserver le patrimoine historique, la sécurité doit toujours rester prioritaire.

... Etant donnée l'époque du tracé (de la voie), il se peut que le seul emplacement de nouvelles barrières ne soit pas suffisant; il faudrait penser à redessiner la zone, puisque les barrières ont été conçues pour recevoir des impacts latéraux et non frontaux".

("Redessiner la zone" veut dire, carrément, changer le tracé et supprimer le virage)

JournalSIMEPROVI, num. 3, page 20.

"L'image ci-dessus montre la scène de l'accident. La voiture est sortie de la voie, en emportant avec elle la barrière métallique de sécurité existant sur le point du choc,

Mais... est-ce que l'installation de celle-ci était correcte ?

Voyons l'analyse de l'état de la barrière métallique de sécurité installée à l'écluse 13 du Canal de Castille."

Journal SIMEPROVI, num. 3, page 19.

"Les points 1 et 2 indiquent les espaces se trouvant à chaque extrémité du tronçon de la barrière installée. De la même façon, sur 3 on voit une interruption sur le système de soutènement.

Evidemment, le défaut de continuité sur les barrières de protection, ainsi que l'existence d'espaces sans protéger, fait réduire à zéro l'efficacité de la réaction au choc de la barrière.

Même dans le cas de venir à bout des points 1, 2 et 3, la barrière sans séparation et une distance entre les poteaux de 4 mètres donneraient une réponse d'un niveau de soutènement normal N2 avec une ampleur de travail W5/W6. D'autre part, étant donné la discontinuité indiquée à 3, la barrière compte finalement avec deux tronçons de 8 et 12 mètres respectivement.

Dans le but de garantir le correct comportement du système (dans le cas où celui-ci a été testé), il faudrait pouvoir installer au moins une longueur correspondante à la longueur de la barrière testée. En outre, ce type de système de soutènement n'est pas adéquat dans une zone aux caractéristiques décrites. Que se passerait-il dans le cas d'un autobus ? Les conséquences en seraient inimaginables.

Il faudrait donc installer une barrière de fort soutènement.

D'un autre côté, les finitions en “queue de poisson” comme celle marquée au point 5 peuvent avoir de sérieuses conséquences en cas d'impact, parce que la barrière peut pénétrer de forme longitudinale dans le véhicule impactant contre celle-ci. Il y a eu nombre d'occasions où les conséquences d'un accident ont été mortelles a cause de cette finition de la barrière qui n'est pas plantée au sol.

Finalement, et non moins important, le point 6 indique l'ancien mur du pont. C'est vrai, ce mur peut éviter la sortie de voie des véhicules en train de franchir le pont et non avant (comme cela a été le cas de l'accident décrit) mais alors, quelles en seraient les conséquences pour ses passagers ? La sévérité du choc d'un véhicule heurtant fortuitement un tel mur serait du type C, un impact pouvant avoir de très graves conséquences sur les passagers.

L'analyse réalisée montre clairement la dangerosité de la zone."

Journal SIMEPROVI, num. 3, page 19.


Conclusions

Qui avait aussi mal installé

cette barrière de « protection » totalement inefficace,

qui enfreignait toutes les normes de sécurité

et qui a eu une importance décisive dans la mort de ma fille

et des cinq autres victimes noyées ?


Qui (ne) s’était (pas) occupé de l’entretien

et de l’actualisation de cette barrière de sécurité ?

L’institution ou l’organisme qui avait installé cette barrière, quel qu'il soit,

et qui aurait dû l’entretenir et l’actualiser,

n’a-t-il aucune responsabilité dans la chute du véhicule dans le canal

et la mort par noyade de tous ses occupants ?



La tragédie de Naveros de Pisuerga (11-08-21012) (6 morts)

ressemble beaucoup à la tragédie de Madrid-Arena (1-11-2012) (5 morts)

et à la tragédie du métro de Valence (3-7-2006) (43 morts).

Dans les 3 cas, la manière d’agir des administrations publiques a été lamentable dans la mise en place de moyens préventifs qui auraient permis d'éviter les accidents. Les responsables politiques et administratifs ne se sont pas non plus surpassés dans leur gestion postérieure à ces catastrophes.

En guise d’exemple, nous insérons un site de liens en relation avec la tragédie du métro de Valence. La lecture de ces documents, en particulier ceux liés au comportement honteux de plusieurs administrations publiques après l’accident, est réellement effrayante.

Mais il y a encore de l’espoir: sept ans après, grâce au programme télévisé « Salvados », la procédure judiciaire, qui n’avait pas eu de suites, a été rouverte.

Ce statut tiers-mondiste de l'écluse du Canal de Castille à Naveros n'est absolument pas un cas isolé. On pourrait affirmer que c'est habituel dans toute la zone du Canal de Castille, mais les conditions sont encore bien pires au Canal du Pisuerga, qui coule parallèlement à celui-là.

A 7 Km. en amont de Naveros, la route de Zarzosa près de l'écluse 9e. du Canal de Castille (S. Lorenzo) a un tracé ahurissant d'un danger très sérieux. C'est un autre endroit où plusieurs personnes se sont noyées -et mortes- quand leur véhicule s'est précipité dans l'eau. (cf. photo ci-dessous)

Et quelques 3 Km. en aval, près de l'écluse 10e. (Pradojo - Castrillo), le tracé est encore plus diabolique et dangereux.

Deux photos récentes qui montrent l’état lamentable de la sécurité routière aux abords des canaux de Castille et du Pisuerga.

Nous pouvons observer l’infinie et l’éternelle négligence de l’entretien et de la sécurité de ces canaux ainsi que les ponts et les voies qui les traversent. Comme ces deux photos, des centaines d’autres pourraient êtres prises.

La Caravane de la mort

L'image bouleversante de la caravane de six corbillards se dirigeant aux funérailles à Zarzosa portant leur six cercueils (dont trois blancs).

En son parcours elle contourne l'écluse 9e. du Canal de Castille (où les passagers d'une autre voiture sont morts en un accident semblable il y a quelques années) et franchit (ce qui reste du) le pont sur le canal.

Aucun besoin de chercher la solution pour ces 3 points: écluses 13, 9 et 10 (Naveros, S. Lorenzo et Pradojo), puisqu'elle a déjà été trouvée, inventée, implantée et vérifiée depuis un certain nombre d'années ailleurs sur le même Canal de Castille...

c'est la solution Frómista

La solution "Frómista"

Vue du pont sur lequel la route N-611 franchit le Canal de Castille, au sud de Frómista (Palencia).

Le pont est construit sur de simples poutres préfabriquées.

Au sud de la commune de Frómista, la route N-611 (ancien tracé) traverse le Canal de Castille sur un pont aligné avec la route (et non pas perpendiculaire au canal, comme les 3 antérieurs), sans virage serré à l'entrée ni à la sortie du pont.

Le pont de Frómista a été construit il y a plusieurs années et depuis lors pas un seul accident ne s'est produit, malgré que c'est une route à la circulation très intense.

Il faudra appliquer la même solution aux ponts de Naveros, San Lorenzo et Pradojo.

Et les beaux ponts du 18e. siècle devront être conservés comme exclusivement piétonniers.

La sécurité des personnes près du Canal de Castille doit être prioritaire, d'autant plus si on prétend promouvoir le tourisme du canal et continuer à obtenir des subventions de l'Union Européenne.

Stop aux morts au Canal de Castille !

Les habitants des villages affectés par les passages dangereux sur le Canal de Castille ont toujours eu les idées très claires sur ce qu’il fallait faire. Ils ont essayé à plusieurs reprises de trouver une solution eux-mêmes et avec leurs propres fonds. Mais ils se sont toujours heurtés à la « non autorisation » de la Confédération Hydrographique du Duero.

Un habitant de Castrillo de Riopisuerga m’a expliqué que dans les années 70, lorsqu'il était maire, la mairie de Castrillo a demandé l’autorisation à la Confédération Hydrographique du Duero, responsable du Canal de Castille, de construire un tronçon de route droite et un nouveau pont sur le Canal de Castille (la solution Frómista). La mairie de Castrillo aurait pris en charge le financement des travaux.

L’autorisation a été rejetée par la Confédération.

Des années plus tard, la même mairie a réitéré à plusieurs reprises sa demande auprès de la Confédération Hydrographique du Duero, recevant toujours les mêmes résultats négatifs.

La mairie de Zarzosa a aussi réalisé des gestions similaires, obtenant la même réponse.

Les péripéties par lesquelles la mairie de Herrera de Pisuerga a dû passer il y a 30 ans pour élargir le pont de « Los Malecones » sur le Canal de Castille méritent une mention à part.

N’importe quel habitant de Herrera et de la région connaît ces catastrophes et ces malheurs (et bien

d’autres) liés à la

Confédération Hydrographique du Duero et « son » Canal de Castille.

Un an après... (août 2013)

Les ponts du Canal de Castille n’ont toujours pas

de plan de travaux un an après l’accident

(« El Diario de Burgos »11/08/2013)

Un an après l’accident du Canal de Castille

(Pages d’opinion de « El País » 11/08/2013)

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