L’identité d’ostéopathe, comme celle de nombreuses professions, repose sur une dimension performative. Une identité performative signifie qu’elle n’existe et ne prend forme qu’à travers les actions, les interactions et la reconnaissance des autres. Cela signifie que l’identité professionnelle d’un ostéopathe ne repose pas uniquement sur l’obtention d’un diplôme ou d’une formation, mais qu’elle se construit à travers plusieurs éléments :
La pratique : C’est en exerçant son métier, en développant ses compétences cliniques et en accumulant de l’expérience qu’un ostéopathe devient véritablement un professionnel accompli.
La reconnaissance par les pairs et les patients : Un ostéopathe est aussi défini par la manière dont il est perçu. La confiance et la reconnaissance des collègues (autres ostéopathes, professionnels de santé) et des patients contribuent à asseoir son statut et sa légitimité.
L’inscription dans un cadre professionnel et réglementaire : L’ostéopathie n’existe pas en dehors des règles et des structures qui l’encadrent. Être ostéopathe implique de respecter des normes légales, déontologiques et institutionnelles qui définissent le champ d’action et les responsabilités du métier.
Autrement dit, être ostéopathe, ce n’est pas seulement avoir un titre, c’est une construction dynamique qui repose sur l’expérience, la reconnaissance sociale et le cadre légal. Cela s'oppose à une identité considérée comme fixe et préexistante, qui serait définie uniquement par un titre ou une formation.
Cette identité confère aux unions professionnelles et autres corporations un rôle clé. Leur vision influence les formations qu’elles légitiment, déterminant ainsi l’accès à la profession et le statut qui en découle. Il serait donc illogique, au XXIe siècle, d’associer l’identité de l’ostéopathie à des théories du XIXe siècle. La reconnaissance d’une pratique médicale ne relève pas de la croyance : un médecin n’est pas défini par l’adhésion de ses prédécesseurs à la théorie des humeurs d’Hippocrate, mais bien par le fait qu’il s’en est affranchi. (1)
Pour beaucoup, l’attachement aux principes historiques est profondément lié au sentiment d’« être ostéopathe ». Pourtant, actualiser les bases théoriques de l’ostéopathie ne constitue pas une menace pour son identité, mais bien une opportunité d’enrichir et d’améliorer sa pratique. (2)
L'ostéopathie a besoin d’être réformée, et certains estiment qu’il faudrait aller encore plus loin. À ceux qui craignent pour leur avenir professionnel, leurs compétences resteront toujours précieuses. Elles n’ont pas besoin d’être confinées à un cadre professionnel spécifique pour s’exprimer pleinement. (3)
Les questions liées à l’identité ostéopathique reposent sur une double facette (idem et ispe), intégrant à la fois des éléments issus de la tradition et des approches contemporaines. L’identité idem de l’ostéopathie renvoie à sa continuité et à ses caractéristiques stables à travers le temps, tandis que son identité ipse incarne sa capacité à évoluer et à se redéfinir. Ces deux dimensions ne doivent pas être perçues comme antagonistes, mais comme complémentaires, formant une dynamique essentielle à l’évolution de la profession. C’est en trouvant un équilibre entre préservation des fondamentaux et adaptation aux nouvelles connaissances que l’ostéopathie peut se structurer et répondre aux bouleversements sociétaux qui remettent en question ses fondements. Si la réforme de cette identité exige un effort cognitif important, elle est néanmoins essentielle pour améliorer la prise en soin des patients. (4)
Salem, W., Vaucher, P. (2024), L’enseignement de la médecine ostéopathique dans l’ère du rationnel et de la pratique éclairée – quelles possibilités reste-t-il ?, Mains Libres, 20, no. 324, 147–149. https://doi.org/10.55498/MAINSLIBRES.2024.12.3.147
Oliver P. Thomson, Andrew MacMillan, What's wrong with osteopathy ?, International Journal of Osteopathic Medicine, Volume 48, 2023, 100659, ISSN 1746-0689. https://doi.org/10.1016/j.ijosm.2023.100659.
David A. Nicholls, What is wrong with osteopathy ? A response to Thomson and MacMillan, International Journal of Osteopathic Medicine, Volume 51, 2024, 100694, ISSN 1746-0689, https://doi.org/10.1016/j.ijosm.2023.100694.
Pierre-Luc L'Hermite, The double facets of osteopathy's identity, International Journal of Osteopathic Medicine, Volume 52, 2024, 100715, ISSN 1746-0689, https://doi.org/10.1016/j.ijosm.2024.100715.