4e RTT historique

Historique sommaire

(extrait d'une plaquette réalisée à Sfax le 1er juin 1957, imprimerie du Nord à Tunis.)

Mis en site par Roger LOUIS


Création du régiment et pacification du Maroc

Le 4e Régiment de Tirailleurs Tunisiens a été créé en 1884 et initialement constitué par les Compagnies Mixtes de Tirailleurs et spahis qui ont existé en Tunisie dès la conquête de 1881. Dans l'esprit d'alors la Tunisie n'était que le prolongement vers l'Est de notre empire Nord-Africain d'où le numéro 4 donné au régiment : 1 er à Alger; 2 e à Oran; 3 e à Constantine, donc 4 e en Tunisie.

Le colonel commandant le Régiment tenait garnison à La Goulette mais le Régiment était disséminé dans tous les postes tunisiens de Gabès à Bizerte. C'est l'époque de la pacification : la France commençait à protéger un pays autrefois florissant mais ravagé par des siècles d'invasions et par la cupidité de ses seigneurs. Tout était à créer ; aussi dès sa formation le Régiment exécute partout sur le territoire une œuvre de pacification : construction de pistes, mise en valeur du sol, recherches archéologiques, plantations.

En 1908, après avoir assuré "par la charrue" la paix française en Afrique du Nord, le 4 e RTT doit l'assurer par l'épée : le Régiment est envoyé au Maroc et participe à la campagne de pacification; il se distingue en particulier à Casablanca, puis en 1912, il opère à Oujda, puis à fez où ses postes disséminés, sous le commandement d'une poignée de Français ou de gradés indigènes éprouvés, tiennent contre la population de cette grande ville révoltée. Le drapeau du 4 e RTT sur lequel s'inscrit son premier nom de bataille : Casablanca 1908, est le premier à flotter sur l'Empire chérifien pacifié.

Le Régiment s'est agrandi : en 1912, il compte 12 bataillons dont la moitié au Maroc, soit 48 Compagnies de 250 hommes. En 1912, 6 bataillons forment le 8e RTT, le premier "fils" du régiment.

1914-1918

En exécution du plan de mobilisation, le Régiment forme en 1914 un " régiment de marche " constitué des 1 er, 2 e et 6 e Bataillons. Il rentrera dans la composition de la Division Marocaine avec les régiments de marche du 1 er REI, du 7 e RTA et des Zouaves.

Les Bataillons débarquent à Sète et à Bordeaux et sont conduits sur la ligne de bataille ; le 23 Août 1914 c'est le premier combat en Belgique, à Husimelle, mais la bataille des Flandres est perdue ; il faut battre en retraite.

Retraite pénible : marcher et combattre sans cesse; Ribemont (30 août), Ronchères (3 septembre), Pargny (4 septembre), Provins (5 septembre). Le 6 septembre, le général Joffre donne à toute l'armée l'ordre de faire face en avant et d'arrêter l'ennemi : la bataille de la Marne s'engage. Le 4 e RTT a sa part dans la victoire par ses combats menés de Provins au Chemin des Dames.

Après la Marne, les adversaires s'enterrent dans les tranchées, le front se stabilise entre la Mer du Nord et la Suisse. Trois années de lutte gigantesque n'amèneront, malgré le courage et l'acharnement des adversaires, que des changements peu conséquents du tracé de ce front qui est jalonné par les noms illustres de Flandres, Artois, Chemin des Dames, Champagne, Verdun, Lorraine, Vosges, Alsace.

Le 4 e RTT verra inscrire presque tous ces noms dans son historique au prix du sang de tant de braves que conduisait le colonel Aubertin.

Après la Marne, en novembre, le Régiment se bat en Champagne, à Soupir, au Fort de la Pompelle, à la Ferme d'Alger. Il tiendra ce secteur jusqu'en mars 1915.

Après un court repos, il est appelé en Artois. Du 9 mai au 16 juin 1915, il attaque sans relâche et réussit à conserver le terrain conquis malgré de fortes pertes; ces actions lui vaudront sa première citation à l'ordre de l'Armée.

Le commandant Dupas en 1915

Le commandant DUPAS combattit à la tête de la 4e Compagnie du 4e RTT à Hanzinelle en 1914. Puis prend le commandement du 1/4e RTT du 1er juillet au 24 septembre 1915 date à laquelle il est évacué pour blessure.

Durant l'été de 1915, il se bat en Alsace, puis en septembre retour en Champagne; là, il attaque Bon sabot et y gagne sa deuxième citation à l'ordre de l' Armée. En 1916, le Régiment se trouve dans la Somme et tient le terrain conquis autour de Belloy-du-Sauterre. L'hiver de 1916-1917 se passe dans le froid, la boue et la neige des tranchées. En 1917, Champagne (Auberive), période d'attaques limitées après l'échec français au Chemin des dames. Puis en août le Régiment est appelé à son tour à Verdun; le 4e RTT attaque et enlève la côte de l'Oise et les lisières du Bois de Cumières; c'est dans cette bataille gigantesque, dans cet enfer de Verdun qu'il gagne sa troisième citation à l'ordre de l'Armée. Retiré du secteur de Verdun, il va prendre les lignes en Lorraine (Flirey). En 1918, Ludendorf qui veut forcer la décision d' entreprendre les grandes offensives qui conduiront la France à une situation aussi critique qu'en 1914 au moment de la Marne : le Maréchal Foch réussit non seulement à maîtriser les ruées mais encore à reprendre l'offensive qui conduira finalement la France et ses Alliées à la victoire du 11 novembre 1918. L'offensive allemande commence en avril dans la Somme. Le 4e RTT arrête l'ennemi à Cachy. En mai, nouvelle offensive dans l'Aisne, le 4e est transporté d'urgence près de Soissons; à Breuil et Missy-aux-Bois, au prix de grosses pertes il réussit à contenir le flot allemand. En juin, il reçoit pour mission d'arrêter l'ennemi à Ambleny, au Sud de l'Aisne; les bataillons sont réduits à 120 hommes, mais l'ennemi ne passe pas; la défense héroïque d'Ambleny vaut au Régiment sa quatrième citation à l'ordre de l'Armée et la fourragère aux couleurs de la Médaille Militaire lui est conférée. En juillet, il est appelé en Champagne, puis en Lorraine (Bois le Prête) et entre dans la composition de la 2e Division Marocaine. En août, les offensives allemandes sont stoppées et l'ennemi impuissant. C'est alors que le Maréchal Foch prend à son tour l'offensive : le 4e RTT est de toutes les attaques, d'abord dans la forêt de Compiègne et sur l'Ailette, puis à Crécy-au-Mont où il bat la garde Impériale Prussienne, ce qui lui vaut sa cinquième citation, enfin en Champagne; en septembre où il réalise entre la Butte du Mesnil et Marvaux une avancé de 11 kilomètres, c'est sa sixième citation et la fourragère aux couleurs de la Légion d'honneur. En octobre, il se retrouve à l'attaque en Lorraine (Ravin de Beaurepaire) et lorsque sonne l'Armistice il est en Alsace. Après le 11 novembre, c'est l'entrée en vainqueur à ..ninque et Mulhouse, mais le 26 décembre, il reçoit l'ordre de continuer la lutte au Maroc.

Pour en savoir plus

Au Maroc

Au Maroc, le Régiment retrouve son 2e bataillon. Le 2e bataillon avait été engagé avec la 152e Division en 1914 à Lassigny et dans l'Aisne et en 1915 à Ypres. Là, en trois jours, sous les gaz, il perdit 9 officiers et 727 tirailleurs. En juin 1915, le bataillon très éprouvé recevait l'ordre de rentrer au Maroc où il tint jusqu'en 1918 les postes du Haut Atlas puis la Région de Taza.

Lorsque le Régiment se retrouve au complet au Maroc, il est engagé dans l'œuvre de pacification au Nord de Fez. A la Casbah de Médiouna, le 1er bataillon et les 6e et 7e Compagnies s'y distinguent particulièrement, ce qui leur vaut une citation à l'ordre de l'Armée. De Taza, le drapeau du régiment partit recevoir à Paris, la Croix de la Légion d'honneur remise par le Président de la République le 13 juillet 1919 et pour défiler le 14, sous l'Arc de Triomphe. En rentrant au Maroc, le Maréchal Lyautey lui remet, à Casablanca, la Médaille du mérite Militaire Chérifien.

Période 1922-1939


Rentré en Tunisie, le 4e RTT partage avec le 8e RTT l'occupation du territoire; il occupe les garnisons de Sousse, Kairouan, Gafsa, Camp Servières et à diverses époques Sfax et Gabès. Période d'entre deux guerres pendant laquelle des milliers de Tirailleurs sont instruits avant d'aller faire campagne au Levant. voir les correspondances du sergent major Massié René

Le 1er bataillon cependant est envoyé en 1925 au Maroc où il prend part durant quelques mois aux opérations. En 1939, le 4e RTT est une unité bien instruite et bien entraînée, prête à entrer en campagne et à ajouter des pages glorieuses à celles écrites par leurs Anciens de 1914-18.

1939 - 1942

En mai 1940, la bataille des Flandres est perdue, le 4e RTT, commandé par le colonel Bassères, qui montait la garde à la frontière de Tripolitaine, est appelé d'urgence en France et sitôt débarqué est amené dans la Région de l'Oise. Il est immédiatement engagé et livre des combats d'arrière garde à l'Isle-Adam et Persan-Beaumont. Les pertes sont sévères, mais l'ennemi est contenu aussi longtemps que dure sa mission de sacrifice. Après quoi commence la retraite pénible vers la Loire, au cours de laquelle il reçoit l'ordre d'infliger de fréquents coups d'arrêt à l'ennemi. Celui-ci est arrêté, mais déborde le Régiment à droite et à gauche; à Rambouillet, le 4e RTT est encerclé mais se dégage en forçant la ceinture ennemie, jusqu'à Ablis. Il continue à se battre quand sonne l'Armistice de juin 1940; 90% de son effectif a été mis hors de combat, mais dans la défaite, il a gardé l'honneur intact et reçoit une citation à l'ordre de l'Armée, sa septième palme au drapeau. Rentré en Tunisie, il occupe les garnisons de Sousse (PC et 3e bataillon), Kairouan, Le Kef, Sfax (2e bataillon) et Gabès (1er bataillon), plus des postes à Tatahouine, Médenine, Zarzis, Ben Gardane et Mareth. L'instruction est menée par tous les moyens malgré les difficultés créées par les Commissions d'Armistice de l'Axe, et quand enfin arrive le débarquement du 8 novembre 1942, le 4e RTT sera moralement prêt à reprendre la lutte.

Voir le témoignage du : Lt Runfola Roland

Campagne de Tunisie novembre 1942 - Mai 1943

Dès le 10 novembre, les Allemands envahissent la Régence. Les trois bataillons ont reçu l'ordre de se replier sur la dorsale, de la vallée de la Medjerda et Gafsa, et de faire face à l'Est. Jusqu'au 20 novembre, la situation est confuse et chaque bataillon ignorera le sort des autres et le sort de leurs familles laissées dans les garnisons. Malgré l'infériorité matérielle et l'action démoralisante des agents indigènes ennemis sur les Tirailleurs, le régiment remplira partout sa mission. Le 1er Bataillon, après avoir fait face à Gafsa est appelé à organiser la défense de Tebessa puis de Kessera. En janvier 1943, il contient l'ennemi à Pichon et après la bataille d'Ousseltia, est placé en réserve à El Ala, où le commandant Bacqué en prend le commandement. Le 2e bataillon, sous les ordres du commandant Durix après s'être regroupé dans la vallée de la Medjerda, fait front en novembre à Testour et Slougia. L'ennemi, qui tente de passer à Slougia le pont de la Medjerda, est arrêté malgré l'infériorité matérielle du bataillon. En janvier 1943, le Bataillon est placé au Djebel Mansour, c'est là que se produit l'offensive allemande du 18 janvier; le 2/4 RTT tente d'arrêter la ruée, il est encerclé, décimé, mais retarde l'avance ennemie à un moment où tout est une question d'heure pour permettre aux blindés américains d'arriver à temps. Le 3e bataillon, commandé par le commandant Lorillot, est regroupé en novembre dans la vallée de l'Oued Kébir et en décembre effectue un important et fructueux coup de main à l'intérieur de la position ennemie. Le bataillon est envoyé ensuite à Medjez el Bab où il résiste avec succès malgré l'acharnement ennemi contre la ville. A la fin de la campagne, les trois bataillons sont regroupés dans la région de Tebessa-La Meskiana; ils reçoivent les éléments du 16e RTT dissous venant du Levant.

Le colonel Roux prend le commandement du Régiment, les bataillons reçoivent du matériel américain neuf et s'entraînent avec leurs nouveaux moyens de combat, d'abord à la Meskiana, puis à Batna, enfin à Ténès et Oran. En décembre, le régiment, qui fait partie de la 3e Division d'Infanterie Algérienne sous les ordres du général de Monsabert, est " fin prêt" pour les grands combats d'Italie.