Biographie de Michel Sapir

Biographie de Michel Sapir

Michel Sapir est né en 1915 à Moscou. Arrivé à Paris à 18 ans, il y commence des études de médecine, participe à la Résistance dans le Midi puis entreprend une pratique de médecine générale avant de développer un intérêt jamais démenti pour les liens psyche-soma.

Ses travaux et ses recherches, en effet, se construisirent et s’appuyèrent sur son approche de ce qui se passe entre le corps et la parole à travers la relaxation et sur l’étude de la relation soignant-soigné à travers les travaux de Michael Balint. Les groupes de relaxation, avec cette prise de conscience nouvelle et étonnante de l’approche du corps et les groupes Balint furent le véhicule vivant de sa réflexion.

Sa formation psychanalytique constitua toujours un point de référence et un cadre à ses recherches et à sa pratique.

La rencontre avec la relaxation

Dans les années 50, Michel Sapir et ses deux collaborateurs, François Reverchon et René Philibert, ont en charge quelques lits dans le service de néphrologie du Professeur Wolfrom à l’hôpital Rothschild à Paris.

C’est une période très riche où la psychiatrie commence à s’ouvrir avec le début de l’ère des psychotropes (Largactil) et un intérêt nouveau pour le discours des patients.

Face aux différentes pathologies auxquelles ils sont confrontés, dont des troubles fonctionnels, il leur est demandé d’expérimenter les cures de sommeil dans l’hypertension ; elles n’auront qu’une efficacité relative. Ils sont rapidement sensibilisés à l’aspect psychologique du discours des patients et à son importance.

Puis le docteur Charles Brisset ouvrira dans ce même hôpital une « consultation porte » de psychiatrie à orientation psychosomatique. Ce fut la première à exister dans un hôpital général. Michel Sapir et R. Gaschkel furent ses assistants. C’est dans ce contexte, en 1954, qu’arrivera dans le service un jeune interne suisse à orientation psychosomatique Félix Labhardt. Il a appris, en Allemagne, auprès du docteur Johannes Heinrich Schultz, le Training Autogène. Il leur en parle, les initie à cette méthode et leur montre comment l’utiliser avec leurs patients.

C’est un tournant décisif pour la carrière de Michel Sapir et de ses collaborateurs. Il rencontrera d’autres praticiens de cette technique : les strasbourgeois Th. Kammerer et R. Durand de Bousingen.

A cette même époque, Julian de Ajurriaguerra introduisait une autre méthode de relaxation d’emblée plus imprégnée par la psychanalyse et très axée sur les variations du tonus musculaire.

Michel Sapir créa, en 1960, le premier enseignement de la relaxation à l’hôpital Cochin avec la participation des praticiens des différentes méthodes.

Les bouleversements et les ouvertures

La fin des années 50 est marquée par trois évènements et deux apports fondamentaux.

a) Les événements - M. Sapir constitue avec L. Chertok (qui a réintroduit l’hypnose en France) et avec P. Aboulker la Société de Médecine Psychosomatique.

- Ces trois praticiens vont fonder, en 1959, la Revue de Médecine Psychosomatique (qui, en 1995, deviendra Champ Psychosomatique).

- M. Sapir fait la connaissance de J.H. Schultz dont il deviendra le correspondant à Paris.

b) Les apports fondamentaux

- La maîtrise, l’apprentissage, la suggestion et la codification importante du Training Autogène constituent des limites pour l’équipe de M. Sapir. La première évolution sera marquée par une nouvelle méthode de relaxation : le Training Autogène Psychologisé. Les formules sont plus longues, moins codifiées, laissant davantage de place à l’imaginaire et à la créativité du relaxateur et il est laissé un temps plus grand au patient pour exprimer son vécu.

– En 1960, c’est l’arrivée en France de la pensée de Michaël Balint révélée par son livre : « Le médecin, le malade et la maladie » (traduit par J-P. Valabrega). La méthode dite des « groupes Balint », pratiquée à la Tavistock Clinic (inaugurée en France autour de E. et G. Rimbault) va être le véritable tournant. Elle transforme la compréhension de la relation soignante et permet la formation des médecins à cette approche.

L’ " école Sapir "

Michel Sapir impulse par sa personnalité un mode de travail, de collaboration, d’échanges originaux dans des groupes de formation à la fonction soignante. Il s’adresse à différentes professions soignantes, ce qui est inhabituel à cette époque. Cet esprit nouveau fonde ce qui peut être appelé l’ « école Sapir » dont les fruits et les effets construisent et enrichissent la relaxation.

La naissance de la RIV

Et c’est à partir de là que tout un travail s’accomplit qui va présider à la naissance de ce qui allait devenir la « Relaxation à Induction Variable » (RIV).

En effet, au fil des années, les dénominations se succèdent : « relaxation de sens psychanalytique », « à inductions multiples », puis « variables » ; et enfin « variable » (au singulier).

L’appellation actuelle est : « Relaxation psychanalytique méthode Sapir».

Ces appellations différentes traduisent le travail et l’évolution de la pensée de M. Sapir et de ses collaborateurs. Toutes insistent sur la dimension d’ouverture ou « découvrante » de la technique visant à la mise à jour des conflits et de la dimension inconsciente par opposition aux méthodes « couvrantes » qui visent seulement à l’apaisement des tensions.

Il ne s’agit plus de la technique de Schultz, mais d’une transformation dans une optique psychanalytique. La séance peut se décrire ainsi : il y a des inductions (parole et toucher) de la part du relaxateur, un temps de silence au cours duquel le patient est invité à se mettre à l’écoute de ses sensations, images, pensées et associations, puis un temps de parole pour le patient afin de mettre en mots le ressenti de son corps et de la relation dans un échange avec son analyste relaxateur, dans le cadre d’une relaxation individuelle ou avec les analystes animateurs et les autres participants dans le cadre d’une relaxation en groupe. C’est cela la « méthode Sapir ».

L’AREFFS

L’aboutissement des bases de ce cheminement, sa richesse, son dynamisme entraînent, en 1975, la création de l’AREFFS (Association de Recherche, d’Etude et de Formation pour la Fonction Soignante), lieu de formation pour les soignants à travers la relaxation, le groupe Balint et le psychodrame Balint (mis au point par Anne Caïn).

Michel Sapir et ses collaborateurs animèrent de 1981 à 2001 le Centre Balint, dispensaire de soins original qui abrita l’AREFFS et ses activités de formation. L’AREFFS est un cadre institutionnel où vont continuer à s’élaborer clinique et théorie de la relaxation. Cela reste un lieu d’échanges, de recherche et de réflexion pour les formateurs et les praticiens autour de leur pratique.

Recentrée sur la relaxation psychanalytique elle se nomme maintenant AREPS

Les séminaires de formation

Michel Sapir créa également, à Divonne puis à Annecy, des séminaires résidentiels de formation dans la ligne du séminaire créé par Balint en Suisse. Tout un dispositif d’alternance de grands et de petits groupes de cas avec la possibilité d’une sensibilisation à la relaxation et au psychodrame Balint permet au soignant de mieux percevoir son vécu de la relation. Les théories de D. Anzieu et du CEFFRAP ont éclairé la compréhension de ces phénomènes de groupe.

"Michel Sapir a eu le courage de représenter et d’intégrer le fait du corps dans le paysage psychanalytique. Il a offert aux soignants la possibilité de s’intéresser, dans la maladie, à cette dimension inconsciente agissant tant dans la relation du malade à son corps que dans la relation soignant-soigné.

La relaxation psychanalytique en est une approche importante et un processus vivant avec lesquels il a pu et su maintenir des questionnements, une pratique et un enseignement."

(LLPF N° 112 Février 2002 - allocution prononcée par Jean-Jacques Kress lors des obsèques de Michel Sapir, le 15 janvier 2002)