lectures de lettres du front
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TAUPIAC Brigadier 58ᵉ régiment 48ᵉ batterie 68ᵉ secteur. Présentation par Mattéo
Dimanche 14 février 1915
Cher ami, Quand nous sommes arrivés par ici au mois de novembre, cette plaine était alors magnifique avec ses champs à perte de vue, pleins de betteraves, parsemées de riches fermes et jalonnés de meules de blé. Maintenant, c'est le pays de la mort, tous ces champs sont bouleversés, piétinés, les fermes sont brûlées ou en ruines et une autre végétation est née : ce sont les petits monticules surmontés d’une croix ou simplement d’une bouteille renversée dans laquelle on a placé les papiers de celui qui dort là. Tahitia
Que de fois la mort me frôle de son aile quand je galope le long des fossés ou des chemins creux pour éviter leur « shrapnels » ou le tac-tac de leurs mitrailleuses. La nuit, j’ai couché longtemps dans un tombeau neuf, puis on a changé de cantonnement et je suis maintenant dans un trou que j’ai creusé après un talus. J’emporte ma couverture perdue à ma selle, ma marmite de l’autre côté et en route. J’étais l’autre jour dans les tranchées (des Joyeux). Je n’ai jamais rien vu de si horrible. Faustine
Ils avaient étayé leurs tranchées avec des morts recouverts de terre, mais, avec la pluie, la terre s’éboule et tu vois sortir une main ou un pied, noirs et gonflés. Il y avait même deux grandes bottes qui sortaient de la tranchée, la pointe en l’air, juste à hauteur, comme des porte-manteaux. Et les « joyeux » y suspendaient leurs musettes, et on rigole de se servir d’un cadavre boche comme porte-manteau. (Authentique.) Je ne te raconte que des choses que je vois autrement je ne le croirai pas moi-même. […] Je compte que tu m’enverras des nouvelles de là-bas et je te quitte en t’envoyant une formidable poignée de main. TAUPIAC Brigadier 58e régiment 48e batterie 68e secteur. Izia
Gustave Berthier était un instituteur de la région de Chalon-Sur-Saône, il habitait Sousse en Tunisie et a été mobilisé en août 1914. Ce soldat a été tué le 7 juin 1915 à Bully-les-Mines.
Le 28 décembre 1914 Ma bien chère petite Alice Nous sommes de nouveau en réserve pour quatre jours, au village des Brebis. Le service tel qu’il est organisé maintenant est moins fatiguant. Quatre jours aux tranchées, quatre jours en réserve. Nos quatre jours de tranchées ont été pénibles à cause du froid et il a gelé dur, mais les Boches nous ont bien laissés tranquilles. Le jour de Noël, ils nous ont fait signe et nous ont fait savoir qu’ils voulaient nous parler. C’est moi qui me suis rendu à 3 ou 4 mètres de leur tranchée d’où ils étaient sortis au nombre de 3 pour leur parler. Louise D-B
Je résume la conversation que j’ai dû répéter peut-être deux cents fois depuis à tous les curieux. C’était le jour de Noël, jour de fête, et ils demandaient qu’on ne tire aucun coup de fusil pendant le jour et la nuit, eux-mêmes affirmant qu’ils ne tireraient pas un seul coup. Ils étaient fatigués de faire la guerre, disaient-il, étaient mariés comme moi (ils avaient vu ma bague), n’en voulaient pas aux Français mais aux Anglais. Ils me passèrent un paquet de cigares, une boîte de cigarette bouts dorés, je leur glissai. Le petit Parisien en échange d’un journal allemand et je rentrai dans la tranchée française où je fus vite dévalisé de mon tabac boche. Calie
Nos voisins d’en face tinrent mieux leur parole que nous. Pas un coup de fusil. On put travailler aux tranchées, aménager les abris comme si on avait été dans la prairie Sainte-Marie. Le lendemain, ils purent s’apercevoir que ce n’était plus Noël, l’artillerie leur envoya quelques obus bien sentis en plein dans leur tranchée. Nous voilà aux Brebis maintenant. Faillaut a invité hier tous ses chefs de section. J’ai trouvé un lit chez une bonne vieille où je me repose comme une marmotte. […] Fais part de mes amitiés à tous. Mes meilleures caresses aux petites, et à toi mes plus affectueux baisers. Gustave Aaron