La servitude par destination du père de famille

Ce sont les articles suivants du Code Civil qui l'évoquent :

Article 692

La destination du père de famille vaut titre à l'égard des servitudes continues et apparentes.

Article 693

Il n'y a destination du père de famille que lorsqu'il est prouvé que les deux fonds actuellement

divisés ont appartenu au même propriétaire, et que c'est par lui que les choses ont été mises dans

l'état duquel résulte la servitude.

Article 694

Si le propriétaire de deux héritages entre lesquels il existe un signe apparent de servitude, dispose

de l'un des héritages sans que le contrat contienne aucune convention relative à la servitude, elle

continue d'exister activement ou passivement en faveur du fonds aliéné ou sur le fonds aliéné.

Voici un exemple :

"Vu les articles 693 et 694 du Code civil ;

Attendu qu'il n'y a destination du père de famille que lorsqu'il est prouvé que les deux fonds actuellement divisés ont appartenu au même propriétaire, et que c'est par lui que les choses ont été mises dans l'état duquel résulte la servitude ; que si le propriétaire de deux héritages, entre lesquels il existe un signe apparent de servitude, dispose de l'un des héritages sans que le contrat contienne aucune convention relative à la servitude, elle continue d'exister activement ou passivement en faveur du fonds aliéné ou sur le fonds aliéné ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 24 octobre 2000), que M. X..., qui avait acquis un immeuble issu de la division d'un fonds unique, dont le restant, demeuré appartenir au vendeur, avait ensuite été acheté par les époux Y..., reprochant à ces derniers d'avoir élevé sur leur propriété un mur qui obstruait une porte de son propre édifice ouvrant sur celle-ci, les a assignés pour obtenir la reconnaissance de l'existence d'une servitude de passage et subsidiairement, d'une servitude de vue ou tout au moins de jour, ainsi que la démolition du mur ;

Attendu que pour débouter M. X... de ses demandes, l'arrêt retient que les différents droits réclamés ne peuvent être fondés sur le fait que les propriétaires originels étaient les mêmes car si ceux-ci, lors de la première vente, alors qu'ils gardaient une partie de leur propriété, avaient voulu consentir une servitude quelconque à M. X..., ils auraient demandé au notaire rédacteur de rédiger une clause claire et précise déterminant les droits et obligations de chacun, que cela n'ayant pas été fait, il n'est pas possible de retenir la notion de "destination du père de famille" ;

Qu'en statuant ainsi, tout en retenant, par motifs propres et adoptés, qu'il n'était pas contestable qu'une porte existait lors de la vente consentie par l'auteur commun à M. X..., et alors qu'il résultait de ses propres constatations que l'acte de division n'avait rien prévu relativement à la servitude, la cour d'appel, qui n'a pas relevé d'éléments de nature à démontrer la volonté de l'auteur d'écarter la présomption légale qui s'attachait à la situation de fait constatée, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 octobre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges."

Voici un autre exemple :

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 15 mai 2003), que les époux X... ont assigné les époux Y..., propriétaires de la parcelle cadastrée 1114, en rétablissement du libre accès à leur propriété contigue cadastrée 1115 et en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 682 du Code civil ;

Attendu que pour dire que les époux X... ne pouvaient se prévaloir du titre légal que constituerait l'enclave et rejeter leurs demandes, l'arrêt retient que l'huissier de justice missionné par les époux Y... a constaté que l'accès à la parcelle cadastrée 1115 pouvait se faire non seulement par la traversée de la parcelle 1114, mais directement par le chemin prenant naissance au pied de l'entrée de la grange de la propriété X... à l'ouest de celle-ci ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si cet accès était suffisant pour permettre une utilisation normale du fonds, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et, sur le second moyen :

Vu l'article 694 du Code civil ;

Attendu que si le propriétaire de deux héritages entre lesquels il existe un signe apparent de servitude dispose de l'un des héritages sans que le contrat contienne aucune convention relative à la servitude, elle continue d'exister activement ou passivement en faveur du fonds aliéné ou sur le fonds aliéné ;

Attendu que pour dire que les époux X... ne pouvaient se prévaloir du titre légal que constituerait la destination du père de famille, l'arrêt retient qu'il n'est pas contesté que les fonds actuellement divisés et propriété de chacune des parties ont appartenu au même propriétaire, mais que seules les servitudes continues et apparentes peuvent être établies par destination du père de famille ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la destination du père de famille vaut titre à l'égard des servitudes discontinues lorsqu'existent, lors de la division du fonds, des signes apparents de servitude et que l'acte de division ne contient aucune stipulation contraire à son maintien, la cour d'appel a violé l'article susvisé.

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mai 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon."